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Le « juste soin »: Un nouveau concept ?

 

Le « juste soin »: Un nouveau concept ?

C’est un paradoxe et pas des moindres, mis en lumière par les revendications des professionnels, les discours politiques tenus durant la campagne présidentielle, et l’attention des médias : fermeture de lits, fermetures des urgences, postes vacants de médecins et de soignants : tout le débat se concentre sur l’hôpital, comme un retour à contre-temps à « l’hospitalo-centrisme » que l’on croyait disparu depuis des années. Par Christelle Garier-Reboul, Présidente de B. Braun en France. ( dans la Tribune) 
Une contribution qui milite pour une certaine rationalisation des soins entre public et privé. Qui constate que 20 à 30 % des examens ne sont pas toujours nécessaires. Le problème est qu’ils sont autant prescrits par le public que par le privé. Une contribution au parfum corporatiste qui réclame aussi un relèvement du prix des médicaments . NDLR

Du fait de son histoire, notre système de santé, de son organisation et de son financement, a été bâti autour de l’hôpital et se concentre sur le soin aux personnes malades. En dépit de ses vertus, ce système, lui-même malade depuis longtemps, est aujourd’hui inadapté aux défis du temps et peu préparé pour l’avenir.

D’un côté, les besoins de santé évoluent et l’ensemble des acteurs de la santé s’accorde à dire que l’enjeu est au moins autant le soin prodigué en tant qu’acte curatif, que la gestion préventive de la santé, qui prend une place croissante comme réponse à nos enjeux sanitaires, comme en témoigne le nouvel intitulé du ministère de la Santé et de la Prévention. Dans le même temps, les pratiques et les technologies médicales, ainsi que le développement du numérique ouvrent les champs des possibles, notamment l’accélération de la prise en charge ambulatoire pour répondre à la recherche d’efficience des établissements et de la pertinence des soins des patients.

Or cette pertinence des soins, qui doit s’ériger en priorité des futures politiques de santé publique, n’est aujourd’hui ni une réalité, ni une priorité. Pilier du plan « Ma Santé 2022 », cet axe de travail a été perdu pendant la crise sanitaire alors même que 20 à 30% des actes réalisés n’auraient pas, d’un point de vue médical, une grande pertinence.

Si l’on met en regard le fait que les décideurs publics ont construit depuis 20 ans une stratégie de régulation des prix par le volume, à la fois pour les offreurs de soins (hôpitaux et cliniques via la T2A) et pour leurs fournisseurs – industrie du médicament et dispositif médical le constat est imparable : il faut changer !

Aujourd’hui, le système n’est vertueux ni pour l’hôpital, qui est incité à « capter » les patients et à optimiser la cotation T2A, son mode majeur de rémunération, ni pour le médecin de ville, la rémunération à l’acte demeurant majoritaire. Un système qui finalement met en concurrence les acteurs plutôt qu’il ne les incite à collaborer.

Pourtant, ce système obsolète doit être réinventé en plaçant au cœur des enjeux économiques, sanitaires et du financement le critère du « juste soin ». D’un point de vue médical, c’est celui qui est accepté et utile pour le patient. D’un point de vue économique, c’est celui qui engage de manière raisonnée les comptes publics et les complémentaires santé sans alourdir le reste à charge des patients. D’un point de vue éthique et professionnel, c’est celui qui rémunère de manière juste les professionnels et les industriels sans qui la prise en charge de qualité serait impossible.

Pour répondre au développement de ce « juste soin », et rompre avec la logique de pré carré qui prévaut jusqu’à aujourd’hui et nuit à l’efficience de notre système, nous appelons de nos vœux à la création d’une communauté d’intérêts en santé. Cette communauté est rendue possible du fait des aspirations nouvelles des professionnels et des solutions technologiques, notamment numériques qui donnent à voir de nouvelles pratiques collaboratives. Néanmoins, soyons clairs : on ne peut pas coopérer si le développement d’activité de l’un se fait au détriment des autres acteurs.

Nous sommes convaincus que travailler à l’amélioration de la pertinence des soins, c’est dégager une marge de manœuvre supplémentaire pour financer un système de santé plus juste, qui redonne du sens au travail de chacun. Travailler à l’amélioration de la pertinence des soins, c’est aussi proposer une démarche où le patient est forcément gagnant, en matière d’accès aux soins et en qualité de prise en charge. Enfin, il est aussi question de mettre en place une démarche dans laquelle les produits de santé sont rémunérés à leur juste prix, en intégrant la valeur de leur apport, qu’il soit technologique, médical, socio-économique ou environnemental.

Face à une crise sans précédent du secteur de la santé et au moment où s’installe la nouvelle Assemblée nationale et où le Gouvernement s’apprête à lancer une grande concertation en santé, nous formulons le vœu que soit enfin questionnées la pérennité et la performance du financement actuel du soin et de la santé. Collectivement, nous pouvons agir en faveur d’un système vertueux qui place le « juste soin » au cœur des décisions et des investissements.

C’est tout le système de financement de la santé qu’il faut réformer.

Les industriels que nous sommes sont prêts à ces bouleversements. Nous avons d’ailleurs commencé à nous transformer pour mieux répondre à ce nouveau cadre de pensée et d’action. Encore faut-il que les décideurs publics s’en saisissent.

Les causes de l’inflation

 

Les causes de l’inflation

Il existe deux bibles traitant du miracle. La bible des chrétiens et celle de Hume. La 1re bible nous parle d’un gars qui marcha sur l’eau. La 2e bible nous dit que c’est probablement un bobard. Quant à Grigori Perelman, le serial génie russe, il expliquera que tout jeune il cherchait à calculer la vitesse à laquelle Jésus devait marcher sur l’eau pour ne pas tomber dedans. Une manière de réconcilier le mythe avec les lois de la nature. Par Karl Eychenne, stratégiste et économiste (Dans la Tribune)

 

Un article intéressant sur les facteurs explicatifs de l’inflation mais qui n’insiste pas sur l’extrême générosité des politiques accommodantes des banques centrales qui ont inondé le monde d’argent presque gratuit. Avec aujourd’hui une correction que payent  ménages et épargnantsNDLR

Et l’inflation alors ? Nous avons passé près de 40 ans d’inflation entre 1 et 2%, et soudainement nous voilà à 4%, puis 5%, et aujourd’hui 8% voire 10% pour certains. Avons-nous affaire à un miracle ? Simple hasard ou implacable nécessité ? David Hume, l’un des pères fondateurs de l’empirisme (version sceptique) adoptera une approche très minimaliste permettant de trancher entre plusieurs interprétations d’un fait clivant :

L’inflation est-elle un miracle ? Une première réponse retient le divin comme cause nécessaire et suffisante à l’inflation, puisque les lois de la nature seraient inaptes à expliquer le fait. Si l’on retient cette définition exigeante du miracle, l’inflation ne peut pas être qualifiée de miracle. En effet, l’inflation n’a pas eu recours au divin ou au surnaturel pour jaillir de nulle part. L’inflation a seulement augmenté parce qu’il s’est produit un déséquilibre abyssal entre d’un côté l’offre de biens confinée (Crise Covid) puis confisquée (conflit ukrainien) et rationnée (crise climatique), et de l’autre côté la demande maintenue à flot par les autorités (quoi qu’il en coûte).

