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Quelle compatibilité entre démocratie et souveraineté

Quelle compatibilité entre démocratie et souveraineté

Dans son livre « la grande réinitialisation », paru en 2020, le Président du Forum Economique Mondial de Davos, Klaus Schwab, cite (pages 118 et suivantes) une étude fondamentale de Dani Rodrik, économiste à Harvard. Elle concerne la mondialisation. Dani Rodrik démontre que les trois notions suivantes sont incompatibles entre elles : la démocratie, la souveraineté de l’Etat-nation et enfin une mondialisation forte. Seules, deux de ces trois notions peuvent être associées. C’est ce qu’il dénomme le « trilemme de la mondialisation ».

Par Bertrand de Kermel, Président du Comité Pauvreté et Politique dans la Tribune

La démocratie et la souveraineté nationale ne sont compatibles que si la mondialisation est contenue. Si la démocratie et la mondialisation se développent toutes les deux, il n’y a plus de place pour l’État-nation. Enfin, si la mondialisation et l’État-nation prospèrent tous les deux, la démocratie devient intenable !

Par nature, la démocratie ne peut en aucun cas devenir « intenable » et par conséquent la mondialisation doit s’adapter, et pas l’inverse.

Ce n’est pas évident pour tout le monde. Chacun aura noté qu’au sein de l’Union européenne et dans les 27 États, ce « trilemme de la mondialisation » n’est jamais évoqué. Pire, on ne parle jamais de « démocratie », seulement de « souveraineté économique ». Or, sans la démocratie, les peuples perdront mécaniquement leur pouvoir au profit des lobbies.

Ce n’est pas une vue de l’esprit. C’est déjà le cas aux États-Unis. Le Président Macron déclarait lui-même au salon Vivatech en mai 2019 : « Le modèle économique américain n’est plus sous contrôle démocratique » (le journal « l’Opinion » du 16 mai 2019). Ce n’est pas rassurant pour l’Europe.

Ajoutons qu’en présentant un bilan accablant de la mondialisation devant l’Assemblée générale de l’ONU, le 22 septembre 2020, le Président Macron affirmait que la mondialisation actuelle met en cause à la fois la souveraineté et la démocratie, tout en utilisant les classes moyennes comme « variables » de la mondialisation. Il est clairement impossible de poursuivre la politique européenne sur le commerce extérieur, sans y apporter des aménagements majeurs.

La remise à plat de la politique européenne est incontournable et urgente : deux solutions sont possibles.

Pour ne sacrifier ni la souveraineté ni la démocratie, il faut impérativement « contenir la mondialisation ». Deux solutions sont possibles. Soit régionaliser la mondialisation par grands ensembles cohérents, soit mettre en place des protections intelligentes et équilibrées.

La régionalisation de la mondialisation est la solution proposée par Klaus Schwab, dans son livre, page 123. C’était également la solution proposée (en vain) par Maurice Allais, prix Nobel d’économie, dans sa « lettre aux français » publiée par le journal Marianne en décembre 2009. Elle est lisible là, ou encore en tapant sur votre navigateur : « lettre aux Français : contre les tabous indiscutés ».

Lorsqu’on lit la démonstration de Maurice Allais, on ne peut que constater la justesse de son propos. Ce qu’il craignait s’est produit (saccage de notre industrie, chômage de longue durée pendant 30 ans, inégalités hors de contrôle, etc.).

Maurice Allais démontrait également dans cette « lettre aux français » que le système de régionalisation qu’il préconisait ne constituait pas une atteinte aux pays en développement, bien au contraire.

La deuxième solution pour « contenir la mondialisation » consiste à mettre en place des mesures équilibrées de protectionnisme. Elle est aujourd’hui prônée par… les États-Unis ! Ceux-là mêmes qui ont poussé la planète au néolibéralisme en 1994.

Sous le titre « Les États-Unis dénoncent « une version insoutenable » de la mondialisation » le journal de Montréal du 15 juin 2023 rapporte une interview de Mme Tai, la représente américaine au commerce. Remettant en question certains aspects des théories libérales et de la mondialisation dans sa version actuelle, Madame Tai demande des réformes et des améliorations, précisant : « nous n’avons pas intégré de garde-fous ».

Les « garde fous » évoqués sont ces mesures équilibrées de protectionnisme encore dénommées à Bruxelles : «autonomie stratégique ». C’est ce qui permettra de passer du libre-échange déloyal au « juste-échange ».

Quelle que soit la solution retenue (qui se recoupent) il faut renégocier les accords bilatéraux de libre-échange signés par l’UE, car ces accords constituent « La Loi » de la mondialisation.

Ce sujet doit être médiatisé et débattu pendant la campagne des européennes
Toutes les listes candidates aux européennes devront se positionner clairement sur ce point. Pour ne pas tromper les électeurs, elles devront aussi faire connaître la position du parti européen auquel elles vont adhérer. Sans cette information, les électeurs ne seront pas en état de choisir.

Politique et acceptation sociale: quelle compatibilité ?

Politique et acceptation : quelle compatibilité ?

Par
Fabrice Hamelin
Enseignant-Chercheur en science politique, Université Paris-Est Créteil Val de Marne (UPEC) dans The Conversation


La réforme des retraites a beau être adoptée, elle ne passe pas dans l’opinion publique. Grèves, manifestations, sondages et controverses en témoignent. Pour les éditorialistes, l’explication tient souvent en une formule : l’ « acceptation sociale » ! On retrouve ce même vocable dans la bouche de députés, à l’exemple des Républicains qui, à la veille du vote de la motion de censure contre le projet de loi sur les retraites, s’inquiétaient de « l’acceptabilité sociale de la réforme dans leur circonscription ». Le président, enfin, reconnaît que la réforme des retraites n’a pas été acceptée par les Français.

