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Punaises de lit: Apprendre à s’en débarrasser

Les punaises de lit: Apprendre à s’en débarrasser


Les punaises de lit sont de retour en force. Après une absence d’environ 70 ans, du fait de l’emploi de pesticides puissants tels que le DDT, elles ont fait leur (ré)apparition dans les hôtels de luxe, les spas, les grands magasins, les métros, les cinémas et, bien sûr, les maisons. Je suis entomologiste en santé publique et, dans le cadre de mon travail, j’ai étudié ces petits suceurs de sang – allant jusqu’à les laisser se régaler sur mes propres appendices, au nom de la science… Personne n’aime avoir affaire à des punaises de lit. Heureusement, il existe des moyens de minimiser le risque de devoir s’y confronter.

Par
Jerome Goddard
Extension Professor of Biochemistry, Molecular Biology, Entomology and Plant Pathology, Mississippi State University
dans The Conversation

La punaise de lit commune, Cimex lectularius, parasite notre espèce depuis des milliers d’années. Historiquement, ces minuscules suceuses de sang étaient courantes dans les habitations humaines du monde entier, donnant un véritable sens au vieux dicton qu’on trouve toujours par endroit : « Dors bien serré, ne laisse pas les punaises de lit te piquer »…

Jusqu’au milieu des années 1990, elles avaient pratiquement disparu dans les pays en développement – période à laquelle elles ont commencé à faire leur retour, pour diverses raisons : mise en place de résistance à certains pesticides utilisés contre elles, restriction ou interdiction de certains d’entre eux, changements dans les méthodes de lutte contre les parasites, ou encore augmentation des voyages internationaux.

Dans de nombreuses régions du monde, les punaises de lits sont désormais des parasites urbains d’importance.

Les adultes, d’un brun-rougeâtre, mesurent quelques 5 mm. Elles sont de forme ovale et aplatie, et ressemblent à des tiques non nourries ou à de petits cafards. Les jeunes, minuscules, sont de couleur blanc-jaunâtre.

Repliée sous leur tête, les punaises de lit possèdent une longue trompe (ou proboscis) : une pièce buccale tubulaire qu’elles peuvent étendre pour prendre leur repas de sang. Une punaise de lit n’a besoin que de trois à dix minutes pour consommer jusqu’à six fois son poids en sang en un seul repas.

Ces insectes se cachent dans les fissures et les crevasses de nos habitations, de préférence celles situées à quelques mètres d’un lit, ne sortant que pour se nourrir d’un hôte peu méfiant. Puis elles retournent en courant dans leur cachette, où elles s’accouplent et pondent des œufs.

Les maisons peuvent être infestées par des milliers de ces bestioles assoiffées de sang. Matelas et sommier sont alors souvent couverts de taches fécales noires révélatrices. Dans les cas graves, il peut y avoir d’épaisses accumulations d’excréments, des centaines de mues perdues et des œufs sur plusieurs millimètres d’épaisseur.

Les punaises de lit ont été suspectées de transmettre plus de 40 types de pathogènes, mais il y a peu de preuves qu’elles transmettent des agents pathogènes humains, à l’exception possible du micro-organisme qui cause la maladie de Chagas. Les infestations extrêmes peuvent toutefois, dans de rares cas, entraîner une perte de sang suffisamment importante pour provoquer une anémie.

Leurs principaux impacts médicaux sont liés aux piqûres, en raison des démangeaisons et inflammations associées. Les réactions les plus courantes à ces attaques sont des taches rouges qui grattent. Situées au niveau des sites de piqûre, elles disparaissent généralement en une semaine environ. Certaines personnes peuvent présenter des réactions cutanées complexes, y compris de l’urticaire et des cloques, ou encore des réactions allergiques.

Mais au-delà de ces manifestations physiques, il ne faut pas négliger les effets émotionnels et psychologiques de ces insectes sur leurs victimes.

Une infestation par des punaises de lit a souvent pour effet secondaire de susciter une inquiétude constante et un sentiment de honte. La rencontre avec ces parasites peut entraîner de la nervosité, de l’anxiété et des insomnies. Un Canadien en détresse l’a exprimé ainsi :

« Pour être honnête, tant que vous n’avez pas vécu une [infestation], vous n’avez aucune idée de l’horreur que cela représente. Il est tout à fait naturel de devenir paranoïaque ; on perd le sommeil, on finit par rêver et penser aux punaises de lit – elles consument chaque fibre de notre être… »

Une étude sur les personnes qui ont été confrontées aux punaises de lit a d’ailleurs révélé qu’environ la moitié d’entre elles ont rapporté des troubles du sommeil et un isolement social liés à l’infestation.

Avec mon collègue, nous avons analysé 135 messages Internet concernant des infestations de punaises de lit. La majorité d’entre eux (81 %) faisaient état d’au moins trois comportements généralement associés au syndrome de stress post-traumatique : des réactions de reviviscence de l’événement avec des souvenirs intrusifs et des cauchemars, des sursauts, et une hypervigilance.

Six messages décrivent des nettoyages intenses et répétés de la maison ou du bureau. Cinq font état d’un évitement persistant des personnes, des activités et des lieux susceptibles d’entraîner la transmission d’insectes ou d’éveiller des souvenirs de la rencontre initiale. Enfin, cinq messages font état de pensées suicidaires ou de tentatives de suicide. Il existe d’autres rapports anecdotiques de suicides ou d’overdoses de drogues concernant des personnes luttant contre les punaises de lit.

Comment se protéger

Bien sûr, toutes les chambres d’hôtel ne sont pas infestées de punaises de lit, mais certaines le sont. Des précautions simples peuvent contribuer à vous protéger contre une infestation. Voici quelques recommandations simples.

● À l’hôtel : laissez les choses dont vous n’avez pas besoin dans votre véhicule, tels que les vêtements supplémentaires, le matériel et l’équipement divers. Lorsque vous entrez dans votre chambre d’hôtel, placez vos bagages dans la salle de bain jusqu’à ce que vous ayez eu l’occasion d’inspecter les lieux. Retirez les draps et vérifiez que le matelas et le sommier ne contiennent pas de punaises de lit vivantes ou de taches fécales noires.

Si vous trouvez des punaises ou des signes suspects d’infestation, rendez-vous à la réception et demandez une autre chambre. Comme les punaises de lit ne se déplacent généralement pas beaucoup par elles-mêmes, d’autres chambres non adjacentes peuvent être parfaitement exemptes de parasites.

