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Social-Pouvoir d’achat-Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Social-Pouvoir d’achat-Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Entre 2011 et 2017, « les versements aux actionnaires et les dépenses par salarié évoluent de manière conjointe » avant une « nette rupture » en 2018, souligne Oxfam dans cette étude sur « l’inflation des dividendes » des 100 plus grosses entreprises françaises cotées en Bourse. Un écart de 40% environ.

« Alors que les versements aux actionnaires font un bond de 40% en ligne avec la croissance de la valeur ajoutée, les dépenses par salarié se mettent à stagner » à partir de 2018, observe l’ONG.

« En 2019, 45% des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires auraient suffi à couvrir leurs besoins en investissement dans la transition écologique », estime Oxfam, qui note qu’ »en moyenne 71% des bénéfices » de ces entreprises ont été redistribués à leurs actionnaires, de 2011 à 2021, via dividendes ou rachats d’actions. Les politiques de l’énergéticien Engie, du fabricant de tubes sans soudure Vallourec et de l’entreprise minière Eramet sont notamment visées.

Oxfam réclame que le versement des dividendes soit conditionné par la loi à la mise en place « d’un salaire décent sur l’ensemble de la chaîne de valeur », ainsi que d’ »une stratégie climat ambitieuse » et d’un plan d’investissement mis en place avec le comité social et économique (CSE) de l’entreprise.

L’ONG souhaite aussi l’abolition du prélèvement forfaitaire unique sur les dividendes (« flat tax ») et le conditionnement des aides publiques au plafonnement des dividendes.

Pouvoir d’achat-Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Pouvoir d’achat-Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Entre 2011 et 2017, « les versements aux actionnaires et les dépenses par salarié évoluent de manière conjointe » avant une « nette rupture » en 2018, souligne Oxfam dans cette étude sur « l’inflation des dividendes » des 100 plus grosses entreprises françaises cotées en Bourse. Un écart de 40% environ.

« Alors que les versements aux actionnaires font un bond de 40% en ligne avec la croissance de la valeur ajoutée, les dépenses par salarié se mettent à stagner » à partir de 2018, observe l’ONG.

« En 2019, 45% des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires auraient suffi à couvrir leurs besoins en investissement dans la transition écologique », estime Oxfam, qui note qu’ »en moyenne 71% des bénéfices » de ces entreprises ont été redistribués à leurs actionnaires, de 2011 à 2021, via dividendes ou rachats d’actions. Les politiques de l’énergéticien Engie, du fabricant de tubes sans soudure Vallourec et de l’entreprise minière Eramet sont notamment visées.

Oxfam réclame que le versement des dividendes soit conditionné par la loi à la mise en place « d’un salaire décent sur l’ensemble de la chaîne de valeur », ainsi que d’ »une stratégie climat ambitieuse » et d’un plan d’investissement mis en place avec le comité social et économique (CSE) de l’entreprise.

L’ONG souhaite aussi l’abolition du prélèvement forfaitaire unique sur les dividendes (« flat tax ») et le conditionnement des aides publiques au plafonnement des dividendes.

Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Écart grandissant entre dividendes et salaires depuis plusieurs années

Entre 2011 et 2017, « les versements aux actionnaires et les dépenses par salarié évoluent de manière conjointe » avant une « nette rupture » en 2018, souligne Oxfam dans cette étude sur « l’inflation des dividendes » des 100 plus grosses entreprises françaises cotées en Bourse. Un écart de 40% environ.

« Alors que les versements aux actionnaires font un bond de 40% en ligne avec la croissance de la valeur ajoutée, les dépenses par salarié se mettent à stagner » à partir de 2018, observe l’ONG.

« En 2019, 45% des dividendes et rachats d’actions versés aux actionnaires auraient suffi à couvrir leurs besoins en investissement dans la transition écologique », estime Oxfam, qui note qu’ »en moyenne 71% des bénéfices » de ces entreprises ont été redistribués à leurs actionnaires, de 2011 à 2021, via dividendes ou rachats d’actions. Les politiques de l’énergéticien Engie, du fabricant de tubes sans soudure Vallourec et de l’entreprise minière Eramet sont notamment visées.

Oxfam réclame que le versement des dividendes soit conditionné par la loi à la mise en place « d’un salaire décent sur l’ensemble de la chaîne de valeur », ainsi que d’ »une stratégie climat ambitieuse » et d’un plan d’investissement mis en place avec le comité social et économique (CSE) de l’entreprise.

L’ONG souhaite aussi l’abolition du prélèvement forfaitaire unique sur les dividendes (« flat tax ») et le conditionnement des aides publiques au plafonnement des dividendes.

Climat–Les cinq années à venir les plus chaudes.

Climat––Les cinq années à venir les plus chaudes.


L’Organisation météorologique mondiale (OMM) pronostique sur les cinq années les plus chaudes depuis le début de l’ère industrielle pour la période 2023-2027.

L’une de ces cinq années devrait être l’une des plus chaudes connues depuis la fin du XIXe siècle. Ces deux prévisions seront atteintes avec une probabilité de 98 %, autant dire que cela est presque certain. Selon ces anticipations coordonnées par le Met Office, l’agence de météorologie du Royaume uni, et produites par dix-huit instituts, dont le Cerfacs (Centre européen de recherche et de formation avancée en calcul scientifique) à Toulouse, il y a une probabilité de 66 % que l’une des cinq prochaines années affiche 1,5 °C de réchauffement. Elle devrait donc être plus chaude que le précédent record établi en 2016, pendant un épisode El Niño particulièrement fort, un phénomène climatique récurrent qui prend sa source dans un réchauffement des eaux de surface à l’ouest de l’océan Pacifique et tend à faire remonter la température moyenne de la planète.

Le réchauffement accru déjà noté dans l’Arctique devrait se poursuivre sur les cinq prochaines années, où la température devrait progresser trois fois plus rapidement par rapport à la moyenne entre 1991 et 2000. D’autres conséquences sont anticipées notamment un régime de précipitations accrues, entre mai et septembre, dans le Sahel, le nord de l’Europe, en Alaska et le nord de la Sibérie. Inversement, une diminution des pluies est anticipée dans le bassin de l’Amazone et certaines régions d’Australie. « L’Amazonie devient une source de carbone et n’est plus un puits de CO2. C’est l’un des points de bascule que nous devons surveiller », prévient le secrétaire général de l’OMM qui redoute d’autres mauvaises nouvelles pour l’agriculture, les ressources en eau et les zones forestières.

Selon les scientifiques du WWA (World Weather Attribution) qui analysent les phénomènes climatiques extrêmes, de nombreux événements n’auraient pas pu se produire sans le changement climatique déjà à l’œuvre. C’est le cas de la vague récente de chaleur dans la péninsule ibérique, de la sécheresse catastrophique depuis octobre 2020 dans la Corne de l’Afrique et des pluies extrêmes associées au cyclone Gabrielle en Nouvelle-Zélande en février dernier.

Température 2015-2022 Années record

Température 2015-2022 Années record (ONU)

En matière de température, la réalité est cruelle. En effet en 2015 la Cop 21 a décidé d’objectifs complètement contradictoires avec l’évolution des températures. En effet, les années 2015–2022 ont atteint des records de hausse .

La COP21 devait engager les 195 États et l’Union européenne à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. . Cet accord avait pour objectif de stabiliser le réchauffement climatique dû aux activités humaines diverses. Sur le long terme, l’objectif est de parvenir à la neutralité climatique (c’est-à-dire veiller à ne pas produire plus de CO2 que ce que la Terre est capable d’absorber, via les océans ou les forêts).