Après les mobilisations contre de grands projets inutiles et imposés, le mouvement des Gilets jaunes, la colère contre le 80 km/h et la controverse sur les mega-bassines, ce recours croissant, relâché et étendu à de nouvelles arènes publiques, rend la formule incontournable.

L’acceptation sociale exprime un jugement collectif qui se manifeste en dehors du cadre institutionnel formel ou de l’espace législatif. Il remplace d’autres notions : adhésion, assentiment, consentement ou réception. Dans le langage courant, son usage reste le plus souvent rhétorique, au mieux descriptif, et sans apport significatif à la compréhension de l’intervention publique, de sa réussite comme de son échec. Peut-on dépasser l’ambivalence de ce lexique et recourir aux termes d’acceptation et d’acceptabilité sociales pour mieux comprendre la réception de l’intervention publique ?

Cette question a du sens, parce que ce lexique fait partie du vocabulaire des sciences sociales. Un ouvrage tout juste publié et que j’ai coordonné en montre les usages et en discute l’utilité. Il le fait à partir de terrains d’études divers (les espaces naturels protégés, la transition énergétique, la taxe carbone, l’expression religieuse au travail ou les véhicules à hydrogène) et mobilise différentes disciplines (sociologie, géographie, psychologie, science politique, management et économie). Plusieurs leçons peuvent en être tirées.

Le débat sur l’usage préférentiel des notions d’acceptabilité ou d’acceptation sociale est loin d’être clos. Dans l’acception la plus courante, l’acceptabilité sociale rend compte d’une perception antérieure à la mise en œuvre de l’action publique. L’acceptation sociale renvoie alors à une perception a posteriori et à un état de fait. Or l’acceptation n’est pas figée. Elle est construite par des stratégies ou des techniques variées (la libre participation, l’enrôlement, l’expérimentation) qui la font évoluer.

La recherche du mot juste est donc vaine et d’autant plus qu’il est difficile de penser l’acceptation et l’acceptabilité sociales déconnectées d’un ancrage disciplinaire.

L’opposition est claire entre géographes, qui parlent d’acceptation, et sociologues qui privilégient l’acceptabilité. Les sciences politique et économique se passent largement de concepts dont elles se méfient. Seules la gestion et la psychologie sociale ont dépassé le débat. À la recherche du meilleur vocable, elles préfèrent celle des bons outils de mesure et des indicateurs pertinents.

Dans le cas de la réforme des retraites, le défaut d’acceptation sociale est déduit des formes et de l’intensité de la mobilisation. Il est aussi appréhendé par les sondages d’opinion publique réalisés tout au long du mouvement social. Ces outils de mesure restent étonnamment frustres, alors que des protocoles d’enquête plus sophistiqués existent et peuvent être mobilisés : focus groups, suivi de cohortes, expérimentations, etc.

L’acceptation sociale est alors saisie par des indicateurs (confiance, bénéfices escomptés, légitimité des promoteurs, crédit accordé aux informations, respect du cadre légal, etc.). Cette variété permet d’échapper à la dualité un peu naïve opposant les « pour » aux « contre », l’« adhésion » à la « contestation » et de saisir des degrés d’acceptation, et surtout des profils et des comportements d’acteurs.

Au-delà de la mesure, l’acceptation peut devenir un objectif à atteindre pour les promoteurs d’un projet, à l’exemple des décideurs politiques et de l’administration chargée de sa mise en œuvre. L’acceptation devient alors un horizon plus qu’un élément d’évaluation de la réussite ou de l’échec d’une politique publique. De ce point de vue, qu’elle soit conçue comme un processus ou comme un résultat, la volonté de saisir l’acceptation sociale acquiert une visée instrumentale.

Si la notion a le mérite d’intégrer le conflit comme une évidence dans l’intervention publique, cette entrée par les controverses masque une approche managériale, par laquelle les promoteurs d’une innovation cherchent à réduire les oppositions et accroître leurs soutiens.

L’idéal démocratique peut se trouver heurté par des stratégies de communication ou de lobbying destinées à accroître l’acceptation. Cette ingénierie du consentement peut cacher une volonté toute technocratique de faire accepter un programme rejeté.

L’acceptation sociale ne peut être réduite à l’acceptation des publics ou du (grand) public. L’acceptation des élus ou celle des agents est tout aussi essentielle pour comprendre la réussite ou l’échec d’un programme. La mobilisation contre l’abaissement des vitesses à 80 km/h met véritablement à mal la décision du gouvernement quand les élus territoriaux et les sénateurs s’en saisissent.

Cette attention particulière à ceux qui fabriquent les politiques publiques et mobilisent leurs ressources dans l’épreuve d’acceptation est d’autant plus essentielle, qu’elle doit d’abord être envisagée comme leur problème et non pas celui des destinataires. Cette épreuve à surmonter conduit à prendre au sérieux le travail de conviction voire d’enrôlement dans lequel se lancent les policy makers ou à l’inverse les stratégies d’évitement du débat que les élites gouvernantes préfèrent souvent à un périlleux et incertain travail de conviction.