● À domicile : il peut être difficile d’empêcher les punaises de lit d’entrer dans les maisons et les appartements, surtout si vous voyagez beaucoup. Après un voyage, défaites les bagages à l’extérieur ou dans le garage, et lavez tous les vêtements qu’ils contenaient à l’eau chaude puis séchez-les à haute température si possible (le sèche-linge est un excellent outil dans la lutte contre les punaises de lit).

Les punaises de lit peuvent également s’introduire dans votre maison, via des meubles de seconde main ou des articles achetés dans des magasins d’occasion ou lors de brocantes par exemple. Veillez à les désinfecter – plus précisément à les « désinsectiser ». Il est par ailleurs conseillé de ne jamais acheter de matelas ou de lits usagés, même s’il s’agit d’une bonne affaire…

Que faire si vous vous retrouvez confronté à ces suceurs de sang ?

Comme mentionné précédemment, une infestation de punaises de lit découverte dans une chambre d’hôtel doit être immédiatement signalée à la direction. Si vous trouvez des punaises de lit chez vous, ou si vous en détectez sur des objets achetés d’occasion, il est préférable de ne pas essayer de les traiter vous-même au moyen des pesticides en vente libre. Je vous recommande plutôt de contacter un exterminateur compétent, qui traitera votre espace de vie avec des pesticides adaptés, ou procédera à une désinsectisation thermique – voire les deux – pour vous débarasser de ces insectes.

Quoi qu’il en soit, essayez de ne pas paniquer. N’oubliez pas qu’il ne s’agit que d’insectes qui n’ont rien de maléfique… Croyez-moi : il est parfaitement possible de les éliminer et d’en débarasser votre logement.

Cerveau: on peut apprendre à tout âge

Cerveau: on peut apprendre à tout âge

par Alice Latimier, Laboratoire de sciences cognitives et psycholinguistique, École normale supérieure (ENS) – PSL dans the Conversation


À 55 ans, Philippe a retrouvé du temps pour lui, depuis que ses enfants ont quitté la maison. Pourquoi n’apprendrait-il pas enfin le piano, comme il en a toujours rêvé ? Mais à 55 ans, se dit-il, je ne suis plus capable d’apprendre, je suis trop vieux et mon cerveau n’est plus aussi performant qu’à 20 ans… Nathalie, elle, a 30 ans. Pour son évolution de carrière, elle doit choisir entre un poste en Allemagne, qui ne l’attire pas vraiment, et un autre en Espagne, qu’elle juge formidable. J’aurais dû faire espagnol au lycée, regrette-t-elle, c’est trop tard aujourd’hui pour se mettre à une nouvelle langue.

Ce sentiment d’être trop vieux pour apprendre quoique ce soit de nouveau, beaucoup de personnes l’éprouvent. Mais est-il justifié ? Y a-t-il effectivement une limite d’âge à partir de laquelle notre cerveau n’est plus capable d’apprendre à jouer d’un instrument ou à parler une nouvelle langue ?

Apprendre, c’est en réalité l’activité de toute une vie. Dès le plus jeune âge, notre cerveau mobilise une grande partie de ses fonctions (attention, mémoire, vision/audition, motricité…) pour que nous puissions acquérir de nouveaux savoirs et savoir-faire. Quels sont les mécanismes qui nous permettent d’apprendre ? Et comment évoluent-ils avec le temps ?

Des connexions entre les neurones renforcées ou diminuées

L’apprentissage est un processus cognitif dynamique qui se déroule en deux étapes : l’acquisition d’une nouvelle information et son stockage en mémoire. Le résultat d’un apprentissage est en quelque sorte l’empreinte qui reste dans notre cerveau après que l’on ait vécu une expérience. Plus précisément, les neurones concernés par cette expérience ou l’acquisition d’une nouvelle information changent la manière dont ils dialoguent entre eux : leurs connexions (les synapses) se voient renforcées ou diminuées.

Parfois, la dynamique de nos apprentissages conduit purement et simplement à l’élimination de certaines connexions neuronales qui n’ont plus lieu d’être au profit d’autres connexions plus « utiles ». On parle, de manière imagée, d’un « élagage » synaptique (pruning en anglais), comme pour un arbre dont on coupe les branches encombrantes. Il se produit principalement durant l’enfance et ce grand chamboulement qu’est l’adolescence.

Ces modifications à l’échelle des neurones, en lien avec ce que nous apprenons, sont particulièrement intenses pendant l’enfance, alors même que nous acquérons une grande quantité de connaissances et développons de nouvelles compétences comme voir, toucher, marcher ou parler. Elles ont un impact à l’échelle du cerveau tout entier, en participant à la transformation des différents réseaux de neurones.

Une dynamique qui change la structure de notre cerveau
Les apprentissages laissent donc dans notre cerveau une trace physique de leur survenue, et cette dynamique s’appelle la plasticité cérébrale. La découverte de ce mécanisme par les neuroscientifiques a permis de comprendre une chose essentielle : rien n’est figé dans notre cerveau !

La plasticité cérébrale permet de remodeler le cerveau en permanence selon nos apprentissages. Ce remodelage est non seulement relativement rapide mais réversible. En effet, une équipe de chercheurs a trouvé que certaines régions du cerveau chez de jeunes adultes présentaient des modifications structurelles importantes après trois mois d’apprentissage à la jonglerie, par rapport à des personnes n’ayant pas suivi cet apprentissage ; et ces modifications disparaissaient quelques semaines après l’arrêt de cette activité. Voilà pourquoi les artistes s’entraînent tous les jours !

Nous sommes en quelque sorte « programmés » pour apprendre. L’organisation de notre cerveau peut s’adapter et se reconfigurer à tout moment, en fonction des expériences que nous vivons dès le plus jeune âge.

Il n’y a pas d’âge pour apprendre une nouvelle langue

Certaines périodes de la vie sont plus propices à certains apprentissages. La recherche en psychologie du développement a ainsi déterminé des « fenêtre temporelles » qui correspondent à des périodes durant lesquelles le cerveau a une capacité particulière à recevoir les informations de l’environnement. Par exemple, l’acquisition de la langue maternelle a fait l’objet de nombreuses études, et il semble qu’il existerait une fenêtre temporelle particulièrement propice à l’acquisition du langage. D’où cette idée répandue – à tort – que plus on vieillit, plus il est difficile d’apprendre une seconde langue. Même s’il semble en effet y avoir une période clé pour l’acquisition de la langue maternelle, c’est beaucoup moins clair pour une seconde langue.