Afin de confronter les défis relatifs aux changements climatiques, les membres de la COP21 se sont mis d’accord sur 3 objectifs principaux :

Le maintien des températures en dessous de 2° C (d’ici à 2100) par rapport à la température de l’ère préindustrielle et prendre toutes les mesures possibles pour empêcher les températures d’augmenter de plus de 1,5° C ;Avec une température moyenne estimée de 1,15°C supérieure à celle de l’ère préindustrielle, l’année 2022 devrait se classer «seulement» à la cinquième ou sixième place de ces années les plus chaudes, en raison de l’influence inhabituelle, pour une troisième année consécutive, du phénomène océanique La Niña qui entraîne une baisse des températures. «Mais cela ne renverse pas la tendance de long terme ; c’est seulement une question de temps avant qu’il y ait une nouvelle année plus chaude», a insisté l’OMM, agence spécialisée de l’ONU.

D ‘après l’ONU, «les huit années de 2015 à 2022 seront probablement les huit années les plus chaudes enregistrées». La température moyenne sur la décennie 2013-2022 est estimée à 1,14°C au-dessus de celle de l’ère préindustrielle, contre 1,09°C sur la période 2011-2020.

«Les concentrations de CO2 dans l’atmosphère sont tellement élevées que l’objectif de 1,5°C (…) est à peine du domaine du possible», a commenté dimanche le patron de l’OMM Petteri Taalas. «C’est déjà trop tard pour de nombreux glaciers et la fonte va se poursuivre pendant des centaines voire des milliers d’années, avec des conséquences majeures sur l’approvisionnement en eau», a-t-il ajouté. Ainsi, les glaciers des Alpes ont enregistré en 2022 une perte record de masse de glace, avec une réduction d’épaisseur de 3 à 4 mètres, «beaucoup plus que lors du précédent record en 2003».
«Œillères»

Et les nouvelles ne sont pas meilleures du côté de l’élévation du niveau des océans, principalement liée à la fonte des calottes glaciaires. Le niveau des océans est aussi à un «record» en 2022, avec une hausse de 10 mm depuis janvier 2020, soit 10% de la hausse enregistrée depuis le début des mesures par satellite il y a près de 30 ans. Et le rythme d’élévation a doublé depuis 1993.

La planète a été en outre victime cette année d’une avalanche d’événements extrêmes, des inondations historiques au Pakistan aux canicules répétées en Europe, en passant par la sécheresse dans la Corne de l’Afrique. «Nous savons que certains de ces désastres, les inondations et la chaleur au Pakistan, les inondations et les cyclones dans le sud de l’Afrique, l’ouragan Ian, les canicules extrêmes et la sécheresse en Europe n’auraient pas été aussi graves sans le changement climatique», a commenté Friederike Otto, climatologue à l’Imperial College de Londres. «S’il y a bien une année où il faut réduire en lambeau et brûler les œillères qui empêchent l’action climatique, c’est celle-là», a ajouté Dave Reay, de l’Université d’Edimbourg.

Croissance mondiale : vers une crise comme dans les années 70

Croissance mondiale : vers une crise comme dans  les années 70

 

L’état de l’économie mondiale rappelle celui des années 1970. Sauf que « le contexte actuel est à plusieurs égards potentiellement plus explosif ». C’est le constat dressé par Jézabel Couppey-Soubeyran, maîtresse de conférences en économie à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et corédactrice en chef de « L’économie mondiale 2023 », un ouvrage publié chaque année et présenté mercredi par le Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii). ( les Echos)

« Le parallèle avec la stagflation des années 1970 ne pousse pas à l’optimisme », avance Thomas Grjebine, économiste au Cepii. A l’époque, pour casser l’inflation générée par les deux chocs pétroliers et l’indexation des salaires sur l’inflation, les banques centrales avaient fortement relevé les taux d’intérêt. Conséquence : une récession mondiale accompagnée d’une crise des dettes des pays en développement. L’histoire pourrait bien se répéter.

Depuis 2010, l’économie mondiale a connu une vague d’endettement la plus importante, la plus rapide et la plus synchronisée de ces 50 dernières années, observe l’économiste. La hausse des dettes publiques est un réel danger pour les pays qui s’endettent en devises étrangères. « C’est le cas de la zone euro car la devise européenne est comme une monnaie étrangère pour les pays membres qui s’endettent dans une devise qu’ils ne contrôlent pas. Une fragmentation de la zone euro n’est pas à exclure », craint Thomas Grjebine. L’inquiétude concerne avant tout les pays du Sud qui affichent des niveaux très élevés d’endettement public (200 % du PIB en Grèce, 150 % en Italie, 123 % en Espagne).

Les pays émergents et en développement suscitent aussi des craintes puisque leur dette en devise étrangère représente 25 % de leur dette publique contre 15 % en 2009. Que dire de la dette privée dans ces pays qui s’élevait à 142 % du PIB en 2020 contre seulement 32 % à la fin des années 1970 ? Le resserrement monétaire américain qui se profile pourrait générer une nouvelle crise de la dette, comme en 1979 pour les pays d’Amérique latine suivie d’un défaut de paiement du Mexique en 1982 .

Autre similitude pointée par le Cepii, l’évolution des salaires et de l’inflation. Comme à la fin des années 1960, la période actuelle voit émerger des revendications salariales fortes. La crise sociale de Mai 68 avait été le marqueur du refus par les salariés des conditions du partage des revenus qui prévalait à l’époque. « Le pouvoir d’achat du salaire minimum a progressé de 130 % entre 1968 et 1983. Dans le même temps le salaire moyen a progressé d’environ 50 % », constate Thomas Gjrebine. Les tensions sociales nourrissent alors l’inflation qui, en retour, entraîne de nouvelles revendications salariales. Jusqu’à ce que les dirigeants politiques décident de supprimer cette boucle qui se matérialisera notamment par la désindexation des salaires dans les années 1980.

Aujourd’hui, avec le retour de l’inflation et la mondialisation qui se grippe, le compromis implicite qui s’était mis en place dans les années 1980 pourrait bien voler en éclat. Ce compromis reposait sur des hausses modérées de salaires compensées par des gains de pouvoir d’achat liés à la désinflation importée que générait la mondialisation des échanges. Les demandes actuelles de rééquilibrage des salaires que révèlent les tensions aux Etats-Unis depuis la pandémie sous la forme de grèves nombreuses et du phénomène de « grande démission » en témoignent. Ailleurs, la croissance des salaires horaires réels est désormais négative dans la plupart des pays de l’OCDE, affectant pouvoir d’achat et consommation des ménages. Des tensions sociales sont à redouter.

La croissance mondiale devrait s’en ressentir. D’autant plus que le moteur chinois qui, ces vingt dernières années, représentait le quart de la croissance mondiale se grippe. Pas seulement en raison de la politique « zéro Covid » du gouvernement. D’autres facteurs structurels sont à l’oeuvre : « La population en âge de travailler a atteint un pic au début des années 2010 et devrait diminuer la croissance à venir. » Et la croissance de la productivité, comme au Japon et en Corée du Sud au cours des décennies précédentes, ralentit.  L’Europe est encore un peu plus menacée par un choc énergétique d’ampleur. Les effets du conflit en Ukraine pourraient être plus lourds que prévu en raison des interruptions de livraison de gaz russe à l’échelle de toute l’Europe. Selon l’OCDE, il faut s’attendre à une baisse de la production dans les secteurs manufacturiers et les services marchand de près de 3 %.

Ces effets pourraient être sous-estimés notamment si les entreprises arrêtent complètement leur production, craint le Cepii. « De nombreuses industries notamment les plus consommatrices d’énergie comme la métallurgie pourraient être en faillite. Un arrêt total des importations de gaz russe pourrait conduire à une baisse du PIB allemand de 3 à 8 % », redoute Thomas Gjrebine.