Nul recours au divin dans cette histoire, juste de la mécanique : quand l’offre est inférieure à la demande, alors les prix montent ; quand l’offre est vraiment inférieure à la demande, alors les prix s’envolent. L’inflation n’est pas un miracle, juste un problème d’offre – demande, surtout d’offre d’ailleurs et si peu de demandes. À ce sujet, il faudrait cesser de nous bassiner avec les chèques Biden. Ils ont probablement mis un peu de beurre dans les épinards des Américains, mais pas de quoi transcender son Homme. Davantage de pouvoir d’achat, oui ; mais pas de super – pouvoir d’achat. Les chèques Biden sont un détail dans l’histoire de l’inflation américaine. D’une manière générale, les politiques de soutien des différents pays expliquent à la marge les différences d’inflation entre ces mêmes pays. Car le gros de l’accélération de l’inflation s’explique surtout et partout par la pénurie de l’offre. Là encore, le miracle n’est pas convoqué.

Peut-on dire quand même que l’inflation est une forme de miracle ? Il s’agirait d’un miracle moins clinquant, moins exigeant que celui invoquant le divin. Le miracle dont il serait question ici invoquerait seulement la plausibilité du fait, sa vraisemblance. Dans notre cas, l’inflation était improbable, mais elle s’est réalisée, donc l’inflation serait une forme de miracle. Effectivement, l’inflation était improbable, juste de la poisse en vérité, la résultante d’une mauvaise série comme on en a jamais connu. Pensez donc : quelle était la probabilité pour qu’une crise sanitaire mondiale oblige la planète à se mettre en apnée pendant près de 2 ans, et plus encore si l’on pense à la Chine et sa politique de tolérance zéro ? Quelle était la probabilité pour qu’une crise géopolitique majeure vienne de nouveau frapper aux portes de l’Occident, et plus encore si l’on pense à la Chine et ses vues sur Taïwan ? Certes, la probabilité pour qu’une crise climatique génère des catastrophes ici et là semblait déjà plus élevée.

Bref, l’inflation n’était pas impossible, mais largement improbable puisqu’elle supposait la réalisation quasi – conjointe des 3 catastrophes précitées. Rien ne prédisposait le monde à dévier de sa trajectoire pépère, touchant les dividendes de la paix et du progrès, le meilleur restait à venir. Sauf qu’il y eut déviation(s) : la déviation sanitaire, la déviation ukrainienne, et la déviation climatique. Ce type de déviation imprévisible a un autre nom popularisé par Lucrèce dans son livre sur « la nature des choses » (livre II) : le clinamen. Lucrèce explique que le clinamen décrit la manière dont les atomes chutant en ligne droite sont amenés à se cogner de manière imprévisible, et briser ainsi leur trajectoire, exerçant une forme de « liberté arrachée au destin ». Il était pourtant inconcevable que cela fut, mais cela fut. En l’absence de clinamen, le monde aurait probablement continué son long fleuve tranquille, et l’inflation aurait continué de ramper entre 1 et 2 % des années durant probablement, rappelant du même coup une autre forme de miracle : comment l’inflation a-t-elle pu rester si faible, si longtemps, malgré tout l’argent injecté par les autorités dans le système ? Un mystère au moins aussi profond que celui dont est nimbée l’inflation sauvage aujourd’hui.

En conclusion de cet article qui se veut récréatif, l’inflation serait donc un miracle. Pas un miracle du même type que la bilocation de la vierge marie, mais un miracle du même type que celui qui gagne au loto deux fois successivement. Le souci avec l’invraisemblable c’est qu’il habite au même étage que l’illusion d’optique. Cette remarque n’est pas anodine pour nos Banquiers centraux qui voient l’inflation, mais ne la croient pas, comme s’ils doutaient d’une inflation trop élevée pour être honnête. Conséquence, on peut avoir l’impression que les Banquiers centraux montrent les dents, mais ne mordent pas vraiment.

Stade de France : un chaos aux causes multifactorielles

Stade de France : un chaos aux causes multifactorielles

 

Si les origines des troubles qui se sont produits avant le coup d’envoi de la finale de la Ligue des champions entre le Real Madrid et Liverpool sont multifactorielles, le gouvernement doit sortir de son déni pour préparer au mieux les JO 2024 estime un papier du Monde.

 

Il y a deux façons d’envisager les troubles qui se sont produits aux abords du Stade de France à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), samedi 28 mai, avant le coup d’envoi de la finale de la Ligue des champions entre le Real Madrid et Liverpool.

La première consiste à regarder la réalité en face et analyser froidement l’enchaînement des circonstances qui ont conduit à un engorgement des accès et à des heurts avec la police, poussant à retarder de trente-six minutes un événement retransmis en mondovision. Et puis, il y a celle qui consiste à chercher des excuses plus ou moins audibles pour mieux s’exonérer de ses propres responsabilités. Organisateurs de l’événement et responsables des forces de l’ordre chargées d’en assurer la sécurité ont malheureusement plutôt opté pour la seconde attitude.

Lundi, lors d’une conférence de presse à l’issue d’une réunion interministérielle censée tirer les leçons du chaos, le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, a pointé une « fraude massive, industrielle et organisée de faux billets », rejetant implicitement la responsabilité sur les « 30 000 à 40 000 supporteurs anglais [qui] se sont retrouvés au Stade de France, soit sans billet, soit avec des billets falsifiés ».

Avancé à chaud, dès la fin du match, par l’UEFA, l’instance dirigeante du football européen, et repris par le ministre de l’intérieur, cet argument paraît à tout le moins un peu court, et ne justifie certainement pas le traitement infligé aux fans de Liverpool, dont l’immense majorité s’est présentée dans le calme aux abords du stade. Les vidéos de familles avec enfants munies de billets se faisant repousser à l’aide de sprays lacrymogènes ont choqué à raison et donnent une piètre image du maintien de l’ordre en France.

Cette démonstration de force est d’autant plus critiquable qu’elle n’a pas empêché parallèlement le déploiement de groupes de petits délinquants, venus les uns pour resquiller, les autres pour détrousser des supporteurs à la sortie du stade. A ces manquements patents du dispositif de sécurité sont venus s’ajouter d’importants dysfonctionnements dans la gestion de l’affluence de la foule vers le stade. Toute la clarté doit être faite sur les responsabilités qui ont permis ces débordements.

