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Pour des modèles économiques durables attrayants

Pour des  modèles économiques  durables  attrayants

 C’est désormais l’un des principaux défis auxquels sont confrontées les entreprises : construire des modèles économiques à la fois durables, rentables et attractifs pour le grand public. Par Anne-Lorène Vernay, Grenoble École de Management (GEM); Jonatan Pinkse, University of Manchester et Mélodie Cartel, UNSW Sydney

 

Rendre l’économie plus durable afin d’éviter les effets désastreux du changement climatique est devenu une nécessité indiscutable. Or une transition vers une économie « net zéro » implique un changement fondamental dans la manière dont les entreprises fonctionnent et gagnent de l’argent.

Par conséquent, les modèles économiques actuels, axés uniquement sur la réalisation de bénéfices, ne sont plus viables dans un avenir « net zero ». Comment alors les remplacer ? À quoi ressembleront les modèles économiques de l’avenir ? Et comment convaincre les leaders du marché de changer une recette gagnante ? Sachant qu’il est peu probable qu’ils puissent maintenir les mêmes flux de revenus avec un modèle durable.

Il existe de nombreuses options, mais seules quelques-unes sont jusqu’à présent parvenues à s’imposer dans un monde où l’essentiel de l’argent est encore gagné par des entreprises qui polluent la planète et n’ont pas à payer pour cela. Comment les entrepreneurs qui conçoivent ces modèles réussissent-ils à faire accepter leurs idées, quand bien même elles remettent en cause les idées reçues sur ce que les consommateurs aiment et sont prêts à payer ?

Dans notre dernière publication, nous montrons comment des entrepreneurs du secteur néerlandais de l’électricité ont réussi à rallier le public à leur modèle de vente d’électricité verte. Pendant des décennies, le secteur de l’électricité a été dominé par un modèle dans lequel des entreprises verticalement intégrées produisaient de l’électricité dans de grandes centrales utilisant des combustibles fossiles.

Mais les pressions en faveur de la décarbonation, de la numérisation et de la déréglementation du secteur ont permis à de nouveaux acteurs d’entrer sur le marché avec une proposition différente. Comment ont-ils su se rendre attractifs ?Les modèles classiques de vente d’électricité reposent sur l’idée que « l’argent est roi ». Le prix et la fiabilité déterminent le choix des clients, rien d’autre.

C’est en changeant cette perception de ce qui fait la valeur de l’électricité verte que les entrepreneurs néerlandais ont su rendre leur modèle attrayant. Sans ignorer l’importance du prix et de la fiabilité, ils mettent également en avant d’autres avantages à choisir l’électricité verte. Certains arguments de vente consistent à laisser les clients choisir la provenance de leur électricité (elle est produite dans mon village), qui produit leur électricité (elle est produite par mes amis et ma famille) et comment leur électricité est produite (je peux décider comment elle est produite).

Toutefois, mettre l’accent sur ces aspects n’a pas suffi à généraliser les modèles de l’électricité verte.

Les entrepreneurs, ainsi que les ONG, ont également dû changer la perception des clients sur les offres des leaders du marché en montrant que ces offres n’étaient pas vraiment vertes. En partie grâce à un marketing non conventionnel, ils ont fait germer dans l’esprit des gens l’idée que l’on ne pouvait pas faire confiance aux grandes compagnies d’électricité pour mener à bien la transition vers une consommation nette zéro.

Une start-up influente, Vandebron, a ainsi proposé d’acquérir une centrale électrique au charbon pour un million d’euros, avec l’intention de la transformer en parc d’attractions. Elle a tenté de prouver que le propriétaire actuel, Nuon, n’était pas disposé à mettre fin à ses activités liées aux combustibles fossiles.

Les entrepreneurs ont également fait prendre conscience aux gens que la plupart de l’électricité verte proposée n’était pas produite aux Pays-Bas, mais qu’elle était simplement le résultat d’un exercice sur papier où les entreprises achètent des certificats verts pour affirmer que leur électricité sale est verte.

En faisant honte aux entreprises existantes, les entrepreneurs ont créé un espace pour leur propre offre, car les consommateurs ont commencé à chercher des fournisseurs alternatifs, vendant de l’électricité réellement verte. Ils ont également fait pression sans relâche pour obtenir des changements réglementaires permettant de déployer d’autres modes d’approvisionnement en électricité, tels que la livraison de pair-à-pair et les micro-réseaux communautaires.

En faisant comprendre aux gens que l’électricité verte présente de nombreux avantages et que l’on ne peut pas faire confiance aux leaders du marché pour atteindre le net zéro, les entrepreneurs ont réussi à montrer qu’il est possible de faire les choses différemment et que cela peut être source de succès économique.

Ils ont démantelé l’idée selon laquelle les entreprises ne peuvent réussir dans ce secteur que si elles proposent un prix bas : au contraire, ils ont révélé que les citoyens sont prêts à payer un peu plus si l’électricité est produite localement, s’ils peuvent l’acheter directement à leurs voisins, leur famille ou leurs amis, ou si cela signifie qu’un prix équitable est versé à ceux qui produisent l’électricité.

Même si l’électricité elle-même a exactement la même fonction, à savoir alimenter nos appareils, les entrepreneurs ont montré que les gens accordent de l’importance à la provenance de leur électricité et à la manière dont elle est produite. Déboulonner les mythes sur la réussite dans le secteur a ouvert les yeux des leaders du marché qui ont commencé à acquérir des start-up dont les business model durables ont fait leurs preuves.

Alors, ces modèles durables dominent-ils désormais le secteur ? Malheureusement, non. Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. Mais les entrepreneurs et les ONG ont réussi à prouver qu’il était possible de créer de la valeur autrement, et ils ont aidé les leaders du marché à se diversifier, en proposant une électricité véritablement verte, livrée de différentes manières, notamment par des plates-formes d’échange d’énergie de pair-à-pair. Les gens ont désormais beaucoup plus de choix pour passer au vert.

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Par Anne-Lorène Vernay, Associate professor, Grenoble École de Management (GEM) ; Jonatan Pinkse, Professor, University of Manchester et Mélodie Cartel, Lecturer in organization theory, UNSW Sydney

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.




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