Le Donbass-Ukaine: une guerre pour durer des mois et des années

Le Donbass-Ukaine: une guerre pour durer des mois et des années

 

 

Un moment du rapport de force,  lorsque les russe progressaient  à l’intérieur de l’Ukraine , Zelinsky  était prêt à accepter de se séparer du Dombass,  en tout cas d’une grande partie. Compte tenu des déboires de l’armée russe et du soutien des occidentaux, le président ukrainien tout en se prononçant pour la négociation n’est plus favorable à laisser le Dombass à Poutine. Du coup va se dérouler une guerre sans merci car toutes les forces aussi bien ukrainiennes que russes vont se consacrer à la lutte dans le Dombass.

Certes dans un premier temps il est vraisemblable que la puissance de feu de la Russie va permettre à Poutine de gagner la première phase de cette nouvelle guerre. Par contre,  il aura du mal à occuper en permanence et totalement ses territoires. En effet il est prévisible que pendant des mois et même des années, l’armée ukrainienne et les résistants ne cesseront d’assaillir l’occupant qui risque de subir aussi de très lourdes pertes.

La Russie se renforce pour «prendre le contrôle de l’ensemble du Donbass» et réaliser un «pont terrestre» avec la Crimée, a prévenu mardi Jens Stoltenberg, le patron de l’Otan. Face à elle, 40% de l’armée ukrainienne défend la partie du Donbass, au sud-est du pays, demeurée sous le contrôle de Kiev après 2014. Le gouvernement dit se préparer à une situation «très difficile». «Dans le Donbass et à Marioupol, dans la direction de Kharkiv, l’armée russe se renforce en prévision d’attaques puissantes», a prévenu le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans une allocution dans la nuit de jeudi à vendredi dernier.

En effet, «nous constatons une jonction par le sud entre les forces de Crimée et celle de la République de Donetsk avec le siège de Marioupol d’un côté. De l’autre, une pression sur l’aile gauche des Ukrainiens depuis le nord dans un mouvement de tenaille», analyse le général (2S) Olivier Kempf, chercheur associé à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS).

Mais la force russe risque d’être compensée par la souplesse des combattants ukrainiens. De sorte que la bataille va durer et que le Dombass  après des années de lutte pourrait se transformer en véritable ruine.

Salaires fonction publique: Une érosion depuis des années

Salaires fonction publique: Une érosion depuis des années

 

Si la conférence sur les « perspectives salariales » du 21 septembre a permis de répondre à l’urgence concernant les agents payés sous le smic, Luc Farré, secrétaire UNSA-Fonction publique, demande cependant dans une tribune au « Monde » l’ouverture de négociations afin de mettre un terme à l’érosion des salaires et redonner de l’attractivité à la fonction publique.(extrait)

 

Tribune. 

 

Cette année encore, le gouvernement a choisi de geler la valeur du point d’indice des agents publics. Or, il s’agit du mécanisme – réaffirmé avec l’accord Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) de 2015 – qui permet à leurs salaires de ne pas décrocher face à la hausse des prix et de maintenir leur pouvoir d’achat. En dix ans, cette politique, conduite par trois gouvernements successifs pour réduire le déficit budgétaire (à l’exception, en 2016, d’une revalorisation de 1,2 %, appliquée en deux fois), a abouti à un décrochage des salaires par rapport à l’inflation.

Les salaires des agents publics sont ainsi devenus une variable d’ajustement activée pour participer au comblement des déficits budgétaires. La conséquence, pour chaque agent, c’est une baisse de la valeur réelle de leur salaire très forte, qui produit collectivement aujourd’hui un véritable problème d’attractivité. On peine à recruter dans de nombreux métiers (par exemple des enseignants, des soignants, des policiers), ce qui pose ou va poser rapidement la question de la qualité du service public rendu.

 

Individuellement, l’impact n’est pas moindre car l’érosion des salaires, quels que soient la catégorie ou le statut, renvoie aux conditions fixées à l’entrée dans la fonction publique, que ce soit par contrat ou par concours. Le compte n’y est pas. Les agents publics les plus modestes ont du mal à joindre les deux bouts et leur pouvoir d’achat ne cesse de s’affaisser.

Face à la paupérisation de la catégorie C, c’est-à-dire des agents les plus modestes, dont le niveau de rémunération est régulièrement rattrapé par les hausses du smic (déjà, le 1er avril, des points d’indice avaient dû être ajoutés), le 6 juillet, la ministre de la transformation et de la fonction publiques, Amélie de Montchalin, a décidé de faire un geste qui pouvait paraître important en annonçant des mesures applicables au 1er janvier 2022 pour accélérer leur déroulement de carrière et relever leur grille indiciaire.

Cependant, ce relèvement était déjà obsolète. Avant même la publication des textes, l’inflation constatée cette année dépasse les 2 % (2,2 %). Les salariés du secteur privé vont bénéficier d’une hausse du smic en rapport avec cette évolution, afin que ces travailleurs ne deviennent pas à terme des travailleurs pauvres.

 

Les agents publics de catégorie C, eux, même avec la mesure de juillet, commenceraient toujours en dessous du smic, tandis que les débuts de grille de catégories B et A continuent, de leur côté, à se rapprocher dangereusement de ce plancher.

La dimension sociale se manifestait déjà il y a 400 000 années

La dimension sociale se manifestait déjà il y a 400 000 années

Deux anthropologues ont rassemblé les preuves que les sociétés « primitives » de chasseurs-cueilleurs, loin de cultiver l’entre-soi, coopéraient à grande échelle pour chasser ou faire la guerre. Un nouveau discours sur les origines qui pourrait changer notre regard sur le monde social, explique, dans sa chronique au « Monde », l’économiste Paul Seabright.

 

Chronique.

 

La pertinence de l’expérience de sociétés de chasseurs-cueilleurs pour notre compréhension de la société moderne est célébrée depuis longtemps. La connaissance de cette expérience a, certes, été souvent superficielle ; personne aujourd’hui ne partagerait la description par Jean-Jacques Rousseau des habitants du Caraïbe dans le Discours sur les origines de l’inégalité « Tel est encore aujourd’hui le degré de prévoyance du Caraïbe : il vend le matin son lit de coton, et vient pleurer le soir pour le racheter, faute d’avoir prévu qu’il en aurait besoin pour la nuit. »

Mais l’idée reste courante que la vie des chasseurs-cueilleurs les a formés pour des interactions à petite échelle, et que nous, leurs descendants, avons hérité de talents peu adaptés à la gestion de populations nombreuses, nous contraignant à bricoler les outils qu’exige la coopération moderne.

 

D’autres métaphores abondent : les grandes villes dans lesquelles vit la moitié de l’humanité sont comme des « zoos » enfermant notre espèce qui ne serait pas faite pour y vivre, selon le zoologiste Desmond Morris, par exemple. Ou « comme un voyage au large pour des gens n’ayant jamais eu à s’adapter à un environnement autre que la terre ferme » , comme je l’ai moi-même écrit ! (La Société des inconnus : histoire naturelle de la collectivité humaine, éd. Markus Haller, 2011).

Mais voilà que cette représentation est bousculée par deux anthropologues renommés qui ont rassemblé sur plusieurs continents des preuves de coopération à grande échelle entre des populations nombreuses de chasseurs-cueilleurs pour chasser, faire la guerre ou construire des infrastructures de gestion de l’environnement (« Large-Scale Cooperation in Small-Scale Foraging Societies », par Robert Boyd et Peter Richerson, EcoEvoRxiv, 17 mai 2021).

Si la majorité des cas étudiés remontent à des époques récentes, il existe des traces archéologiques de plus longue date. Dans la grotte Gran Dolina de la Sierra de Atapuerca en Espagne, les fouilles ont découvert une grande masse d’os de bisons tués en grand nombre lors d’épisodes de chasse collective à deux dates distinctes il y a quatre cent mille ans. Des chasses rassemblant jusqu’à plusieurs centaines de chasseurs sont attestées sur des sites en Allemagne (il y a cinquante-quatre mille ans), plus récemment en France et, de manière moins certaine, au Kenya.

