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Législatives: L’abstention encore gagnante (Bruno Cautrès, CNRS)

Législatives: L’abstention encore gagnante (Bruno Cautrès, CNRS)

  Le chercheur au CNRS et spécialiste de la vie politique française, Bruno Cautrès estime dans la Tribune que, dans un contexte de campagne électorale atone, la Nupes va qualifier au second tour beaucoup de candidats issus de la gauche. Ce qui pourrait amplement compliquer la tâche du gouvernement. Toutefois, le profil des abstentionnistes pourrait profiter à l’actuelle majorité.

À la veille du premier tour des élections législatives, quel est l’état des rapports de force politiques ?

BRUNO CAUTRÈS - La Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) et la coalition de la majorité présidentielle Ensemble sont au coude-à-coude. Cela fait plusieurs semaines qu’il y a presque match nul entre ces deux mouvements. Ces deux formations tournent respectivement autour de 27%-28% des intentions de vote. Du côté du Rassemblement national (RN), les intentions de vote se situent autour de 20%. Il y a un décrochage entre les deux coalitions et le RN.

Pour l’instant, le scénario est très différent de 2017. Très tôt après le second tour de la présidentielle, la République en Marche avait dominé les intentions de votes et les projections en sièges. Il faut néanmoins rappeler que les rapports de force en intentions de vote ne se traduisent pas forcément de la même manière en projections de sièges à l’Assemblée nationale. Les projections de sièges continuent de donner davantage de députés à la coalition Ensemble qu’à la coalition Nupes. Cet avantage est en train de se réduire. Quand on regarde les projections de la plupart des sondeurs aujourd’hui, la situation est moins favorable qu’il y a deux ou trois semaines.

Les Français ont boudé les urnes à la dernière présidentielle alors que c’est un scrutin traditionnellement mobilisateur. Doit-on s’attendre à une forte abstention dimanche prochain au premier tour des élections législatives ?

Oui, la plupart des indicateurs annoncent une forte abstention, même s’il est difficile de bien estimer son niveau avec des sondages préélectoraux. Même si la campagne est aujourd’hui davantage polarisée sur les tirs de barrage de la majorité contre Jean-Luc Mélenchon, et inversement, le désintérêt des Français pour cette campagne est visible dans les enquêtes, même s’ils la suivent. L’abstention devrait être nettement plus importante qu’à la présidentielle.

À qui pourrait profiter cette abstention ?

La sociologie des abstentionnistes donnerait un avantage à la majorité. Son électorat est composé de seniors, de catégories sociales favorisées. Ces deux caractéristiques sociologiques favorisent la participation. Ce qui est plus difficile à mesurer, c’est le degré de mobilisation dans certaines catégories de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon à la présidentielle.

La part des Français indécis est-elle encore importante à deux jours du scrutin ?

Elle reste importante. Plus que l’indécision, c’est la difficulté pour les électeurs à bien comprendre le thème principal de cette campagne électorale qui se réduit aujourd’hui à un combat entre Jean-Luc Mélenchon et Emmanuel Macron.

Le président a accéléré le tempo sur le thème « il me faut une majorité absolue ». Jean-Luc Mélenchon a insisté sur le thème « qu’il ne fallait pas laisser les coudées franches à Emmanuel Macron ». Les Français voient surtout cette campagne comme une simple déclinaison de la campagne présidentielle.

Quel bilan tirez-vous de cette campagne électorale ?

C’est une non-campagne. Il n’y a pas vraiment eu de campagne au sens traditionnel. Nous n’avons pas été submergés d’images de candidats en train de faire campagne. Les candidats n’ont pas vraiment mis en avant des axes de politique publique. La Première ministre, Élisabeth Borne, fait campagne dans une circonscription du Calvados. Le pilote de cette campagne a bien été Emmanuel Macron.

Du côté de la Nupes, il y a eu une vraie dynamique. La mise en œuvre de cette coalition a créé un événement politique de très grande importance. Cette coalition va être un vrai marqueur de ces élections législatives. Cette coalition va qualifier au second tour beaucoup de candidats issus de la gauche. Ce sera sans doute un des résultats spectaculaire de dimanche soir.

Dans un récent billet, vous affirmez que, « si Jean-Luc Mélenchon a incontestablement réussi à transformer une élection de confirmation de la présidentielle en élection à enjeu (imposer une cohabitation à Emmanuel Macron), il lui reste à faire la démonstration que le soufflé n’est pas retombé et que les effets mobilisateurs escomptés auront bien lieu à gauche ». Faut-il s’attendre à une forte mobilisation des électeurs de gauche au premier tour des élections législatives ?

Les sympathisants de la France insoumise (LFI) et ceux de Jean-Luc Mélenchon sont très mobilisés. Dans les électorats de centre gauche du Parti socialiste ou des Verts, c’est un peu moins le cas.

Le Rassemblement national peut-il faire une percée à l’Assemblée nationale ?

Oui, le Rassemblement national aura sans doute plus de députés en 2022 qu’en 2017. Il y a 5 ans, le RN avait fait élire 8 députés au Palais Bourbon. Les députés RN ne devraient pas avoir de mal à former un groupe à l’Assemblée nationale [pour former un groupe à l'Assemblée, il faut au minimum 15 députés élus, Ndlr]. Cela pourrait être un événement très important – ce serait une première depuis les élections législatives de 1986.

Emmanuel Macron a-t-il sous-estimé ses adversaires après les résultats de l’élection présidentielle ?

Emmanuel Macron a voulu faire la même campagne qu’à la présidentielle, c’est-à-dire une non-campagne. Il a tout misé sur le fait que les Français voulait lui donner une majorité. Le chef de l’État s’est sans doute impliqué un peu tard dans cette campagne. La nomination de la Première ministre et la mise en place du gouvernement ont pris beaucoup de temps. Il y a eu une forme d’inertie post-présidentielle.

L’inversion du calendrier entre la présidentielle et les législatives il y a 20 ans a toujours donné une majorité confortable au chef de l’État. Que pourrait-il se passer si Emmanuel Macron n’obtenait pas la majorité absolue ?

Tout dépendra du nombre de sièges qu’il lui manquerait à ce moment-là pour obtenir la majorité absolue, fixée à 289 sièges. S’il ne lui manque que quelques sièges, il pourra sans doute compter sur des rapprochements individuels de députés de centre-droit. Du côté du centre-gauche, ces rapprochements me semblent plus compliqués.

Les députés socialistes qui seront élus seront issus en grande majorité de la coalition de la Nupes. S’il lui manque beaucoup plus de sièges pour former cette majorité, le chef de l’État sera sans doute obligé de faire un accord électoral avec une autre formation politique.

Cette annonce peut signifier la volonté de donner un nouveau souffle à cette campagne et de donner de la perspective en rappelant que le chef de l’État réformateur est toujours là. Ce n’est plus la « start-up nation » de 2017 mais un « changement profond de modèle » basé sur les fondamentaux de l’action publique (santé, école, écologie, production et emploi), nous explique le chef de l’État. Je pense que cette annonce est passée inaperçue chez beaucoup d’électeurs.

Propos recueillis par Grégoire Normand

Santé- Vaccin covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

Santé- Vaccin covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

 

Nombre de pseudo experts notamment des sociologues n’hésitent pas à donner leur avis à propos du covid. Le CNRS somme ces bavards impénitents de se taire sur des sujets dont ils ignorent tout . Dans le corps médical lui-même, nombre de soignants s’expriment aussi sans compétence particulière poussés il est vrai notamment par les chaînes d’information continue en mal de bla-bla

Un chercheur en sociologie est-il fondé à analyser les effets indésirables des vaccins contre le Covid-19 ? Pour le CNRS, la réponse est non. Dans un communiqué, mardi 24 août, l’organisme « déplore les prises de position publiques de certains scientifiques, souvent plus soucieux d’une éphémère gloire médiatique que de vérité scientifique, sur des sujets éloignés de leurs champs de compétences professionnelles ».

