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Juillet 2020, l’un des plus chauds de l’histoire

Juillet 2020, l’un des plus chauds de l’histoire

 

Les trois mois de juillet les plus chauds de l’histoire ont eu lieu au cours des cinq dernières années, juillet 2020 fait partie.

“Ce n’est pas qu’une histoire d’été”, a commenté Freja Vamborg, scientifique et membre du Service Copernicus concernant le changement climatique (C3S) de l’Union européenne.

“C’est à l’échelle mondiale et tous les mois se réchauffent”, a-t-elle ajouté.

Selon ces données, les mois de juillet 2016, 2019 et 2020 sont les plus chauds depuis le début du recensement des températures au milieu du XIXe siècle.

Le mois dernier, le Nouveau-Mexique et le Texas aux Etats-Unis ont enregistré un pic de chaleur. A Bahreïn, le mois de juillet a été le plus chaud depuis 1902.

Dans l’Arctique, qui se réchauffe deux fois plus vite que l’ensemble de la planète depuis plusieurs décennies, la superficie de la banquise est tombée en juillet à son plus bas niveau depuis les premiers relevés par satellite il y a quarante ans.

Climat – Les étés seront de plus en plus chauds (Robert Vautard, climatologue)

Climat – Les étés seront de plus en plus chauds (Robert Vautard, climatologue)

 

C’est lavis de  Robert Vautard, climatologue au CNRS et directeur de recherche au Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) interrogé par franceinfo,

 

Par ailleurs, des scientifiques de Météo France ont présenté les scénarios de changement climatique en France jusqu’en 2100 dans un rapport intitulé Le climat de la France au 21e siècle. Pour la première fois, ces projections sont aussi effectuées pour les Outre-mer, comme le souligne Météo France.  En métropole dans un horizon proche entre 2021 et 2050, les chercheurs projettent une hausse des températures moyennes entre 0,6 et 1,3 °C, une augmentation du nombre de jours de vagues de chaleur en été (surtout dans le quart Sud-Est) ainsi qu’une diminution du nombre de jours anormalement froids en hiver sur l’ensemble de la France.

Puis, d’ici la fin du siècle entre 2071 et 2100, les tendances s’accentueraient encore. Les scientifiques observent une forte hausse des températures moyennes pouvant atteindre de 2,6 °C à 5,3°C en été, des vagues de chaleur pouvant dépasser 20 jours dans le Sud-Est mais aussi la poursuite de la diminution des extrêmes froids Les scénarios sont en effet alarmants : des épisodes de sécheresse plus nombreux sont à prévoir ainsi qu’un renforcement des précipitations extrêmes sur une large partie du territoire.

 

interview de Robert Vautard, climatologue au CNRS

 

Franceinfo : Peut-on imputer les vagues de chaleur actuelles au changement climatique ?

 

Robert Vautard : D’une manière générale, oui. Il n’y a plus de doutes là-dessus. On est capable de démontrer scientifiquement que les vagues de chaleur sont une conséquence directe du réchauffement climatique, contrairement aux cyclones ou aux fortes pluies, pour lesquels il est encore difficile d’établir un lien de causalité.

On sait notamment que les gaz à effet de serre et les activités humaines augmentent directement la fréquence des vagues de chaleur.

Pourquoi ?

On ne pourra pas revenir à un climat normal, même en diminuant nos émissions de CO2. On pourra les contenir et en limiter la progression mais les températures dépendent des gaz à effet de serre qui se trouvent déjà dans l’atmosphère et faire redescendre les niveaux de CO2, c’est extrêmement difficile. Contrairement à la pollution atmosphérique, dont les particules retombent assez vite, ces émissions de gaz à effet de serre ne retombent pas, ou extrêmement lentement. On a tendance à l’oublier.

Que peut-on faire en priorité pour lutter contre ce réchauffement climatique ?

