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La stratégie antinucléaire allemande contre la France

La stratégie antinucléaire allemande contre la France

Par l’intermédiaire de la Commission européenne et sous l’influence d’Ursula von der Leyen, l’Allemagne a fait pression sur le reste de l’Europe, suivant deux axes. Mettre un terme définitif à l’énergie nucléaire, d’abord. Privilégier l’implantation des énergies renouvelables, ensuite. Cette stratégie, somme toute rationnelle, peut être perçue comme une forme de billard à trois bandes. Par Christian Semperes, Ingénieur énergéticien(*). dans La Tribune

L’Allemagne a réussi à obtenir, de haute lutte et avec la collaboration active des gouvernements français depuis deux quinquennats, la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim dans l’Hexagone. Moins connu en France, un schéma similaire a conduit à l’arrêt des réacteurs belges Doel 3 et Tihange 2. En témoigne, dans le cas français, la lettre adressée par l’ancienne ministre de l’Environnement allemande Barbara Hendricks à son homologue Ségolène Royal, exigeant la fermeture de la centrale dans les délais les plus brefs. Pour les pays concernés, une telle stratégie équivaut à une privation volontaire de production sûre, pilotable, économiquement rentable et amortie, bas-carbone et non conditionnée aux humeurs météorologiques. En bref, une balle dans le pied. C’est la première bande du billard. L’Allemagne a, quant à elle, « montré l’exemple » en arrêtant définitivement son parc nucléaire au début de l’année 2023, se privant ainsi de 30TWh par an d’électricité à faible impact carbone.

La littérature scientifique a désormais admis que la lutte contre le réchauffement climatique repose largement sur la sortie des énergies fossiles ou, du moins, leur maintien a minima pour répondre à d’éventuels besoins ponctuels. Une évidence que l’Allemagne, contrainte par la sortie accélérée du nucléaire, ignore globalement. Berlin a construit et démarré à Datteln, en juin 2020, une centrale à charbon flambant neuve de 1.100MW, équivalent à 60% des capacités de Fessenheim. Ironie de l’histoire, Élisabeth Borne se réjouissait publiquement à quelques jours près, le 30 juin 2020, de l’arrêt définitif de Fessenheim. « Il y a ceux qui en parlent. Nous, on le fait », affirmait alors l’actuelle Première ministre, répondant à la promesse de campagne de l’ancien Président François Hollande.

Dans le même temps, Berlin conserve un parc fossile hors norme, comprenant une puissance installée en gaz de 34,8GW ; en lignite et en charbon, de respectivement 18,6GW et 19GW et, en fuel, de 4,7GW, selon les données du portail Energy Charts. Soit, au total, une puissance installée pilotable fossile de 77,1GW pour l’Allemagne, là où la France ne conserve qu’une puissance installée pilotable très largement nourrie par le nucléaire de 61,4GW, auxquels doivent s’ajouter l’hydraulique et notre reliquat de centrales fossiles. C’est la seconde bande du billard. La montée en puissance du parc renouvelable allemand ne peut, à ce jour, pas répondre aux besoins domestiques. Depuis début août, l’Europe de l’Ouest est confrontée à une canicule qui dure et un anticyclone qui force l’ensemble du parc éolien européen à l’arrêt. Pour l’illustrer, le 10 septembre à 10h du matin, le parc éolien allemand, subventionné à hauteur de 500 milliards d’euros d’argent public, ne produisait que 0,18% de la puissance installée. Même la très bonne production solaire ne permet pas à l’Allemagne d’assurer une production d’énergie domestique suffisante pour répondre à sa propre demande.

Dans l’Hexagone, tous les signaux semblent en revanche au vert. En juillet, selon les données du think tank Agora Energiewende, environ un tiers de l’électricité allemande provenait du nucléaire français. Dans le même temps, la France s’est durablement installée sur le podium des pays les moins émetteurs de gaz à effet de serre sur le segment de la production d’électricité, là où l’Allemagne occupe de longue date la queue du classement du fait d’un recours au charbon à des niveaux encore très importants. La faible disponibilité du parc nucléaire l’année passée a certes placé la France en situation d’importatrice nette d’électricité, surtout entre juillet et septembre. Mais le parc nucléaire, qui n’a produit que 2.479TWh en 2022, son niveau de production le plus faible depuis 1988 et en baisse de 30% par rapport aux moyennes de ces 20 dernières années, retrouve aujourd’hui des niveaux de production normaux.