Sans le nommer, le CNRS incrimine l’un de ses directeurs de recherche en sociologie, Laurent Mucchielli, qui a publié, depuis mars 2020, pas moins de soixante-trois analyses consacrées à la crise sanitaire sur son blog hébergé par Mediapart, dont l’une a été dépubliée le 4 août par la rédaction en chef au motif qu’elle diffusait de « fausses informations ».

Le sociologue, spécialiste de la délinquance et des politiques de sécurité, y affirmait au côté d’autres signataires, dont deux pharmaciens et un médecin, que la vaccination de masse contre le Covid-19 conduisait à « une mortalité inédite dans l’histoire de la médecine moderne ». Aux Etats-Unis, elle « a contribué à tuer cinq fois plus de personnes que la vaccination antigrippe en trente ans », avançait-il, en s’appuyant sur les enquêtes de pharmacovigilance des différents vaccins.

 « Ces communications ne respectent aucune des règles en vigueur dans le cadre de publications scientifiques, notamment le jugement par les pairs, seuls à même de contrôler la rigueur de la démarche », tranche le CNRS, qui précise que son comité d’éthique a « récemment » approuvé une recommandation prévoyant que « le chercheur qui intervient dans l’espace public doit préciser à quel titre il prend la parole », en qualité de spécialiste, en tant que représentant de son organisme de recherche ou au titre de « citoyen engagé, voire de militant ».

A la faveur d’une tribune publiée dans les colonnes du Monde, jeudi 19 août, huit sociologues, dont Gérald Bronner et Dominique Schnapper, avaient sommé le CNRS de réagir, évoquant la manipulation qui consiste à confondre les décès durant une période consécutive à une vaccination avec ceux causés par la vaccination.

 « L’imputabilité est un travail d’enquête fait par des médecins et des pharmaciens spécialisés en pharmacovigilance. Un sociologue ne pourrait y prendre part », rappelle Fabienne Blum, présidente de Citizen4Science, association créée fin 2020 pour soutenir les scientifiques « harcelés » depuis le début de la crise sanitaire.

Un avis que ne partage pas Laurent Mucchielli. « La science repose sur le débat contradictoire, la libre discussion des données et des raisonnements, se défend-il dans une réponse écrite au MondeLe CNRS ne s’en serait jamais inquiété s’il n’avait pas été harcelé par mes détracteurs. ».

Un sociologue qui confond sans doute bavardage et recherche ! Comme trop souvent dans sa discipline.

Vaccin covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

Vaccin covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

 

Nombre de pseudo experts notamment des sociologues n’hésitent pas à donner leur avis à propos du covid. Le CNRS somme ces bavards impénitents de se taire sur des sujets dont ils ignorent tout . Dans le corps médical lui-même, nombre de soignants s’expriment aussi sans compétence particulière poussés il est vrai notamment par les chaînes d’information continue en mal de bla-bla

Un chercheur en sociologie est-il fondé à analyser les effets indésirables des vaccins contre le Covid-19 ? Pour le CNRS, la réponse est non. Dans un communiqué, mardi 24 août, l’organisme « déplore les prises de position publiques de certains scientifiques, souvent plus soucieux d’une éphémère gloire médiatique que de vérité scientifique, sur des sujets éloignés de leurs champs de compétences professionnelles ».

Sans le nommer, le CNRS incrimine l’un de ses directeurs de recherche en sociologie, Laurent Mucchielli, qui a publié, depuis mars 2020, pas moins de soixante-trois analyses consacrées à la crise sanitaire sur son blog hébergé par Mediapart, dont l’une a été dépubliée le 4 août par la rédaction en chef au motif qu’elle diffusait de « fausses informations ».

Le sociologue, spécialiste de la délinquance et des politiques de sécurité, y affirmait au côté d’autres signataires, dont deux pharmaciens et un médecin, que la vaccination de masse contre le Covid-19 conduisait à « une mortalité inédite dans l’histoire de la médecine moderne ». Aux Etats-Unis, elle « a contribué à tuer cinq fois plus de personnes que la vaccination antigrippe en trente ans », avançait-il, en s’appuyant sur les enquêtes de pharmacovigilance des différents vaccins.

 « Ces communications ne respectent aucune des règles en vigueur dans le cadre de publications scientifiques, notamment le jugement par les pairs, seuls à même de contrôler la rigueur de la démarche », tranche le CNRS, qui précise que son comité d’éthique a « récemment » approuvé une recommandation prévoyant que « le chercheur qui intervient dans l’espace public doit préciser à quel titre il prend la parole », en qualité de spécialiste, en tant que représentant de son organisme de recherche ou au titre de « citoyen engagé, voire de militant ».

A la faveur d’une tribune publiée dans les colonnes du Monde, jeudi 19 août, huit sociologues, dont Gérald Bronner et Dominique Schnapper, avaient sommé le CNRS de réagir, évoquant la manipulation qui consiste à confondre les décès durant une période consécutive à une vaccination avec ceux causés par la vaccination.

 « L’imputabilité est un travail d’enquête fait par des médecins et des pharmaciens spécialisés en pharmacovigilance. Un sociologue ne pourrait y prendre part », rappelle Fabienne Blum, présidente de Citizen4Science, association créée fin 2020 pour soutenir les scientifiques « harcelés » depuis le début de la crise sanitaire.

Un avis que ne partage pas Laurent Mucchielli. « La science repose sur le débat contradictoire, la libre discussion des données et des raisonnements, se défend-il dans une réponse écrite au MondeLe CNRS ne s’en serait jamais inquiété s’il n’avait pas été harcelé par mes détracteurs. ».

Un sociologue qui confond sans doute bavardage et recherche ! Comme trop souvent dans sa discipline.

Covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

Covid: Les sociologues et autres bavards sommés de se taire par le CNRS

 

Nombre de pseudo experts notamment des sociologues n’hésitent pas à donner leur avis à propos du covid. Le CNRS somme ces bavards impénitents de se taire sur des sujets dont ils ignorent tout .

Un chercheur en sociologie est-il fondé à analyser les effets indésirables des vaccins contre le Covid-19 ? Pour le CNRS, la réponse est non. Dans un communiqué, mardi 24 août, l’organisme « déplore les prises de position publiques de certains scientifiques, souvent plus soucieux d’une éphémère gloire médiatique que de vérité scientifique, sur des sujets éloignés de leurs champs de compétences professionnelles ».

Sans le nommer, le CNRS incrimine l’un de ses directeurs de recherche en sociologie, Laurent Mucchielli, qui a publié, depuis mars 2020, pas moins de soixante-trois analyses consacrées à la crise sanitaire sur son blog hébergé par Mediapart, dont l’une a été dépubliée le 4 août par la rédaction en chef au motif qu’elle diffusait de « fausses informations ».

Le sociologue, spécialiste de la délinquance et des politiques de sécurité, y affirmait au côté d’autres signataires, dont deux pharmaciens et un médecin, que la vaccination de masse contre le Covid-19 conduisait à « une mortalité inédite dans l’histoire de la médecine moderne ». Aux Etats-Unis, elle « a contribué à tuer cinq fois plus de personnes que la vaccination antigrippe en trente ans », avançait-il, en s’appuyant sur les enquêtes de pharmacovigilance des différents vaccins.

