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Vaccination et passe sanitaire : les ambiguïtés de Force ouvrière

Vaccination et passe  sanitaire : les ambiguïtés de Force ouvrière

 

Le secrétaire général de Force ouvrière parle de la rentrée et évoque avec beaucoup d’ambiguïté la question de la vaccination et du passe sanitaire dans une interview à l’Opinion (extrait)

Ce n’est pas faute de m’être exprimé pour défendre la vaccination et la nécessité de son accélération – ce qui m’a valu quelques commentaires peu amènes sur les réseaux sociaux – mais aussi sur les modalités du passe sanitaire pour ce qui concerne les salariés. Peut-être qu’il est compliqué d’être entendu dans un flux continu d’informations.

Vu le côté exceptionnel de la situation, pourquoi les syndicats, si soucieux de la santé des salariés, n’ont-ils pas adopté une position commune sur la question ?

Force ouvrière est un syndicat, tout un syndicat, et rien qu’un syndicat. Les décisions de santé publique relèvent de la compétence des autorités scientifiques, médicales, et, sur cette base et dans une démocratie comme la nôtre, des pouvoirs publics.

Votre rôle n’est donc pas d’inciter les salariés à se faire vacciner ?

En matière sanitaire, le rôle du syndicat est de s’assurer de la santé et de la sécurité des salariés sur leur lieu de travail. Dès le premier confinement, nous nous sommes battus pour que seuls les secteurs essentiels restent ouverts ; pour obtenir des protections, masques, gel, blouses, etc., à l’intention de ceux qui devaient continuer ; puis, lorsque la vaccination a été rendue possible plus largement, pour que les salariés en contact avec le public, dans un premier temps, puissent y accéder afin de les protéger eux-mêmes.

Vous vous êtes adressé aux pouvoirs publics pour accélérer la vaccination, pas aux salariés réticents…

Je n’ai pas attendu cet été pour faire part de ma confiance dans les vaccins. Mais chacun doit s’exprimer sur sa compétence reconnue, celle qui fonde sa légitimité. Vouloir tout embrasser finit par semer la confusion, en mettant tous les discours et affirmations, d’où qu’ils viennent, sur un même pied, et nourrit ainsi le trouble et la défiance. Nous avons besoin de rétablir une saine autorité de la parole publique. Force ouvrière s’est fondée sur l’indépendance syndicale et sur la laïcité au sens où elle sépare la sphère privée de la sphère publique. Nous sommes porteurs de l’intérêt particulier des salariés, nous ne sommes pas directeurs de conscience des citoyens. C’est un positionnement de fond, pas une fuite de responsabilité.

«Dès le départ, nous avons milité pour que les personnels du soin bénéficient d’une priorité pour se protéger eux-mêmes : c’est ainsi qu’il fallait s’adresser à eux, au lieu de dire qu’ils constituaient un danger pour les autres»

Que dites-vous aux soignants adhérents de FO, face à l’obligation de vaccination de leurs professions ?

La confédération et notre fédération santé estiment que l’obligation de vaccination relève d’une prescription d’ordre public. La vaccination des soignants est déjà obligatoire pour l’hépatite B. Dès le départ, nous avons milité pour que les personnels du soin bénéficient d’une priorité pour se protéger eux-mêmes : c’est ainsi qu’il fallait s’adresser à eux, au lieu de dire qu’ils constituaient un danger pour les autres. Il y a eu un défaut d’explication et de l’incompréhension : ne leur a-t-on pas dit, à certains moments, de continuer à venir travailler, même positifs à la Covid, s’ils étaient asymptomatiques ? J’ai contesté qu’à l’annonce de l’obligation vaccinale soit associée la menace de sanction, de licenciement. Il fallait mettre l’accent sur la nécessité de la vaccination, pour ces salariés en particulier comme plus largement, et déployer les ressources pour informer, expliquer et rassurer. La vaccination contre l’hépatite B, bien que controversée à l’époque, n’a pas posé de problème majeur.

FO est pour ou contre le pass sanitaire ?

Nous n’avons pas pris position sur le pass en tant que tel. Nous disons et redisons que la vaccination est le meilleur moyen de se protéger. Nous sommes intervenus pour que la sanction du licenciement, ou de la rupture de contrat dans le cas des CDD et des intérimaires, soit retirée. Nous avons évité le pire, mais la pénalisation retenue – la suspension du contrat de travail — crée une situation bancale dans laquelle ni le salarié, ni l’entreprise ne pourraient tenir longtemps.

Les pertes d’emplois redoutées ne se sont pas produites. Ce risque est-il durablement éloigné ?

Il faut être attentif à ce qu’une fois consommées les aides publiques, certaines entreprises ne passent à la case licenciements. Voilà pourquoi nous n’avons eu de cesse d’appeler à conditionner ces aides. Nous n’avons pas été entendus, c’est pourquoi nous insistons aujourd’hui pour que les pouvoirs publics surveillent le comportement des entreprises afin de détecter et prévenir les risques.