Les outils législatifs et de communication mobilisés comme les argumentaires fluctuants du gouvernement pour justifier le report de l’âge de la retraite témoignent des stratégies d’acceptabilité successivement tentées : s’agit-il de sauver le système des retraites, d’en réduire les inégalités, de maîtriser le déficit public, d’éviter la « bordélisation », etc. ?

Au Québec, la notion est mobilisée comme critère de décision par les autorités publiques depuis plus d’une décennie. Des guides de bonnes pratiques sont édités et des dispositifs de participation mis en place.

Nous n’en sommes pas là en France, même si l’usage de cette terminologie progresse dans la formulation de l’action publique, comme en témoigne son intégration dans l’évaluation de politiques publiques ou la saisie, par le Premier ministre Jean Castex, du CESE pour avis sur « l’acceptabilité des projets d’infrastructures environnementales » fin 2021.

À défaut d’en être une nouvelle norme, elle peut servir de balise à l’action publique. L’étude de la fabrique politique de l’acceptation sociale peut permettre d’éviter des erreurs.

La première serait de croire que via les sondages ou les mobilisations, on identifie une volonté générale claire et stable qui autorise les élites gouvernantes à poursuivre ou les amène au contraire à renoncer. Une autre serait de croire que l’on peut convaincre la population sur des enjeux macro (parfois jugés abstraits). Celle-ci est vulnérable et changeante, façonnée par ses propres préoccupations quotidiennes et qui sont parfois aussi portées par l’air du temps.

Il n’en demeure pas moins que l’acceptation sociale pose la question de la faisabilité des programmes et permet de passer de l’idéal au faisable en politique.

Compatibilité entre progrès technique et progrès écologique ?

Compatibilité entre progrès technique et progrès écologique ?

Le think tank Open Diplomacy et CentraleSupélec ont co-organisé à Metz les rencontres du Développement Durable. Thomas Friang, le directeur du think tank et créateur des rencontres, livre son éditorial pour le JDD.

Lorsque le GIEC a publié son 6e rapport d’évaluation, le débat public s’est focalisé sur un élément très fort : nous devons, à l’échelle planétaire, atteindre le pic d’émissions de gaz à effet de serre avant 2025 si nous voulons réellement atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat, c’est-à-dire limiter le réchauffement planétaire à +2°C d’ici la fin du siècle. De ce fait, le 6e rapport du GIEC avait fait l’objet d’un rapport de force entre dirigeants politiques et responsables scientifiques plus fort que d’habitude encore.
Et pour cause, l’urgence climatique, que nous constatons par épisodes catastrophiques, est une tendance longue qui structure nos vies depuis déjà bien longtemps. Ce n’est pas une série d’épisodes plus ou moins dramatiques, plus ou moins proches de nous, tantôt un typhon hyper-violent, tantôt un méga-feu inarrêtable, tantôt une sécheresse insupportable.
Innover pour « shifter »

Alors que le temps presse, il faut s’emparer rapidement et profondément de chacune des conclusions que le GIEC a rassemblées en passant en revue des milliers de publications scientifiques pour constituer son 6e rapport d’évaluation, et notamment le chapitre consacré à l’atténuation des dérèglements climatiques.
Lire aussi – Thomas Friang, le créateur des Rencontres du développement durable : « Faire face à la polycrise »
Celui-ci affirmait – entre autres données d’utilité publique – que « dans tous les secteurs, nous disposons de solutions pour réduire au moins de moitié les émissions d’ici à 2030 ». Quelles sont ces solutions ? Quelles sont les innovations à faire mûrir rapidement pour que nous puissions relever le défi ? Quels mécanismes de contrôle mettre en œuvre pour éviter que la promesse d’une greentech se transforme en une impasse de greenwashing ?
En somme, comment « innover pour shifter » ? C’était le thème de la première étape régionale des Rencontres du Développement Durable co-organisée à Metz par CentraleSupélec et l’Institut Open Diplomacy, en partenariat avec le JDD. Au fil de cette journée, plusieurs éléments de réponse ont émergé sur la manière de mettre la politique de recherche et d’innovation au service de la transition.

Des objectifs clairs pour piloter l’innovation au service de la transition
Le premier enjeu est celui de fixer des objectifs politiques clairs : tant pour piloter la politique de recherche et l’axer vers la transition que pour évaluer les projets de recherche eux-mêmes et leur contribution à celle-ci. Les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies, fournissant un système complet pour prendre en compte les aspects environnementaux, économiques et sociaux de la transition, se sont imposés comme le meilleur référentiel dans les débats.
Ce consensus s’est dégagé d’autant plus naturellement qu’il a été remarqué, par les scientifiques, élus nationaux et locaux, comme par les entreprises, que les ODD sont une référence commune à tous les acteurs qui peuvent former ensemble des écosystèmes de recherche. Or, il a été rappelé à quel point cette notion d’écosystème, tantôt appelé clusters, historiquement appelé technopôles en France, est essentielle pour faire émerger des projets de recherche à fort potentiel, en assurer le bon fonctionnement et les débouchés les plus rapides possibles vers des solutions appliquées, y compris quand on part d’une recherche plutôt exploratoire.