 « Ces communications ne respectent aucune des règles en vigueur dans le cadre de publications scientifiques, notamment le jugement par les pairs, seuls à même de contrôler la rigueur de la démarche », tranche le CNRS, qui précise que son comité d’éthique a « récemment » approuvé une recommandation prévoyant que « le chercheur qui intervient dans l’espace public doit préciser à quel titre il prend la parole », en qualité de spécialiste, en tant que représentant de son organisme de recherche ou au titre de « citoyen engagé, voire de militant ».

A la faveur d’une tribune publiée dans les colonnes du Monde, jeudi 19 août, huit sociologues, dont Gérald Bronner et Dominique Schnapper, avaient sommé le CNRS de réagir, évoquant la manipulation qui consiste à confondre les décès durant une période consécutive à une vaccination avec ceux causés par la vaccination.

 « L’imputabilité est un travail d’enquête fait par des médecins et des pharmaciens spécialisés en pharmacovigilance. Un sociologue ne pourrait y prendre part », rappelle Fabienne Blum, présidente de Citizen4Science, association créée fin 2020 pour soutenir les scientifiques « harcelés » depuis le début de la crise sanitaire.

Un avis que ne partage pas Laurent Mucchielli. « La science repose sur le débat contradictoire, la libre discussion des données et des raisonnements, se défend-il dans une réponse écrite au MondeLe CNRS ne s’en serait jamais inquiété s’il n’avait pas été harcelé par mes détracteurs. ».

Un sociologue qui confond sans doute bavardage et recherche ! Comme trop souvent dans sa discipline.

Santé–Covid-19 : « la France a choisi de laisser circuler le virus largement (Samuel Alizon, CNRS)

Santé–Covid-19 : « la France a choisi de laisser circuler le virus largement (Samuel Alizon, CNRS)

 

 

 

Sur France Info, Selon Samuel Alizon, directeur de recherche au CNRS, au laboratoire maladies infectieuses et vecteurs, la stratégie choisie par la France « est de laisser circuler le virus largement ».

 

Est-ce que la mise en place de quarantaine peut vraiment limiter l’arrivée en Europe et en France du variant brésilien ?

 

Samuel Alizon : On peut s’interroger sur la motivation. Parce que si c’est pour empêcher l’arrivée des variants venus d’autres pays, c’est trop tard. On sait qu’ils sont déjà en France. À ce niveau-là, cela peut jouer sur des nouvelles importations. Mais les variants sont déjà là, on les a détectés même s’ils sont rares. Il y a des inconnues aujourd’hui sur ces variants, mais ils sont déjà là. Si cela a un effet, ça ne sera pas sur l’arrivée des variants.

Est-ce qu’il faut s’inquiéter des variants brésilien et sud-africain ?

À court terme, le problème c’est le variant V1 détecté au Royaume-Uni. C’est 80% des cas. Celui-là, il est maintenant à peu près avéré qu’il est plus virulent. C’est à dire que si vous êtes infecté par celui-là, vous avez plus de risques de faire un Covid sévère. Il y a un peu un décalage entre ces effets d’annonce sur les quarantaines imposées aux voyageurs et l’absence d’annonce vis à vis du variant V1, dit britannique, avec la réouverture des écoles dans une semaine où là, on ne sait pas trop ce qui est prévu. Sur le moyen ou le long terme, les variants V2 et V3, ceux détectés en Afrique du Sud et au Brésil, posent pas mal de questions, notamment parce qu’ils semblent échapper à l’immunité naturelle et à l’immunité de certains vaccins.

Si vous avez déjà été infectés par des lignées qui circulaient en 2020, a priori, vous n’êtes pas immunisés ou très peu immunisés contre les variants V2 et V3. C’est ce qu’a vécu le Brésil, qui a eu une première vague extrêmement meurtrière et qui malgré cela est en train de revivre une deuxième vague extrêmement meurtrière.

Est-ce qu’il y a donc un intérêt à mettre tous les voyageurs en quarantaine en provenance de ces pays où le variant circule ?

Ces variants sont déjà là, donc, à court terme, vous n’empêcherez pas leur arrivée. Sur le moyen ou le long terme, la volonté politique de contrôler l’épidémie n’est pas claire. Aujourd’hui, la circulation massive en France, fait par exemple que la France est potentiellement aussi un des pays où des variants risquent d’évoluer. Le virus mute en continu. La plupart de ces mutations sont neutres. Plus vous le laissez circuler, plus il y a de risques que certaines de ces mutations aient des effets. Donc, la stratégie choisie par la France qui est de laisser circuler le virus largement est une stratégie qui maximise les risques, qui maximise les coûts à court terme, et qui, sur le long terme, maximise les risques aussi en termes d’évolution virale.

« Pandémie – économie, un choc explosif » ( Anne-Laure Delatte, CNRS)

« Pandémie – économie,  un choc explosif » ( Anne-Laure Delatte, CNRS)

Anne-Laure Delatte , économiste du CNRS et spécialiste de l’Europe, évoque dans une interview de la Tribune les effets néfastes de la pandémie sur les économies du Vieux Continent.

 

Quelle est l’ampleur du choc économique dans l’Union européenne ?

ANNE-LAURE DELATTE - La pandémie a provoqué un choc hétérogène en Europe. C’est un choc commun mais il a frappé les pays de manière différente, d’abord sur le plan sanitaire. Notamment pour des raisons démographiques, comme la densité de population par exemple, certains pays ont été bien plus touchés que d’autres avec plus de victimes du virus.

Les États n’étaient pas préparés de la même façon. Sur le plan économique, les pays sont entrés dans la crise avec des conditions plus ou moins solides. L’Italie et l’Espagne par exemple étaient dans une position plus vulnérable que l’Allemagne ou la France. L’Italie en particulier avait un stock de dette assez important et donc une capacité à dépenser de l’argent pour protéger ses populations moins importante qu’en Allemagne ou en France. En même temps, l’Espagne et l’Italie ont été bien plus affectés en nombre de morts que les pays du Nord. C’est une double peine pour ces pays du sud de l’Europe. La combinaison du choc pandémique et de la vulnérabilité économique à l’entrée de la crise ont provoqué un cocktail explosif. Cela explique que les dégâts économiques soient beaucoup plus importants dans ces pays.

Le plan de relance européen est-il vraiment à la hauteur de la crise ?

Le plan de relance a un caractère historique. C’est la première fois que les Européens arrivent à se coordonner autour d’un soutien budgétaire. L’Europe n’avait pas les outils pour réagir de façon budgétaire à des crises auparavant. Lors de la dernière crise de l’euro, les États européens n’avaient pas pu mettre en place de plan d’urgence pour répondre aux besoins des pays. C’est la première fois que l’Union européenne se dote d’une capacité budgétaire. La Commission européenne a émis des obligations, c’est-à-dire qu’elle s’est endettée sur les marchés pour financer un plan de soutien aux membres de l’Union européenne. L’Union européenne émet de la nouvelle dette et elle transfère de l’argent vers les pays.