De prime abord, il serait aisé de penser que l’Allemagne se pénalise financièrement en étant entièrement dépendante des importations. En y regardant de plus près, la situation apparaît plus complexe. La stratégie de Berlin-Est en effet d’éviter de solliciter ses centrales à gaz et de stocker massivement son gaz cet été pour préparer au mieux ses journées sans soleil et, en cas d’anticyclone d’hiver, sans vent. Depuis début janvier, le facteur de charge des centrales au gaz est de 17%, un taux très faible eu égard des capacités de production allemandes, qui se gardent de la marge.

De longues dates, l’Allemagne a donc préparé le terrain chez ses voisins européens, dont certains devraient manquer de production pilotable. Une stratégie qui s’est aussi dessinée au plus haut niveau réglementaire, en témoigne la bataille à la Commission européenne sur l’intégration de l’atome dans la taxonomie verte, obtenue de très haute lutte par la France, en échange de l’inclusion — scandaleuse — du très polluant gaz «naturel ». L’Allemagne pourrait ainsi se positionner comme un fournisseur européen de gaz naturel, dont les besoins devraient être notables cet hiver.

Compte tenu du mécanisme de fixation du prix de l’électricité, l’Allemagne va facturer ses exportations d’hiver au prix fort du gaz devenu rare, évidemment plus fort que ce qu’elle a payé l’électricité en été, 2, 3 voire 10 fois plus cher si une vague de froid intense sévit. L’Allemagne va rafler la mise cet hiver. Une approche qu’il est possible de percevoir comme la troisième bande du billard. Peut-être même que ses pertes estivales sont considérées par Berlin comme un investissement pour l’hiver ? Dans ce contexte, la France doit fermement poursuivre sa stratégie de maintien d’un puissant parc nucléaire, malgré la pression allemande.

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(*) Christian Semperes a participé au démarrage des 58 réacteurs REP des années 1980-1990, à la conduite des installations, et à la formation sur simulateur des exploitants.

La manipulation antinucléaire allemande contre la France

La stratégie antinucléaire allemande contre la France

Par l’intermédiaire de la Commission européenne et sous l’influence d’Ursula von der Leyen, l’Allemagne a fait pression sur le reste de l’Europe, suivant deux axes. Mettre un terme définitif à l’énergie nucléaire, d’abord. Privilégier l’implantation des énergies renouvelables, ensuite. Cette stratégie, somme toute rationnelle, peut être perçue comme une forme de billard à trois bandes. Par Christian Semperes, Ingénieur énergéticien(*). dans La Tribune

L’Allemagne a réussi à obtenir, de haute lutte et avec la collaboration active des gouvernements français depuis deux quinquennats, la fermeture des deux réacteurs de Fessenheim dans l’Hexagone. Moins connu en France, un schéma similaire a conduit à l’arrêt des réacteurs belges Doel 3 et Tihange 2. En témoigne, dans le cas français, la lettre adressée par l’ancienne ministre de l’Environnement allemande Barbara Hendricks à son homologue Ségolène Royal, exigeant la fermeture de la centrale dans les délais les plus brefs. Pour les pays concernés, une telle stratégie équivaut à une privation volontaire de production sûre, pilotable, économiquement rentable et amortie, bas-carbone et non conditionnée aux humeurs météorologiques. En bref, une balle dans le pied. C’est la première bande du billard. L’Allemagne a, quant à elle, « montré l’exemple » en arrêtant définitivement son parc nucléaire au début de l’année 2023, se privant ainsi de 30TWh par an d’électricité à faible impact carbone.

La littérature scientifique a désormais admis que la lutte contre le réchauffement climatique repose largement sur la sortie des énergies fossiles ou, du moins, leur maintien a minima pour répondre à d’éventuels besoins ponctuels. Une évidence que l’Allemagne, contrainte par la sortie accélérée du nucléaire, ignore globalement. Berlin a construit et démarré à Datteln, en juin 2020, une centrale à charbon flambant neuve de 1.100MW, équivalent à 60% des capacités de Fessenheim. Ironie de l’histoire, Élisabeth Borne se réjouissait publiquement à quelques jours près, le 30 juin 2020, de l’arrêt définitif de Fessenheim. « Il y a ceux qui en parlent. Nous, on le fait », affirmait alors l’actuelle Première ministre, répondant à la promesse de campagne de l’ancien Président François Hollande.

