Consultation publique sur la biodiversité !
Encore une consultation dite publique sur la biodiversité qui évidemment va demeurer assez virtuelle comme toutes les autres. En témoigne la pauvreté du discours de la secrétaire d’État en charge de cette question.
A l’occasion de la journée internationale de la biodiversité, la secrétaire d’Etat au ministère de la Transition écologique en charge du dossier lance une consultation publique » inédite »
Bérangère Abba est secrétaire d’Etat à la biodiversité, chargée de présenter d’ici à la fin de l’année 2021 le troisième volet de la « stratégie nationale de la biodiversité » pour les dix années à venir.
En quoi consiste cette consultation publique pour établir une nouvelle Stratégie nationale de la biodiversité (SNB) ?
On est sur un travail qui s’étale sur toute l’année. Le premier volet a commencé en janvier, lorsque j’ai rencontré les acteurs de la biodiversité en région. Des tables rondes ont été organisées sur les enjeux propres à chaque territoire. J’ai ainsi réuni 600 contributions issues de toutes les régions de France, métropole et Outre-mer compris. Cela a d’ailleurs été un peu disruptif, y compris au ministère parce que d’ordinaire, la stratégie nationale s’écrit avec les experts nationaux. Là, contrairement aux volets précédents de la SNB établis sur les années 2004-2010 et 2011-2020, on part des territoires et du vécu. Le bilan des stratégies précédentes n’est pas bon et, forte de ce constat, j’ai souhaité partir du réel, du concret.
En interpellant également les citoyens ?
Oui, je lance ainsi ce samedi, pour la journée mondiale de la biodiversité, une phase de consultation citoyenne. Les Français vont pouvoir s’exprimer à travers un questionnaire en ligne, et un accès ludique à différentes fiches de connaissances sur le site biodiversite.gouv.fr. Et ce jusqu’à début juillet. C’est un exercice inédit. Nous compilerons ensuite toutes ces consultations au niveau national. Et nous présenterons une première version au congrès mondial de la nature (UICN) qui se déroule cette année à Marseille, début septembre, voulu par le Président pour mobiliser la société sur la biodiversité.
«Il ne faut pas que certaines initiatives portent atteinte à la biodiversité, tout est une affaire d’équilibre»
Pourquoi les SNB précédentes ont-elles échoué ?
On n’était sans doute pas au même niveau de prise de conscience sur la préservation de la nature. Là, les événements climatiques ont été violents et brutaux, et ont sans doute accompagné cette prise de conscience pour réfléchir à des politiques publiques avec plus de moyens et d’engagements. Notre plan de relance y contribue ! Quand on finance la restauration des friches par exemple, on évite d’artificialiser des espaces naturels. On n’est bien sûr qu’au début d’une prise en compte de l’érosion majeure qui est en train de se produire. Il faut sensibiliser, y compris même, j’en prends ma responsabilité, en décloisonnant nos différentes politiques publiques. Il ne faut pas en effet que certaines initiatives portent atteinte à la biodiversité. Tout est une affaire d’équilibre. Et ce qu’on met en œuvre au niveau national doit également correspondre au niveau international. La SNB est un tremplin vers la COP15 qui doit adopter un cadre international pour la biodiversité, et vers la présidence française de l’Union européenne en 2022, qui fera de la protection des forêts tropicales une priorité.
Dans la prise de conscience environnementale justement, on parle davantage climat et moins biodiversité, n’avez-vous pas peur que ce sujet soit éclipsé ?
Il l’est peut-être parce que l’on ne sait pas bien de quoi on parle. C’est silencieux, l’érosion de la biodiversité. Il faudrait davantage évoquer la protection de la nature, le bien-être, la sécurité alimentaire ou la santé environnementale : ces sujets parlent aux Français. Nous vivons quand même l’un des exemples les plus dramatiques de cette érosion avec la crise sanitaire actuelle. C’est une pandémie, et donc un déséquilibre de la nature car certaines espèces sauvages ne trouvent plus leur place au contact de l’homme en raison de trafics d’animaux et de la déforestation. On va y être de plus en plus confrontés, notamment avec la décongélation du permafrost.
N’assiste-t-on pas, parfois, à certaines contradictions entre climat et biodiversité, avec l’implantation par exemple d’énergies renouvelables dans des zones protégées ?
Il ne faut pas opposer énergies renouvelables et biodiversité. Je crois vraiment que l’on doit concilier ces enjeux et le dialogue doit permettre d’éviter les polémiques. Quand ce sujet sera totalement installé, la société civile ira beaucoup plus vite. Ma responsabilité est de percer des lignes pour anticiper ces débats et trouver une cohérence entre nos différents objectifs. Je fais beaucoup d’interministériel en ce sens, pour mobiliser plus largement. Et les concertations avec les territoires sont essentielles : plus on dessine ça ensemble, plus on emporte de l’adhésion.
Comment évaluer la transformation de la biodiversité
Comment évaluer la transformation de la biodiversité
Le Club des entreprises pour une biodiversité positive (Club B4B+), appellent dans la Tribune à la mise en place de métriques quantitatives de la biodiversité, d’outils d’évaluation de l’empreinte biodiversité et d’objectifs scientifiques mesurables à tous niveaux pour faire face au déclin alarmant de la biodiversité.
La décennie qui s’achève se sera malheureusement soldée par l’échec tragique de la plupart des Objectifs d’Aichi pour la période 2011-2020 [adoptés par les parties à la Convention sur la diversité biologique en octobre 2010, Ndlr] et le constat sans appel de l’Evaluation mondiale de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services éco systémiques (IPBES), qui révélait en mai 2019 que le déclin de la nature se poursuit à un rythme sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Le Congrès mondial de la Nature, organisé par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à Marseille, puis la COP15 de la Convention sur la diversité biologique (CDB) en Chine -tous deux reportés au premier trimestre 2021-doivent nous permettre d’entrer dans le temps de la biodiversité.
Nous sommes persuadés que le secteur privé peut et doit jouer un rôle clé dans la concrétisation à la fois de la vision 2050 de la CBD pour « vivre en harmonie avec la nature », et des Objectifs de développement durable (ODD) – en particulier des ODD 14 et 15 concernant la biodiversité. Pour ce faire, et afin qu’advienne le « New Deal » pour la nature et les hommes, il est essentiel que nous mesurions notre impact sur la biodiversité et que nos objectifs en matière de biodiversité soient en capacité de rejoindre les scénarios proposés par la communauté scientifique et retenus par la communauté internationale.
La tonne équivalent CO2 a joué un rôle déterminant dans la prise de conscience des enjeux liés au changement climatique. Cette métrique a constitué un levier incontestable dans la mise en œuvre d’actions d’atténuation du changement climatique. Des métriques comparables, autrement dit des métriques quantitatives décrivant l’état de la biodiversité, largement utilisées et accessibles à tous, consensuelles sur le plan scientifique et pouvant être agrégées ou désagrégées à de multiples niveaux de granularité, sont nécessaires pour répondre efficacement à l’enjeu de la perte de biodiversité. Associées à des analyses qualitatives, de telles métriques sont indispensables aux États, aux entreprises et aux institutions financières désirant évaluer leurs impacts, démontrer des gains de biodiversité et piloter leur action opérationnelle.