CNRS: Antoine Petit rétropédale sur le darwinisme social

CNRS: Antoine Petit rétropédale sur le darwinisme social  

 

Antoine Petit, Président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) dans une tribune au Monde rétropédale le concept de darwinisme social dont en quelque sorte il s’était fait le chantre sans doute pour plaire  à Macon leur de la cérémonie des 80 ans de l’organisme qu’il préside. Antoine Petit rétropédale sérieusement au point même de se faire maintenant représentant syndical des chercheurs. Des chercheurs qui avaient précédemment dénoncé Antoine Petit pour s’être fait l’apôtre du darwinisme social dans la recherche. Ils avaient réagi dans une première tribune au Monde:

 

« La politique de la science est de plus en plus conduite par la compétition « au détriment de la coopération », s’indignaient  un collectif de 16 chercheurs qui ont protesté  dans une tribune au Monde contre les propos du patron du   CNRS qui préconise un retour du darwinisme social, un retour approuvé par Macron. Jamais depuis Alexis Carrel un intellectuel n’avait osé reprendre ces thèses eugénistes; Alexis Carrel avait une excuse en quelque sorte, il appartenait au parti français pro nazi et soutenait ses idées. Pour preuve cette citation de Carrel:

« En Allemagne, le gouvernement a pris des mesures énergiques contre l’augmentation des minorités, des aliénés, des criminels. La situation idéale serait que chaque individu de cette sorte soit éliminé quand il s’est montré dangereux »

La référence au darwinisme social s’appuie peut-être sur une conviction mais découle aussi d’  une volonté assez lamentable de certaines élites de plaire au prince pour un maintien en poste voire une promotion. Bref une attitude de courtisan. Le darwinisme social est bien entendu une théorie particulièrement fumeuse dans le domaine de la recherche car  les champs et les compétences se complètent au lieu de se concurrencer et ont peu à voir avec les évolutions aléatoires. Lors de la cérémonie des 80 ans du CNRS en présence de Macron, le patron du CNRS, Antoine Petit, résumait ainsi l’idéologie qui sous-tend la future loi de programmation de la recherche, dont la présentation est prévue pour février 2020 : « Il faut une loi ambitieuse, inégalitaire – oui, inégalitaire, une loi vertueuse et darwinienne, qui encourage les scientifiques, équipes, laboratoires, établissements les plus performants à l’échelle internationale, une loi qui mobilise les énergies. »

 

De son coté Macron avait  assuré  que les innombrables évaluations auxquelles sont soumis les chercheurs (annuelle, biennale, quinquennale, et lors de chaque publication et projet évalué par les pairs) pourraient diminuer à condition qu’elles permettent une « différenciation » et que les « mauvais » en « assument les conséquences ». Emmanuel Macron a également cité, parmi les « chantiers » de la future loi, la création, à côté des modes de travail statutaires de plus en plus rares, de « CDI de projets », nouvel oxymore désignant des contrats voués à durer le temps d’un projet. Une sorte d’ubérisation de la recherche qui pourrait faire école dans toute l’économie pour éliminer les « mauvais ».

 

Suite à cette bavure conceptuelle, le Directeur du CNRS tente de rectifier le tir sur le fond et sur la forme.

 

 

Tribune’ Antoine Petit, Président-directeur général du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) 

 

« Le 26 novembre, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) célébrait les 80 ans de sa création, en présence du président de la République. Depuis quatre-vingts ans, les découvertes réalisées ont repoussé les limites de la connaissance et irriguent la vie quotidienne, dans des domaines très divers. Le CNRS a acquis une réputation d’excellence internationalement reconnue. Il est un fleuron de la France, et chacun peut en être fier.

Cette histoire continue de s’écrire aujourd’hui et beaucoup d’attentes convergent actuellement vers la future loi de programmation pluriannuelle de la recherche. Elle doit d’abord permettre à notre pays de demeurer une grande nation de recherche scientifique : c’est la souveraineté de la France et l’avenir de ses habitants qui sont ici en jeu. Notre communauté scientifique doit pouvoir participer à la résolution des grands défis qui se posent à la planète comme le réchauffement climatique, la transition énergétique, la préservation de la biodiversité, l’amélioration de la santé humaine ou encore le développement éthique de l’intelligence artificielle. Le CNRS, après une très large consultation des laboratoires, a formulé des propositions dès juillet 2019, que ce soit en matière de financement de la recherche, d’attractivité des emplois et carrières scientifiques, ou plus largement de recherche partenariale et d’innovation.

Ainsi avons-nous proposé un plan pluriannuel d’emplois, tant pour les chercheurs et chercheuses que pour les personnels d’appui à la recherche, de manière à enrayer la baisse continue constatée depuis près de vingt ans (pour le seul CNRS, perte de plus de 3 000 emplois en dix ans, soit près de 11 %). Nous voulons aussi disposer des moyens d’attirer les talents, et de les garder, dans une compétition internationale difficile et exigeante. Cela suppose de mettre fin au décrochage des rémunérations, notamment en début de carrière, afin que la France reste attractive. Il faut aussi que les chercheurs et les chercheuses aient les moyens d’exercer correctement leur métier avec un soutien au juste niveau des laboratoires et des projets scientifiques.

Nous demandons que le budget de l’Agence nationale de la recherche (ANR) lui permette de s’aligner sur les standards internationaux. Nous invitons à privilégier l’évaluation qualitative des laboratoires et des projets scientifiques, et celle des agents en prenant en compte l’ensemble de leurs missions. Nous voulons valoriser le doctorat au sein de la société, en particulier en favorisant l’emploi de docteurs dans les entreprises. C’est dans cet esprit que le CNRS a augmenté la rémunération des doctorants qu’il emploie de 20 % en 2019. Enfin, nous voulons recruter plus de chercheuses et favoriser leurs carrières. »

 

 

Moins de transport est plus démocratique qu’augmenter les taxes CO2 (Jean-Baptiste Fressoz, CNRS)

Moins de  transport est plus démocratique qu’augmenter les taxes CO2  (Jean-Baptiste Fressoz,  CNRS)

À juste titre, le chercheur Jean-Baptiste Fressoz. Du CNRS dénonce l’enflure sémantique des responsables vis-à-vis de l’environnement. Des discours en contradiction avec les pratiques et aussi des orientations erronées concernant par exemple les taxes CO2 alors que la régulation du transport permettrait d’éviter d’énormes gaspillages et serait beaucoup plus démocratique (extrait tribune du monde) »

 « Conseil de défense écologique » (Emmanuel Macron), « troisième guerre mondiale » (Joseph Stiglitz), « nouveau Pearl Harbor » (Bernie Sanders), « union nationale dans la guerre pour le climat » (Nicolas Hulot), « guerre contre l’effet de serre » (François de Rugy)… On assiste depuis quelques mois à une surenchère de déclarations martiales autour du climat. La guerre est devenue l’analogie évidente pour caractériser la mobilisation générale contre le réchauffement climatique.

On comprend la fonction de ces discours belliqueux : réactiver les rêves d’union sacrée et cacher la faiblesse des mesures actuelles. Mais hormis la rhétorique, une telle analogie entre guerre et climat est-elle pertinente ?

Une situation de guerre est définie par plusieurs éléments : un ennemi extérieur, une lutte entre nations et un état d’exception. La crise climatique présente des caractéristiques en tous points opposés : l’ennemi est intérieur, la coopération internationale est indispensable, et la mobilisation ne devra jamais prendre fin. Il n’y a ni bataille décisive ni armistice possible. La situation climatique ressemble moins à la guerre patriotique conjurée par nos dirigeants qu’à une guerre civile sans fin.

Pour être tout à fait juste, il y a néanmoins une expérience à retenir de la guerre qui est très pertinente dans le contexte climatique actuel : le rationnement. Si, en France, ce dernier rappelle les heures sombres de l’Occupation, si, en Allemagne et en Russie, il a servi à éliminer par la famine des populations entières, aux Etats-Unis et au Royaume-Uni le rationnement est, en revanche, associé à un moment à la fois patriotique, égalitaire et surtout très efficace.

Par exemple, le rationnement de l’essence établi aux Etats-Unis en mai 1942, avec un système de coupons en fonction des besoins professionnels de chacun, divise soudainement par deux la consommation domestique de carburant sans interférer de manière catastrophique avec l’économie américaine pourtant déjà bien motorisée (35 millions de voitures en 1939).

