François Hollande en campagne annonce des réductions d’impôts
Dans une interview fleuve aux Échos François Hollande lance sa campagne électorale pour 2017 et fait aussi le point sur brexit. Une sorte de promesse électorale mais qui n’est pas sur d’être suivie d’effet. L’annonce de la baisse d’impôts pour les couches moyennes est bien tardive, en outre elle risque d’être compensée par d’autres augmentations d’autant que vraisemblablement François Hollande ne sera plus alors au pouvoir. Ensuite concernant le brexit François Hollande souhaite une réponse rapide et claire. Là aussi un souhait qui ne sera peut-être pas exaucé. D’abord parce que l’Europe, sur l’insistance de Merkel, attend la demande officielle de divorce de la Grande-Bretagne laquelle n’interviendra pas avant la fin 2017. Quant à la clarté elle risque aussi d’être mise en doute dans la mesure où l’Allemagne souhaite le statu quo pour l’Europe à fin de ne pas être entraîné dans une solidarité financière qu’elle refuse à l’inverse de la France. Bref une interview pour justifier un bilan politique et des annonces en forme de promesses de coiffeur dont l’objectif est vraisemblablement de tenter d’inverser la courbe d’impopularité d’un président de la république qui chute encore dans le dernier sondage à 12 % .
Extrait de l’interview :
Allez-vous dérouler le tapis rouge pour les investisseurs britanniques, comme l’avait fait David Cameron lors de la mise en place de la taxe à 75% ?
Je n’aurais pas l’indécence de lancer ce genre d’appel. Je me garderais de parler de « tapis rouge à dérouler » et mieux vaut faire attention à ce type de formules. Elles peuvent se retourner contre leur auteur… Mais la France doit être en situation d’accueillir tous les talents et tous les investissements.
La place financière de Paris estime que la City doit perdre son passeport européen, qui permet à une banque implantée à Londres d’opérer sur tous les marchés de la zone euro…
Ce n’est pas négociable. Le Royaume-Uni redevenant un pays tiers, le passeport financier européen devra disparaître, de même que ce sera la fin du passeport commercial et du passeport européen tout court. Autre point clef : les opérations de compensation en euros ne pourront plus se faire à Londres. Le Royaume-Uni a bénéficié pendant longtemps de dérogations alors même qu’il n’était pas dans la zone euro. Ce ne sera plus possible. Il est légitime et logique que les banques françaises s’organisent et se préparent en conséquence. Et nous devons adapter nos règles y compris fiscales pour rendre la place financière de Paris plus attractive.
N’est-ce pas contradictoire de vouloir créer une taxe sur les transactions financières ?
Nous travaillons avec plusieurs pays dont l’Allemagne sur le projet de TTF dans le cadre d’une coopération renforcée. Certains nous disaient que, si on introduisait cette taxe, des activités allaient partir à Londres, cet argument ne tient plus.
Le Brexit va-t-il entraver la reprise en France ?
D’abord, il y a bien une reprise en France et un début d’inversion de la courbe du chômage. C’est un fait indiscutable. Notre croissance sera supérieure à 1,6% cette année, ce qui nous permettra de créer au moins 200.000 emplois. Le Brexit aura surtout un impact défavorable pour le Royaume-Uni et c’est par le biais d’une éventuelle récession outre-Manche qu’il peut y avoir un risque pour la zone euro et pour la France. Nous devons les conjurer par un soutien encore plus consistant à l’investissement privé comme public. Et par une réponse européenne rapide et claire. Plus brève sera la période d’incertitude sur la place du Royaume-Uni dans l’Europe, plus limitées seront les conséquences du Brexit sur l’activité.
Le sort de la loi El Khomri est un autre facteur d’incertitude. Les critiques persistent au sein de la majorité parlementaire…
Il n’y a aucune incertitude. La loi sera votée et promulguée dans les délais prévus. Je souhaite qu’une majorité puisse être trouvée. A défaut, il sera de nouveau recouru à l’article 49-3.
Peut-il y avoir encore des modifications, notamment de l’article 2 sur les accords d’entreprise concernant l’organisation du travail ?
Non, l’article 2 sera maintenu dans sa rédaction actuelle. Mais le débat peut conduire à préciser le rôle des branches dans la réforme du code du Travail.
Comment jugez-vous le rôle de la CGT dans ce conflit qui s’éternise ?
Elle a contesté le texte dans sa totalité puis ensuite certaines parties seulement. Elle a cherché la discussion à la fin du processus alors qu’elle l’avait évité au début et s’est lancée dans une suite de manifestations au risque de les épuiser.
Après la loi travail, il y aura le budget 2017. L’impôt sur le revenu va-t-il baisser, comme vous l’aviez évoqué ?
J’avais dit au printemps dernier qu’une baisse supplémentaire d’impôt sur les ménages était possible, si nous disposions des marges de manoeuvre liées à l’amélioration de la croissance et sans remettre en cause notre objectif de réduction du déficit public à 2,7 % du PIB en 2017. Je reste sur la même position : si malgré le Brexit la croissance était de 1,7 % en 2017, ce geste fiscal, qui ne pourrait être supérieur à 2 milliards d’euros, viendrait s’ajouter aux allégements accordés depuis 2014 et qui ont d’ores et déjà concerné 12 millions de contribuables.
La Cour des comptes juge élevé le risque que ne soit pas respecté l’objectif de déficit. Que lui répondez-vous ?