À notre niveau, il faut d’abord que l’on ait une prise de conscience. Le changement climatique ne sera pas un problème dans vingt ou trente ans. C’est maintenant. On en subit même déjà les conséquences aujourd’hui puisque l’on doit déjà s’adapter, particulièrement en été avec ces vagues de chaleur. Cette prise de conscience peut paraître évidente mais force est de constater que, pour le gouvernement américain par exemple, ce n’est pas du tout une priorité. Malgré les bonnes intentions affichées des politiques, le climat reste quand même au second plan par rapport à des sujets qu’ils jugent plus immédiats.

La deuxième étape, c’est l’action. Il faut agir un peu à tous les niveaux. Cela commence par recourir au maximum à une énergie zéro carbone, qui n’émet pas de CO2 : ce n’est pas difficile et c’est déjà en cours. On est sur la bonne voie. Même si, aujourd’hui, le problème n’est pas tellement en France ou en Europe mais dans les pays émergents. Il ne faut pas les blâmer mais il faut plutôt réfléchir à les aider pour qu’ils se développent d’une façon différente de la nôtre. Ce n’est pas un défi uniquement pour eux : il nous concerne tous.

Dans les villes, la situation s’annonce particulièrement difficile…

Les villes ont un climat vraiment particulier, surtout en été. Le peu de présence de végétation notamment fait que l’énergie est piégée la journée dans la ville et a du mal à s’évacuer la nuit. Cela crée un îlot de chaleur urbain qui fait que les températures redescendent beaucoup moins vite la nuit, contrairement aux campagnes environnantes.

On est capable d’absorber des températures assez fortes la journée, à condition de se reposer après.

Jean Jouzel, climatologue et vice-président du Giec, affirmait que l’on pourrait même atteindre les 50 degrés dans l’est de la France, dans la deuxième partie du XXIe siècle. Vous confirmez ?

Bien sûr. Si le réchauffement climatique augmente de 3 ou 4 degrés, on a des scénarios dans lesquels les écarts à la normale d’aujourd’hui seront beaucoup plus importants. L’été 2003 en région parisienne était 3 degrés plus chaud que la normale.

 

Dans certaines de nos simulations climatiques, d’ici la fin du siècle, on aura des étés qui iront jusqu’à 10 degrés au-dessus de la normale. Est-on prêt à supporter ça ? Robert Vautard, climatologue sur franceinfo

 

Climat : un des mois les plus chauds depuis 100 ans

Climat : un des mois les plus chauds depuis 100 ans

Juillet 2018, le mois le plus chaud depuis 100 ans  (après cependant ceux de 2006 et 1983). Des températures en moyenne proches de 30 degrés. À Paris, on a eu plus de 29 voire 30 degrés en moyenne sur le mois de juillet, ce qui correspond à un mois de juillet moyen à Perpignan », détaille François Jobard, prévisionniste à Météo France. Deux raisons à cela, des conditions anticycloniques particulières qui maintiennent la chaleur, aussi une sécheresse inquiétante dans certaines régions qui n’ont enregistré que quelques millimètres d’eau depuis un mois au moins. Le venet aussi qui rend le sol plus aride dans certains cas. Plus fondamentalement sans doute,  le réchauffement général du climat qu’on constate en hiver comme en été. Dans plusieurs régions, il n’y a plus vraiment d’hiver, à peine quelques jours de gelée. La neige a disparu en plaine et même en basse montagne. La pollution généralisée porte uen responsabilité dans le réchauffement de la planète.

Des étés de plus en plus chauds (Jean Jouzel, climatologue)

Des étés de plus en plus chauds (Jean Jouzel, climatologue)

Le climatologue et ancien vice-président du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) Jean Jouzel, dresse dans le JDD un bilan bien sombre sur l’évolution du réchauffement climatique.