Apprendre à parler une langue étrangère, à jouer d’un instrument, ou se lancer dans la peinture : la plasticité de notre cerveau nous le permet, quelque soit notre âge. Jules Zimmermann/Cog Innov, CC BY-NC-SA
L’équipe de Ana Ines Ansaldo, chercheuse en psychologie à l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal (Canada), s’est intéressé à l’apprentissage d’une seconde langue chez des personnes adultes. Les chercheurs ont demandé à des non-hispanophones, un groupe de jeunes adultes et un groupe de personnes de plus de 65 ans, d’apprendre 100 mots en espagnol sur une période de trois semaines. Lors d’un test à l’issue de cet entraînement, les personnes âgées ont obtenu des temps de réponse et des nombres de bonnes réponses comparables aux jeunes adultes, montrant que les deux groupes ont des performances d’apprentissage similaires.

Et ce qui vaut pour le langage et les connaissances déclaratives (explicites) vaut aussi pour les connaissances procédurales (implicites, en lien avec les gestes et les mouvements). Ainsi, l’expérience de jonglage citée précédemment a été répliquée pour comparer, cette fois, la performance des personnes âgées par rapport aux jeunes. Les performances finales sont moindres chez les personnes âgées, cependant le même phénomène de plasticité a été observé. Autrement dit, l’apprentissage du jonglage a été moins efficace chez elles, mais les traces cérébrales de cet apprentissage sont bel et bien présentes.

Certaines compétences sont modifiées par le vieillissement normal du cerveau. Un apprentissage plus long peut être nécessaire pour compenser l’effet de l’âge. Mais le mécanisme de plasticité cérébrale permettant d’apprendre est présent toute la vie.

Un apprentissage plus long chez les personnes âgées

Plusieurs études ont mesuré les conséquences du vieillissement cognitif en utilisant une combinaison de tests de performance mentale. Leurs résultats montrent que les personnes plus âgées ont en moyenne des temps de réaction plus longs, une mémoire moins fiable, une perception sensorielle altérée, et elles ont plus de difficultés à résoudre des problèmes. Ces déficits mesurés en laboratoire seraient un frein à l’acquisition d’informations nouvelles.

Mais de telles études occultent une dimension importante de l’avancée en âge : l’accumulation des expériences au cours de la vie augmente la quantité de connaissances stockées dans le cerveau. En effet, cette accumulation d’expériences et la complexité des connaissances qui y sont associées sont plus importantes chez les personnes âgées. Ce qui rendrait plus difficile l’acquisition de nouvelles connaissances.

Cette expertise constituerait donc un handicap et expliquerait les résultats inférieurs des personnes âgées par rapport aux jeunes cerveaux. Mais pourrait-elle avoir certains bénéfices ?

L’expérience, un levier pour l’apprentissage

Dans l’expérience sur l’apprentissage de l’espagnol déjà citée, l’imagerie cérébrale des personnes âgées montre une activation particulière de certains réseaux de la mémoire qui n’est pas retrouvée chez les plus jeunes. Cette activation spécifique est celle de la mémoire dite « sémantique », qui stocke notamment les connaissances générales sur le monde. Dans le contexte d’un défi cognitif, comme apprendre une seconde langue, les personnes âgées font appel à leur expérience personnelle comme ressource cognitive en plus. Leur vécu plus fourni en expériences personnelles se révèle ainsi comme une aide à l’apprentissage.

En vieillissant, nous pouvons tirer profit de notre raisonnement plus affûté pour apprendre de nouvelles informations, même s’il est parfois plus lent à se mettre en route. Le recrutement spécifique de certaines régions du cerveau chez les personnes âgées lors d’un apprentissage nouveau serait le reflet de cet appel à l’expertise.

Il ne faut pas pour autant minimiser le vieillissement cérébral. Celui-ci est bien réel, comme le montre notamment la diminution mesurable de l’épaisseur du cortex, et les modifications de certaines performances mentales. Cependant, ces dernières sont à nuancer car les tests psychométriques ne tiennent pas compte de la richesse de l’expérience humaine, ni de la façon dont la connaissance augmente avec l’expérience.

La plasticité du cerveau « s’entretient »

« L’entretien » de notre cerveau semble jouer un rôle clé pour le maintien de sa plasticité entre 30 et 60 ans. Cette capacité est affaiblie si et seulement si nous cessons d’apprendre et de maintenir un état de curiosité à la nouveauté. Le chercheur Pierre Marie Lledo, neuroscientifique à l’institut Pasteur, explique qu’une combinaison de facteurs peut être bénéfique pour le maintien de cette plasticité incluant l’activité physique, peu de stress, ne pas consommer de psychotropes, et avoir des relations sociales en plus d’une activité cognitive régulière.

À tout âge, si les circonstances sont propices et en l’absence de pathologies neurologiques, apprendre par l’expérience reste la principale activité de notre cerveau au quotidien ! Même si les mécanismes de l’apprentissage sont moins performants à partir d’un certain âge en terme de vitesse d’acquisition, la plasticité cérébrale perdure toute la vie si nous maintenons notre esprit ouvert et actif pour de nouvelles expériences. Contrairement à ce que la recherche a longtemps pensé, nous ne sommes pas enfermés dans un déterminisme biologique qui nous permettrait d’apprendre seulement jusqu’à un certain âge.

Donc, du point de vue du fonctionnement du cerveau, rien n’empêche Philippe d’apprendre le piano à 55 ans, ni Nathalie d’apprendre l’espagnol à 30 ans. Leur vécu personnel et leur désir d’apprendre seront d’ailleurs des clés dans leur apprentissage.

À l’horizon 2070, le nombre de personnes âgées de plus de 75 ans devrait doubler et atteindrait alors 13 millions en France, selon l’Insee. Quelle place allons-nous donner aux seniors dans cette société vieillissante ? Allons-nous cantonner cette partie importante de la population à vivre dans son passé et ses souvenirs, ou bien la considérer pour ce qu’elle est, capable d’évoluer et d’apprendre ? Les données de la recherche en sciences cognitives peuvent servir d’outils concrets pour rendre la formation accessible tout au long de la vie.

« Crise climatique : apprendre à fermer des activités »

« Crise climatique : apprendre à fermer des activités »

 

Plaidant pour une écologie du démantèlement, les chercheurs Emmanuel Bonnet, Diego Landivar et Alexandre Monnin préviennent, dans une tribune au « Monde », que l’humanité doit se préparer à « fermer » ce qui la détruit.

 

Tribune.

 

 Il va falloir s’habituer à ce que, désormais, chaque nouveau rapport du Groupe d’experts intergouvernemental (GIEC) sur l’évolution du climat génère un sentiment de lassitude supplémentaire. Pourquoi n’arrivons-nous pas à enclencher cette satanée « transition » ? Nous voudrions défendre ici une hypothèse relativement naïve, mais qui pourtant semble peu évoquée : si nous ne parvenons pas à traduire les alertes climatiques et écologiques en actes concrets à la hauteur de ces enjeux, c’est parce que nous n’arrivons pas à « fermer les choses ». En clair, plus que d’un renversement théorique ou d’une réforme impossible du capitalisme, nous avons besoin de le fermer concrètement.