 

Si la coopération à relativement grande échelle (entre centaines d’individus plutôt qu’entre dizaines) était plus courante que nous ne le pensions jusqu’ici, il semble probable que notre psychologie et nos habitudes sociales ont évolué pour en tenir compte. Le bricolage du début serait devenu au fil du temps un talent peaufiné par l’expérience d’interactions avec des gens inconnus : chacun aurait progressivement appris à avoir moins peur de l’autre.

Après Covid-19 : retour aux années folles

Après Covid-19 : retour aux années folles

 

Vivrons-nous des années folles, comme ces années 1920 où il s’agissait d’oublier le traumatisme de la Première guerre mondiale ? Par Didier Julienne, Président de Commodities & Resources » (*). (La Tribune)

 

 

Les années folles qui atténuèrent les traumatismes de la Première Guerre mondiale s’épanouirent après le Dadaïsme, cette remise en cause écarta les conventions, la logique, les convenances, la raison, la poésie, la peinture, les littératures qui avaient accompagné la catastrophe de la guerre. Le mouvement jusqu’au-boutisme précéda l’émergence du surréalisme, de l’art déco, de la libération des femmes et la mode garçonne de Chanel, la diffusion du jazz dansé par Joséphine Baker avec la nouveauté du Charleston . Il était contemporain de la diffusion de nouvelles idéologies dont le communisme qui s’incarnait en Russie et, parallèlement, du nouveau dieu étatsunien et de sa vitesse fascinante en tout, y compris dans la rapidité du progrès et notamment dans la modernisation des domiciles avec la radio qui facilita la massification des sensibilités et des opinions.

Mais cette décennie de liberté fut également nommée décadente, une jouissance détraquée de la vie et son art qualifié de dégénéré par des critiques qui se distinguèrent au cours de la Deuxième guerre mondiale.

Parallèle

Le parallèle entre la guerre et la crise de la Covid-19, entre les années folles et notre futur post-vaccinal, est sans doute une exagération de la planète communication. Néanmoins, la pandémie aura des conséquences à long terme pour de nombreux contaminés et à la différence d’une minorité qui aura abusé de fêtes ou restaurants clandestins, parce qu’elle est adepte d’un marché noir de l’anti-distanciation sociale, pour le commun des confinés, la distanciation sociale est un combat, particulièrement pour les plus jeunes. Ils demanderont avec raison que cette période soit suivie de son antithèse, une fusion sociale et la liberté retrouvée, les fêtes, la nuit entre amis, les retrouvailles familiales chacune à leur façon, les voyages pour se mélanger avec des étrangers…

Dans ce futur proche, quel sera l’équivalent de la découverte du jazz dans le Paris des années 1920, quelles seront les nouvelles idéologies, quel sera l’art nouveau, où est son avant-garde ? Subirons-nous une nouvelle influence des États-Unis sur l’Europe comme il y a un siècle, puis pendant les années 1950, ou bien ce prochain soft-power viendra-t-il de l’Est, d’Asie ? Ou encore ni Chine ni États-Unis, cette influence sera-t-elle la nôtre, celle du chez soi, locale, un renouveau des terroirs, un succès du non-globalisme ? Ces années à venir seront-elles lentes, celles d’intellects secs, de croyances religieuses nouvelles ou anachroniques : dieux naturels, saisonniers ou olympiens ? Le freinage brutal des naissances dû la pandémie sera-t-il poursuivi d’une prise de conscience d’une surpopulation mortifère qu’il faut freiner par un malthusianisme généralisé ou bien d’un baby-boom généreux ?

Ne croyons pas que l’avenir sera comme le passé, mais en pire. Espérons plutôt qu’un néo-Dadaïsme réforme la situation de chacun et de la société.

Remise en question omniprésente

À l’échelle individuelle, cette remise en question est déjà omniprésente : avenir, finalité de l’existence et les moyens à mettre en phase avec un projet de vie. Les études ou le métier actuel, qui ont permis de passer au travers de la crise de la Covid-19, sont-ils à abandonner pour éliminer la souffrance post-traumatique de l’épidémie ou bien simplement à adapter, avec le travail à distance ?

L’exemple des soignants est éclairant. La Covid-19 est la crise suraiguë au milieu d’un très long malaise chronique devenu intolérable à cause du manque de reconnaissance, des horaires surchargés, des salaires imparfaits et de l’étouffement de la sur-administration. C’est le combat de trop, celui dont on ne parlera qu’avec pudeur entre anciens camarades de salle de réanimation, entre initiés qui comprendront avec peu de mots les traumatismes, les intubations, la fatigue de la fatigue de voir la mort gagner… Ils sont déjà si nombreux à quitter les métiers de la santé que ces derniers devront faire leur Dadaïsme, se libérer des conventions et des carcans pour retrouver une attractivité.

Deux évolutions évidentes

 

À l’échelle de la société, deux évolutions sont déjà évidentes. Premièrement, minorer le changement climatique. Mais les premières initiatives ne sont pas encourageantes. La bataille de Poitiers commence par tuer le rêve d’enfants icariens, voler, et, par suite, elle nie les possibles progrès tel que celui de l’avion électrique ou à hydrogène. À n’en pas douter cette école de pensée poursuivra d’autres batailles contre la curiosité de l’homme qui le pousse à aller voir au-delà de l’horizon, découvrir les roches de Mars. Cette situation ressemble étrangement à une scène du film Interstellar, celle de la maitresse d’école qui reproche à son élève d’avoir amené à l’école un livre indiquant que l’homme a marché sur la Lune, alors que selon la doxa professorale de cette époque future, cet événement serait une infox étatsunienne construite dans l’unique but de précipiter la chute de l’URSS. Je préfère de loin entendre l’entreprise japonaise Prologium Technology nous indiquer que d’ici la fin 2021 elle produira des batteries de véhicules électriques capables d’une autonomie de 1 .150 km.

Mettre à jour les solidarités stratégiques

Deuxièmement, la pandémie accentue la nécessité d’accélérer la mise à jour des solidarités stratégiques. Au-dessus de chaque État, il est possible de les identifier. Elles sont autant de trajectoires à très long terme auxquelles les administrations et les différents gouvernements qui se succèdent à la tête du pays ne touchent pas parce qu’elles façonnent la relation particulière entre la population et son concept de nation. Elles sont un prélude à la construction politique et au développement économique d’un pays, elles différencient les États les uns des autres, parce qu’elles définissent leurs dépendances, leurs indépendances et leurs interdépendances vis-à-vis notamment de la sécurité, des ressources naturelles, du développement économique, de la santé, de modèle économique…

La première d’entre elles est sans aucun doute l’inspiration première de l’État, dans sa Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dans sa constitution, ou de par la voie tracée dans la matrice idéologique d’un petit livre rouge. Bref, l’évènement intellectuel qui inspire ou conclut, selon les cas, la guerre de libération ou la révolution qui engendra le premier pouvoir en place. Cette solidarité stratégique intellectuelle et fondatrice est suivie des solidarités stratégiques plus tangibles décidées à des moments historiques ou charnières, telle la fin d’un conflit mondial par exemple.

À sa façon la pandémie du Covid-19 est l’un de ces moments charnières. Certes, elle aura peu de conséquences sur les solidarités stratégiques de pays asiatiques qui ont bien géré la crise parce que le risque pandémique y figurait. Mais son impact majeur sur nos démocraties répond à nos aveuglements. Les menaces extérieures contre l’intégrité du territoire et les populations restaient les solidarités stratégiques primordiales auxquels l’État de droit répondait par la protection de la force. Nos gouvernements ont subitement découvert qu’elles étaient indissociables de souverainetés économiques et sociales dans tous les domaines.

Sans elles, nulle survie des populations sur le territoire national, c’est pourquoi elles sont la ligne de mire de l’immédiat et du long terme ; décisions  qui seront aux rendez-vous des prochains échéances politiques et notamment électorales. Ici, à la différence du passé, la politique de l’incantation et de la communication voyageuse seront irrecevables. Au contraire, une nouvelle direction ambitieuse armée d’une expérience démontrée d’actions fondées sur l’intelligence des situations sera gagnante.