 

À quoi ressembleront nos étés demain ?
Ils seront plus chauds en moyenne. Pour vous donner une idée, en juin, juillet et août 2003, les températures étaient supérieures de 3 °C par rapport à un été de référence du XXe siècle. Si rien n’était fait pour lutter contre le réchauffement, cela pourrait devenir banal au-delà de 2050. Les étés caniculaires seraient encore plus chauds, jusqu’à 6 à 8 °C de plus, avec deux problèmes majeurs. D’une part la mortalité : même si on est mieux préparés, la canicule de 2003 avait causé 15.000 décès en France et 70.000 morts en Europe ; d’autre part, les feux de forêt, avec 73.000 hectares brûlés ce même été. Et dans certaines mégapoles comme Paris, des îlots de chaleur urbains se formeront, où le mercure grimpera encore de 6 à 8 °C supplémentaires, entraînant des problèmes de santé accentués en cas de pollution.

Certaines régions en France connaîtraient des journées à plus de 50 °C, selon une récente étude.
C’est un travail très utile car il rend le phénomène concret. Si on n’agit pas, la planète se réchauffera en moyenne de 4 à 5 °C d’ici à la fin du siècle par rapport à l’ère préindustrielle. La limite à ne pas ­dépasser, c’est + 2 °C. Si on respecte les accords de Paris, on sera entre les deux, entre + 3 et + 3,5 °C. Or il est difficile de faire comprendre qu’un degré de plus nous fera basculer dans un autre climat. Ces chercheurs ont compilé les données de températures journalières et travaillé avec un modèle de Météo France d’une résolution de 12,5 kilomètres. Si rien n’est fait, vers 2075, les maximales journalières seront certaines années plus chaudes de 12 à 13 °C dans l’est de la France, de 8 °C en Bretagne. Et cela sur des températures dépassant déjà 40 °C! On atteindrait ainsi 50 à 55 °C dans certaines régions.

Une canicule en juin, des incendies massifs en juillet… La France est-elle déjà en surchauffe?
L’été est plus chaud et plus précoce. Au 15 juin, on a désormais un climat de début juillet 1960. La saison s’étend, avec des canicules plus précoces en juin ou plus tardives en septembre. Le lien avec le réchauffement climatique est certain, et celui-ci est dû depuis 1950 avec une quasi-certitude aux activités humaines. Ce contexte fait craindre que les sécheresses actuelles du ­Bassin méditerranéen (40 °C et plus de 60 morts dans un incendie au Portugal, pénurie d’eau en Italie, le sud de la France en proie aux flammes) soient de plus en plus fréquentes et aiguës. Les incendies augmentent partout et les ingrédients sont connus : la température, la sécheresse, le vent, mais aussi l’urbanisation et la négligence humaine. À l’horizon 2050, ce risque de feux apparaîtra dans le centre et l’ouest de la France, jusqu’ici épargnés.

Boira-t‑on bientôt du vin de Bordeaux cultivé en Finlande?
Il y a dix ans, lorsqu’on disait qu’il faudrait planter des vignes en ­Angleterre car les vins deviendraient trop alcoolisés avec la chaleur, les gens nous prenaient pour des fous. Aujourd’hui, les maisons champenoises investissent toutes dans le sud de l’Angleterre. Cette préoccupation de l’adaptation au climat est devenue quotidienne pour la profession. Pour les vignerons et les producteurs de fruits, la succession d’hivers doux suivis de gelées tardives est aussi très néfaste.

Votre frère, qui a repris la ferme familiale en Bretagne, ne croit pas au réchauffement!
Exact, comme beaucoup de paysans qui reprennent le credo de Claude Allègre, il pense que nous sommes dans un cycle comme il y en a déjà eu par le passé. En ­revanche, j’ai beaucoup d’espoir en voyant mes sept petits-enfants. Récemment, j’ai entendu deux de mes ­petites-filles de 9 et 10 ans parler trente minutes d’éoliennes et d’énergies renouvelables…

