Foot-Qatar 2022, : pas de boycott mais….
Plusieurs députés expriment dans l’opinion les conditions à réunir pour la coupe du monde au Qatar 2022
« »
Tribune
Nous le savons tous : le monde arabe n’est pas un long fleuve tranquille où la démocratisation va de soi. C’est un processus complexe qui se fait par étapes et qui prend du temps. Parfois même, c’est un processus qui recule. Mais la coupe du monde 2022 aura lieu pour la première fois de l’histoire au Moyen-Orient dans un pays musulman : il faut le saluer car c’est un progrès, y compris et surtout pour ceux qui l’organisent.
En vingt ans, Doha est devenu l’incontournable organisateur des plus grands évènements sportifs et culturels du monde et vise à terme les JO. Et en l’espace de ces deux décennies, sous le regard et le poids des pays occidentaux qui lui demandent des comptes, le Qatar s’est engagé sur la voie des droits de l’homme.
Cette année encore a été marquée par l’organisation des premières élections législatives de l’histoire du pays, mais aussi par l’élaboration d’une législation du travail qui n’existe nulle part dans toute la région du Golfe. Cela prend du temps, c’est normal, et pour cela, il a fait appel aux institutions internationales.
Abandon de la « kafala ». La préparation de la Coupe du Monde a nécessité l’appel à une main-d’œuvre immigrée spécialisée depuis dix ans. Ce sont des chantiers phénoménaux et l’échéance de l’évènement a poussé le pays à un respect strict des délais de réalisation des infrastructures. Malgré cela, avec l’appui de l’Organisation internationale du travail, qui a désormais un bureau à Doha, et travaille avec le gouvernement, des réformes ont été entreprises : abandon de la « kafala », ce fameux système de parrainage du travailleur digne d’autres âges, mise en place d’une protection du travailleur, services d’aide et de soutien économique en temps de pandémie.
C’est un début. Globalement, sur la dernière décennie, le taux de mortalité a baissé, grâce à des programmes de santé en développement permanent et une nette amélioration des conditions de travail. Une législation punit désormais les patrons qui enfreignent ces règles. Un salaire minimum vient de se mettre en place et les conditions de travail sont désormais conditionnées aux températures extérieures qui montent très vite au Qatar. L’Etat veille désormais à sanctionner tout abus de la part des employeurs. Qui d’autre le fait dans le Golfe où la kafala court toujours et les atteintes évidentes aux droits des travailleurs sont passées sous silence, Arabie Saoudite et Emirats en tête, dans leurs divers chantiers ?
Plutôt que de boycotter, ou d’appeler au boycott, il vaut mieux avec l’appui des ONG et des organisations internationales continuer à le soutenir dans ce sens quand des efforts sont faits
Pendant la pandémie, Doha s’est engagé à hauteur de 825 millions de dollars à couvrir les salaires et la prise en charge de ses ouvriers pendant tout le temps de l’épidémie. Même ceux qui étaient en arrêt et en quarantaine pour cause de contamination étaient payés. Une application vient également d’être lancée en de multiples langues pour permettre au travailleur local, en fonction de sa langue natale, de connaître ses nouveaux droits et de ses devoirs. A charge aux entreprises étrangères qui sont maîtres d’ouvrage sur place, de faire respecter la législation. C’est aussi la mission de l’OIT sur place.
A l’occasion de la Coupe du Monde, et pour que le succès soit total, d’un point de vue sportif, politique, culturel, et d’image, le Qatar n’aurait aucun intérêt à s’enfermer dans le passé et dans un fonctionnement rétrograde. Il agit étape par étape dans le sens de la modernisation et donc de l’Histoire et veut poursuivre cette modernisation.
Mais plutôt que de boycotter, ou d’appeler au boycott, il vaut mieux avec l’appui des ONG et des organisations internationales continuer à le soutenir dans ce sens quand des efforts sont faits. Et les équipes nationales qui protestent actuellement devraient probablement se concentrer sur les pays hôtes d’un événement qui ne coopèrent pas avec les institutions internationales comme le fait Doha.
La Coupe du Monde peut être l’outil de coopération qui amènera le pays à atteindre les standards internationaux de transparence et de dignité. Oui, la Coupe du Monde peut réussir cette révolution. C’est ce vers quoi nous devons, collectivement, tendre.
Pascal Brindeau, député du Loir-et-Cher, Julien Borowczyk, député de la Loire, Jérôme Lambert, député de Charente, Meyer Habib, député de la 8e circonscription des Français de l’étranger, Michel Zumkeller, député du Territoire de Belfort, Marie-France Lorho, député de Vaucluse, M’jid El Guerrab, député de la 9e circonscription des Français de l’étranger.