Comme chaque année à cette date, la Cour des comptes met en garde sur la tenue de nos objectifs. C’est son rôle. Cet avertissement vaut pour l’avenir. Quand je regarde nos résultats, je constate que nous avons tenu nos engagements. L’an dernier, nous avons même fait mieux puisque nous avons réduit le déficit plus fortement que prévu (3,6% au lieu de 3,8%).
Les contribuables concernés seront-ils les mêmes, ceux des premières tranches du barème ?
Il est trop tôt pour le dire. Le Premier ministre me fera des propositions. Mais ma préférence irait vers une mesure ciblée pour les classes moyennes.
Allez-vous rogner sur la troisième étape du pacte qui doit représenter 5 milliards de nouvelles baisses d’impôts et de charges en 2017 ?
Non, le quantum des 41 milliards d’allègements de prélèvements prévus par le Pacte de responsabilité sera intégralement respecté. Mais afin de muscler les créations d’emplois générées par la reprise, j’ai décidé, avec le Premier ministre, de consacrer les 5 milliards restants au relèvement du Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – qui sera porté à au moins 7% de la masse salariale – et à la baisse de l’impôt sur les sociétés des PME.
Il n’y aura donc pas de suppression de la C3S…
Je veux donner toute sa force au CICE, qui est désormais pleinement compris et apprécié par les entreprises, notamment les PME et TPE, et qui a des effets rapides sur l’emploi, l’investissement et le pouvoir d’achat. Quant à l’impôt sur les sociétés, son taux sera en baisse pour les PME et une mesure d’allégement sera prévue pour les artisans qui ne bénéficient pas du CICE.
La mesure aura-t-elle des effets en 2017 ou en 2018 ?
Les entreprises disposeront d’une créance dès 2017. Elle sera enregistrée dans leurs comptes, et celles qui le souhaitent bénéficieront d’un préfinancement de la BPI.
Allez-vous demander davantage de contreparties au patronat ?
C’est le sens même du pacte. Et les partenaires sociaux doivent, dans les branches et les entreprises, évaluer régulièrement l’utilisation du CICE. Surtout s’il est relevé en 2017. Quant au Medef, il a manqué à ses responsabilités sur l’Unedic et prend une position dangereuse en n’appliquant pas la loi sur le compte pénibilité. Dans une démarche sociale si les acteurs se dérobent, il ne reste plus que l’Etat !
Allez-vous la prolonger la prime à l’embauche dans les PME de moins de 250 salariés ?
Nous allons franchir dans quelques jours le seuil des 500.000 embauches dans le cadre de ce dispositif. C’est un succès au bénéfice de l’emploi et des entreprises et j’ai donc décidé de le prolonger sur l’ensemble de l’année 2017, comme d’ailleurs le mécanisme du suramortissement des investissements.
Au-delà de 2017, que reste-t-il à faire, selon vous, pour moderniser l’économie française ?
En 4 ans nous avons considérablement modernisé l’économie française. Le coût du travail dans l’industrie est aujourd’hui devenu inférieur à celui de nos voisins allemands et sans perte de pouvoir d’achat pour les salariés, puisque ce résultat a été obtenu par des allégements de prélèvements.
Les lois sur la sécurisation de l’emploi de 2013, la réforme de la formation professionnelle et celle sur le dialogue social ont considérablement amélioré la négociation. Aujourd’hui, le projet de loi El Khomri prévoit une évolution progressive du Code du travail dans les prochaines années et introduit le compte personnel d’activité, qui sera une étape majeure dans la sécurisation des parcours professionnels.
Enfin, j’ai voulu donner une place très importante à l’innovation et à l’investissement. Et dans le même temps les déficits publics ont été réduits, les régimes de retraite ont été équilibrés et la protection sociale a été préservée sans mise en cause des droits des assurés sociaux.
Vous vous déplacez ce jeudi au salon VivaTechnology, qui va ressembler des milliers de start-up. Quel regard portez-vous sur ce phénomène en France ?
La France, et chacun le découvre, est une nation de jeunes entreprises. La French Tech est une formule qui recouvre une réalité bien vivante ! Jamais autant de start-up n’ont vu le jour dans notre pays. 1 500 sont créées chaque année à Paris, la ville qui a le plus d’incubateurs en Europe. Jamais autant de fonds n’ont été investis dans les entreprises innovantes en France. Jamais autant de chercheurs et d’ingénieurs français n’ont été à ce point sollicités par le monde entier.
La France a pris une avance dans de nombreux domaines : les objets connectés, les plateformes, les services culturels. Ces succès démontrent la créativité de notre économie que le gouvernement a accompagnée et encouragée en favorisant un écosystème avec notamment le crédit d’impôt recherche élargi à l’innovation, avec l’alliance pour l’industrie du futur, avec la French Tech. VivaTechnology en est la plus éloquente illustration.
Mais pourquoi la France et également l’Europe ont-elles tant de mal à faire grandir ces entreprises pour qu’elles deviennent des champions mondiaux à l’image de ce que sont capables de produire les Etats-Unis ?
La France a ses licornes, ces jeunes entreprises dont la valorisation dépasse le milliard de dollars. Mais c’est au niveau européen que nous devons nous organiser. L’Europe a les moyens de développer des champions dans la transition énergétique et le numérique à condition de ne pas empêcher les concentrations de ses entreprises face aux géants comme Google ou Facebook.
Nous devons constituer des grands groupes européens à partir d’un marché large et régulé et qui ne peut être l’addition des marchés nationaux. Ce qui exige un changement d’approche de la part de la Commission européenne sur l’application des règles de concurrence.