Comme souvent dans ce genre de circonstances, les origines du désordre sont multifactorielles. La grève des agents de la ligne B du RER, qui a obligé à reporter le flux des milliers de supporteurs – essentiellement britanniques – sur la ligne D, qui n’est pas la voie privilégiée pour accéder au Stade de France, a certainement compliqué l’organisation. Mais, là encore, le manque d’anticipation est flagrant. Il n’est pas possible de faire venir et repartir plusieurs dizaines de milliers de personnes par les transports en commun sans un minimum de sécurité et de confort, qui ont fait défaut.

« Sans les décisions prises par la police et le préfet, il y aurait eu des morts », affirme aujourd’hui Gérald Darmanin. Invoquer le pire pour s’affranchir de ses propres défaillances n’est pas le meilleur moyen de tirer les leçons de ce fiasco. Le ministre de l’intérieur a martelé ces dernières semaines que la préparation de la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 allait constituer le fil rouge de son mandat.

Ce qui s’est passé samedi au Stade de France augure mal de cette feuille de route, surtout si le gouvernement s’obstine dans le déni. Il doit en sortir rapidement pour préparer dans les meilleures conditions la Coupe du monde de rugby de 2023. Quant à la cérémonie d’ouverture des JO, qui prévoit d’accueillir le long de la Seine près de huit fois plus de public qu’au Stade de France, ne serait-il pas raisonnable de réviser à la baisse les ambitions ?

Covid-19 : Des causes pas uniquement biologiques !

 

L’historien de la médecine Frédéric Vagneron analyse, dans un entretien au « Monde », les singularités de la pandémie actuelle, mais aussi ce qui la rapproche des épidémies passées.Il souligne en particulier le rôle de la mobilité mondiale et la vitesse d’évolution des sciences.

 

Maître de conférences en histoire de la médecine et de la santé à l’université de Strasbourg, Frédéric Vagneron s’est notamment intéressé à l’histoire de la grippe et à celle des relations entre santé humaine et santé animale. Ses travaux actuels portent sur l’histoire de l’Europe de la santé, la gestion des morts en temps de pandémie et le rôle des régulations internationales face au ralentissement de l’innovation sur les antibiotiques. Selon lui, la pandémie de Covid-19 marque un tournant par rapport aux précédentes épidémies, même si des parallèles existent avec le passé, sur le plan de la gestion ou du ressenti des populations.

interview

Comment la pandémie de Covid-19 se distingue-t-elle des grandes épidémies passées ?

Elle est unique, d’abord, par l’abondance des données sur la maladie. Nous avons accès à une connaissance presque instantanée de son évolution planétaire, par exemple avec le suivi des variants du virus SARS-CoV-2. En cela, cette pandémie se distingue de la grippe espagnole de 1918-1919, dont on a beaucoup convoqué la mémoire depuis deux ans, pour laquelle la connaissance restait lacunaire sur des pans entiers de territoires. A ce savoir scientifique s’ajoute désormais l’information – ou la désinformation –, qui circule avec une ampleur inédite sur les réseaux sociaux et dans les médias.

Autre singularité : cette pandémie se développe dans une mondialisation sans précédent des échanges, qui offre au virus un espace et une vitesse de prolifération uniques. En écho à cette diffusion ultrarapide, des solutions, notamment vaccinales, ont été mises en place avec une rapidité sans précédent, alors même qu’on ignorait tout de cette maladie en décembre 2019.

L’apparition d’une maladie nouvelle est-elle un phénomène rare ?

Ce qui me semble « rare », c’est que les savoirs sur cette nouvelle maladie se sont construits dans un temps extrêmement court. D’abord à partir de connaissances sur le virus, sur sa carte d’identité génétique et sur sa propagation. Ensuite seulement, sans expérience préalable auprès de patients, les médecins ont dressé le tableau clinique de cette maladie, observée à travers les atteintes très variées dans les corps. C’est une chronologie inédite. Souvent, au cours de l’histoire, on faisait face à des épidémies de maladies connues de longue date (peste, rage, variole…), mais le germe en cause était identifié bien plus tard. Ici, le processus a été inversé. Au point que la maladie a été nommée après l’identification du virus. Même pour le VIH-sida, pandémie pas si ancienne, cela n’a pas été le cas : il a fallu plusieurs années avant de déterminer la cause virale de la maladie, en 1983, après les premiers cas épars constatés dès juin 1981. Imaginons l’histoire de cette pandémie si les scientifiques n’avaient pas identifié le virus avant 2022 ! Elle aurait été tout autre.

 

Séparatisme : s’attaquer surtout aux causes

Séparatisme : s’attaquer surtout aux causes

 

 

Spécialiste du monde arabo-musulman, le politiste retrace, dans une tribune au « Monde », le processus menant de l’irruption de la question du voile en milieu scolaire, en 1989, aux « fatwas des smartphones » d’aujourd’hui et à l’assassinat du professeur Samuel Paty. La loi en préparation, souligne-t-il, doit traiter le problème à la racine.

 

TRIBUNE

 

Il y a trente et un ans, à l’automne 1989, éclatait la première « affaire » islamiste dans l’école de la République. Trois jeunes filles s’étaient présentées voilées en cours au collège Gabriel-Havez de Creil, dans l’Oise. L’organisation des Frères musulmans avait envoyé ses représentants pour négocier avec le principal, qui les avait éconduits lorsqu’il se rendit compte qu’ils l’enregistraient à son insu. Elle venait de marquer symboliquement une importante rupture, en cette année où l’affaire Rushdie avait déchaîné les passions outre-Manche et où Khomeyni, en prononçant sa fatwa du 14 février condamnant à mort Salman Rushdie pour blasphème, avait, du même coup de force, inclus l’Europe – et les autres territoires de la planète où vivaient des musulmans – dans le « domaine de l’islam », c’est-à-dire toute juridiction où s’applique une fatwa.

Les Frères musulmans avaient, dans le même esprit, modifié l’intitulé de leur organisation : elle devint l’Union des organisations islamiques de France, et non plus en France. Pour eux, les injonctions de la loi islamique, ou char’ia, devaient désormais pouvoir s’appliquer, et les jeunes filles qui le souhaitaient porter le hidjab à l’école. Ne serait-ce qu’au nom de la liberté d’expression… garantie par les lois de la République. Cette capacité à jouer sur deux registres juridiques déstabilisa les institutions et le réseau associatif – du ministre de l’éducation nationale Lionel Jospin à SOS Racisme, en passant par le Conseil d’Etat –, ouvrant une guérilla judiciaire pendant quinze ans, jusqu’à la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux à l’école, issue des travaux de la commission Stasi.