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(*) Didier Julienne anime un blog sur les problématiques industrielles et géopolitiques liées aux marchés des métaux. Il est aussi auteur sur LaTribune.fr.

Économie -Après covid : retour au années 1970 (Patrick Artus)

Économie -Après covid : retour au années 1970 (Patrick Artus)

 

 

Par Patrick Artus (chef économiste et membre du comité exécutif de Natixis) pose dans l’opinion la problématique d’une modification des processus de production voire d’un retour aux années 70

Tribune

 

 

Du milieu des années 1980 à aujourd’hui, l’économie des pays de l’OCDE a eu un fonctionnement assez particulier, qu’on a baptisé « grande modération ». Le point de départ de ce fonctionnement est le recul du pouvoir de négociation des salariés, avec la désyndicalisation (le taux de syndicalisation des pays de l’OCDE passe de 36 % au début des années 1980 à 18 % aujourd’hui) et les mesures de flexibilisation du marché du travail. Il en a résulté, à partir du milieu des années 1990, une forte déformation du partage des revenus au détriment des salariés, d’où la faiblesse des hausses de salaires.

L’autre cause de ce phénomène est la globalisation, c’est-à-dire l’ouverture des échanges commerciaux avec les pays émergents (le poids des importations dans le PIB de l’OCDE passe de 2,2 % en 1985 à 8 % en 2020), qui a permis d’importer les produits de prix bas fabriqués dans les pays émergents. Faiblesse des hausses des salaires et globalisation se conjuguent pour maintenir l’inflation à un niveau durablement faible de 1985 à 2020.

Ses effets ont été extrêmement puissants sur les pays de l’OCDE. Les politiques monétaires sont devenues de plus en plus expansionnistes ; ceci a favorisé la hausse des taux d’endettement, l’investissement des entreprises entre autres dans la production de matières premières. Il est clair, par exemple, que la forte hausse de la production de pétrole et de gaz de schiste aux Etats-Unis a été rendue possible par les taux d’intérêt bas et par la facilité à s’endetter, et elle a aussi contribué à la faiblesse de l’inflation en faisant baisser les prix de l’énergie.

Le prix à payer pour cette politique a été la répétition des bulles sur les prix des actifs et des crises financières qui suivent l’explosion de ces bulles : en 2000, explosion de la bulle sur les actions des nouvelles technologies ;en 2008, explosion de la bulle immobilière. De manière associée, le prix à payer a aussi été l’excès d’endettement des entreprises dans la seconde moitié des années 1980 jusqu’à la crise du Covid. Dans les pays de l’OCDE, le partage des revenus devient favorable aux profits.

Une économie… différente

L’après-Covid annonce-t-il un monde différent, qui pourrait ressembler à celui des années 1970 ? La progression des inégalités et de la pauvreté observée depuis les années 1990 pousse aujourd’hui les opinions à réclamer une hausse des plus bas salaires. Aux Etats-Unis, Joe Biden veut doubler le salaire minimum fédéral (même si l’obtenir pourra être compliqué) à 15 dollars de l’heure. S’il y a hausse des salaires dans des secteurs de services où il est difficile de faire des gains de productivité, cette hausse sera inflationniste.

La deuxième évolution importante est l’arrêt de la globalisation. Le poids des importations des pays de l’OCDE depuis les pays émergents recule légèrement depuis le début des années 2010. Cela résulte de la volonté de revenir à des chaînes de valeur régionales. L’influence désinflationniste de la globalisation est donc interrompue.

Le troisième mécanisme important est l’apparition de nombreux facteurs structurels d’une inflation plus forte. Il s’agit du vieillissement démographique (qui est inflationniste puisque les retraités sont des consommateurs non producteurs) et de la transition énergétique (puisque l’énergie renouvelable est chère en raison de l’intermittence de la production).

Enfin, quatrième mécanisme, on observe aujourd’hui l’apparition de nombreux goulots d’étranglement. Ils concernent le transport maritime (les porte-conteneurs), les composants électroniques (semi-conducteurs), le pétrole et le gaz naturel liquéfié ou encore les métaux industriels.

Un monde plus inflationniste

Au total, on voit apparaître une économie peut-être différente qui rappelle celle des années 1970 : partage des revenus plus favorables aux salariés, productions plus régionales et moins globales, facteurs structurels d’inflation, goulots d’étranglement. Cette économie serait plus inflationniste (l’inflation varie entre 5 % et 14 % dans les années 1970 et au début des années 1980).

S’il y a effectivement retour progressif à l’économie des années 1970, les conséquences sont très importantes. On peut se diriger vers un monde plus inflationniste et sans excès d’épargne. La conséquence de cela serait des taux d’intérêt plus élevés, mauvaise nouvelle évidemment compte tenu des taux d’endettement, privés et publics.

Patrick Artus est conseiller économique de Natixis.

Electricité : le risque d’une pénurie pendant plusieurs années

Electricité : le risque d’une pénurie pendant plusieurs années

 

En raison de la fermeture de Fessenheim, des travaux d’entretien sur les réacteurs et des retards de Flamanville, la France pourrait friser le risque de pénurie d’électricité pendant plusieurs années au moins jusqu’en 2024. Tout dépendra en fait  de la rigueur des prochains hivers. Du coup, la fermeture de deux nouveaux réacteurs en 2025 et 2026 pourrait être décalée. À noter aussi que les énergies alternatives sont loin de compenser le vide laissé par le nucléaire. « Le système électrique ne disposera que de marges très faibles sur la période 2021-24 et l’hiver prochain présente un risque plus élevé qu’un hiver normal« , a expliqué Xavier Piechaczyk, président du gestionnaire du réseau haute tension, lors d’une conférence de presse.

 

RTE publiait mercredi son « bilan prévisionnel », un épais document qui étudie les perspectives du système français à l’horizon 2030.RTE avait déjà exprimé sa « vigilance » pour l’hiver 2020-2021, qui s’est finalement passé sans encombre grâce à une météo clémente et à une baisse de la consommation électrique avec la crise.

Pour l’avenir, la situation doit s’améliorer en 2024-2026 avec la mise en route attendue de l’EPR et de six parcs éoliens en mer, notamment. L’amélioration est plus nette encore en 2026-2030.

Pour 2030, RTE prévoit par ailleurs une hausse modérée de la consommation d’électricité, de l’ordre de 5% par rapport à 2019. Elle sera notamment tirée par le développement des véhicules électriques mais aussi la production d’hydrogène.

La fameuse « pointe » de consommation de 19 heures en hiver devrait cependant diminuer grâce aux mesures d’efficacité et à de nouveaux usages qui ne seront pas concentrés sur cet horaire. Les voitures électriques devraient par exemple se charger au creux de la nuit, à l’exemple des chauffe-eaux actuellement.

Concernant les émissions de CO2, RTE calcule qu’elles devraient diminuer de 30 à 40 millions de tonnes par an.

C’est en partie le fait de l’évolution du système électrique lui-même mais surtout grâce aux transferts d’usage vers l’électricité (mobilité, production d’hydrogène, procédés industriels, chauffage ou cuisson…) qui limiteront le recours aux énergies fossiles.

Le virus peut circuler pendant des années (le professeur Yves Lévy)

Le virus peut  circuler pendant des années (le professeur Yves Lévy)

 

 

Pour Yves Lévy, professeur d’immunologie clinique : « Le virus pourrait circuler pendant des années » : interview dans le JDD

Ancien PDG de l’Inserm, le médecin Yves Lévy, directeur de l’Institut de recherche vaccinale (VRI) au CHU Henri-Mondor de Créteil (Val-de-Marne), est un spécialiste du système immunitaire. Depuis un an, il est engagé dans la course au vaccin contre le Covid-19. Comme d’autres immunologistes à travers le monde, il redoute que le virus s’installe durablement.