En Grande-Bretagne, le rationnement alimentaire a considérablement amélioré l’état de santé des classes populaires. Dans les années 1930, frappés par la crise économique et le chômage, les pauvres n’avaient plus accès aux produits laitiers, aux fruits et aux légumes. Les inégalités étaient criantes, avec une mortalité jusqu’à 50 % supérieure dans les villes industrielles du nord par rapport au sud de l’Angleterre. »

Gilets jaunes-La trouille des élites, exemples Elie Cohen et Gérard Grunberg du CNRS

Gilets jaunes-La trouille des élites, exemples   Elie  Cohen et Gérard Grunberg du CNRS

 

 

Nourrie au lait du libéralisme (et aussi à la fiscalité qui finance le CNRS), les deux médiatiques directeurs de recherche au CNRS, Elie Cohen et Gérard Grunberg  manifestent leur trouille vis-à-vis des gilets jaunes ; Une réaction qui confirme leur religion libérale ; réaction  aussi cohérente avec le conformisme de l’âge, l’un a 75 ans et l’autre 68 ans. Bref deux pépés qui depuis longtemps sont davantage présents sur les plateaux télé que dans les labos de recherche. Malheureusement c’est du discours de bistrot, pas de bistrot de quartier mais  du café de Flore. Extraits : « Mais là n’est pas la trace la plus saillante qui restera de ce conflit. Une double image s’impose au cœur du mouvement des « gilets jaunes ». La première est celle de citoyens affirmant avec fierté leur qualité de détachement avancé du peuple souverain et revendiquant à ce titre la démission de tel ou tel ministre, l’annulation d’une loi, ou l’institution d’une assemblée citoyenne, bref c’est un peuple « en armes » qui à nouveau s’exprime et entend même congédier le « petit marquis » siégeant à l’Élysée. ; Des  sujets revendiquant au souverain qui une hausse du smic, qui une baisse d’impôts, qui des équipements supplémentaires, et souvent les trois à la fois, bref de quoi remplir les frigos, gâter les petits enfants à Noël, et mieux vivre comme si l’Etat riche dont on ne sait quel trésor caché pouvait prodiguer des libéralités infinies à des sujets en demande. Une double régression économique et politique …. Trente ans de diagnostics, sans cesse confirmés, sur les raisons de la désindustrialisation, du fort chômage structurel, du caractère non soutenable d’une dépense publique financée par la dette avaient fini par créer un consensus centre gauche centre droit, consacré par l’élection de Macron, sur au moins trois orientations de politiques publiques. La première porte sur la nécessité d’améliorer la compétitivité, d’accroître l’attractivité du site productif France en allégeant la fiscalité pesant sur le capital, en améliorant le taux de marge des entreprises, en assouplissant les règles de fonctionnement du marché du travail, en incitant à investir dans le capital humain, la R&D, l’équipement industriel et les infrastructures de l’ère numérique. La suppression de l’ISF était bienvenue quand on sait les ravages provoqués par cet impôt notamment lors de la transmission ou de la cession d’une PME familiale……. Année après année les meilleurs travaux établissent que la hausse continue du smic a des effets négatifs sur l’emploi des non qualifiés. Les gouvernements ont cessé de pratiquer le coup de pouce, ont baissé les charges pesant sur le smic pour favoriser le retour à l’emploi. Pour traiter la question de la pauvreté, notamment des salariés, ils ont inventé la prime pour l’emploi. Rétablissement de l’ISF, retrait de la fiscalité écologique, hausse massive du SMIC, réinstallation des services publics de proximité, suppression des taxes qui oppressent les petites entreprises… La liste des revendications est longue, elle cumule hausse des dépenses et baisse des recettes, extension de l’intervention de l’Etat et refus du poids grandissant des réglementations. Les « gilets jaunes » dans leur inorganisation réinventent le programme des populistes italiens fiscophobes et dépensolâtres !….. Il n’est pas légitime en revanche que ces citoyens, qui par définition ont le droit de vote et ont élu démocratiquement il y a dix-huit mois leur président et leurs représentants, considèrent aujourd’hui le pouvoir comme leur ennemi, et cherchent à le renverser éventuellement par la violence…. »

Le reste est de la même tonalité uen contestation de la légitimité de la révolte et par contre uen plaidoyer en faveur de celle de Macron et de sa politique. *Comme disait Malrault la vieillesse est  souvent un naufrage surtout quand en plus on se fait rémunérer par ces élites pour leur chater ce qu’ils souhaitent entendre (dans les colloques et autres congrès professionnels). La conclusion est pathétique et témoigne bien de la trouille de ces élites :

« Il ne faut donc pas encourager ce mouvement à …. Nier la légalité d’un pouvoir pourtant démocratiquement élu. ….. Il faut au contraire expliquer aux gilets jaunes que nous ne sommes plus en 1789 puisque nous avons des institutions démocratiques …. »

Ça  sent vraiment la maison de retraite quand on confond insurrection morale et insurrection politique. Et ce n’est certainement une prise de position  très partagée même au CNRS.

Consommation d’eau en France (CNRS)

Consommation d’eau en France (CNRS)

 

Les prélèvements totaux en eau dans le milieu naturel, en France, ont été estimés, pour l’année 1995, à 40 milliards de mètres cubes. Sur ce total, les consommations nettes (volumes d’eau non restitués immédiatement dans le milieu aquatique ou évaporés) s’élevaient à 5,6 milliards de mètres cubes, le reste (34,4 milliards de mètres cubes) ayant été restitué au milieu aquatique ou s’étant évaporé.

Sur ces 5,6 milliards de mètres cubes d’eau de consommations nettes :

  • 43 % ont été consommés par l’agriculture, via l’irrigation. Cette consommation agricole connaît un accroissement rapide, les surfaces irriguées ayant pratiquement quadruplé entre 1970 et 1997. Il faut, selon les cultures, de 500 à 4 000 mètres cubes d’eau par hectare en irrigation par aspersion, en année moyenne.
  • 42 % sont liés à la consommation en eau potable par les collectivités locales. On estime, en moyenne, que la consommation française en eau potable est de 150 litres par jour et par habitant.
  • 7 % ont été consommés par les activités industrielles. Les secteurs industriels les plus « gourmands » en eau sont notamment la métallurgie (il faut 300 à 600 litres d’eau pour produire un kilogramme d’acier), la chimie, l’agroalimentaire (il faut 300 à 400 litres d’eau pour produire 1 kilogramme de sucre), les raffineries de pétrole et l’industrie de la pâte à papier (il faut 40 à 500 litres d’eau pour fabriquer 1 kilogramme de papier, mais seulement 1 à 10 litres pour fabriquer 1 kilogramme de papier recyclé).
  • 8 % ont été consommés par la production d’électricité. En réalité, la très grande majorité de l’eau prélevée pour le fonctionnement des centrales électriques est restituée dans le milieu naturel… qu’elle peut perturber par sa température plus élevée.

Les prélèvements en eau représentent en France 24 % de la ressource annuelle disponible : 40 milliards de mètres cube, sur les 170 milliards de mètres cubes disponibles. Ce pourcentage est comparable à celui d’autres grands pays européens : Allemagne (25 %), Espagne (29 %) et Italie (32 %). En revanche, l’Irlande, la Suède et la Norvège ne prélèvent que 2 % de leurs ressources disponibles.

en France, 63 % de l’eau potable provient des eaux souterraines, et 37 % est produite à partir des eaux superficielles (eau des fleuves, des rivières et des lacs). La France compte environ 32 400 captages d’eau potable, dont 96 % sont d’origine souterraine (puits, forages ou sources), et seulement 4 % d’origine superficielle (lacs ou cours d’eau). Mais ce sont ces 4 % de captages superficiels qui produisent 37 % de l’eau d’alimentation française.