Trois décennies plus tard, la décapitation du professeur d’histoire, géographie et instruction morale et civique Samuel Paty, qui avait fait réfléchir ses élèves du collège du Bois-d’Aulne, à Conflans-Sainte-Honorine (également en banlieue parisienne), sur la notion de blasphème à partir de caricatures de Charlie Hebdo, s’inscrit dans le prolongement de ce processus.

Le père d’une élève – lui-même très actif dans l’« islamosphère » –, qui avait lancé une alerte rapidement devenue virale en se basant sur une description partiellement controuvée des faits et désigné l’enseignant à la vindicte, fut, comme ses prédécesseurs de 1989, reçu par la principale, accompagné par un agitateur sexagénaire, islamiste notoire issu de la mouvance des Frères musulmans radicalisés, ayant créé le Collectif Cheikh Yassine (du nom du fondateur du Hamas), un temps compagnon de route de Dieudonné, fiché « S » et inscrit au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste. Que celui-ci se soit targué, dans une interview filmée, d’avoir « exigé la suspension immédiate de ce voyou, car ce n’est pas un enseignant » auprès de la principale du collège en dit long sur l’évolution, en trente ans, du rapport de force autour des enjeux éducatifs en France par rapport à la mouvance islamiste.

Economie-Industrie : les causes du désastre

Economie-Industrie : les causes du désastre

 

Sébastien Laye, entrepreneur dans le domaine des services financiers explique les causes du déclin industriel de la France.(chronique dans le Figaro)

 

«La politique la plus ruineuse, la plus coûteuse, c’est celle d’être petit». Nous avons tous en mémoire cet adage gaullien alors que l’annonce de licenciements sur l’ancien site d’Alstom devenu General Electric – à la faveur d’un rachat controversé de la branche énergie par un géant américain lui-même en difficulté désormais – s’ajoute à la litanie de mauvaises nouvelles industrielles ce printemps: Ascoval avec un repreneur British Steel lui-même en difficulté, Whirlpool….

Car pour comprendre le désastre industriel français, il convient de revenir sur les erreurs stratégiques des pouvoirs publics français et de nos grands patrons, eux-mêmes issus du moule techno-politique via les grands corps. Nous devons à Serge Tchuruk dans les années 90, le patron de ce qui était alors Alcatel (depuis démantelé en de nombreuses entités), d’avoir théorisé chez nous le concept d’industrie sans usines, sans actifs, «asset-light»: une hérésie stratégique vite abandonnée par les Américains mais qui a perduré en France jusque dans les années 2000. Or notre monde économique actuel, loin d’avoir vu la disparition de la vieille industrie au profit d’une économie purement tertiaire et de services, est beaucoup plus complexe. En réalité nos économies sont devenues hyper industrielles, avec le logiciel ou les services à valeur ajoutée qui sont venus transformer l’usine d’antan. Les smart factories embarquent des compétences en informatique, robotique et automatisation en brouillant la frontière avec l’univers de la technologie et des GAFA. Ainsi, d’une certaine manière, l’industrie n’existe peut-être plus en tant que secteur autonome mais paradoxalement elle est omniprésente: même les acteurs des nouvelles technologies doivent déployer des plateformes industrielles et logistiques colossales, que ce soit Amazon ou Google avec ses data centers.

 

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, la France et victime d’un vrai décrochage industriel.

Les États-Unis ont compris depuis une dizaine d’années qu’un modèle économique uniquement orienté vers la consommation domestique est voué à l’échec: ce mouvement s’est accéléré sous le mandat Trump, qui a vu la création de 400 000 emplois manufacturiers. Par un subtil équilibre de baisses massives d’impôts (alors que les impôts sur la production obèrent toute rentabilité de nos usines.) et de menaces, Trump a obtenu de Softbank/Sprint, de GoPro ou encore d’Apple une relocalisation aux États-Unis de leur base manufacturière. Pfizer, Comcast, Boeing, notamment en rapatriant les profits offshores, investissent à nouveau dans leurs usines américaines. Les Américains ont supprimé en deux ans la moitié du code des réglementations pour créer de nouvelles usines ; les Chinois, avec un modèle moins libéral mais un État visionnaire, développent non seulement leur base industrielle mais sont aussi en train de réindustrialiser toute l’Asie par leur projet de nouvelle route de la soie, qui se traduit par de colossales infrastructures de transport.

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, comme en attestent la réindustrialisation de l’Amérique de Donald Trump ou les grandes réalisations chinoises, la France est victime d’un vrai décrochage industriel. Or développer la seule économie de services (petits boulots en chaîne) ou des start-up (peu intense en capital humain) ne permettra pas à la France de juguler le fléau du chômage et de la croissance molle. On ne peut qu’être sidéré par le manque de volontarisme des pouvoirs publics français en la matière, alors que notre génie industriel était la marque de fabrique de la France encore dans les années 1990 (il suffit de noter le rayonnement des produits de Schneider, Airbus, Alstom, Dassault, à cette époque) et que le complexe militaire, comme aux États-Unis, fournissait un excellent levier public pour le développement de l’industrie privée.

En 2018, la part de l’industrie dans la richesse nationale en France n’était plus que de 11 %, contre 17 % à la fin des années 1990, ce qui est le niveau actuel de la plupart des autres économies développées. À l’origine du déclin de l’industrie, on peut noter la détérioration générale de la compétitivité des entreprises françaises. Face à la concurrence mondiale, l’industrie française ne fait plus le poids dans certains secteurs. D’autre part, en quinze ans, alors que les ventes de biens ont augmenté de plus de 50 % sur nos territoires, notre production manufacturière… est restée au même niveau. Sans compter qu’au-delà des ventes de biens, les services à haute valeur ajoutée ont accru leur part dans notre PIB, et à ce niveau la domination des GAFA et autres entreprises technologiques étrangères a signifié d’irrémédiables pertes de marché: elles sont visibles dans les chiffres du déficit du commerce international, qui se creuse depuis notre plus haut point en 2004 ; non seulement nos entreprises ne produisent plus ce que les Français consomment, mais elles ne disposent pas des compétences et technologies clefs dont nos concitoyens ont besoin. Enfin, l’absence de fonds de pension entrave le développement de nos entreprises, empêchant le financement de l’innovation de long terme et poussant les plus grandes d’entre elles à abandonner leur base hexagonale.

Les conséquences de ces défaillances sont visibles: notre industrie est l’une des moins robotisées (126 robots pour 10 000 salariés contre 270 en Allemagne), les investissements dans les NTIC sont deux fois moins nombreux que dans le reste de la zone euro et trois fois moins nombreux qu’aux USA. Le très poussif basculement du CICE en baisse de charges, l’hypothétique baisse de l’IS promise à l’horizon 2022 et l’absence de baisse des impôts sur la production ne laissent pas augurer un redressement rapide de l’investissement privé. Il faut donc rapidement changer de braquet et promouvoir des partenariats publics-privés ancrés sur des dépenses d’investissement public (que Bruxelles doit mieux distinguer des dépenses de fonctionnement).