Penser à l’échelle d’un écosystème de recherche et d’innovation favorise également un meilleur pilotage politique de l’innovation au service de la transition. Cela crée une interface efficace (souvent locale, parfois nationale) entre politiques et scientifiques pour que la recherche soit la plus possible en phase avec les besoins de l’époque.
Cela permet des interactions entre le secteur public et les partenaires privés plus intégrées pour catalyser l’avancement des projets de recherche menés. Cela encourage, enfin, les connexions inter-disciplinaires qui sont le cœur de l’innovation au service de la transition.
Avec des objectifs clairs, une logique d’écosystèmes et des interfaces intelligentes, la promesse du progrès technique peut rimer avec le désir de progrès écologique. Mais ce n’est pas tout, car il y a encore bien des critères de succès pour aligner innovation et transition.
Appel à la mobilisation politique
Les nouveaux modèles économiques à la fois créateurs de richesse et prometteurs pour la transition et les solutions technologiques qui peuvent catalyser cette grande transformation ont pour témoins des entrepreneurs et des inventeurs qui ont un message en commun : il n’y a rien de plus fort que le signal législatif pour faire bouger les lignes et potentialiser le décollage économique d’une innovation écologique.
Un simple « projet de loi », même pas encore voté, peut débloquer des investissements importants pour accompagner l’émergence d’une solution technologique qui aurait un grand potentiel écologique.
Le courage du législateur précède l’existence des entrepreneurs… car il bouscule l’ordre établi, certaines rentes économiques qui sont des remparts anti-écologiques.
Plaidoyer pour des pratiques scientifiques nouvelles
Le pilotage politique de la recherche par les appels à projets est une méthode connue et éprouvée. L’approche européenne des appels à projet a été vivement critiquée par tous les experts présents à Metz : ces projets sont souvent le fruit de grands consortiums d’acteurs qui coopèrent de façon plutôt factice au prix de coûts de coordination qui consomment une grande partie du budget de la recherche.
La logique des appels à projet est plébiscitée quand elle encourage réellement la créativité, fondée sur des approches interdisciplinaires, partenariales, parfois exploratoires, et qu’elle n’est pas employée pour répliquer les généalogies scientifiques.
Cela nécessite parfois de la part des jurys de savoir rapprocher des projets entre eux, souvent complémentaires, plutôt que de les opposer via l’appel à projets.
La Nature, meilleure muse de la transition
Les débats auraient pu paraître fâcheusement anthropocentrés si les experts présents n’avaient pas rappelé, collectivement, que la plus grande source d’inspiration au service de la transition est la nature elle-même.
Les solutions les plus efficaces, les plus justes et les moins chères pour atténuer et nous adapter aux dérèglements climatiques se trouvent autour de nous. Si la photonique et la science des matériaux, si l’électronique ou la mécanique quantique sont des aires de progrès majeurs, y compris pour la transition écologique, n’oublions pas l’essentiel : la compréhension des écosystèmes naturels, aux fins de leur protection, leur gestion durable et leur restauration est la clé des solutions basées sur la nature qui sont nos meilleures alliées face aux dangers environnementaux que nous avons nous-mêmes créés.
Corollaire : les sciences comportementales, et plus généralement les sciences sociales, sont une nécessité absolue pour comprendre comment notre espèce – aussi avancée sur le plan technologique soit-elle – peut s’élancer aussi vite vers son autodestruction.
L’anthropocène n’est donc pas la fin du progrès technique, mais le début d’une éthique écologique des révolutions industrielles. Serait-ce la meilleure définition de la sobriété ?

Environnement–Climat et marché : quelle compatibilité ?

Environnement–Climat et marché : quelle compatibilité ?

Face à l’idée prônée par le Prix Nobel Jean Tirole que la « bonne » économie consiste à combiner le jeu des intérêts particuliers, Benjamin Coriat , Économiste, développe dans son essai un modèle qui permettrait d’organiser une gestion durable et partagée des biens nécessaires à la vie de tous.( analyse du Monde, extrait)

 

 L’économiste Benjamin Coriat est l’un des principaux commentateurs et diffuseurs en France des idées d’Elinor Ostrom. L’Américaine, décédée en 2012, avait reçu le prix Nobel d’économie en 2009 pour ses travaux théoriques et empiriques sur la façon dont les communautés humaines gèrent ce que les Anglo-Saxons appellent les commons, et que l’on traduit en français de façon ambiguë soit par « les biens communs » (la nature, l’air, l’eau, le climat, l’énergie – tout objet dont l’appropriation par les uns prive les autres), soit par « le bien commun » au singulier (tout ce qui fait progresser le bonheur de l’humanité). Aussi son sang n’a-t-il fait qu’un tour lorsque Jean Tirole a publié, en 2016, Economie du bien commun (PUF), un essai dans lequel il tente de mettre ses travaux à portée du public. Pour le Prix Nobel d’économie (2014) en effet, « l’économie est au service du bien commun ; elle a pour objet de rendre le monde meilleur ».

Mais le fil rouge de son approche du bien commun n’en reste pas moins l’idée que la bonne économie consiste à combiner le jeu des intérêts particuliers. Or comme chacun cherche à obtenir un optimum de richesse pour lui-même, ce bien commun ne peut être atteint que sous ce que Tirole appelle le « voile de l’ignorance », qui empêche chacun d’agir rationnellement au mieux de ses intérêts, et permet aux marchés régulés d’atteindre un optimum collectif. Par exemple en incitant consommateurs et entreprises à accomplir la transition énergétique en organisant un marché du carbone où s’échangeraient des quotas de CO2.