 

Nous le voyons tous les jours. On mettra sûrement plus de trente ans à nous débarrasser du glyphosate depuis les premières études sur son écotoxicité. La fermeture ne serait-ce que d’une centrale nucléaire a pris à la France une dizaine d’années ; son démantèlement va s’étaler pendant plusieurs décennies. Dans l’Alberta, ni les pouvoirs publics ni les entreprises privées ne sont encore prêts à assumer la gestion des 95 000 puits de pétrole délaissés. A Detroit, la démolition de milliers de mètres carrés de bâtiments abandonnés est prise en charge par une poignée d’associations de riverains armés d’outils improvisés pour répondre à des besoins de subsistance critiques. Alors que les liaisons aériennes locales pourraient être rapidement abandonnées pour des raisons écologiques évidentes, une grande partie des élus locaux s’accrochent à la promotion de « l’attractivité » de leur territoire. Après six ans de travail, 24 milliards d’euros investis, 16 000 personnes impliquées et 20 millions de mètres cubes de déchets, seul un tiers du territoire autour de la centrale de Fukushima a été correctement dépollué…

Conquête cosmologique

Pourquoi n’arrivons-nous pas à bien fermer les choses ? D’abord parce qu’un des traits anthropologiques majeurs des modernes est celui de « l’ouverture ». Héritage de notre front de modernisation, il sous-tend notre modèle de développement et nous conduit à penser le monde et ses situations écologiques critiques uniquement sous le mode du projet (administratif, économique, social ou technologique), de la gestion et de l’ingénierie. L’innovation, la création, la production seraient encore une fois les armes les plus évidentes pour dépasser la situation climatique et nous permettre de conserver notre modèle de développement.

Apprendre à vivre durablement avec le virus!

Apprendre à vivre durablement avec le virus!

 

Le Pr Michaël Peyromaure est chef du service d’urologie à l’hôpital Cochin de Paris.  Il s’étonne de la sous estimation de la gravité de la situation par les pouvoirs publics et considère qu’il faut apprendre à vivre durablement avec le virus (interview Figaro)

 

 

Sans doute, et j’en fais peut-être partie aux yeux de certains, d’autant plus que je suis bien loin d’être spécialisé dans les maladies infectieuses! Mais la plupart des confrères que j’entends développent des points de vue très consensuels, avec lesquels je suis souvent en désaccord. Ceux qui ne sont pas dans la ligne sont automatiquement taxés de rassurisme. C’est ce qui est arrivé à Didier Raoult, dont certaines positions sont pourtant dignes d’intérêt.

 

 

Exagère-t-on la gravité de cette pandémie?

 

Depuis le début, on nous assomme de prévisions catastrophistes. Il y a un an, on pouvait le comprendre face à la soudaineté du phénomène. Mais ces dernières semaines, avec l’émergence du variant anglais, j’ai été frappé par les assertions de quelques sommités. Bruno Riou, directeur médical de crise de l’AP-HP, a déclaré: «La situation n’est plus inquiétante mais terrorisante.

«Apprendre à aimer la France» (Général de Villiers )

  •  «apprendre  à aimer la France» (Général de Villiers )
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  • «Il y a une coupure entre les citoyens et ceux qui dirigent», a indiqué mercredi Pierre de Villiers.
  •  «Au travers de mes rencontres, j’ai noté ce délitement du creuset national. Délitement territorial : on ne vit pas aujourd’hui de la même manière au centre d’une grande ville, à la campagne, ou dans une cité», dit-il.
  • «Ces jeunes qui partent en vrille, il faut les remettre dans le doit chemin avec une approche globale. Pas simplement la sécurité et l’ordre. Il faut commencer par l’école, donner le cadre.»
  • L’ancien chef d’état-major des armées propose dans un nouveau livre L’équilibre est un courage une stratégie et des lignes de conduite pour retrouver l’unité. Il s’agit de son troisième livre en trois ans. Il assure que sa démarche et ses livres partent d’une intention «désintéressée» quand on l’interroge sur une candidature à la présidentielle de 2022. «Ce n’est pas à l’ordre du jour, je propose des solutions, je veux le débat, j’essaie d’inspirer les dirigeants», assure-t-il.
  • «Il faut que le moral des troupes soit pris en compte» pour sortir des crises, ajoute-t-il.
  • Interrogé si la France était trop laxiste, il a asséné : «après chaque attentat, c’est la même chose, puis il y a une loi. Cela ne suffit pas. Je pense qu’il faut appliquer la loi dans la totalité. On doit pouvoir fermer une salle radicale en six mois ou expulser un imam qui crache sur la France chaque vendredi très rapidement».

Numérique: apprendre à maîtriser la technologie

Numérique: apprendre à maîtriser la technologie

Fondateur de l’Institut Sapiens, Olivier Babeau vient de publier Le nouveau désordre numérique, sous-titré : comment le digital fait exploser les inégalités. Son point de départ est cruel : si la crise de la Covid-19 a consacré le triomphe du numérique, les nouvelles technologies portant l’espoir d’un monde plus égalitaire, « l’espoir est cruellement déçu. ». Il propose d’apprendre à maîtriser les nouvelles technologies dans une interview à l’Opinion.

Vous soutenez que le numérique a accéléré la polarisation du monde. De quelle manière ?

Le XXe siècle a vu un prodigieux mouvement d’égalisation des conditions et l’émergence d’une grande classe moyenne aux Etats-Unis et en Europe. On a pensé que le développement économique créait inévitablement cette égalisation des conditions. C’était un effet d’optique. Cette société où s’épanouissait une grande classe moyenne unificatrice n’était pas une nouvelle ère, mais qu’une courte parenthèse. Les nouvelles technologies dopent la valeur ajoutée du travail très qualifié, mais font baisser la valeur des autres. La classe moyenne disparaît au profit d’une polarisation sociale. Le numérique accélère les différences entre ce que David Goodhart appelle les Anywheres, cosmopolites et mobiles, et les Somewheres, attachés à leur communauté et à leur espace géographique. C’est l’effet Matthieu, connu des économistes par référence à la phrase de l’apôtre : « On donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas on ôtera même ce qu’il a. »

Le numérique devait pourtant aplanir les inégalités économiques et sociales et renforcer la démocratie. Nous sommes au final dans ce que vous décrivez comme le « siècle des excès ». Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?