 

L’apparition des variants anglais, sud-africain ou brésilien est-elle surprenante?
Au contraire, les mutations, aléatoires sont des phénomènes courants. Un virus, c’est une photocopieuse qui se multiplie des milliards de fois dans l’organisme. Ce faisant, il fait des erreurs. Soit elles lui sont défavorables et le virus variant décline. Soit elles lui sont favorables, et sa contagiosité – et/ou sa dangerosité – augmente. La finalité d’un virus est simplement de survivre ; de survivre au mieux. C’est un mécanisme darwinien implacable : les mutants les plus efficaces finissent par prendre le dessus. Le Sars-CoV-2 qui nous a frappés en mars était déjà une souche plus contagieuse que celle détectée en Chine.

Mais pourquoi autant de mutants plus contagieux surgissent-ils aujourd’hui?
Plus le virus circule au cours d’une épidémie, plus le nombre de personnes touchées augmente, plus le risque de mutations s’accroît. Notre organisme essaie de contrôler le virus en développant une réponse immunitaire. De son côté, le virus tente de lui échapper. En se diffusant très largement et très rapidement sur la planète, le Sars-CoV-2 fait face à des millions d’anticorps, ces petits missiles qui tentent de l’empêcher d’entrer dans l’organisme. S’il réussit à forcer cette première défense, il doit encore affronter une deuxième ligne de cellules tueuses dirigées contre les cellules infectées. C’est dans cet environnement hostile pour lui, et à cause de ces interactions multiples entre lui et nous, qu’une pression de sélection s’exerce. Pour forcer la serrure et réussir à franchir ces obstacles, le Sars-CoV-2 a le plus souvent muté, jusqu’à présent, au niveau de la protéine Spike, c’est-à-dire pile à l’endroit qui lui permet de pénétrer dans nos cellules. Si, par exemple, les variants identifiés au Royaume-Uni et en Afrique du Sud ont des mutations en commun, c’est parce que la réponse immunitaire commune à tous les individus est dirigée contre cette région du virus. Il y a là un paradoxe : le système immunitaire, qui nous défend, permet au virus de s’échapper. Cet échappement, c’est sa survie. Le but d’un vaccin, c’est d’induire une réponse précoce, plus forte et plus durable pour contrer ce phénomène.

Autant de mutations, est-ce inédit?
C’est au contraire très banal et ça rappelle à tous ceux qui ont combattu le sida dans les années 1980 et 1990 la confusion et le désespoir qui régnaient alors. Lorsque les premiers antirétroviraux sont arrivés, des médicaments incapables de bloquer complètement la réplication du virus, des mutants sont apparus chez les patients. Parfois, en huit jours seulement! La recherche de nouveaux médicaments visait à contrer ces mutants : il a fallu mettre au point des bithérapies puis des trithérapies, aujourd’hui heureusement efficaces.

Les variants rendent-ils les vaccins inefficaces?
L’urgence absolue est de vacciner les plus fragiles avec les vaccins dont on dispose pour les protéger contre la maladie. Comme les anticorps induits par ces produits sont dirigés contre différentes régions du virus, on peut penser qu’ils vont rester en partie efficaces. Un article vient de montrer que les anticorps induits par le vaccin de Pfizer-BioNTech pourraient neutraliser, en laboratoire, le mutant anglais. Ça pourrait être moins vrai avec le variant sud-africain. Cependant, cela pose la question à long terme de la nécessité d’adapter les vaccins aux mutations déjà apparues ou à venir. Il faut donc nous préparer à l’éventualité de devoir revacciner de façon régulière. Et donc, sans doute, à mettre au point de nouveaux vaccins, comme nous le faisons chaque année pour la grippe. Au VRI, nous travaillons sur des vaccins de deuxième génération qui incluent déjà les mutations des variants actuels afin d’induire, en même temps, des anticorps et des cellules tueuses, la deuxième ligne de défense de l’organisme. On espère un effet protecteur sur le long terme.

Il est urgent d’ouvrir des lignes de production et de développer de nouveaux vaccins pour revacciner si besoin et contrer les variants

Dans La Provence, le virologue Jean-Michel Claverie dit qu’une vaccination lente et non massive peut favoriser l’émergence de variants. Ça vous inquiète?
L’effet démontré des vaccins utilisés actuellement est de prévenir les formes graves de l’infection. Nous n’avons pas encore la preuve scientifique qu’ils diminuent la transmission du virus, même si c’est probable. Aujourd’hui, le principal problème que rencontrent les Etats est celui de la production mondiale, insuffisante pour couvrir 7 milliards d’individus. Certains se plaignent des lenteurs de la vaccination dans notre pays ; cela a demandé des efforts logistiques qu’il faut saluer. On pourrait rappeler que le vaccin est un bien public mondial et qu’en Afrique moins de 6.000 habitants ont été vaccinés. Or le virus n’a pas de frontières et continuera de circuler partout. Il est urgent d’ouvrir des lignes de production et de développer de nouveaux vaccins pour revacciner si besoin et contrer les variants.

Si le vaccin n’est pas durablement efficace, comment l’immunité de groupe pourra-t-elle être atteinte?
La notion d’ »immunité de groupe », qui s’installerait naturellement après que le virus a touché un grand nombre d’individus et qui empêcherait sa circulation, est illusoire. C’est ce qu’on observe aujourd’hui à Manaus au Brésil, où les personnes se réinfectent alors que 60% de la population avait été préalablement infectée. L’immunité de groupe n’a été décrite qu’après des campagnes de vaccination massives. Et il faut souvent des décennies pour y parvenir avec des vaccins très efficaces induisant une immunité à long terme. Faute de recul, nous ne savons pas encore, pour le Sars-CoV-2, quelle est la durée d’efficacité des vaccins.

Le Sars-CoV-2 est-il un virus saisonnier comme la grippe?
Une année vient de s’écouler et on ne l’a pas vu s’affaiblir, sauf lors des confinements. En Afrique du Sud, il circule malgré l’hiver austral ; il était aussi très présent en Israël au mois d’août… On ne retrouve pas les variations saisonnières de la grippe.

Comment bloquer l’arrivée du clone anglais?
Les leçons de Darwin suggèrent que c’est mission impossible. La diffusion massive du virus a favorisé l’apparition de variants plus contagieux, qui vont devenir majoritaires. On ne gagnera pas la course de vitesse contre eux mais on peut freiner leur progression en essayant de circonscrire les clusters, en testant, traçant et en isolant. Le confinement reste l’arme la plus efficace. On ne vient pas à bout d’un incendie en le laissant flamber! Pour espérer casser ce cycle infernal, utilisons toutes les autres armes à notre disposition : port du masque, gestes barrière et bien sûr vaccination. S’il n’est pas certain qu’elle puisse casser l’épidémie, elle va protéger les plus fragiles et lever la pression sur le système de santé.

Comme l’arme nucléaire, le vaccin est aussi un enjeu de souveraineté

Un séquençage plus massif pourrait-il nous aider à lutter contre les variants?
On dit que la France est sous-dotée dans ce domaine. C’est faux : notre parc de séquenceurs est suffisant même s’il reste à organiser un réseau de veille et une centralisation des données. Mais séquencer à tout-va ne sert à rien. Détecter toutes les personnes avec un variant n’aurait d’intérêt que si cela changeait la prise en charge médicale. Or nous n’avons rien d’autre à proposer que l’isolement des cas. L’important, c’est de faire des sondages pour pouvoir modéliser la progression de l’épidémie. Et surtout de repérer les clusters et d’isoler soigneusement les gens atteints.