Dans le même temps, Berlin conserve un parc fossile hors norme, comprenant une puissance installée en gaz de 34,8GW ; en lignite et en charbon, de respectivement 18,6GW et 19GW et, en fuel, de 4,7GW, selon les données du portail Energy Charts. Soit, au total, une puissance installée pilotable fossile de 77,1GW pour l’Allemagne, là où la France ne conserve qu’une puissance installée pilotable très largement nourrie par le nucléaire de 61,4GW, auxquels doivent s’ajouter l’hydraulique et notre reliquat de centrales fossiles. C’est la seconde bande du billard. La montée en puissance du parc renouvelable allemand ne peut, à ce jour, pas répondre aux besoins domestiques. Depuis début août, l’Europe de l’Ouest est confrontée à une canicule qui dure et un anticyclone qui force l’ensemble du parc éolien européen à l’arrêt. Pour l’illustrer, le 10 septembre à 10h du matin, le parc éolien allemand, subventionné à hauteur de 500 milliards d’euros d’argent public, ne produisait que 0,18% de la puissance installée. Même la très bonne production solaire ne permet pas à l’Allemagne d’assurer une production d’énergie domestique suffisante pour répondre à sa propre demande.

Dans l’Hexagone, tous les signaux semblent en revanche au vert. En juillet, selon les données du think tank Agora Energiewende, environ un tiers de l’électricité allemande provenait du nucléaire français. Dans le même temps, la France s’est durablement installée sur le podium des pays les moins émetteurs de gaz à effet de serre sur le segment de la production d’électricité, là où l’Allemagne occupe de longue date la queue du classement du fait d’un recours au charbon à des niveaux encore très importants. La faible disponibilité du parc nucléaire l’année passée a certes placé la France en situation d’importatrice nette d’électricité, surtout entre juillet et septembre. Mais le parc nucléaire, qui n’a produit que 2.479TWh en 2022, son niveau de production le plus faible depuis 1988 et en baisse de 30% par rapport aux moyennes de ces 20 dernières années, retrouve aujourd’hui des niveaux de production normaux.

De prime abord, il serait aisé de penser que l’Allemagne se pénalise financièrement en étant entièrement dépendante des importations. En y regardant de plus près, la situation apparaît plus complexe. La stratégie de Berlin-Est en effet d’éviter de solliciter ses centrales à gaz et de stocker massivement son gaz cet été pour préparer au mieux ses journées sans soleil et, en cas d’anticyclone d’hiver, sans vent. Depuis début janvier, le facteur de charge des centrales au gaz est de 17%, un taux très faible eu égard des capacités de production allemandes, qui se gardent de la marge.

De longues dates, l’Allemagne a donc préparé le terrain chez ses voisins européens, dont certains devraient manquer de production pilotable. Une stratégie qui s’est aussi dessinée au plus haut niveau réglementaire, en témoigne la bataille à la Commission européenne sur l’intégration de l’atome dans la taxonomie verte, obtenue de très haute lutte par la France, en échange de l’inclusion — scandaleuse — du très polluant gaz «naturel ». L’Allemagne pourrait ainsi se positionner comme un fournisseur européen de gaz naturel, dont les besoins devraient être notables cet hiver.

Compte tenu du mécanisme de fixation du prix de l’électricité, l’Allemagne va facturer ses exportations d’hiver au prix fort du gaz devenu rare, évidemment plus fort que ce qu’elle a payé l’électricité en été, 2, 3 voire 10 fois plus cher si une vague de froid intense sévit. L’Allemagne va rafler la mise cet hiver. Une approche qu’il est possible de percevoir comme la troisième bande du billard. Peut-être même que ses pertes estivales sont considérées par Berlin comme un investissement pour l’hiver ? Dans ce contexte, la France doit fermement poursuivre sa stratégie de maintien d’un puissant parc nucléaire, malgré la pression allemande.

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(*) Christian Semperes a participé au démarrage des 58 réacteurs REP des années 1980-1990, à la conduite des installations, et à la formation sur simulateur des exploitants.

Plaidoirie antinucléaire

Plaidoirie antinucléaire

En octobre 2021, RTE a fait paraître un document de référence sur l’avenir du système électrique français. Retour sur ses principales conclusions concernant les options nucléaires et renouvelables. Par Philippe Quirion, Centre national de la recherche scientifique (CNRS).Une plaidoirie antinucléaire qui propose notamment à la place du nucléaire  des Éoliennes dont les coûts sociaux au sens large sont aussi largement sous-estimés. Bref, pas vraiment une analyse scientifique mais plutôt partisane.