Quand les technologies arrivent, on a toujours une idée floue de leur usage et de leurs effets sociaux. Quand on a inventé le téléphone, on a d’abord pensé qu’il servirait à écouter des pièces de théâtre à distance ! Le plus dur quand on veut faire de la prospective, c’est d’imaginer la façon dont les technologies sont assimilées et dont elles transforment la société. Il y a un double mouvement : la technologie est transformée par les usages en même temps que la société est changée par les technologies. Jusque dans les années 2010, les conséquences des réseaux sociaux sur la démocratie — l’invasion des imbéciles, l’hystérisation des expressions, la violence des attaques en meute, la prime à l’excès et l’abolition de la nuance — étaient impossibles à imaginer. Dans le monde d’avant ce désordre informationnel, l’information était rare. Et quand on la trouvait, elle était certifiée. Rien ne nous avait préparés à un monde où cette information pouvait être créée par tout le monde. Ce déluge informationnel noie le débat politique.

L’homme s’est bâti sur le dépassement des limites naturelles à notre hubris, notre désir d’excès. Le numérique a donné des moyens nouveaux d’abolir ces barrières

Le numérique portait-il en lui-même les germes de ces biais ?

Le numérique a permis l’accélération et l’intensification de beaucoup de choses, comme la concentration des fortunes : Jacob Fuger, grand banquier Allemand de la fin du XVe siècle, avait amassé un capital équivalent à 177 millénaires de travail pour un ouvrier. C’était impressionnant, mais limité à côté de la fortune de Jeff Bezos qui correspond à plus de 10 millions d’années de travail d’un salarié au smic. L’homme s’est bâti sur le dépassement des limites naturelles à notre hubris, notre désir d’excès. Le numérique a donné des moyens nouveaux d’abolir ces barrières. Jusqu’au XVIIIe siècle, il fallait 15 jours depuis Marseille pour rejoindre Paris, ou deux ans pour faire l’aller-retour vers la Chine. Aujourd’hui, 15 jours est le temps que mettent les trains venant de Chine pour rallier la France. Mais le marché n’est réellement devenu global que le jour où il est devenu numérique. Avec pour conséquence des effets de concentration qui n’existaient pas dans les anciens marchés segmentés, plus petits et dépendants de l’espace.

Le confinement a révélé les écarts en matière d’accès et de maîtrise des technologies. La nouvelle inégalité du XXIe siècle oppose-t-elle les élites technophiles aux populations déconnectées ?

On se rend compte que l’accessibilité de l’information ne profite qu’à une certaine partie de la population. Celle qui a les clés. Après avoir été fondée sur la seule naissance, l’appartenance à l’élite a théoriquement été ouverte aux talents. Mais les codes de la réussite dans le monde numérique sont plus complexes et difficiles à obtenir quand on est issu d’un milieu qui en est éloigné. Les chiffres sont terribles sur l’illectronisme. En 2018, 23 % des Français n’étaient pas à l’aise avec le numérique. La mobilité sociale devient plus difficile à mesure que la fracture cognitive s’aggrave.

Vous soulignez tout de même un paradoxe : dans un monde où l’élite est connectée, la richesse se traduira par un temps d’esprit non connecté…

Dans notre siècle numérique, le vrai luxe sera l’autonomie. La technologie est un formidable serviteur, mais un très mauvais maître. Les entreprises du numérique ont la volonté délibérée de prendre en otage notre attention tout en nous rendant de précieux services. Nous sommes devenus dépendants du shoot de dopamine suscité par les « likes » et les notifications de nos réseaux sociaux. Notre cerveau de chasseur-cueilleur n’a pas été calibré pour cet afflux permanent de sollicitations et de calories. Ses failles sont exploitées avec adresse par les entreprises qui manipulent nos pulsions. La maîtrise de son alimentation est déjà un marqueur social fort : l’épidémie d’obésité que nous connaissons dans tous les pays développés est cruellement liée au niveau social. Désormais, c’est la maîtrise cognitive de soi qui devient cruciale. Les classes sociales supérieures développent une culture d’apprivoisement du numérique à travers le contrôle des écrans qui est paradoxalement la condition d’une utilisation saine.

Avons-nous encore la possibilité d’être libres dans un monde numérique qui a colonisé nos cerveaux ?

Le numérique a aboli la rareté de biens et services autrefois difficiles à obtenir et onéreux. La vidéo et la musique sont disponibles à l’infini et sans effort, comme l’eau ou l’électricité. Dès lors, c’est à nous de fixer une limite à notre consommation. Ce que notre cerveau n’était pas vraiment préparé à faire. Le fondateur de Netflix a dit un jour que son seul concurrent était le sommeil. Où mettre la limite ? Le système lui-même n’en posera jamais : il est réglé pour suivre la plus grande pente de nos désirs. On pensait qu’il suffisait de laisser les gens libres et responsables pour qu’ils prennent des décisions raisonnables. On se rend compte qu’il va surtout falloir beaucoup aider les gens. La Chine a opté pour une solution radicale en interdisant aux mineurs de jouer aux jeux vidéo entre certaines heures et en infligeant de fortes amendes aux jeunes joueurs dépassant les 90 minutes maximum quotidiennes. C’est la solution illibérale par excellence : pour votre bien, l’Etat limite et interdit. Si nous voulons éviter cela, nous devons miser sur la prise de conscience et l’éducation.

Notre cerveau est bien fait. Il élimine ce dont il n’a plus besoin : la mémoire se vide. Nous devons réagir et devenir des spartiates de l’intelligence en plaçant le développement de nos capacités cognitives au cœur de toute notre société

De quelle manière ?

On a besoin que l’école enseigne un nouveau savoir-vivre, au sens plein du terme. Comment maîtriser la technologie pour profiter de ses avantages tout en évitant les dérives cognitives potentielles ? Aujourd’hui, le réflexe, c’est de tout demander à Google. Mais dans ce cas, pourquoi continuer à apprendre ? Notre cerveau est bien fait. Il élimine ce dont il n’a plus besoin : la mémoire se vide. Nous devons réagir et devenir des spartiates de l’intelligence en plaçant le développement de nos capacités cognitives au cœur de toute notre société. La maîtrise de soi doit être complétée par des régulations adaptées. L’Etat doit vous laisser libre, mais aussi vous empêcher de tomber librement dans la servitude. Comme il le fait en interdisant la drogue par exemple. L’action de l’Etat ne doit pas se limiter à essayer de récupérer des miettes fiscales du festin financier des géants du net, ou à ériger d’illusoires remparts censés protéger des acteurs traditionnels. Aguerrir les populations au monde de l’information infinie et affronter les innovations avec courage sont les deux tâches essentielles de l’Etat moderne.