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie.

Il convient en premier lieu de favoriser la montée en gamme de nos industries informatique, robotique et d’intelligence artificielle: cela passe par le redéploiement des interventions de la BPI trop centrées sur l’internet grand public, et par plus de précisions sur le plan d’investissement promis par Macron sur le quinquennat, qui pour l’instant inclut essentiellement des dépenses de fonctionnement dans l’éducation. La robotisation est aussi une opportunité pour notre industrie et souvenons-nous que les pays les plus robotisés sont aussi ceux où le chômage est le plus faible. Elle doit être couplée par un plan massif d’équipement 5G sur notre territoire, car ces nouveaux robots et objets doivent pouvoir communiquer, seul moyen de révéler le vrai potentiel de nos territoires.

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie: clientélisme à l’égard d’autres secteurs, manichéisme économique simpliste (l’industrie c’est l’ancien monde, la start-up le nouveau qui doit aller de l’avant.), remise aux calendes grecques des mesures pour favoriser l’investissement et la modernisation: la survie politique plus que la vision stratégique semble servir de cap aux décisions économiques. À Bercy, nous avions déjà testé le manque de détermination, voire l’ambiguïté d’Emmanuel Macron sur ces sujets, lorsqu’il avait écarté hâtivement toutes les alternatives, notamment françaises, au rachat par General Electric. L’amateurisme actuel est si évident que Bercy version Lemaire n’a jamais lu les comptes du repreneur d’Ascoval, British Steel, en état de faillite théorique dès le rachat du site français….

Il est plus qu’urgent de rééquiper notre secteur industriel, afin de monter en gamme, de produire à nouveau sur notre territoire, de redevenir une machine à exporter et à créer des emplois. À défaut, toutes les réformes lancées par le pouvoir actuel, ne viendront jamais à bout de notre chômage structurel.

Industrie : les causes du désastre

Industrie : les causes du désastre

 

 

Sébastien Laye, entrepreneur dans le domaine des services financiers, souligne le sérieux retard que la France accuse sur le plan industriel.

 

«La politique la plus ruineuse, la plus coûteuse, c’est celle d’être petit».  Pour comprendre le désastre industriel français, il convient de revenir sur les erreurs stratégiques des pouvoirs publics français et de nos grands patrons, eux-mêmes issus du moule techno-politique via les grands corps. Nous devons à Serge Tchuruk dans les années 90, le patron de ce qui était alors Alcatel (depuis démantelé en de nombreuses entités), d’avoir théorisé chez nous le concept d’industrie sans usines, sans actifs, «asset-light»: une hérésie stratégique vite abandonnée par les Américains mais qui a perduré en France jusque dans les années 2000. Or notre monde économique actuel, loin d’avoir vu la disparition de la vieille industrie au profit d’une économie purement tertiaire et de services, est beaucoup plus complexe. En réalité nos économies sont devenues hyper industrielles, avec le logiciel ou les services à valeur ajoutée qui sont venus transformer l’usine d’antan. Les smart factories embarquent des compétences en informatique, robotique et automatisation en brouillant la frontière avec l’univers de la technologie et des GAFA. Ainsi, d’une certaine manière, l’industrie n’existe peut-être plus en tant que secteur autonome mais paradoxalement elle est omniprésente: même les acteurs des nouvelles technologies doivent déployer des plateformes industrielles et logistiques colossales, que ce soit Amazon ou Google avec ses data centers.

 

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, la France et victime d’un vrai décrochage industriel.

Les États-Unis ont compris depuis une dizaine d’années qu’un modèle économique uniquement orienté vers la consommation domestique est voué à l’échec: ce mouvement s’est accéléré sous le mandat Trump, qui a vu la création de 400 000 emplois manufacturiers. Par un subtil équilibre de baisses massives d’impôts (alors que les impôts sur la production obèrent toute rentabilité de nos usines.) et de menaces, Trump a obtenu de Softbank/Sprint, de GoPro ou encore d’Apple une relocalisation aux États-Unis de leur base manufacturière. Pfizer, Comcast, Boeing, notamment en rapatriant les profits offshores, investissent à nouveau dans leurs usines américaines. Les Américains ont supprimé en deux ans la moitié du code des réglementations pour créer de nouvelles usines ; les Chinois, avec un modèle moins libéral mais un État visionnaire, développent non seulement leur base industrielle mais sont aussi en train de réindustrialiser toute l’Asie par leur projet de nouvelle route de la soie, qui se traduit par de colossales infrastructures de transport.

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, comme en attestent la réindustrialisation de l’Amérique de Donald Trump ou les grandes réalisations chinoises, la France est victime d’un vrai décrochage industriel. Or développer la seule économie de services (petits boulots en chaîne) ou des start-up (peu intense en capital humain) ne permettra pas à la France de juguler le fléau du chômage et de la croissance molle. On ne peut qu’être sidéré par le manque de volontarisme des pouvoirs publics français en la matière, alors que notre génie industriel était la marque de fabrique de la France encore dans les années 1990 (il suffit de noter le rayonnement des produits de Schneider, Airbus, Alstom, Dassault, à cette époque) et que le complexe militaire, comme aux États-Unis, fournissait un excellent levier public pour le développement de l’industrie privée.

En 2018, la part de l’industrie dans la richesse nationale en France n’était plus que de 11 %, contre 17 % à la fin des années 1990, ce qui est le niveau actuel de la plupart des autres économies développées. À l’origine du déclin de l’industrie, on peut noter la détérioration générale de la compétitivité des entreprises françaises. Face à la concurrence mondiale, l’industrie française ne fait plus le poids dans certains secteurs. D’autre part, en quinze ans, alors que les ventes de biens ont augmenté de plus de 50 % sur nos territoires, notre production manufacturière… est restée au même niveau. Sans compter qu’au-delà des ventes de biens, les services à haute valeur ajoutée ont accru leur part dans notre PIB, et à ce niveau la domination des GAFA et autres entreprises technologiques étrangères a signifié d’irrémédiables pertes de marché: elles sont visibles dans les chiffres du déficit du commerce international, qui se creuse depuis notre plus haut point en 2004 ; non seulement nos entreprises ne produisent plus ce que les Français consomment, mais elles ne disposent pas des compétences et technologies clefs dont nos concitoyens ont besoin. Enfin, l’absence de fonds de pension entrave le développement de nos entreprises, empêchant le financement de l’innovation de long terme et poussant les plus grandes d’entre elles à abandonner leur base hexagonale.