« L ’énergie le vrai moteur de la croissance » (Gaël Giraud, du CNRS)

 « L ’énergie le vrai moteur de la croissance » (Gaël Giraud, du CNRS)

 

Gaël Giraud, du CNRS) dans le Monde remet en cause ce qui est le vrai moteur de la croissance à savoir l’énergie.

 

 

Quels sont d’après vous les indices d’un lien intime entre consommation d’énergie et croissance de l’économie ?
Depuis deux siècles, depuis les travaux d’Adam Smith et de David Ricardo par exemple, la plupart des économistes expliquent que l’accumulation du capital est le secret de la croissance économique inédite que connaissent les sociétés occidentales, puis une partie du reste du monde. Marx était, lui aussi, convaincu de cette apparente évidence. Or, historiquement, l’accumulation du capital (au sens moderne) n’a pas commencé au 18ème siècle avec le début de la révolution industrielle, mais au moins deux cents ans plus tôt. Inversement, la première “révolution marchande” des 12ème et 13ème siècles, qui permit à l’Europe de sortir de la féodalité rurale, coïncide avec la généralisation des moulins à eau et à vent. Une nouvelle source énergétique, en plus de la photosynthèse (agriculture) et de la force animale, devenait disponible. De même, qui peut nier que la découverte des applications industrielles du charbon, puis du gaz et du pétrole (et, plus récemment, de l’atome) a joué un rôle décisif dans la révolution industrielle, et partant, comme moteur de la croissance ? De 1945 à 1975, les “trente glorieuses” ont été une période de croissance accélérée et aussi de consommation inédite d’hydrocarbures. Depuis lors, la planète n’a jamais retrouvé la vitesse de consommation d’énergies fossiles qui fut la sienne après guerre. C’est une bonne nouvelle pour le climat. Mais cela n’est pas étranger au fait que nous n’avons jamais retrouvé non plus les taux de croissance du PIB des trente glorieuses.

Au cours des dix dernières années en France, la consommation d’énergie et de pétrole en particulier a diminué, tandis que le PIB, lui, a progressé.
Cela ne prouve-t-il pas qu’il n’y a pas de lien entre consommation d’énergie et croissance économique ?
La consommation d’énergie primaire française est passée de 255 millions de tonnes d’équivalent pétrole (MTep) en 2000 à 265 MTep en 2004 [corr.]. Elle a ensuite décliné légèrement jusqu’en 2008, avant de connaître un trou d’air en 2008-2009, suivi d’un second trou d’air en 2011. Elle a touché un plancher (provisoire ?) en 2012 à 245 MTep. Le PIB français a connu des variations analogues, ces variations ont simplement été plus amorties. C’est tout à fait normal dans la mesure où, heureusement, l’énergie n’est pas le seul facteur de production qui “tire” le PIB. Le travail réalisé avec Zeynep Kahraman, membre du Shift Project, montre que l’efficacité énergétique joue également un rôle majeur, là aussi devant le capital. Reste que sur le long terme, une relation extrêmement stable existe entre la consommation d’énergie et la croissance du PIB. On retrouve la même très grande stabilité lorsque l’on élargit la perspective non plus dans le temps, mais dans l’espace. Pour des pays importateurs comme la France, l’externalisation de la consommation d’énergie par le biais des importations conduit à sous-estimer l’influence de l’énergie dans l’évolution de la croissance économique. L’estimation de la relation entre énergie et croissance est beaucoup plus fiable à l’échelle mondiale qu’à l’échelle nationale.

Vos travaux aboutissent à une conclusion qui diverge totalement des analyses classiques : “l’élasticité”, c’est-à-dire la sensibilité du PIB par habitant vis-à-vis de la consommation d’énergie, est d’après vous de l’ordre de 60 %, et non de moins de 10 % (soit le coût de la facture énergétique dans la production), comme l’indique la littérature économique habituelle. [Autrement dit, si la consommation d’énergie augmente de 100 %, la théorie économique conventionnelle prédit que la hausse induite du PIB par habitant se limitera à moins de 10 %. D’après Gaël Giraud, l’observation empirique montre que l’augmentation est en réalité de 60 %, pas moins ! ]
Comment justifiez-vous cet énorme écart ?
La raison profonde de cet écart, c’est évidemment le très bas niveau du prix des hydrocarbures, même aujourd’hui. Beaucoup d’économistes postulent que le marché international de l’énergie est à l’équilibre, et que les prix qui en émergent reflètent les tensions réelles s’exprimant sur ce marché. D’abord quelques remarques sur cette idée d’un équilibre naturel. Le prix de la plupart des énergies fossiles est influencé par celui du pétrole et, tout récemment, du gaz. Or le prix du pétrole, comme celui du gaz de schiste nord-américain, ne résulte pas d’une pure rencontre concurrentielle de l’offre et de la demande. Tous deux sont soumis à diverses manipulations. Il apparaît que le mode de fixation du prix du pétrole spot, livrable à court terme, ressemble davantage à la fixation des taux monétaires du LIBOR qu’aux fictions idéales des manuels d’économie. Nous savons aujourd’hui que ces taux interbancaires du LIBOR ont été sciemment manipulés par diverses banques de la City de Londres, cela durant des années et avec éventuellement la complicité passive de leur régulateur, la banque centrale d’Angleterre. De même, le prix du pétrole est un sujet politiquement très sensible, il n’est pas étonnant qu’il soit soumis à diverses pressions. Par exemple, la chute du prix du pétrole durant la seconde moitié des années quatre-vingt n’est pas étrangère à la stratégie de Washington qui visait à étrangler l’économie de l’URSS [en demandant à l’allié saoudien d’ouvrir ses vannes de brut à fond, NDLR], ce qui a conduit à précipiter la chute de l’empire soviétique. Je ne prétends pas que ce contre-choc pétrolier des années quatre-vingt ait résulté uniquement de cette initiative de l’administration Reagan, mais que l’on mesure, à travers un exemple de ce type d’exemple, la nature en partie géopolitique du prix de l’or noir. A l’étage supérieur des marchés internationaux, celui des marchés financiers, le prix des futures, les contrats de livraison à terme sur le pétrole est, lui aussi, soumis à des mouvements de capitaux qui n’ont pas grand chose à voir avec la réalité économique de l’énergie, mais qui ont tout à voir avec des stratégies spéculatives mises en place par une poignée de grandes banques d’affaires américaines. Enfin, concernant le gaz de schiste nord-américain, il fait très certainement l’objet d’un dumping à la baisse, favorisé par des subventions plus ou moins cachées de l’administration américaine. Il résulte de tout ceci une déconnexion assez forte entre les réalités strictement économiques des hydrocarbures et leurs prix.