C’est précisément ce que réfute Benjamin Coriat, pour qui le jeu, même régulé, des intérêts égoïstes ne peut que conduire à la catastrophe, et pour qui la justification de la recherche du bien commun par le « voile de l’ignorance » n’est qu’une pirouette rhétorique. Il est vrai que le cas du marché carbone européen tel qu’il a fonctionné jusqu’ici, décortiqué par l’auteur, n’est pas convaincant.

Aussi l’économiste préfère montrer que les solutions proposées par Elinor Ostrom restent le meilleur moyen d’éviter la catastrophe climatique. A savoir un modèle d’économie « polycentrée », qui permettrait à chaque niveau de collectivité humaine d’organiser à son échelle une gestion sobre, durable et partagée des biens nécessaires à la vie de tous, sans qu’aucune appropriation privée ni aucun niveau politique supérieur ou aucune « règle de marché » surplombante ne vienne l’entraver, mais plutôt l’appuyer.

Climat et marché : quelle compatibilité ?

Climat et marché : quelle compatibilité ?

Face à l’idée prônée par le Prix Nobel Jean Tirole que la « bonne » économie consiste à combiner le jeu des intérêts particuliers, Benjamin Coriat , Économiste, développe dans son essai un modèle qui permettrait d’organiser une gestion durable et partagée des biens nécessaires à la vie de tous.( analyse du Monde, extrait)

 

 L’économiste Benjamin Coriat est l’un des principaux commentateurs et diffuseurs en France des idées d’Elinor Ostrom. L’Américaine, décédée en 2012, avait reçu le prix Nobel d’économie en 2009 pour ses travaux théoriques et empiriques sur la façon dont les communautés humaines gèrent ce que les Anglo-Saxons appellent les commons, et que l’on traduit en français de façon ambiguë soit par « les biens communs » (la nature, l’air, l’eau, le climat, l’énergie – tout objet dont l’appropriation par les uns prive les autres), soit par « le bien commun » au singulier (tout ce qui fait progresser le bonheur de l’humanité). Aussi son sang n’a-t-il fait qu’un tour lorsque Jean Tirole a publié, en 2016, Economie du bien commun (PUF), un essai dans lequel il tente de mettre ses travaux à portée du public. Pour le Prix Nobel d’économie (2014) en effet, « l’économie est au service du bien commun ; elle a pour objet de rendre le monde meilleur ». 

Mais le fil rouge de son approche du bien commun n’en reste pas moins l’idée que la bonne économie consiste à combiner le jeu des intérêts particuliers. Or comme chacun cherche à obtenir un optimum de richesse pour lui-même, ce bien commun ne peut être atteint que sous ce que Tirole appelle le « voile de l’ignorance », qui empêche chacun d’agir rationnellement au mieux de ses intérêts, et permet aux marchés régulés d’atteindre un optimum collectif. Par exemple en incitant consommateurs et entreprises à accomplir la transition énergétique en organisant un marché du carbone où s’échangeraient des quotas de CO2.

C’est précisément ce que réfute Benjamin Coriat, pour qui le jeu, même régulé, des intérêts égoïstes ne peut que conduire à la catastrophe, et pour qui la justification de la recherche du bien commun par le « voile de l’ignorance » n’est qu’une pirouette rhétorique. Il est vrai que le cas du marché carbone européen tel qu’il a fonctionné jusqu’ici, décortiqué par l’auteur, n’est pas convaincant.

Aussi l’économiste préfère montrer que les solutions proposées par Elinor Ostrom restent le meilleur moyen d’éviter la catastrophe climatique. A savoir un modèle d’économie « polycentrée », qui permettrait à chaque niveau de collectivité humaine d’organiser à son échelle une gestion sobre, durable et partagée des biens nécessaires à la vie de tous, sans qu’aucune appropriation privée ni aucun niveau politique supérieur ou aucune « règle de marché » surplombante ne vienne l’entraver, mais plutôt l’appuyer.

Quelles compatibilité temps de travail et les rémunérations

Quelles compatibilité temps de travail et les rémunérations 

 

Pour le président du Cercle des économistes, il faut « sortir de l’antagonisme idiot sur les 35 heures » et « s’attaquer d’urgence à la réindustrialisation du pays » ( chronique dans l’opinion)*

 

Jean-Hervé Lorenzi, le p

Les Rencontres du Cercle des économistes se tiendront cette année à Paris, du 3 au 5 juillet. Trois jours de débats en ligne et en direct, qui selon Jean-Hervé Lorenzi, doivent ouvrir une grande période de discussions et de débats dans tout le pays, « en dehors de toute tutelle des pouvoirs publics ».

Le président de la République a-t-il raison d’appeler à travailler et produire plus pour surmonter la crise ?

La discussion sur le temps de travail et les rémunérations devra avoir lieu. Mais pas de manière idéologique. Sortons de l’antagonisme idiot sur les 35 heures. Les 35 heures n’existent pas : les Français travaillent plus de 38 heures par semaine en moyenne ! Par contre, les RTT font que les Français travaillent moins annuellement que leurs voisins, et donc sont moins bien payés. Les 35 heures ont gelé les salaires pendant huit ans, notamment les petits salaires. On a payé en RTT des gens qui n’avaient pas les moyens d’en profiter. C’est tout notre équilibre macroéconomique qu’il faut revoir. Depuis vingt ans, la croissance est faible, le chômage et la désindustrialisation sont plus forts qu’ailleurs en Europe. Les inégalités se creusent. Il est temps de consulter massivement le pays sur tous ces sujets. Les Rencontres économiques qui se tiendront cette année à Paris, lanceront le débat.