Les conséquences de ces défaillances sont visibles: notre industrie est l’une des moins robotisées (126 robots pour 10 000 salariés contre 270 en Allemagne), les investissements dans les NTIC sont deux fois moins nombreux que dans le reste de la zone euro et trois fois moins nombreux qu’aux USA. Le très poussif basculement du CICE en baisse de charges, l’hypothétique baisse de l’IS promise à l’horizon 2022 et l’absence de baisse des impôts sur la production ne laissent pas augurer un redressement rapide de l’investissement privé. Il faut donc rapidement changer de braquet et promouvoir des partenariats publics-privés ancrés sur des dépenses d’investissement public (que Bruxelles doit mieux distinguer des dépenses de fonctionnement).

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie.

Il convient en premier lieu de favoriser la montée en gamme de nos industries informatique, robotique et d’intelligence artificielle: cela passe par le redéploiement des interventions de la BPI trop centrées sur l’internet grand public, et par plus de précisions sur le plan d’investissement promis par Macron sur le quinquennat, qui pour l’instant inclut essentiellement des dépenses de fonctionnement dans l’éducation. La robotisation est aussi une opportunité pour notre industrie et souvenons-nous que les pays les plus robotisés sont aussi ceux où le chômage est le plus faible. Elle doit être couplée par un plan massif d’équipement 5G sur notre territoire, car ces nouveaux robots et objets doivent pouvoir communiquer, seul moyen de révéler le vrai potentiel de nos territoires.

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie: clientélisme à l’égard d’autres secteurs, manichéisme économique simpliste (l’industrie c’est l’ancien monde, la start-up le nouveau qui doit aller de l’avant.), remise aux calendes grecques des mesures pour favoriser l’investissement et la modernisation: la survie politique plus que la vision stratégique semble servir de cap aux décisions économiques. À Bercy, nous avions déjà testé le manque de détermination, voire l’ambiguïté d’Emmanuel Macron sur ces sujets, lorsqu’il avait écarté hâtivement toutes les alternatives, notamment françaises, au rachat par General Electric. L’amateurisme actuel est si évident que Bercy version Lemaire n’a jamais lu les comptes du repreneur d’Ascoval, British Steel, en état de faillite théorique dès le rachat du site français….

Il est plus qu’urgent de rééquiper notre secteur industriel, afin de monter en gamme, de produire à nouveau sur notre territoire, de redevenir une machine à exporter et à créer des emplois. À défaut, toutes les réformes lancées par le pouvoir actuel, ne viendront jamais à bout de notre chômage structurel.

 

Industrie : les causes du désastre

Industrie : les causes du désastre

 

Sébastien Laye, entrepreneur dans le domaine des services financiers, souligne le sérieux retard que la France accuse sur le plan industriel.

 

«La politique la plus ruineuse, la plus coûteuse, c’est celle d’être petit». Nous avons tous en mémoire cet adage gaullien alors que l’annonce de licenciements sur l’ancien site d’Alstom devenu General Electric – à la faveur d’un rachat controversé de la branche énergie par un géant américain lui-même en difficulté désormais – s’ajoute à la litanie de mauvaises nouvelles industrielles ce printemps: Ascoval avec un repreneur British Steel lui-même en difficulté, Whirlpool….

Car pour comprendre le désastre industriel français, il convient de revenir sur les erreurs stratégiques des pouvoirs publics français et de nos grands patrons, eux-mêmes issus du moule techno-politique via les grands corps. Nous devons à Serge Tchuruk dans les années 90, le patron de ce qui était alors Alcatel (depuis démantelé en de nombreuses entités), d’avoir théorisé chez nous le concept d’industrie sans usines, sans actifs, «asset-light»: une hérésie stratégique vite abandonnée par les Américains mais qui a perduré en France jusque dans les années 2000. Or notre monde économique actuel, loin d’avoir vu la disparition de la vieille industrie au profit d’une économie purement tertiaire et de services, est beaucoup plus complexe. En réalité nos économies sont devenues hyper industrielles, avec le logiciel ou les services à valeur ajoutée qui sont venus transformer l’usine d’antan. Les smart factories embarquent des compétences en informatique, robotique et automatisation en brouillant la frontière avec l’univers de la technologie et des GAFA. Ainsi, d’une certaine manière, l’industrie n’existe peut-être plus en tant que secteur autonome mais paradoxalement elle est omniprésente: même les acteurs des nouvelles technologies doivent déployer des plateformes industrielles et logistiques colossales, que ce soit Amazon ou Google avec ses data centers.

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, la France et victime d’un vrai décrochage industriel.

Les États-Unis ont compris depuis une dizaine d’années qu’un modèle économique uniquement orienté vers la consommation domestique est voué à l’échec: ce mouvement s’est accéléré sous le mandat Trump, qui a vu la création de 400 000 emplois manufacturiers. Par un subtil équilibre de baisses massives d’impôts (alors que les impôts sur la production obèrent toute rentabilité de nos usines.) et de menaces, Trump a obtenu de Softbank/Sprint, de GoPro ou encore d’Apple une relocalisation aux États-Unis de leur base manufacturière. Pfizer, Comcast, Boeing, notamment en rapatriant les profits offshores, investissent à nouveau dans leurs usines américaines. Les Américains ont supprimé en deux ans la moitié du code des réglementations pour créer de nouvelles usines ; les Chinois, avec un modèle moins libéral mais un État visionnaire, développent non seulement leur base industrielle mais sont aussi en train de réindustrialiser toute l’Asie par leur projet de nouvelle route de la soie, qui se traduit par de colossales infrastructures de transport.

Alors que la puissance économique est avant tout une puissance industrielle, comme en attestent la réindustrialisation de l’Amérique de Donald Trump ou les grandes réalisations chinoises, la France est victime d’un vrai décrochage industriel. Or développer la seule économie de services (petits boulots en chaîne) ou des start-up (peu intense en capital humain) ne permettra pas à la France de juguler le fléau du chômage et de la croissance molle. On ne peut qu’être sidéré par le manque de volontarisme des pouvoirs publics français en la matière, alors que notre génie industriel était la marque de fabrique de la France encore dans les années 1990 (il suffit de noter le rayonnement des produits de Schneider, Airbus, Alstom, Dassault, à cette époque) et que le complexe militaire, comme aux États-Unis, fournissait un excellent levier public pour le développement de l’industrie privée.