Quand retrouvera-t-on une vie normale?
Les décideurs doivent envisager tous les scénarios, des plus optimistes aux plus pessimistes en espérant que ces derniers ne se réalisent pas. Je me méfie de la pensée magique selon laquelle le virus va se fatiguer à l’été et le vaccin forcément bloquer la transmission de l’épidémie, même si on l’espère tous. Cependant, il faut aussi se préparer à l’hypothèse d’un scénario plus pessimiste selon lequel le virus circulerait encore pendant plusieurs années. Si tel était le cas, nous devrions apprendre à coexister avec lui ; et d’ores et déjà s’adapter au moyen de nouvelles armes. J’espère vraiment me tromper mais il faut y réfléchir, comme un pays se dote d’un bouclier nucléaire en souhaitant qu’il ne serve jamais. Et comme l’arme nucléaire, le vaccin est aussi un enjeu de souveraineté.

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance 

(Sylvain Félix Semilinko)

Soixante ans après les indépendances, le journaliste Sylvain Félix Semilinko constate dans une tribune du Monde que l’Etat de droit reste un vœu pieux dans de nombreux pays du continent.

 

Tribune. 

Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance ? Alors qu’en Afrique de l’Ouest se profilent une série d’élections présidentielles, ces périodes porteuses de violences, d’arrestations, de musellement des médias, voire de meurtres et de massacres, sont propices à nous poser cette question.

Une grande partie du continent avait poussé des cris d’orfraie pour dénoncer le défunt président français, Jacques Chirac, grand connaisseur de la politique en Afrique, qui laissait entendre que celle-ci n’était pas encore prête pour la démocratie à l’occidentale. Paternalisme et condescendance, hurlait-on alors. Et pourtant, trente ans de pratiques démocratiques sur le continent tendent à prouver qu’il n’était pas loin de la vérité.

Les tares congénitales des démocraties africaines sont multiples. Partout où elle s’est ancrée, la démocratie a pour socle l’Etat de droit, fondé sur une Constitution qui, pour être pérenne, doit être intemporelle, impersonnelle et non taillée sur mesure. Difficile en Afrique de compter sur des textes consacrant ces principes – sauf de rares cas en Afrique australe –, d’où les perpétuels changements constitutionnels contextualisés selon les intérêts du moment.

Ensuite, la plupart des Constitutions d’Afrique sont des copiés-collés de celles des pays développés, avec parfois – quand la fainéantise intellectuelle ne l’emporte pas – une toute petite couche de vernis local. Or il est évident que les paramètres socio-culturels, anthropologiques et politico-économiques ne sont ni semblables ni comparables. Comment faire comprendre une Constitution ou des lois électorales à une population en majorité analphabète ? Sans compter qu’organiser des élections à cycles réguliers, deux ou trois années consécutives, sur un budget de l’Etat plutôt dérisoire est une gageure.

Démocratie ethnique

Les Constitutions africaines sont issues pour la plupart des mouvements politiques des années 1990, sur les ruines et les échecs des partis uniques. Ces derniers, héritiers de la décolonisation, n’ont pu construire des Etats modernes, mais des Etats semi-féodaux et patrimoniaux. L’Etat, c’était le chef, agissant tel un suzerain disposant à sa guise des ressources publiques et ayant droit de vie et de mort sur ses sujets. C’était aussi l’ère des coups d’Etat, commandités ou internes, pour qui veut prendre sa part du maigre gâteau national. Le chef, une fois le coup réussi, pouvait s’octroyer tous les pouvoirs, se faire nommer maréchal (Mobutu dans l’ex-Zaïre) ou changer la forme de l’Etat, qui devenait son empire (Bokassa en Centrafrique).

Les démocraties naissantes des années 1990 n’ont pas tiré les leçons de ces pratiques. Pis encore, elles ont alimenté et aggravé les divisions ethno-régionalistes dans des Etats qui n’étaient déjà pas des nations consolidées, leurs frontières étant un héritage de la conférence de Berlin de 1885. Et la démocratie ethnique s’est substituée à de véritables démocraties nationales. Le chanteur ivoirien Alpha Blondy n’a-t-il pas consacré un titre à la pratique démocratique ? « Démocratie ce n’est pas tribalisme », chantait-il au début des années 1990. Ces pays se sont retrouvés avec des dizaines, voire des centaines de partis politiques du jour au lendemain, et cela a été la naissance du business démocratique, car créer et enregistrer un parti vous ouvre des droits au titre des chartes de partis, même si le nombre d’adhérents déclarés relève de la fiction.

Dès lors, des dissensions et palabres à n’en plus finir sont apparus. Alors pour élargir l’assiette du gâteau, l’inventivité politique a donné naissance aux fameuses commissions électorales dites « indépendantes » ou « autonomes ». Ces mastodontes chargés d’organiser des élections justes et transparentes sont à l’origine de bien des crises pré- et post-électorales : République démocratique du Congo (RDC), Côte d’Ivoire, Bénin… Les budgets alloués à ces structures pour l’organisation des élections dépassent de 10, 20 ou 30 fois les budgets de développement d’une commune moyenne : plusieurs dizaines de milliards de francs CFA (des dizaines de millions d’euros) en Côte d’Ivoire en 2010, une dizaine de milliards pour des législatives en 2015 dans un pays aux ressources modestes comme le Bénin. Toute la classe politique, opposition ou pouvoir, cherche à prendre le contrôle de ces structures, surtout pour en toucher les indemnités de commission et autres oboles.

« Devoir d’ingratitude »

Puis viennent les cours et les conseils constitutionnels. Parfois, ces institutions judiciaires font doublon avec les commissions électorales. Nous n’avons jamais compris pourquoi les élections dans ces pays ne sont pas confiées à des institutions judiciaires crédibles et spécialisées, composées de magistrats expérimentés et d’auxiliaires de justice assermentés. Pourquoi recourt-on aux cours et tribunaux pour les contentieux électoraux, alors qu’ils ne sont pas impliqués en amont dans les opérations électorales ? En Côte d’Ivoire, c’est bien le ministère de la justice qui a piloté les audiences foraines dont est issue la liste électorale en 2010. C’est d’ailleurs l’un des acteurs clés de cette opération qui dirige aujourd’hui la commission électorale. Les élections devraient être l’affaire de la justice et des structures chargées de la décentralisation, alors que les commissions électorales ont fait leur temps et ont montré leurs limites. Quelle crédibilité peut-on accorder à un procès-verbal de vote signé par des commissaires locaux ne sachant ni lire ni écrire ?

Quant aux structures judiciaires spécialisées, sans être un praticien du droit mais au regard des expériences et pratiques courantes, il n’apparaît plus sain que les dirigeants des cours et tribunaux chargés des processus électoraux soient nommés par les pouvoirs en place. En Afrique plus qu’ailleurs, il paraît si difficile d’exercer son « devoir d’ingratitude » vis-à-vis du prince, comme le disait l’ancien président du Conseil constitutionnel français Robert Badinter. Des magistrats ou praticiens du droit expérimentés devraient être majoritaires dans ces juridictions et élire en leur sein les présidents desdites institutions sans voix prépondérante, pour leur garantir un minimum de professionnalisme, d’indépendance et de crédibilité. Les cas de la Côte d’Ivoire, de la RDC ou plus récemment du Mali peuvent aider à repenser les mécanismes de désignation pour ne pas confiner l’Afrique dans des crises électorales à répétition.

Certes, il revient au premier chef aux Africains de s’approprier les réformes du corpus institutionnel de leurs systèmes démocratiques, afin de les revisiter dans le sens d’une plus grande stabilité politique. Cependant, les partenaires et la communauté internationale peuvent les y encourager et y contribuer pour prévenir d’éventuelles crises, plutôt que d’intervenir en pompiers pendant les périodes électorales en Afrique. Aider à mieux articuler le binôme démocratie/développement, comme le plaidait François Mitterrand au sommet de La Baule en juin 1990. Cette articulation participerait à optimiser les ressources au service du plus grand nombre, des jeunes, des femmes et des populations vulnérables, dans cette Afrique qui a chanté et dansé Indépendance Cha Cha depuis soixante ans, sans que cette indépendance soit porteuse de beaucoup de progrès ni d’espérance pour sa jeunesse.