 

 

 

En octobre 2021, RTE (le gestionnaire du réseau de transport d’électricité) a dévoilé le très attendu rapport « Futurs énergétiques 2050 » sur l’avenir du système électrique français.

Le rapport fournit de précieux éclairages sur de nombreux sujets techniques et les tendances futures, notamment à propos du coût des technologies émergentes, du potentiel d’électrification des différents secteurs, de la stabilité du réseau et des besoins de réserve dans un système électrique hautement renouvelable ; des gains d’efficacité possibles par l’électrification et des gains que la sobriété peut apporter à la transition énergétique.

Il conclut qu’un développement important des énergies éolienne et solaire est indispensable.

Selon les scénarios, en 2060, la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité ira de 50 à 100%, le reste étant assuré par le nucléaire. Tous ces scénarios atteignent la neutralité carbone et le même niveau de fiabilité dans la fourniture d’électricité.

Cette étude confirme, après celle de l’Ademe et celle que nous avons publiée en mars 2021, que le coût d’un système électrique 100% renouvelable à l’horizon 2050-2060 est proche de celui d’un système avec de nouvelles centrales nucléaires.

Elle réfute donc les affirmations largement diffusées (mais non basées sur des travaux scientifiques) selon lesquelles le premier coûterait plusieurs fois plus cher que le second.

Cependant, ce rapport aboutit, sous ses hypothèses centrales, à un écart de coût en faveur des scénarios comprenant la construction de nouveaux réacteurs, de l’ordre de 15 % entre le scénario N2 (avec 23 GW de nouveau nucléaire, soit 14 centrales de type EPR, en 2050) et le scénario M23 (sans nouveau nucléaire). Certains observateurs en tirent la conclusion – non endossée par les auteurs de l’étude – que ce rapport fournit une justification économique pour lancer un programme de construction de centrales EPR en France.

Nous pensons, à l’inverse, qu’étant donné les incertitudes, le critère économique n’est pas discriminant entre les scénarios. Autrement dit, les estimations que l’on peut faire aujourd’hui du coût global du système électrique à l’horizon 2060 ne permettent pas de décider s’il est justifié ou non de lancer un nouveau programme nucléaire en France. En effet, plusieurs hypothèses, qui participent à l’obtention de l’écart de coût susmentionné, méritent d’être remises en cause.

Le facteur de charge désigne le ratio entre ce que l’éolien produit sur une période donnée et sa production s’il fonctionnait à 100% de sa capacité.

Dans le rapport de RTE, ce ratio est de 23% pour l’éolien terrestre, chiffre beaucoup plus faible que ceux (30 à 32%) obtenus dans d’autres prospectives comme celles de l’Ademe, de négaWatt ou dans nos travaux.

Or, pour une prospective à 2050-2060, il serait trompeur de se baser sur les facteurs de charge du parc actuel (22 à 26% selon les années). Les machines qu’on installe aujourd’hui balayent une plus grande surface par unité de puissance, ce qui leur permet de mieux capter les vents modérés.

Cette « révolution éolienne silencieuse », pour reprendre l’expression de Bernard Chabot, un des pionniers du développement de l’éolien en France, apparaît clairement dans les données d’Irena (l’Agence internationale des énergies renouvelables) qui présente les facteurs de charge selon l’année d’installation de l’éolienne.

Dans tous les pays étudiés, ce facteur a augmenté rapidement au cours des dernières années. En France, pour les éoliennes installées au cours des trois dernières années, il est en moyenne de 32 % pour une année météorologique standard.

Certes, cette estimation pessimiste du facteur de charge dans le rapport RTE est dans une certaine mesure compensée par une hypothèse de coût unitaire moindre que dans d’autres études, comme celle de l’Ademe ou nos travaux.

Cependant, pour une capacité installée donnée, elle réduit la production de l’éolien terrestre et augmente les capacités nécessaires dans d’autres technologies plus coûteuses et les besoins de flexibilité, renchérissant les scénarios 100 % renouvelables.