On parle beaucoup d’attractivité, de souveraineté économique, de relocalisation… Quelles cartes la France peut-elle jouer ?

Il faut s’attaquer d’urgence à la réindustrialisation du pays. Nous sommes avant-derniers en Europe pour la part de l’industrie dans le PIB, devant la Grèce. La France est passée de la première à la troisième place des producteurs agricoles européens, derrière l’Allemagne et les Pays-Bas. Il faut redonner l’envie de produire en France. Pour cela, je propose la création d’un ministère des Activités productives, le développement des écoles d’ingénieurs qui ont disparu du paysage, à l’exception de Polytechnique. Il faut renégocier le statut financier des diplômés sortants des BTS productifs et revivifier les pôles de compétitivité en les autorisant à financer des projets, en y incluant les universités et tous les partenaires économiques locaux. Il faut plus d’autonomie et de décentralisation. Enfin, il faut aussi préparer une accélération massive de la baisse des impôts de production.

Tourisme, automobile, aérien… Bercy multiplie les plans de soutien sectoriels. Ne manque-t-il pas une vision stratégique plus globale ?

Maintenant que nous sommes sortis de la première phase de la crise placée sous le signe de la protection, s’ouvrent quatre à cinq mois de transition compliqués durant lesquels il va falloir faire débattre le pays — entreprises, partenaires sociaux, collectivités locales, etc. — pour faire émerger une forme de consensus. Ce consensus devra servir de fondation au troisième temps, celui de la relance. L’acceptation de la stratégie gouvernementale par la population ne se fera qu’à cette condition. Il y a trop de tensions dans le pays aujourd’hui. La seule voie de sortie, c’est la discussion, en dehors de toute tutelle des pouvoirs. Sachons rebondir sur cette période inédite où nos destins se sont rapprochés pour sortir de l’archipélisation française.

« Il faut par ailleurs bousculer l’organisation hiérarchique de ce pays, dans le public comme dans le privé. Notre pays crève de hiérarchies mal placées »

Faudra-t-il rembourser la dette de la crise ?

D’abord, les taux sont très faibles et c’est une bonne nouvelle. Ensuite, on semble redécouvrir la dette perpétuelle. Je rappelle que les Britanniques, tout au long du XIXe siècle, ont pu s’endetter sans limites parce que la dette publique britannique était renouvelée. C’est aussi le cas de la France aujourd’hui, avec une durée moyenne de la dette de sept à huit ans. C’est court. Pourquoi ne pas allonger la durée de ce roulement, comme l’a fait la Grande-Bretagne, sur 25 ou 30 ans ? Enfin, il convient de séparer la dette rachetée par la BCE de la dette achetée par les investisseurs privés. Les intérêts versés à la BCE reviennent dans les caisses de l’Etat sous forme de dividendes. On peut donc dire que cette dette n’existe pas. Ce n’est pas le cas de la part, majoritaire, de notre dette qui est détenue par des investisseurs privés. Il faut sur ce sujet du bon sens. Comptablement, il est possible d’annuler la dette qui vient d’être rachetée par la BCE. Mais cela donne l’impression d’argent magique, c’est dangereux. Ma conviction, c’est que dette publique ou dette privée, c’est la même chose. Aujourd’hui, mes inquiétudes portent surtout sur la dette privée. Si 10 % à 20 % des entreprises font faillite, l’Etat, qui a apporté 300 milliards d’euros de garanties bancaires, pourrait se retrouver avec une facture de 10 à 20 milliards d’euros.

Quels seront les trois principaux changements, accélérations, bouleversements… dans le monde d’après ?

Hôpital, Education nationale… Une partie des services publics va être confrontée à des sujets majeurs après la crise. Je souhaite que l’on profite de ce moment pour professionnaliser l’enseignement de notre pays. Il faut par ailleurs bousculer l’organisation hiérarchique de ce pays, dans le public comme dans le privé. Notre pays crève de hiérarchies mal placées. En poussant davantage au partage de l’information, le télétravail peut jouer un rôle dans cette transition. Enfin, la relocalisation doit passer par une organisation plus décentralisée. C’est ce que pense beaucoup de Français. C’est pour cela qu’il faut que partout, le pays discute. On ne sortira de cette crise que par des changements radicaux.

Les membres sont tous professeurs d’économie.

 

Quelle compatibilité entre Intelligence artificielle et éthique ?

Quelle compatibilité entre Intelligence artificielle et  éthique

 

Un Livre blanc européen sur l’intelligence artificielle, publié le 19 février, insiste d’abord sur l’importance du respect des droits fondamentaux des citoyens et met par exemple en garde contre des distorsions dans les algorithmes de recrutement conduisant à des discriminations.

D’après le site pwc.fr , les intelligences artificielles (IA) se font de plus en plus présentes – voitures autonomes, algorithmes de recommandation, drones, etc. – et la question de la moralité de leurs actions commence à se poser. Celles qui s’appuient sur les réseaux de neurones artificiels (deep learning) sont particulièrement critiquées : on leur reproche d’être opaques, de ne pas laisser voir le raisonnement qui permet aux algorithmes d’arriver au résultat final. Une science naissante s’applique d’ailleurs à développer des outils pour regarder à l’intérieur de ces boîtes noires que sont les réseaux neuronaux. À ce travail à rebours pour scruter le code des IA s’ajoute, en parallèle, la volonté affichée par de nombreux experts d’intégrer des préceptes éthiques très en amont, directement au cœur de l’IA.