Votre livre dresse un constat assez noir sur l’état actuel du monde et ses perspectives. Etes-vous optimiste concernant l’avenir ?

Je suis optimiste sur la capacité de sursaut et de résilience de nos sociétés à long terme. Mon inquiétude vient plutôt du temps que nous risquons de perdre. Une civilisation mourante finit toujours par accoucher d’une nouvelle civilisation. Mais la traversée des âges obscurs entre les deux peut être plus ou moins longue. Je pense hélas que nous sommes au début d’une de ces phases de métamorphose qui peuvent être très douloureuses, en particulier pour les plus faibles.

Éric Dupond-Moretti doit apprendre à » souffrir en silence »

Éric Dupond-Moretti  doit apprendre à » souffrir en silence »

C’est la recommandation du président de l’Assemblée nationale à  Dupond Moretti le nouveau ministre de la justice, un peu bousculé leur de sa présentation au Parlement. Régulièrement interrompu, Dupond Moretti a demandé si  les interruption étaient  prise en compte dans son temps de parole. Réponse non sans malice du président de l’Assemblée nationale : « oui, on souffre en silence ». Une remarque quand même sans doute un peu perfide qui peut constituer une sorte de recommandation. L’assemblée nationale n’est pas en effet un tribunal ou la  parole est strictement limitée voire interdite . Au Parlement tous les élus sont conviés au débat en plus parfois assez contradictoire mais aussi confus. Pour retomber dans ses chaussures, Dupond Moretti a souhaité ce contradictoire. Il ne sera sans doute pas déçu, surtout compte tenu de sa personnalité un peu bouillante qui sera mise à l’épreuve dans le chaudron parlementaire. Cela d’autant plus que même au sein de la majorité se manifeste un certain mécontentement quant au processus d’élaboration et de décision législatif qui fait trop de place au gouvernement.

Apprendre à penser global (Edgar Morin)

Apprendre à penser global (Edgar Morin)

 

Edgar Morin est sans doute l’un des rares intellectuels qui invite à comprendre la complexité de ce monde au lieu de se renfermer dans des analyses sectorielles ou simplistes. Comme l’indique Edgar Morin cette pensée globale reste construire. L’exercice est en effet difficile et plusieurs approximations de Morin dans plusieurs domaines le démontrent.  Il faut prendre en compte les effets systémiques des différentes interactions qui affectent les domaines économiques, sociaux, environnementaux, culturels et sociétaux. Mais  la science ne cesse de se parcelliser y compris les sciences sociales du coup l’analyse père en cohérence globale. Un reproche toutefois, la critique qu’il fait aux économistes trop technocratiques à son goût pourrait se retourner contre les sociologues (et autres philosophes) qui de leur côté ignare après pourrait tout de la problématique économique (que Morin réduit à l’intérêt, ce qui est un peu court). L’analyse du monde  est forcément plus complexe. Edgar Morin Entend par là non pas une pensée compliquée, mais plutôt une méthode pour se guérir de la tendance à la simplification que nous avons dans notre rapport au monde. « Pour pouvoir créer une voie nouvelle, il faut abandonner totalement la pensée binaire qui règne plus que jamais (…) Celle qui pense ou bien ou bien et non pas et et. », affirme-t-il. Surtout, il faut penser « global », c’est-à-dire articuler le tout et la partie, que nous avons tendance à fréquemment confondre. Au contraire, Edgar Morin veut relier  – c’est l’étymologie de « complexus » – les éléments entre eux en les contextualisant, en les distinguant, pour non pas « détruire l’incertitude, mais la repérer » afin « d’éviter la croyance en une vérité totale. » Une telle « pensée complexe » reste encore largement à développer. Réinscrivant le devenir de l’homme dans l’univers (physico-cosmologique), dans la nature et l’espèce (évolution biologique), et dans son humanité (histoire), l’auteur de cette cathédrale qu’est « La méthode » (6 tomes) souligne l’effet mutilant de l’organisation même du savoir dans nos sociétés modernes : « En règle générale, les sciences humaines sont compartimentées, (…) entraînant de fait une dissolution totale de l’idée d’homme ». Il va jusqu’à critiquer la rationalisation – expression qui peut donner lieu à une confusion, il vise plutôt la pensée statistique – qui, selon lui, peut être source de dogmatisation. A rebours, cette pensée se veut ouverte – elle devrait inspirer les entrepreneurs des startups -, permettant d’accueillir des déviances dans l’histoire des hommes et de la nature. « Il y a dans l’histoire humaine un processus qui est à peu près le même que dans l’histoire biologique. Une déviance apparaît qui, si elle se consolide et se développe, devient une tendance, et cette tendance devient une force historique, une force créative, une force décisive dans le processus évolutif. » Ainsi, le capitalisme se développe initialement en parasite de la société féodale. De même, la machine à vapeur, invention inattendue en 1784 par James Watt, va changer radicalement le sens de l’histoire. Le monde industriel va détruire la paysannerie traditionnelle aux XVIe et XVIIe siècles. L’histoire « avance de travers comme un crabe », procède par destruction. Selon Morin, « la formule de Schumpeter, la « destruction créatrice », est fausse : c’est la création qui est destructrice. » Tout ce travail d’érudition pluridisciplinaire permet au sociologue de pouvoir repenser le système social, notamment en évitant le débat créé par l’opposition individu/collectif. « Le développement personnel sans la communauté et sans l’amour est le développement de l’égocentrisme et de l’égoïsme. Si on a uniquement la communauté, on a l’étouffement de l’épanouissement personnel », rappelle-t-il. Pour autant la société n’est pas une entité fixe mais une création permanente. « A travers les interactions entre individus s’est constitué un tout social, lequel a produit un langage, formé une culture, puis après les premières sociétés archaïques qui avaient une organisation mais pas d’Etat, sont apparus des Etats, des lois, etc. » Cette dynamique produit en retour ses effets : « Ces qualités émergentes rétroagissent sur les individus parce qu’elles donnent la capacité de lire, d’écrire, de compter grâce à la lecture, au langage ; elles donnent par l’éducation l’ensemble des connaissances minimales nécessaires pour se mouvoir dans la société. »Cette histoire des sociétés a établi solidement le modèle des d’Etats-nations. Ce qui peut s’articuler sans problème avec le phénomène de la mondialisation, qui amplifie le processus d’intercommunications, d’interdépendances qui crée « une réalité de nature globale ». Par exemple, le global modifie le local mais un événement local, comme l’attaque terroriste des deux tours de Manhattan, se répercute sur la réalité globale. Tout ce long détour historique qui a visé, au sens propre, à remettre l’homme à sa place débouche sur une nécessaire interrogation sur l’avenir. Edgar Morin envisage une métamorphose, « pleine de dangers, qui est biologique, informatique et technique », notamment, celle de « transhumanité » que l’auteur ne voit d’ailleurs pas comme « une idéologie, une illusion » mais davantage comme « une possibilité concrète ». Mais à condition, rappelle-t-il, avec des accents d’un moderne Montaigne, de l’encadrer : « La connaissance sans régulation éthique peut conduire à des utilisations terrifiantes. » Ainsi, l’auteur s’invite dans le débat sur l’immortalité, ou, à tout le moins, d’une longue vie. Comme il le rappelle Morin, et l’interrogation est vieille comme l’humanité, nous ne sommes pas des Dieux : « On peut créer des êtres démortalisés mais non immortalisés par ces processus de rajeunissement. La mort ne cessera de menacer les démortalisés », soulignant que, sur le plan anthropologique, « nous savons que nous sommes mortels, qu’on ne peut pas y échapper, mais quand nous penserons que la mort, indéfiniment retardée, peut être toujours menaçante, la vie sera extrêmement angoissante. » Autre métamorphose qu’Edgar Morin anticipe, la montée de la robotique : « Sa contribution au confort humain, avec des appartements intelligents, des villes intelligentes permettent de transférer sur les robots beaucoup de tâches fastidieuses, pénibles, de contrôle, de surveillance que nous subissons. » Mais ces métamorphoses ont un envers : « Il est tragique que la métamorphose transhumaine ait commencé sous la poussée du triple moteur scientifique/technique/économique alors que la métamorphose éthique/culturelle/sociale, de plus en plus indispensable, soit encore dans les limbes. »Si l’on ne peut qu’être stimulé par la réflexion de l’auteur qui prône « une nouvelle politique civilisationnelle », on terminera sur une note critique. La « pensée complexe » réduit l’économie à un excès de rationalisme déshumanisant, et une hubris simplificatrice, là où on aurait pu attendre une réflexion plus profonde sur la signification des échanges, sur l’émergence historique du marché – le commerce -, qui est aussi une création humaine ayant été gage de progrès dans l’histoire. Edgar Morin réduit en effet la sphère économique à la pure expression de l’intérêt. :« Nous sommes actuellement dans une civilisation où l’intérêt privé, personnel, est devenu de plus en plus important avec notamment une politique entièrement dévorée par l’économie, inféodée à l’économie, et pas n’importe quelle économie : l’économie qui parle uniquement des intérêts ».Pourtant, le sociologue souligne dans son livre combien l’homme ne se réduit pas uniquement à cet aspect, il est aussi un homo ludens, un être qui aime le jeu. Mais il est vrai que l’économie mondiale semble aujourd’hui hors de contrôle. « Contrairement à ce que prédisait la majorité des économistes officiels avant 2008, l’économie peut être sujette à des crises graves dont on ne sait pas quelles suites elles pourront avoir. Une sorte de tumeur s’est développée sur cette économie : la domination du capital financier spéculatif, qui utilise les traders, qui utilise les informations sur les Bourses nationales pour pouvoir spéculer sur l’argent ou sur les matières premières », critique-t-il. Le terme de « tumeur » est hautement polémique pour une organisation, les marchés à terme, qui sont critiqués pour leurs effets, Edgar Morin oubliant que ces marchés qui existent depuis le Moyen Age sont également un outil de couverture pour réduire les risques liés aux incertitudes. Un sujet qu’avait bien analysé l’un des pères de la sociologie, Max Weber, au début du siècle dernier dans son ouvrage « la Bourse ». Au delà, cette crise économique inquiète Edgar Morin. Elle peut certes se terminer avec des politiques visant à rééquilibrer les budgets avec des politiques de rigueur, mais c’est peut-être aussi « une crise qui vient des profondeurs de l’évolution historique, pas seulement en Europe et en Occident, mais dans le monde entier. »  Plus que jamais, il faut penser global.

