L’économie collaborative sera taxée
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L’économie collaborative : partage ou business ?
Interviewé dans le journal minute Marc-Arthur Gauthey, membre du collectif OuiShare revient sur les désavantages et les dérives de l’économie. – OuiShare avait
contribué à définir et populariser le concept «d’économie collaborative». De ce point de vue il est clair que l’économie collaborative a permis de nouvelles formes de partage mais qu’elle a rendu aussi possible une nouvelle intermédiation marchande qui a détourné à son profit une partie de la valeur ajoutée sans parler des contournement des règles fiscales et sociales.
Pour la quatrième édition du OuiShare Fest, quel message voulez-vous faire passer?
Le message est dans le thème: «after the Gold Rush» [la ruée vers l’or et après?]. Depuis 5 ans, on a vu pas mal de monde sur la ligne de départ de l’économie collaborative. Il y a eu beaucoup d’espoirs, notamment pour remettre du sens dans nos pratiques de consommation. Dans tout ça, on observe deux orientations. Ceux qui sont partis à la conquête de nouveaux marchés avec un objectif de rentabilité, qui ont levé des fonds. Dans les start-up qui ont survécu, certaines ont tiré leur épingle du jeu comme Airbnb, Blablacar, Guest to Guest, etc. Et puis il y a un deuxième courant qui se rapproche plus de l’économie sociale et solidaire, avec une vision sociale et humaniste. Le problème c’est qu’on a mis ces deux mouvements dans le même sac et que la deuxième tendance est nécessairement moins visible et un peu plus laissée pour compte.
Qu’est-ce qu’il y a justement «après la ruée vers l’or»?
Le grand sujet cette année au OuiShare Fest, c’est la «blockchain». On commence à découvrir qu’on est capables de créer des échanges sans intermédiaires, qui peuvent concurrencer les plateformes traditionnelles. A terme, ça ouvre des opportunités immenses. Dans un autre registre, on questionne les méthodes managériales. Les entreprises traditionnelles ont aujourd’hui du mal à attirer et à conserver les talents, il y a une hiérarchie très forte et un espace de créativité restreint. Il faut impulser une transformation culturelle et digitale et faire évoluer les entreprises. Et puis l’avenir c’est aussi se concentrer sur la transformation personnelle: être bien dans sa vie, dans son job. Jusqu’aux années 2000, la valeur carrière était au centre de tout. Aujourd’hui on se recentre sur l’accomplissement personnel, la créativité.
Quel est le rapport avec l’économie collaborative?
Il n’y en a pas tellement! On essaye de sortir de cette expression qu’on a contribué à créer et qui englobe des choses très différentes. On a vécu un glissement de la consommation collaborative à l’économie collaborative. Maintenant, on compte passer à une société collaborative. Autrement dit, un endroit dans lequel on ferait passer la coopération devant la compétition. L’économie collaborative est un prétexte marketing pour amener le grand public vers toutes ces questions.
Quelle est le rôle du citoyen dans cette société collaborative?
La place du citoyen c’est de se dire qu’on peut tous être acteurs de nouveaux usages, de façons d’être et de faire, de communautés émergentes. C’est pour ça qu’on a organisé une journée portes ouvertes samedi 21 mai avec 5 parcours et des ateliers concrets. L’idée, c’est que les gens se rendent compte qu’ils peuvent contribuer à un avenir commun et être, à leur petite échelle, acteurs de changement. On a tous les moyens de faire avancer les choses.
L’économie collaborative : arnaque ou nouveau modèle ?
A priori l’économie collaborative constitue un moyen de contourner les excès du marché en rapprochant les acteurs. Par exemple quand les producteurs commercent directement avec les consommateurs. Mais un bon moyen parfois de s’affranchir des intermédiaires mais aussi des règles fiscales et parfois sociales qui plombent habituellement le coût de la transaction. Mais force est de constater que la majorité des changes collaboratifs passent par la médiation d’intervenants qui ont flairé la bonne affaire. Grâce à la massification des offres, ils exercent une pression la baisse des prix grâce à une concurrence accrue qui se retourne contre les particuliers comme sur les professionnels. Pour supprimer des intermédiaires, on en rétablit d’autres. En fait la marchandisation de la nouvelle médiation est surtout un moyen de favoriser le travail au noir et le détournement des coûts fiscaux et sociaux. Pourtant certaines formes économies collaboratives sont saines quand elles évitent ces pièges par exmple quand elles rapprochent simplement le producteur du consommateur. Ce qui permet en général une plus grande qualité des produits puisque le producteur est mieux rémunéré. Mais le débat est obscurci par le culte de la nouveauté numérique, les fameuses nouvelles technologies, les applications considérées toutes sans discussion possible comme un progrès. Certes les nouvelles technologies constituent un outil de modernisation des processus de production et d’échanges mais nombreux sont les gadget auxquels on attribue d’office une modernité pour légitimer leur usage et les pratiques douteuses. Certaines formes collaboratives doivent être encouragées notamment pour éliminer des intermédiaires inutiles pour autant il faudra veiller à réguler certaines partqiues , empêcher aussi que viennent émerger de nouveaux parasites dans la médiation. Des parasites légitimés par le recours forcément « progressiste » des nouvelles technologies de communication.
L’ingénierie fiscale est ans limite, le gouvernement envisage de créer un impôt sur les échanges entre particuliers. Ainsi un particulier qui achète une botte de radis à un voisin pourrai t être taxé comme celui qui vend une bricole sur Le Bon Coin. AirBnB, Le Bon Coin ou encore BlaBlaCar sont dans le viseur du fisc. Jusqu’à présent, les particuliers qui tirent profit de la vente d’un objet ou de la location de leur bien immobilier ne sont soumis à aucune taxe. Mais l’État cherche à combler ce manque à gagner. La commission des finances du Sénat a mis en place un groupe de travail concernant le développement de l’économie collaborative et ses conséquences fiscales. Depuis mars, les sénateurs ont auditionné les responsables des sites et des experts du secteur du numérique. Les parlementaires redoutent les revenus « plus faibles et surtout difficiles à repérer pour le fisc », note Le Figaro. L’enjeu concerne aussi la TVA avec les achats de produits français, sur des sites basés à l’étranger. Ces derniers ne reversent pas la TVA ou vendent hors-taxe. Cependant, le gouvernement a déjà commencé à agir. Les particuliers et utilisateurs du site de locations d’appartements, AirBnB, devront désormais payer une taxe de séjour.