En s’appuyant sur d’énormes quantités de données, les systèmes de deep learning sont capables d’effectuer un très grand nombre de tâches : reconnaître et analyser des images ou des voix, proposer une police d’assurance sur mesure, accepter ou refuser une offre de prêt, piloter un véhicule… Mais comment avoir confiance dans les décisions de l’IA si nous ne sommes pas en mesure de les comprendre ?

« L’intelligence doit être augmentée, c’est-à-dire au service de l’humain, plutôt qu’autonome. Nous devons construire un binôme humain-machine où l’IA devra offrir une compréhension intuitive pour l’humain. Elle devra être capable d’expliquer ses recommandations de façon simple et immédiate. » François Royer, directeur consulting Data Intelligence, PwC France

Le développement d’une telle IA a par exemple déjà été initié aux États-Unis par la DARPA (département de R&D militaire du ministère de la Défense) : les premiers résultats du projet XAI (Explainable AI) sont attendus en novembre 2018.

Si XAI vise à développer des techniques de machine learning qui permettent de construire des modèles d’IA plus compréhensibles, capables d’expliquer aux humains en bout de ligne leur raisonnement, c’est loin d’être le cas de toutes les IA. Le fonctionnement des réseaux de neurones artificiels est particulièrement opaque. Les géants du digital, boostés par des mécanismes de collecte de données très efficaces, disposent de quantités de données phénoménales ce qui les encourage à développer massivement les réseaux de neurones artificiels. Ces réseaux se nourrissent des corrélations qu’ils détectent entre des jeux de données préexistants, ce qui peut poser problème.

 

Bruxelles recommande donc  que les futurs systèmes d’intelligence artificielle à haut risque (concernant la santé par exemple) soient certifiés, testés et contrôlés, comme le sont les voitures, les cosmétiques et les jouets.

 

Theodorous Evgueniou, professeur de la prestigieuse école de management Insead, a rendu avec plusieurs autres chercheurs européens et américains un avis mettant en garde contre les risques d’une approche européenne trop centrée sur ses valeurs.

« Il semble que l’esprit du Livre blanc soit que l’Europe utilise ses valeurs comme une arme stratégique pour rattraper la Chine et les États-Unis », et se rendre attractive dans la course mondiale à l’intelligence artificielle, affirme-t-il. Mais « pourquoi penser que des pays non-européens préféreront des intelligences artificielles formées aux valeurs européennes ? Je ne suis pas sûr que ça marche », explique-t-il.

 

Par exemple, le Livre blanc affiche « l’explicabilité » comme valeur cardinale: il doit être possible de comprendre exactement pourquoi un système d’intelligence artificielle arrive à telle conclusion – comme le fait de refuser un prêt à quelqu’un.

Mais obliger des intelligences artificielles à expliquer leur choix « peut réduire leur performance de 20%, si ce n’est plus », affirme-t-il.

De son côté, Guillaume Avrin, responsable de l’intelligence artificielle au sein du Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE), ne remet pas en cause les impératifs éthiques dans le Livre blanc. Mais il regrette que la Commission s’avance peu sur les moyens de vérifier la conformité des intelligences artificielles auxdites valeurs.

« Comment fait-on pour s’assurer de la conformité des systèmes d’intelligence artificielle » à une réglementation, alors qu’ils sont souvent évolutifs et adaptatifs et ont des comportements  »non linéaires », voire « chaotiques », explique-t-il.

Environnement :Quelle compatibilité entre le numérique et l’écologie ?

Quelle compatibilité entre le numérique et l’écologie ?

 

le développement du numérique  est-il écologiquement compatible ? la réponse de  Daniel Sperling  l’élu en charge du sujet à Marseille.( interview La Tribune)

 

Lors du dernier Marseille City Life qui abordait le sujet de la Tech et du zéro carbone, vous avez rappelé que smart city n’égale pas forcément ville durable. Une idée qui est peu répandue…

 

 

 

Daniel Sperling

Il faut résoudre une double équation, celle de l’expansion et de la concentration urbaine qui engendrent une mosaïque de transitions : urbaine, numérique, énergétique, économique et sociétale. Autant de défis qui peuvent être relevés collectivement. Conservateur, le numérique l’est aussi au regard des enjeux environnementaux. Curieusement, le récit autour de la Smart City a postulé d’emblée qu’elle serait durable. Tel n’est pas du tout le cas aujourd’hui. D’une part, l’infrastructure physique du numérique, d’autre part, la collecte des données, leur traitement et leur stockage représentent des quantités d’énergie non seulement colossales, mais surtout en croissance constante et forte. Le numérique consomme bien plus d’énergie que le transport aérien et la croissance de sa consommation est à deux chiffres. La donnée est souvent qualifiée de nouvel or noir. Le fait est que nous avons pris au mot cette analogie avec le pétrole et avons une approche très 20e siècle du numérique dans la ville. La smart a capturé le green. L’écologie du numérique reste à construire et avec elle celle de la Smart City. Attelons-nous à la tâche.

Vous donniez un chiffre intéressant, c’est l’équivalent, en énergie du « coût du clic »…

En effet, 450 millions de tonnes de CO2 ont été émises par les entreprises du numérique dans les pays de l’OCDE depuis 2013. 4 %, c’est la part du numérique dans les émissions mondiales de CO2, en hausse de 50 % depuis 2013.