 

Valls doit encore apprendre ( Hollande)

Valls  doit encore apprendre ( Hollande) 

C’est en substance ce que déclare Hollande à propos de Valls dans un documentaire qui sera diffusé lundi 13 avril sur France 3. Hollande qui sans doute commence à percevoir le danger Valls pour 2017. Hollande lui cherche à ressembler à gauche pour rendre crédible sa candidature et met la pédale douce sur le réformes tandis que Valls veut marquer son passage de réformateur et d’homme d’autorité ( le contraire de Hollande en faiat). Manuel Valls va-t-il se présenter à la présidentielle pour 2017? Interrogé sur ce point par Franz-Olivier Giesbert, François Hollande botte en touche :  »Il a une vie longue. Il est plus jeune que moi. Il est plus jeune que beaucoup d’autres. Il a le temps devant lui », estime le chef de l’Etat. « Vous le voyez Président? », relance le journaliste. « Quelquefois il faut apprendre à faire très bien ce pour quoi on a été nommé. Si on pense toujours à faire ce que le destin ne vous a pas encore permis d’accomplir, on ne fait pas ce que le président de la République vous a demandé de faire, être Premier ministre », grince François Hollande. Autre anecdote,  lors du premier été du retour de la gauche au pouvoir, Manuel Valls multiplie les déplacements en province sur les questions de sécurité. L’ex-ministre écologiste Cécile Duflot ironise sur cette attitude « caricaturale » :  »On a beaucoup parlé de l’été de François Hollande qui était en maillot de bain sur la plage. Je pense qu’il y avait un effet de contraste. Est-ce qu’il était voulu (par Manuel Valls, Ndlr)? Est-ce qu’il était mis en scène en disant ‘Voilà il y a le président en maillot de bain qui se baigne et moi pendant ce temps, sanglé dans mon costume, je suis sur tout les fronts’? Au bout d’un moment, j’ai blagué en disant qu’il y avait un petit chat qui était dans mon platane et qui n’arrivait pas à descendre. J’ai demandé si je pouvais appeler le ministre de l’Intérieur pour m’aider. Le président de la République m’a dit que oui je pouvais », lâche-t-elle dans un sourire.

 

Montebourg à l’école…pour apprendre l’économie !

Montebourg  à l’école…pour apprendre l’économie !