En 2018, la part de l’industrie dans la richesse nationale en France n’était plus que de 11 %, contre 17 % à la fin des années 1990, ce qui est le niveau actuel de la plupart des autres économies développées. À l’origine du déclin de l’industrie, on peut noter la détérioration générale de la compétitivité des entreprises françaises. Face à la concurrence mondiale, l’industrie française ne fait plus le poids dans certains secteurs. D’autre part, en quinze ans, alors que les ventes de biens ont augmenté de plus de 50 % sur nos territoires, notre production manufacturière… est restée au même niveau. Sans compter qu’au-delà des ventes de biens, les services à haute valeur ajoutée ont accru leur part dans notre PIB, et à ce niveau la domination des GAFA et autres entreprises technologiques étrangères a signifié d’irrémédiables pertes de marché: elles sont visibles dans les chiffres du déficit du commerce international, qui se creuse depuis notre plus haut point en 2004 ; non seulement nos entreprises ne produisent plus ce que les Français consomment, mais elles ne disposent pas des compétences et technologies clefs dont nos concitoyens ont besoin. Enfin, l’absence de fonds de pension entrave le développement de nos entreprises, empêchant le financement de l’innovation de long terme et poussant les plus grandes d’entre elles à abandonner leur base hexagonale.

Les conséquences de ces défaillances sont visibles: notre industrie est l’une des moins robotisées (126 robots pour 10 000 salariés contre 270 en Allemagne), les investissements dans les NTIC sont deux fois moins nombreux que dans le reste de la zone euro et trois fois moins nombreux qu’aux USA. Le très poussif basculement du CICE en baisse de charges, l’hypothétique baisse de l’IS promise à l’horizon 2022 et l’absence de baisse des impôts sur la production ne laissent pas augurer un redressement rapide de l’investissement privé. Il faut donc rapidement changer de braquet et promouvoir des partenariats publics-privés ancrés sur des dépenses d’investissement public (que Bruxelles doit mieux distinguer des dépenses de fonctionnement).

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie.

Il convient en premier lieu de favoriser la montée en gamme de nos industries informatique, robotique et d’intelligence artificielle: cela passe par le redéploiement des interventions de la BPI trop centrées sur l’internet grand public, et par plus de précisions sur le plan d’investissement promis par Macron sur le quinquennat, qui pour l’instant inclut essentiellement des dépenses de fonctionnement dans l’éducation. La robotisation est aussi une opportunité pour notre industrie et souvenons-nous que les pays les plus robotisés sont aussi ceux où le chômage est le plus faible. Elle doit être couplée par un plan massif d’équipement 5G sur notre territoire, car ces nouveaux robots et objets doivent pouvoir communiquer, seul moyen de révéler le vrai potentiel de nos territoires.

On est en droit de douter de la volonté du gouvernement actuel de redresser notre industrie: clientélisme à l’égard d’autres secteurs, manichéisme économique simpliste (l’industrie c’est l’ancien monde, la start-up le nouveau qui doit aller de l’avant.), remise aux calendes grecques des mesures pour favoriser l’investissement et la modernisation: la survie politique plus que la vision stratégique semble servir de cap aux décisions économiques. À Bercy, nous avions déjà testé le manque de détermination, voire l’ambiguïté d’Emmanuel Macron sur ces sujets, lorsqu’il avait écarté hâtivement toutes les alternatives, notamment françaises, au rachat par General Electric. L’amateurisme actuel est si évident que Bercy version Lemaire n’a jamais lu les comptes du repreneur d’Ascoval, British Steel, en état de faillite théorique dès le rachat du site français….

Il est plus qu’urgent de rééquiper notre secteur industriel, afin de monter en gamme, de produire à nouveau sur notre territoire, de redevenir une machine à exporter et à créer des emplois. À défaut, toutes les réformes lancées par le pouvoir actuel, ne viendront jamais à bout de notre chômage structurel.

Effondrement d’un pont en Italie : les causes

Effondrement d’un pont en Italie : les causes

 

Explication de franceinfo de Michel Virlogeux, ingénieur des ponts et chaussées et concepteur, notamment, du célèbre viaduc de Millau (Aveyron), du pont de Normandie et du troisième pont sur le Bosphore, le pont Yavuz Sultan Selim, en Turquie.

 

Franceinfo : Quelles sont les principales caractéristiques du viaduc de Polcevera ?

Michel Virlogeux : C’est un ouvrage conçu par Riccardo Morandi, qui était un grand ingénieur italien. Il a construit trois ouvrages sur le même modèle : le pont du général Rafael Urdaneta sur le lac de Maracaibo, au Venezuela, qui est le plus important des trois ; le viaduc de Wadi el Kuf, en Libye ; et le viaduc de Polcevera à Gênes, dont on parle aujourd’hui.

Ces trois ouvrages ont une structure très particulière : chaque pylône est formé de plusieurs éléments, un « V » renversé au sommet et un « V » dans le sens normal, qui permettent de soutenir le tablier [la structure sur laquelle passe la route]. Ce qui est notable, c’est que le tablier n’est pas continu : une partie est portée par chaque pylône et ses haubans [les barres ou câbles qui partent des pylônes pour maintenir la structure en place], et entre ces sections, vous avez une travée suspendue.

Le viaduc de Polcevera comporte trois pylônes, et l’un d’eux s’est effondré. Les parties du tablier liées aux haubans sont donc tombées, tout comme les deux travées suspendues de part et d’autre du pylône.

Quels sont les défauts de cet ouvrage ?

Ce type de structures a l’inconvénient de ne pas être très économique, il consomme beaucoup de matière. Ce n’est pas dans cette direction que les ponts à haubans se sont développés. Tout le monde, y compris moi, a plutôt suivi les architectes allemands qui ont développé ce type de structures dans les années 1950, qui se sont imposées comme des modèles.

J’ai entendu que d’importants travaux de rénovation avaient eu lieu sur le viaduc de Gênes, mais j’en ignore la nature. Cela dit, ce pont avait 50 ans, et il n’est pas anormal qu’il y ait des travaux de réparation au bout de cette période. Aujourd’hui, les grands ponts comme celui de Normandie ou le viaduc de Millau sont équipés de dispositifs de monitoring, et sont surveillés de manière permanente. Des interventions ont lieu lorsque certaines choses ne fonctionnent pas comme prévu.

Avez-vous une hypothèse sur les causes de cet effondrement ? Certains témoignages font état d’un orage et d’un éclair qui aurait frappé le pont. 

J’ignore dans quel ordre la structure s’est effondrée : si je le savais, je pourrais connaître la cause précise de l’effondrement.

Concernant l’hypothèse de la foudre, je suis un peu sceptique. Il y aura sans doute une expertise, et il faudra examiner le sommet du pylône pour voir si la foudre aurait pu provoquer un désordre majeur, mais j’ai plutôt tendance à penser à un problème de vieillissement et de corrosion. Cette corrosion pourrait avoir touché les haubans ou les armatures au niveau où sont situées les fameuses parties suspendues du tablier. De manière générale, en cas d’accident, on inspecte d’abord l’état du béton utilisé.

Les accidents aussi spectaculaires sont-ils fréquents ?