Revenons au point clé : le degré d’élasticité du PIB par rapport à l’énergie est selon vous très largement sous-estimé…
Si malgré les remarques liminaires que je viens de faire, vous croyez, comme la plupart des économistes universitaires, que le prix de l’énergie reflète fidèlement l’offre et la demande réelles, et si en plus et surtout, vous postulez que l’industrie des hydrocarbures n’est soumise à aucune contrainte du côté de l’extraction, alors vous concluez tranquillement que l’élasticité du PIB par rapport à l’énergie est proche de la part du coût de l’énergie dans le PIB, ce que l’on appelle son “cost share” en anglais. Soit moins de 10%, en effet. C’est ce raisonnement qui permet à certains de mes collègues économistes, à tort je pense, de prétendre que l’énergie est un sujet marginal et, pour tout dire, un non-sujet. Admettons un instant, pour les besoins de la discussion, que le prix du pétrole soit vraiment un prix de marché concurrentiel. Même dans pareil cas, il est évidemment faux de prétendre que l’extraction physique des hydrocarbures n’est soumise à aucune contrainte géologique, politique, etc. Or, dès que l’on réintroduit ce type de contraintes, on peut aisément montrer que (même sur un marché purement concurrentiel), il y aura une déconnexion complète entre l’élasticité et la part de l’énergie dans le cost share : les calculs font apparaître des “prix fantômes”, lesquels reflètent la puissance des contraintes extérieures et déforment le cost share à la baisse par rapport à l’élasticité. Cette remarque a déjà été faite depuis longtemps par un physicien allemand, Reiner Kümmel, ainsi que par l’Américain Robert Ayres. Pourtant la plupart des économistes continuent de postuler que l’élasticité de l’énergie est égale à son cost share, c’est-à-dire très faible, sans eux-mêmes y être allés regarder de plus près. Je pense que cela est dû, en profondeur, au fait que beaucoup d’économistes préfèrent regarder des prix et des quantités monétaires plutôt que des quantités physiques. Ce qui est paradoxal, puisque beaucoup de leurs modèles fonctionnent en réalité comme des modèles sans monnaie ! (Je sais, ça vous étonne, mais il faudrait un autre entretien pour expliquer ce point…) Mes propres travaux empiriques, menés sur près d’une cinquantaine de pays, et sur plus de quarante ans, montrent qu’en réalité l’élasticité du PIB par rapport à l’énergie primaire est comprise entre 40 %, pour les zones les moins dépendantes du pétrole, comme la France, et 70 % pour les Etats-Unis, avec une moyenne mondiale tournant autour de 60 %.

L’élasticité (la sensibilité) du PIB par rapport au capital vous apparaît par conséquent beaucoup plus faible que ce qui est couramment admis.
Quelles conséquences en tirez-vous sur le niveau des prix de l’énergie d’une part, et d’autre part sur la rémunération du capital ?
L’une des conséquences de la réévaluation à la hausse de l’élasticité du PIB par rapport à l’énergie est, en effet, une réévaluation à la baisse de l’élasticité par rapport au capital. D’après les manuels, cette dernière devrait de nouveau être égale au cost share du capital, traditionnellement évalué entre 30 et 40 % du PIB. Je trouve pour ma part des élasticités moitié plus faibles et ce, même en adoptant des définitions empiriques larges du capital, comme celle de Thomas Piketty. On pourrait être tenté d’en déduire que le capital est sur-rémunéré, et que l’énergie est sous-rémunérée. Ce n’est pas forcément faux mais, de mon point de vue, ce type de conclusion continue de raisonner comme si l’égalité de l’élasticité et du cost share devait être vérifiée dans un monde idéal. Or, et c’est un point fondamental, je ne connais pas de démonstration entièrement convaincante de cette égalité. Même si le prix de l’énergie (ou du capital) était fixé sur un marché mondial parfaitement concurrentiel, ce qui n’est nullement le cas en pratique, et même si l’on croit que les compagnies pétrolières ne sont soumises à nulle contrainte externe à leur business (de sorte qu’aucun “prix fantôme” ne viendrait déformer la relation élasticité/cost share, ce qui est une fiction), même dans un tel monde idéal, cette égalité reste encore suspecte. Cela est lié au fait que la micro-économie traditionnelle souffre de nombreuses erreurs internes, approximations et autres court-circuits intellectuels, qui rendent ses conclusions extrêmement fragiles. Un excellent livre, rédigé par un économiste australien, Steve Keen, fait le point sur ces problèmes d’apparence technique mais qui sont, au fond, décisifs pour le débat politique contemporain. J’assure la traduction de ce livre avec Aurélien Goutsmedt, il paraîtra à l’automne prochain (L’Imposture économique, Steve Keen, Ed. de l’Atelier).

Vous estimez qu’il existe une sorte de “force de rappel” entre la consommation énergie et le rythme de croissance du PIB. Les deux apparaissent “co-intégrés”, c’est-à-dire qu’ils seraient voués perpétuellement à revenir l’un vers l’autre, au bout d’un certain temps. Existe-t-il un lien de cause à effet entre l’énergie disponible et le niveau d’activité économique, ou au contraire du niveau d’activité économique sur la consommation énergie, ou bien encore s’agit-il d’un lien réciproque ?
Cette question a déjà été étudiée abondamment par les économistes spécialisés dans l’énergie. Il n’y a plus de doute, aujourd’hui, sur le caractère co-intégré de l’énergie et du PIB. Mes travaux montrent que la force de rappel entre ces deux grandeurs est telle qu’après un choc exogène (un krach financier, par exemple), ces variables mettent en moyenne un an et demi à retrouver leur relation de long terme. Si vous regardez la séquence 2007-2009, c’est à peu près ce que l’on observe. Vous posez à juste titre la question de la relation de causalité : est-ce la consommation d’énergie qui cause le PIB ou bien l’inverse ? Là-dessus, même les économistes énergéticiens sont beaucoup plus divisés. Mes travaux avec Zeynep Kahraman penchent clairement en faveur d’une relation causale univoque de la consommation d’énergie primaire vers le PIB, et non l’inverse. Jean-Marc Jancoviciavait déjà anticipé ce résultat depuis un moment, en observant par exemple qu’à la suite du krach 2007, la baisse de la consommation d’énergie précède la baisse du PIB dans un nombre important de pays. Comme l’indique le bon sens physique, une relation de causalité ne peut se traduire que par une précédence temporelle de la cause sur l’effet. C’est exactement ce que confirme mon travail. Il y a beaucoup de malentendus sur cette question de la causalité. La causalité est une notion métaphysique : même la mécanique newtonienne ne prétend pas démontrer que la gravité universelle fait tomber les pommes des arbres ! Tout ce qu’elle peut dire, c’est qu’elle dispose d’un modèle au sein duquel une grandeur appelée force gravitationnelle est supposée se manifester par le mouvement des masses, et que ce modèle n’a jamais été mis en défaut – pour des vitesses faibles par rapport à la lumière, évidemment ! Ici, il en va de même : tout ce que nous pouvons dire, c’est que nous observons une relation empirique entre l’énergie et le PIB, qui peut s’interpréter statistiquement comme une relation causale.

A vos yeux, dans quelle mesure la crise de 2008 pourrait-elle être une sorte de choc pétrolier ?
L’argument est facile à concevoir : en 1999, le baril est à 9 dollars. En 2007, il tourne autour de 60 dollars (avant de s’envoler à 140$ du fait de la tempête financière). Nos économies ont donc connu un troisième choc pétrolier au cours des premières années 2000, de même amplitude que ceux des années 1970, quoique davantage étalé dans le temps. Or ce “choc pétrolier” n’a pas eu l’effet récessif majeur de ceux de 1973 et 1979. Pourquoi ? Certains économistes avancent que cela serait dû à la plus grande flexibilité du marché du travail aux Etats-Unis, dans les années 2000, comparée à celle qui prévalait dans les années 1970, ainsi qu’à la politique monétaire très accommodante menée par la Réserve fédérale américaine (ainsi que par la Banque centrale européenne). La première explication ne me convainc nullement : elle repose très largement sur le postulat de l’égalité élasticité/cost share, dont j’ai dit combien elle est suspecte. Elle vise de manière trop évidente à légitimer des programmes de flexibilisation tous azimuts du marché du travail, qui ont pourtant montré leur inefficacité. En revanche, la seconde explication se rapproche de ce que vous suggérez. La politique monétaire de taux directeurs très faibles a rendu possible une expansion significative du crédit, elle-même facilitée par la dérégulation financière. Autrement dit, nos économies se sont endettées pour compenser la hausse du prix du pétrole ! Comme le crédit était très bon marché, cela a permis de rendre le choc pétrolier relativement indolore. Dans le même temps, la politique monétaire, la déréglementation et la myopie du secteur bancaire ont aussi provoqué le gonflement de la bulle des subprimes, dont l’éclatement en 2007 a enclenché la crise. Le remède qui a rendu possible d’amortir le choc pétrolier a donc aussi provoqué la pire crise financière de l’histoire, elle-même largement responsable de la crise actuelle des dettes publiques, de la fragilisation de l’euro, etc. Tout se passe donc comme si nous étions en train de payer, maintenant, le véritable coût de ce troisième choc pétrolier.