Curieux le parcours de Montebourg, il est sans doute incompétent en management d’entreprise puisqu’il retourne à l’école précisément pour apprendre la gestion ; ce qui ne l’a pas empêché d’être ministre de l’économie ! Incompétent donc pour diriger une entreprise mais qualifié pour diriger l’économie d’un pays ! A sa décharge, il n’est pas plus incompétent que les autres dans ce domaine puisque la plupart n’ont jamais mis les pieds dans une entreprise et encore moins dirigé l’une d’entre elles. Il faut dire que la plupart mettraient en faillite une petiite épicerie en moins de 6 mois  si on leur en confiait la gestion. Nos responsables sont surtout experts en bureaucratie, fiscalité et en pitrerie médiatique. Arnaud Montebourg va donc  reprendre les études. L’ex-ministre de l’Economie, évincé du gouvernement le 25 août, s’est inscrit à l’Insead, une prestigieuse école de commerce de Fontainebleau, pour y suivre le temps d’un mois une formation en management. « J’ai décidé de reprendre des cours parce que diriger une boîte est un vrai métier, je m’en suis rendu compte ces deux dernières années », explique-t-il dans les colonnes du Monde. Une formation qui a obligé Arnaud Montebourg à bousculer un peu ses habitudes, rapporte le quotidien du soir. Pour pouvoir suivre les cours, dispensés exclusivement en anglais, il révise ses langues étrangères deux heures par jour avec un prof particulier. Il a également dû accepter de dormir sur place, car la formation impose aux élèves de nombreux travaux de groupe, à préparer à la fin de la journée de classe. Pour assurer le financement de l’école, de l’ordre de 34.500 euros, il aurait sollicité une bourse. L’intéressé a toutefois tenu à préciser qu’il ne s’agissait pas de fonds publics : « C’est une école qui est financée par les entreprises. Il n’y a pas de demande de fonds publics. Par ailleurs je finance une partie (de la formation) sur mes économies personnelles », a-t-il déclaré au Journal de Saône-et-Loire. Sorti du gouvernement le 25 août, Arnaud Montebourg n’avait pas caché son intention de se retirer de la politique et de reprendre une vie de Français « ordinaire » : « Je vais prendre exemple sur Cincinnatus, qui préféra quitter le pouvoir pour retourner à ses champs et à ses charrues », avait-il expliqué lors d’une conférence de presse, se comparant à l’homme d’Etat romain du Ve siècle avant J.C. Son objectif? Créer sa propre entreprise, spécialisée dans le domaine médical, comme il le révélait début octobre. Un projet en bonne marche, comme le confie l’un de ses proches : « Il a déjà trouvé des associés et réuni l’argent, il devrait se lancer en janvier prochain ».

 

Valérie Trierweiler:  » un an d’apprentissage » ? Pour apprendre à se taire !

Valérie Trierweiler:  » un an d’apprentissage » ? Pour apprendre à se taire !

Une interview de Trierweiler pour ne rien dire. C’est justement ce qu’on attend d’elle et Il lui aura fallu « un an d’apprentissage » ; sans doute pour apprendre qu’il n’existe aucun statut officiel pour la compagne du président. La première dame de France, Valérie Trierweiler, a accordé une interview radio à Europe 1, ce vendredi matin, avant de présider le colloque national sur les violences faites aux enfants qui se tient au Sénat dans la journée. L’occasion de revenir sur sa première année aux côtés du président François Hollande, à l’Elysée.  « Un an d’apprentissage », donc. Valérie Trierweiler assume le terme. « Je l’avais dit au départ: je voulais qu’on me laisse le temps, on ne me l’a pas laissé, mais, bon, bah voilà je l’ai pris. (…) Il m’a fallu le temps de prendre mes marques. (…) Je ne dis pas que c’est difficile. Il y a de très belles surprises dans cette vie donc, non, non, je me réjouis d’être là où je suis aujourd’hui », a ajouté Valérie Trierweiler.   La compagne de François Hollande en a profité pour clarifier sa position et sa fonction. « Je suis journaliste. (…) Je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas… Je ne suis pas une femme politique, pas médecin. J’aide peut-être à faire venir quelques médias… » Par exemple au colloque qu’elle préside ce vendredi au Sénat.   Valérie Trierweiler a bien sûr évoqué le sujet des violences faites aux enfants à l’antenne d’Europe 1. « Très sensible à cette question », elle s’est engagée dans cette cause après la lecture du livre de Céline Raphaël, ancienne enfant battue, auteur de La démesure aux Editions Max Milo, interviewée à ses côtés ce vendredi matin.  Je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas…  « Il faut commencer par briser le silence. (…) Bien sûr, à chaque fois qu’on lit dans les journaux ces faits divers, ces prénoms d’enfants qui finissent par mourir sous les coups de ceux qui leur ont donné la vie, on se révolte, on s’insurge, on dit que c’est terrible. Mais après ça? Qu’est-ce qu’il se passe? Il ne se passe rien de plus! Donc ce colloque doit permettre déjà ça », a-t-elle estimé, annonçant la présence de quatre ministres.  Peut-elle aller plus loin sur ce sujet? Certaines propositions faites lors de ce colloque « peuvent passer par des lois, mais là ce n’est plus moi que ça concerne », a répondu Valérie Trierweiler, renvoyant la balle au sénateur André Vallini et à son « idée d’en faire une grande cause nationale ». « C’est un combat qu’il ne faudra jamais lâcher. On ne peut pas accepter qu’il y a deux enfants morts par jour sous les coups des adultes en France. »  Il s’agissait de la première interview radio en studio de Valérie Trierweiler depuis l’élection de François Hollande à l’Elysée. Sa présence est annoncée dans l’émission de C à vous, sur France 5, le 27 juin prochain. 

 

Manif anti homo : 50 manifestants ou 300 000 ? Il va falloir apprendre à compter !

Manif anti homo : 50 manifestants ou 300 000 ? Il va falloir apprendre à compter !

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La France a décidemment des problèmes avec les chiffres aussi bien ceux du chômage, de inflation, des déficits ou des manifestants. Lors de la dernière manif des antis homos, la police a compté 45.000 personnes. Or Les manifestants étaient 270.000 selon les organisateurs. Un léger écart ! Cela prouve à l’évidence que le calcul a forcément une dimension politique. D’ordinaire lors des manifs, la différence entre les chiffres de la police varie au maximum du simple au double, cette fois, c’est le pompon. Pour la prochaine manif du 26 mai on peut donc affirmer avec une certaine certitude statistique que la participation va se situer entre 50 manifestants et un million. De Toute manière au gouvernement on prévoit une inversion de la courbe des protestataires vers fin 2013 (comme pour le chômage), ce qui est vraisemblable et encore ! Pour sortir de l’impasse comptable, Hollande envisagerait la création une haute autorité d’évaluation des mouvements protestataires. Parmi les personnalités pressentis pour en faire partie, un proche du gouvernement qui a voulu gardé l’anonymat affirme que certains savent faire des additions ; de quoi rassurer sur la dérive de nos comptes.




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