Non, mais il y en a eu quelques-uns. Plusieurs accidents très célèbres ont été provoqués par le choc d’un bateau sur une pile [les pylônes ou appuis intermédiaires qui maintiennent le tablier] : par exemple, en 1964, un bateau a percuté une pile du viaduc d’accès au pont de Maracaibo (Venezuela), que je mentionnais plus tôt, ce qui a provoqué un effondrement.

Il y a également eu un accident de ce type en 1980 à Tampa, en Floride (Etats-Unis), un autre en 1975 sur le Tasman Bridge, en Australie, et un autre en Suède sur le Tjörn Bridge en 1960.

D’autres effondrements ont eu lieu lors de réparations effectuées de manière intempestive, ou encore pendant les constructions, ce qui arrive plus souvent. Le dernier cas en date est l’effondrement d’un pont près de Bogota, en Colombie, en janvier. Dans ce cas-là, il s’agissait plutôt, selon moi, d’une mauvaise compréhension des plans par l’équipe chargée de la construction : le pylône n’avait pas résisté et s’était effondré. Mais ce n’est pas du tout ce genre de problème qu’on peut rencontrer cinquante ans après la conception d’un ouvrage, comme c’est le cas ici.

 

Gironde – les causes de la collision : la vitesse

Gironde – les causes de la collision : la vitesse

Il  est évident que la cause centrale de l’accident est une vitesse excessive dans une partie de route très dangereuse  (un virage à 90 degré sur 90 m et sans visibilité.). Il est possible que la vitesse au sens du code da la route ait été respectée mais ce n’est pas la question. La question c’est pourquoi nous sommes incapables de mettre en place une limitation de vitesse plus fine adaptée à chaque tronçon et tenant compte de la gestion du risque. Or dans ce domaine c’est l’incompétence totale et même la contre vérité. Invité d’Europe 1, vendredi soir, le ministre des Transports, Alain Vidalies, a démenti que la route où a eu lieu l’accident était particulièrement dangereuse :  »Ce n’est pas une route qui est repérée comme telle. J’ai fait procéder à une vérification par mes services », a-t-il assuré.  »C’est un peu sinueux, mais il n’y a pas de dangerosité particulière, et le profil de la route à cet endroit exclut a priori qu’il y ait eu des vitesses excessives », a-t-il précisé. Cette route est « sinueuse car la topographie est celle-là mais on n’est pas dans une configuration de route de montagne », a-t-il ajouté. Ce n’est pas ave ce genre de banalités qu’on fera avancer la cause de la sécurité routière. Chacun sait bien que sur certaines portion 90Kms heures est ridicule, on pourrait rouler à 100 voire à 11O sur d’autres au contraire laisser la vitesse à 90 est criminel.,  même à 60 cest parfois encore trop. La vérité cet que le camion constituait un obstacle et que la vitesse du car interdisait de arrêter avant. Il y a des milliers et des milliers de tronçons de ce type en France et la vitesse autorisée est toujours de 9O.   La collision s’est produite peu avant 7h30, sur la route D17, à proximité de Puisseguin (Gironde), à huit kilomètres seulement du point de départ du car de tourisme, Petit-Palais-et-Cornemps. Dans un virage, le camion de Cyril Aleixandre, non chargé de bois puisqu’il allait en chercher dans les Landes, se retrouve en portefeuille. Le témoignage du conducteur du car fait penser que le poids-lourd se trouvait sur la voie de gauche au moment de l’accident, ont déclaré les enquêteurs. On ne sait toujours pas en revanche avec certitude s’il était arrêté ou en marche au moment du choc. Ce qui est sûr, c’est que le conducteur de l’autocar a eu le temps de voir le camion face à lui, puisqu’il a actionné le déverrouillage des portes du bus avant l’impact. . Jean-Marie Leynier, propriétaire de la forêt, confiait à France 2 vendredi soir :  »C’est un virage très dangereux ». D’autres accidents moins graves ont déjà eu lieu.

Migrants : « on ne s’attache pas assez aux causes » (Chevènement)

Migrants : «  on ne s’attache pas assez aux causes »  (Chevènement)

 

Jean-Pierre Chevènement n’a certainement pas complètement peur quand il considère que le problème des migrants ne se réduit pas à la question de l’accueil d’urgence. Il pinte aussi la responsabilité des pays occidentaux dans les conflits en cours et pose la question du co-développement. Invité spécial de Gérard Larcher en Algérie, dans le cadre d’une visite officielle de quatre jours, Jean-Pierre Chevènement répond au Figaro.fr sur la crise des migrants. «Il ne faut pas laisser croire que la question se réduit à la gestion des flux», a-t-il tenu à préciser.

La crise des migrants agite la classe politique française. Quelle est votre analyse?

JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT - On s’attache beaucoup trop aux effets et pas assez aux causes. On ne veut pas voir que ces migrants sont originaires de pays qui ont été déstabilisés par la guerre ou par des conflits internes. Mais la guerre est souvent étrangère et nous avons collectivement, nous Occidentaux, une certaine responsabilité dans la déstabilisation de l’Irak, de la Libye et dans une certaine mesure, de la Syrie car il aurait fallu organiser une médiation plutôt que de prendre parti dans un conflit qui nous dépasse, le conflit Sunnites/Chiites. Il faut tarir la principale source de ces migrations et gérer les effets sans gesticulations inutiles, sans déclarations à l’emporte-pièce, avec fermeté et humanité.

Comment lutter en amont contre un tel problème?

Le problème doit être pris dans sa globalité. Je veux parler de la question du codéveloppement avec les pays d’origine, du problème des Etats que nous pouvons aider à se construire ou à se développer, puis celui de la gestion des flux. Mais sur ce dernier point, la matière est partagée entre les Etats et l’Union européenne aux termes du traité de Lisbonne. Personne n’a dit que c’est une décision prise par la Commission qui le règle par répartition entre les pays. Ce problème implique l’accord de tous les pays. Cela suppose donc un Conseil européen préparé et outillé pour faire appliquer les décisions qu’il pourra prendre. En même temps, il ne faut pas laisser croire que la question se réduit à la gestion des flux. Ce n’est pas vrai. Quand on observe les ordres de grandeur, on constate 8 millions de déplacés à l’intérieur de la Syrie, 4 millions de réfugiés dans les pays voisins et environ 200 000 Syriens arrivés sur nos côtes.

Le spectre de 800 000 réfugiées accueillis en Allemagne suscite des inquiétudes…

A force de faire des annonces dans tous les sens, on finit par ne plus rien maîtriser. Celle-ci a été faite par le ministre de l’Intérieur allemand sur les demandeurs d’asile en fin d’année. Je mets en garde contre de tels effets d’annonce. La politique, ce n’est pas la communication.




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