L’évolution de la consommation d’énergie est, dites-vous, un non-sujet pour la plupart des économistes. D’autres travaux analogues aux vôtres (ceux de Robert Ayres, notamment) aboutissent également à la conclusion que le rôle de l’énergie dans l’économie est totalement sous-estimé. Où en est la prise en compte de votre type d’approche dans la recherche économique et dans la pensée économique en général ? Obtenez-vous un écho auprès de vos confrères, ou bien prêchez-vous dans le désert ?
La communauté des économistes universitaires n’est nullement homogène. Certains continuent de réciter le catéchisme des manuels, dont nous avons pourtant bien des raisons de penser qu’il contient de nombreuses contre-vérités majeures, lesquelles ne sont pas étrangères à l’incapacité d’une partie de la profession à anticiper une crise monumentale comme celle des subprimes, ou encore à imaginer d’autres solutions à la crise européenne que l’approfondissement des programmes de rigueur budgétaire qui, pourtant, nous condamnent à la déflation. Mais d’autres économistes font un travail remarquable : vous avez cité à juste titre Robert Ayres, il y a aussi des personnes comme Michael Kumhof au FMI [son interview sur ‘Oil Man’], James Hamilton [présentation sur ‘Oil Man’], David Stern, Tim Jackson, Steve Keen, Alain Grandjean, Jean-Charles Hourcade, Christian de Perthuis,… Je suis convaincu qu’au fur et à mesure que la société prendra conscience du rôle vital de l’énergie – ce processus de prise de conscience a déjà commencé –, la première catégorie d’économistes sera contrainte de changer ses dogmes. Le reste appartient à la sociologie du champ académique.

Les contraintes du pic pétrolier et du changement climatique promettent de dessiner un avenir dans lequel la machine économique aura de moins en moins d’énergie à sa disposition pour fonctionner. Ces deux contraintes impliquent-elles selon vous la fin prochaine de l’économie de croissance ?
Oui, très vraisemblablement. Sans transition énergétique (c’est-à-dire, sans réorientation volontariste de nos forces productives et de nos modes de consommation vers une économie moins dépendante des énergies fossiles), nous ne pourrons tout simplement plus retrouver la moindre croissance durable. Même si certains prétendent aller la chercher avec les dents. Les travaux que j’ai conduits avec Antonin Pottier suggèrent que des économies comme les nôtres ne peuvent connaître, au fond, que trois régimes de moyen terme : une croissance significative accompagnée d’une forte inflation (les trente glorieuses), la déflation (Le Japon depuis 20 ans, l’Europe et les Etats-Unis durant l’entre-deux-guerres), ou bien une croissance molle accompagnée de bulles spéculatives à répétition sur les marchés financiers. L’Europe de l’Ouest est à l’évidence dans le troisième régime, vers lequel nous avons bifurqué au cours des années 1980, à la faveur de la dérégulation financière. La question qui nous est posée aujourd’hui est de savoir si nous voulons poursuivre cette expérience, au prix du creusement des inégalités inouï que nous connaissons et de la destruction à terme du secteur industriel européen par la sphère financière. Ou nous pouvons nous laisser glisser paresseusement dans la déflation (le plus dangereux) comme c’est déjà le cas pour une bonne partie du sud de l’Europe. Ou bien encore, nous pouvons tenter de renouer avec la prospérité. Cette dernière ne coïncide pas avec la croissance du PIB. Comme vous le savez, le PIB est, à plein d’égards, un très mauvais indicateur. Il est temps d’en changer. Le rapport Sen-Stiglitz-Fitoussi ou, mieux encore, les travaux de Jean Gadrey et de Florence Jany-Catrice indiquent des pistes très prometteuses permettant d’aller dans ce sens. Autrement dit, faire croître le PIB n’a guère d’importance. D’où l’inanité des débats sur la croissance verte, qui s’interrogent sur le fait de savoir si la transition est compatible avec la croissance du PIB. La bonne question, c’est : comment opérer la transition de manière à assurer du travail pour le plus grand nombre, et un style de vie à la fois démocratique et prospère ?

L’anthropologue américain Joseph Tainter affirme qu’il existe une « spirale énergie-complexité » : « Vous ne pouvez avoir de complexité sans énergie, et si vous avez de l’énergie, vous allez avoir de la complexité », dit-il.
Que vous inspire cette assertion ?
Le parallèle que Tainter propose entre la dépendance de l’empire romain à l’égard de l’énergie pillée chez les sociétés conquises, et notre propre dépendance énergétique me paraît très pertinent. Le colonialisme a constitué – n’en déplaise à certains historiens, tels que Jacques Marseille – une grande opération de captation d’un certain nombre de ressources énergétiques majeures, de la part d’un continent (l’Europe) qui manque cruellement de ressources énergétiques fossiles sur son propre sol. Que notre continent soit plus ou moins condamné au déclin s’il ne réalise pas la transition énergétique, cela également me paraît assez évident. En revanche, je suis moins Tainter sur sa thèse concernant le lien intangible entre la complexité d’une société et son usage de l’énergie. Cette notion de complexité ne risque-t-elle pas de justifier la démission du politique, si elle est comprise comme impliquant que, décidément, les choses sont beaucoup trop complexes pour qu’un gouvernement puisse prétendre décider quoi que ce soit ? Il est vrai, par ailleurs, que la déréglementation financière a provoqué un brouillard d’informations contradictoires (les prix de marchés financiers) qui sèment une énorme confusion sur les tendances économiques lourdes, et paralysent aussi bien les investissements de long terme que la décision politique. En ce sens-là, l’expérience de la déréglementation nous a plongés dans un monde “complexe”, au sens de confus. Mais ce n’est nullement irréversible, et c’est une raison supplémentaire pour ne pas faire dépendre notre prospérité des marchés financiers. Si l’on suit Tainter, nous serions condamnés, dans la mesure où notre société aurait atteint son “pic de complexité”, au-delà duquel les gains de productivité de la complexité deviendraient négligeables ? Je peux me tromper, mais je suis convaincu, pour ma part, que seules deux régions au monde peuvent lancer la transition énergétique en tant que vaste projet économique et politique : l’Europe et le Japon. En effet, il faut, pour cela, d’excellents ingénieurs et une population à la fois riche et très éduquée. Si l’Europe devient leader dans la transition énergétique et, plus globalement, écologique, alors elle pourra, avec son propre retour d’expérience, exporter auprès du reste du monde son savoir-faire. Sinon, elle sera condamnée à devoir faire la guerre, comme l’empire romain, pour capter l’énergie des autres, ce qu’elle n’a plus guère les moyens de faire. La transition est devant nous : elle est le secret de la prospérité future de l’Europe si, du moins, notre continent se donne les moyens de la mettre en oeuvre.




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