Concernant le coût du nouveau nucléaire, RTE reprend les conclusions d’audits réalisés par l’État à partir d’éléments fournis par EDF. À l’horizon 2050, ce coût atteindrait 4,7 euros par watt, soit une baisse de 40 % par rapport à celui estimé pour les EPR de Flamanville et d’Hinkley Point (7,8 à 8,1 €/W).

Or, premièrement, les générations précédentes de centrales n’ont pas montré une baisse aussi élevée entre les têtes de série industrielles et les centrales suivantes : parfois ces dernières se sont avérées plus coûteuses, parfois légèrement moins, que ce soit aux États-Unis ou en France.

D’ailleurs, pour son projet d’EPR à Sizewell (en Angleterre), EDF estime le coût à « environ » 20 milliards de livres, soit 7,4 €/W. On est loin de la tête de série puisqu’il s’agirait des 7e et 8e EPR construits et, pourtant, le coût (annoncé) n’est guère plus faible que celui des premiers EPR.

Deuxièmement, les études prospectives passées ont généralement massivement sous-estimé le coût du nucléaire, comme le souligne un article publié récemment dans la revue PNAS.

Inversement, et toujours selon ce dernier article, ces études prospectives ont généralement surestimé le coût du solaire photovoltaïque, de l’éolien et de l’électrolyse, trois technologies clés pour assurer une électricité 100 % renouvelable.

Comme l’indique RTE, la méthode utilisée pour l’analyse économique des scénarios « implique de préciser le coût du capital associé à chaque technologie » et ces hypothèses « peuvent être différenciées afin de refléter le coût du capital observé pour chaque technologie ».

En effet, plus un projet est jugé risqué par les investisseurs, plus le coût du capital est élevé. Or, le risque de surcoût et de dépassement du temps de construction est bien plus élevé pour le nucléaire que pour les renouvelables.

Pourtant, arguant des difficultés (réelles) pour déterminer un coût du capital spécifique à chaque technologie, RTE utilise des taux identiques dans le scénario de référence du rapport.

La possibilité de taux différenciée est traitée comme une variante, qui montre que si l’on prend un coût du capital de 7 % pour le nouveau nucléaire et 4 % pour les autres technologies, la différence de coût entre les scénarios M23 et N2 disparaît.

Une telle différenciation n’a rien d’extrême puisque l’AIE retient, pour l’Europe, 8 % pour le nouveau nucléaire contre 3,2 à 4 % pour les renouvelables. Pour les EPR en construction à Hinkley Point, ce taux est entre 7 et 8 % selon EDF, malgré un tarif d’achat de l’électricité produite garanti sur 35 ans.

Un écart énorme avec le taux de la dernière émission obligataire de RTE : 0,75 % sur douze ans, pour 850 millions d’euros dédiés entre autres au raccordement des parcs éoliens maritimes.

Un système électrique largement renouvelable nécessite des options pilotables d’approvisionnement en énergie et des options de stockage. Le biogaz, utilisé dans des centrales électriques, constitue l’une des sources d’énergie pilotables pour gérer la variabilité à long terme des énergies renouvelables (afin d’assurer l’approvisionnement en électricité lors des journées d’hiver avec peu de soleil et de vent). Le potentiel de biogaz est fixé à 150 TWh, suivant la Stratégie nationale bas carbone.

Dans l’industrie, RTE modélise un remplacement du gaz naturel par l’électricité et l’hydrogène, d’où une plus grande disponibilité du biogaz dans les autres secteurs, dont l’électricité. Pourtant, la production d’électricité à partir des bioénergies est plafonnée, dans la plupart des scénarios de l’étude, à seulement 12 TWh. Un plus grand recours au biogaz pourrait réduire le coût du système électrique en ajoutant plus de flexibilité à coût relativement modéré.

Pour toutes ces raisons, nous considérons qu’en toute rigueur, on ne peut pas conclure quant au coût relatif, à l’horizon 2060, d’un système électrique 100 % renouvelable et d’un système mixte, comportant également de nouvelles centrales nucléaires.

Le choix doit donc également s’appuyer sur d’autres critères, à commencer par la contribution aux Objectifs de développement durable de l’ONU – point sur lequel les énergies renouvelables présentent un bilan nettement plus favorable que le nucléaire, selon le rapport « 1,5 » du GIEC.

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Par Philippe Quirion, Directeur de recherche, économie, Centre national de la recherche scientifique (CNRS). Behrang Shirizadeh est co-auteur de cet article.

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.




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