Sylvain Félix Semilinko est journaliste et consultant, ancien directeur d’Onuci-FM, la radio de l’opération des Nations unies en Côte d’Ivoire.

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance 

(Sylvain Félix Semilinko)

Soixante ans après les indépendances, le journaliste Sylvain Félix Semilinko constate dans une tribune du Monde que l’Etat de droit reste un vœu pieux dans de nombreux pays du continent.

 

Tribune. 

Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance ? Alors qu’en Afrique de l’Ouest se profilent une série d’élections présidentielles, ces périodes porteuses de violences, d’arrestations, de musellement des médias, voire de meurtres et de massacres, sont propices à nous poser cette question.

Une grande partie du continent avait poussé des cris d’orfraie pour dénoncer le défunt président français, Jacques Chirac, grand connaisseur de la politique en Afrique, qui laissait entendre que celle-ci n’était pas encore prête pour la démocratie à l’occidentale. Paternalisme et condescendance, hurlait-on alors. Et pourtant, trente ans de pratiques démocratiques sur le continent tendent à prouver qu’il n’était pas loin de la vérité.

Les tares congénitales des démocraties africaines sont multiples. Partout où elle s’est ancrée, la démocratie a pour socle l’Etat de droit, fondé sur une Constitution qui, pour être pérenne, doit être intemporelle, impersonnelle et non taillée sur mesure. Difficile en Afrique de compter sur des textes consacrant ces principes – sauf de rares cas en Afrique australe –, d’où les perpétuels changements constitutionnels contextualisés selon les intérêts du moment.

Ensuite, la plupart des Constitutions d’Afrique sont des copiés-collés de celles des pays développés, avec parfois – quand la fainéantise intellectuelle ne l’emporte pas – une toute petite couche de vernis local. Or il est évident que les paramètres socio-culturels, anthropologiques et politico-économiques ne sont ni semblables ni comparables. Comment faire comprendre une Constitution ou des lois électorales à une population en majorité analphabète ? Sans compter qu’organiser des élections à cycles réguliers, deux ou trois années consécutives, sur un budget de l’Etat plutôt dérisoire est une gageure.

Démocratie ethnique

Les Constitutions africaines sont issues pour la plupart des mouvements politiques des années 1990, sur les ruines et les échecs des partis uniques. Ces derniers, héritiers de la décolonisation, n’ont pu construire des Etats modernes, mais des Etats semi-féodaux et patrimoniaux. L’Etat, c’était le chef, agissant tel un suzerain disposant à sa guise des ressources publiques et ayant droit de vie et de mort sur ses sujets. C’était aussi l’ère des coups d’Etat, commandités ou internes, pour qui veut prendre sa part du maigre gâteau national. Le chef, une fois le coup réussi, pouvait s’octroyer tous les pouvoirs, se faire nommer maréchal (Mobutu dans l’ex-Zaïre) ou changer la forme de l’Etat, qui devenait son empire (Bokassa en Centrafrique).

Les démocraties naissantes des années 1990 n’ont pas tiré les leçons de ces pratiques. Pis encore, elles ont alimenté et aggravé les divisions ethno-régionalistes dans des Etats qui n’étaient déjà pas des nations consolidées, leurs frontières étant un héritage de la conférence de Berlin de 1885. Et la démocratie ethnique s’est substituée à de véritables démocraties nationales. Le chanteur ivoirien Alpha Blondy n’a-t-il pas consacré un titre à la pratique démocratique ? « Démocratie ce n’est pas tribalisme », chantait-il au début des années 1990. Ces pays se sont retrouvés avec des dizaines, voire des centaines de partis politiques du jour au lendemain, et cela a été la naissance du business démocratique, car créer et enregistrer un parti vous ouvre des droits au titre des chartes de partis, même si le nombre d’adhérents déclarés relève de la fiction.

Dès lors, des dissensions et palabres à n’en plus finir sont apparus. Alors pour élargir l’assiette du gâteau, l’inventivité politique a donné naissance aux fameuses commissions électorales dites « indépendantes » ou « autonomes ». Ces mastodontes chargés d’organiser des élections justes et transparentes sont à l’origine de bien des crises pré- et post-électorales : République démocratique du Congo (RDC), Côte d’Ivoire, Bénin… Les budgets alloués à ces structures pour l’organisation des élections dépassent de 10, 20 ou 30 fois les budgets de développement d’une commune moyenne : plusieurs dizaines de milliards de francs CFA (des dizaines de millions d’euros) en Côte d’Ivoire en 2010, une dizaine de milliards pour des législatives en 2015 dans un pays aux ressources modestes comme le Bénin. Toute la classe politique, opposition ou pouvoir, cherche à prendre le contrôle de ces structures, surtout pour en toucher les indemnités de commission et autres oboles.

« Devoir d’ingratitude »

Puis viennent les cours et les conseils constitutionnels. Parfois, ces institutions judiciaires font doublon avec les commissions électorales. Nous n’avons jamais compris pourquoi les élections dans ces pays ne sont pas confiées à des institutions judiciaires crédibles et spécialisées, composées de magistrats expérimentés et d’auxiliaires de justice assermentés. Pourquoi recourt-on aux cours et tribunaux pour les contentieux électoraux, alors qu’ils ne sont pas impliqués en amont dans les opérations électorales ? En Côte d’Ivoire, c’est bien le ministère de la justice qui a piloté les audiences foraines dont est issue la liste électorale en 2010. C’est d’ailleurs l’un des acteurs clés de cette opération qui dirige aujourd’hui la commission électorale. Les élections devraient être l’affaire de la justice et des structures chargées de la décentralisation, alors que les commissions électorales ont fait leur temps et ont montré leurs limites. Quelle crédibilité peut-on accorder à un procès-verbal de vote signé par des commissaires locaux ne sachant ni lire ni écrire ?

Quant aux structures judiciaires spécialisées, sans être un praticien du droit mais au regard des expériences et pratiques courantes, il n’apparaît plus sain que les dirigeants des cours et tribunaux chargés des processus électoraux soient nommés par les pouvoirs en place. En Afrique plus qu’ailleurs, il paraît si difficile d’exercer son « devoir d’ingratitude » vis-à-vis du prince, comme le disait l’ancien président du Conseil constitutionnel français Robert Badinter. Des magistrats ou praticiens du droit expérimentés devraient être majoritaires dans ces juridictions et élire en leur sein les présidents desdites institutions sans voix prépondérante, pour leur garantir un minimum de professionnalisme, d’indépendance et de crédibilité. Les cas de la Côte d’Ivoire, de la RDC ou plus récemment du Mali peuvent aider à repenser les mécanismes de désignation pour ne pas confiner l’Afrique dans des crises électorales à répétition.

Certes, il revient au premier chef aux Africains de s’approprier les réformes du corpus institutionnel de leurs systèmes démocratiques, afin de les revisiter dans le sens d’une plus grande stabilité politique. Cependant, les partenaires et la communauté internationale peuvent les y encourager et y contribuer pour prévenir d’éventuelles crises, plutôt que d’intervenir en pompiers pendant les périodes électorales en Afrique. Aider à mieux articuler le binôme démocratie/développement, comme le plaidait François Mitterrand au sommet de La Baule en juin 1990. Cette articulation participerait à optimiser les ressources au service du plus grand nombre, des jeunes, des femmes et des populations vulnérables, dans cette Afrique qui a chanté et dansé Indépendance Cha Cha depuis soixante ans, sans que cette indépendance soit porteuse de beaucoup de progrès ni d’espérance pour sa jeunesse.

Sylvain Félix Semilinko est journaliste et consultant, ancien directeur d’Onuci-FM, la radio de l’opération des Nations unies en Côte d’Ivoire.

 

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