Il ne reste que trois ans pour agir, comme le rappelle un groupe de scientifiques, politiques et économistes dans la revue Nature.
Oui, nous n’avons que trois ans devant nous. C’était écrit dès 2007 dans le rapport du Giec. On l’a réécrit depuis, ça reste vrai! Pour espérer rester en deçà de 2 °C de réchauffement par rapport à l’ère préindustrielle, il faudrait que le pic d’émissions de gaz à effet de serre survienne au plus tard en 2020. L’accord de Paris a transformé ce diagnostic des scientifiques en un objectif d’atteindre ce pic « le plus tôt possible », sans date. Nous écrivions aussi qu’il fallait diminuer de 40 à 70 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 et atteindre la neutralité carbone d’ici à 2100. C’est un défi. Le dialogue entre scientifiques et politiques fonctionne au niveau international, mais les engagements actuels ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. L’urgence est là.

Le discours des scientifiques n’est-il pas trop timide?
On n’a peut-être pas été bons, mais on n’arrête pas de sonner l’alarme ! Tout a été dit dans le premier rapport du Giec en 1990. Les conséquences du réchauffement étaient perçues comme virtuelles. C’était « cause toujours, on verra après ». Malheureusement, les faits sont là. Avec la fonte des glaces, le niveau de l’eau s’est élevé de 20 cm depuis 1900. Il augmente de 3 mm par an, et cela risque de s’accélérer. La Bretagne s’est réchauffée de 1,5 °C depuis le milieu du XXe siècle, les gens de ma génération l’ont vu. Tout ce qu’on prédisait se réalise, et on n’exagère pas ! Hélas, la prise de conscience ne se fait que par les extrêmes. La canicule de 2003 qui a touché toute l’Europe de l’Ouest a eu un effet pédagogique, de même que le rapport de l’économiste Nicholas Stern selon lequel ne rien faire coûterait plus cher que d’agir. Ce message a été un choc pour les entreprises.

Que dire aujourd’hui pour alerter les consciences?
J’ai longtemps dit qu’en Europe de l’Ouest le réchauffement était perceptible mais pas encore dangereux. Je change mon discours : il est déjà dangereux. Ces catastrophes ont des coûts humains, financiers, en pertes de biens. Je le répète, on n’est plus dans le futur : ce sont les enfants d’aujourd’hui, ceux des cours d’école, qui pourraient subir ces étés à 50 °C. On n’échappera pas d’ici à 2100 à une hausse de 40 cm à 1 m du niveau de la mer ; peut-être pas loin de 2 m, selon des études récentes. L’île de Sein ou l’île de Ré seraient coupées en deux. Et si le réchauffement se maintient sur plusieurs siècles, le Groenland pourrait finir par fondre, provoquant une élévation de 7 mètres.

Et cela ne vous rend pas catastrophiste?
Pas besoin de faire de catastrophisme : la situation est catastrophique. Alarmiste, je le suis si on ne fait rien. Le réchauffement est inéluctable, mais en le limitant à 2 °C nous pourrons nous y adapter pour l’essentiel. Du moins dans les pays riches. Car la principale conséquence du réchauffement, c’est l’accroissement des inégalités. Il diminue les endroits où il fait bon vivre sur la planète. Partout, les premières victimes sont les moins fortunées : cela a été vrai en France lors de la canicule de 2003 et pour ­Xynthia : les maisons les plus touchées par la tempête étaient celles construites sur des terrains pas chers. C’est vrai ailleurs. Le réchauffement a des effets sur l’instabilité et le risque de conflits au Moyen-Orient. Cet été, on a relevé 54 °C au Pakistan et en Iran. Au Moyen-Orient et de la Corne de l’Afrique jusqu’à la Libye, le mercure va grimper de 5 à 6 °C… À ces températures, il n’y a plus d’activité extérieure possible. On compte déjà 65 millions de déplacés sur la planète. Si le Sahel et la Corne de l’Afrique deviennent plus secs, les réfugiés seront encore plus nombreux.

 




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