80 fois plus d’énergie est nécessaire à la production d’un gramme de smartphone que d’un gramme de voiture. À l’échelle mondiale, les usages numériques représentent deux fois l’empreinte environnementale de la France. Ces problématiques ne sont pas nouvelles. Si je peux dire, nous ne partons pas de zéro pour aller vers le zéro carbone.

Quels sont les projets smart city qui ont changé la physionomie de Marseille ?

Il y a eu beaucoup de projets dont Smartseille est l’un des derniers exemples, avec sa boucle à eau de mer. Quand CMA CGM annonce toute une série de mesures pour réduire son impact comme l’adoption du GNL et l’optimisation des routes, la réduction de la vitesse de ses navires, ça va dans le bon sens. Mais j’aime rappeler qu’il y a 20 ans, la cogénération par méthanisation et l’expérimentation d’épandage propre, qui a donné naissance à une forêt sur la route de Cassis, étaient précurseurs. C’est un clin d’œil à l’actualité où certains gros pollueurs font aujourd’hui des annonces de replantation d’arbres pour compenser leur bilan carbone. Les estimations les plus récentes considèrent que, chaque jour, un français émet autant de CO2 que ce qu’un arbre stocke en un an.

Existe-t-il une smart city universelle ?

La justification ultime du smart n’est pas de faire toujours plus. C’est de faire en sorte que l’on puisse se déplacer sans dégrader l’environnement pour remplir son programme d’activités quotidiennes à Los Angeles, Paris, Pékin ou Bogota, de faire accéder les villes indiennes à l’eau potable, de mettre fin à l’étalement urbain dans les pays occidentaux et d’électrifier sur un monde durable les mégalopoles africaines qui se développent sous nos yeux.

 

Quelle compatibilité entre le numérique et l’écologie ?

Quelle compatibilité entre le numérique et l’écologie ?

 

le développement du numérique  est-il écologiquement compatible ? la réponse de  Daniel Sperling  l’élu en charge du sujet à Marseille.( interview La Tribune)

 

Lors du dernier Marseille City Life qui abordait le sujet de la Tech et du zéro carbone, vous avez rappelé que smart city n’égale pas forcément ville durable. Une idée qui est peu répandue…

 

 

 

Daniel Sperling

Il faut résoudre une double équation, celle de l’expansion et de la concentration urbaine qui engendrent une mosaïque de transitions : urbaine, numérique, énergétique, économique et sociétale. Autant de défis qui peuvent être relevés collectivement. Conservateur, le numérique l’est aussi au regard des enjeux environnementaux. Curieusement, le récit autour de la Smart City a postulé d’emblée qu’elle serait durable. Tel n’est pas du tout le cas aujourd’hui. D’une part, l’infrastructure physique du numérique, d’autre part, la collecte des données, leur traitement et leur stockage représentent des quantités d’énergie non seulement colossales, mais surtout en croissance constante et forte. Le numérique consomme bien plus d’énergie que le transport aérien et la croissance de sa consommation est à deux chiffres. La donnée est souvent qualifiée de nouvel or noir. Le fait est que nous avons pris au mot cette analogie avec le pétrole et avons une approche très 20e siècle du numérique dans la ville. La smart a capturé le green. L’écologie du numérique reste à construire et avec elle celle de la Smart City. Attelons-nous à la tâche.

Vous donniez un chiffre intéressant, c’est l’équivalent, en énergie du « coût du clic »…

En effet, 450 millions de tonnes de CO2 ont été émises par les entreprises du numérique dans les pays de l’OCDE depuis 2013. 4 %, c’est la part du numérique dans les émissions mondiales de CO2, en hausse de 50 % depuis 2013.

80 fois plus d’énergie est nécessaire à la production d’un gramme de smartphone que d’un gramme de voiture. À l’échelle mondiale, les usages numériques représentent deux fois l’empreinte environnementale de la France. Ces problématiques ne sont pas nouvelles. Si je peux dire, nous ne partons pas de zéro pour aller vers le zéro carbone.

Quels sont les projets smart city qui ont changé la physionomie de Marseille ?

Il y a eu beaucoup de projets dont Smartseille est l’un des derniers exemples, avec sa boucle à eau de mer. Quand CMA CGM annonce toute une série de mesures pour réduire son impact comme l’adoption du GNL et l’optimisation des routes, la réduction de la vitesse de ses navires, ça va dans le bon sens. Mais j’aime rappeler qu’il y a 20 ans, la cogénération par méthanisation et l’expérimentation d’épandage propre, qui a donné naissance à une forêt sur la route de Cassis, étaient précurseurs. C’est un clin d’œil à l’actualité où certains gros pollueurs font aujourd’hui des annonces de replantation d’arbres pour compenser leur bilan carbone. Les estimations les plus récentes considèrent que, chaque jour, un français émet autant de CO2 que ce qu’un arbre stocke en un an.

Existe-t-il une smart city universelle ?

La justification ultime du smart n’est pas de faire toujours plus. C’est de faire en sorte que l’on puisse se déplacer sans dégrader l’environnement pour remplir son programme d’activités quotidiennes à Los Angeles, Paris, Pékin ou Bogota, de faire accéder les villes indiennes à l’eau potable, de mettre fin à l’étalement urbain dans les pays occidentaux et d’électrifier sur un monde durable les mégalopoles africaines qui se développent sous nos yeux.

 

 




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