En avez-vous repéré ?

Notre crainte est nourrie par quelques exemples. Des entreprises comme Bridgestone ou Nokia ont à l’évidence profité du contexte de la crise sanitaire pour faire passer leurs restructurations et les licenciements en découlant.

On dit que les salariés retrouvent leur combativité quand la situation s’améliore. Est-ce le cas ?

Cet été, on a vu revenir des conflits où les salaires étaient mis en avant comme à ADP ou chez Auchan. Mais la situation reste incertaine, d’abord sur la santé, mais aussi sur l’emploi : dans certains secteurs comme l’aéronautique ou l’automobile, la lutte contre le réchauffement climatique alimente une autre source d’inquiétude.

Sur la réforme de l’assurance-chômage, Emmanuel Macron a annoncé, le 12 juillet, qu’un nouveau décret entrerait en vigueur le 1er octobre. Attaquerez-vous ce texte devant le Conseil d’Etat ?

Nous verrons ce qu’il contient, mais nous n’avons pas changé d’avis. Le gouvernement met en avant l’amélioration de l’emploi pour justifier sa réforme. Si c’est le cas, nul besoin de réforme, le problème financier sera résolu. Plus largement, quand je rencontrerai le Premier ministre, le 1er septembre, je lui dirai qu’il faut cesser de considérer le social comme un coût. Depuis trop longtemps, on nous parle Sécu, retraites, assurance-chômage, services publics comme d’une dépense, là où nous voyons un progrès social, plus égalitaire et plus juste. La finance s’en sort toujours mieux elle, mais on nous ressert des discours stigmatisant ce que les syndicats ont bâti.

Si la finance s’en sort, les protections ont été particulièrement élevées, en France, durant cette crise…

Protection du capital !

Des salariés aussi, grâce à l’activité partielle !

Oui et nous avons soutenu ces dispositifs. Mais quand on dit « les salariés ont bénéficié de l’activité partielle », on oublie de dire que les taux de marge des entreprises en ont tout autant bénéficié. C’est là qu’il fallait être vigilants sur leur utilisation !

Sur la réforme des retraites, le combat a cessé ?

Je suis toujours sur mes gardes. Quand le Président a reçu les partenaires sociaux, le 6 juillet, il nous a dit, en substance : la question n’est pas de savoir s’il faut faire une réforme, mais quand et comment. Le quand et le comment peuvent vite revenir. Dans ce cas, il nous trouvera sur son chemin.

Une concertation sur cette question va être ouverte, y participerez-vous ?

Je ne sais pas si elle sera ouverte, ni ce qu’elle sera. Je ne m’inscrirai pas dans une discussion destinée à évaluer de combien il faut reculer l’âge de départ en retraite. Ce sujet est bien dans l’esprit d’Emmanuel Macron, comme dans celui de certains de ses concurrents pour 2022. Le pouvoir actuel parle d’enjamber l’élection, mais moi, je suis un syndicaliste, je ne vais pas aller discuter du programme d’Emmanuel Macron pour la présidentielle. Ou de celui de n’importe quel autre candidat. Cette réforme est infondée : ce n’est pas notre système de retraite qui est en cause, c’est l’accès à l’emploi des jeunes, les bas salaires, le temps partiel subi, l’emploi des seniors. Le Président lui-même a mis l’accent sur la reprise d’activité et la qualité de l’emploi. Si l’on résout ces problèmes, on parviendra à l’équilibre financier de tous nos systèmes sociaux.

Comment cette crise fait-elle évoluer le métier de syndicaliste ?

Nous avons obtenu quelques victoires. Par exemple, le Ségur de la santé est un accord majeur pour les salariés de ce secteur. Malheureusement, il a fallu la crise pour qu’on nous entende. Par ailleurs beaucoup de salariés isolés se sont tournés vers nous, pour trouver des informations dans le contexte sanitaire ou en cas de licenciement abusif. Notre défi reste de les organiser. Nous n’avons pas encore trouvé la solution miracle.

 

«Macron épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres» (Marc Endeweld)

«Macron épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres» (Marc Endeweld)

 

Marc Endeweld, journaliste d’investigation explique dans le journal l’Opinion l’opa de Macron sur la France et le rôle des réseaux. il traite de la conception très monarchique de Macron.  Il a publié en 2015 la première biographie d’Emmanuel Macron, L’ambigu Monsieur Macron, (Flammarion).

Votre livre décrit la stratégie déployée par Emmanuel Macron dans son ascension, puis à l’Elysée, consistant à « jouer » avec des réseaux déjà existants, et non à construire ses propres réseaux…

Quand Emmanuel Macron se lance à l’assaut de l’Elysée, il n’a ni expérience politique, ni expérience élective. Pour prendre le contrôle de l’Etat, il a donc méthodiquement récupéré les réseaux de ses concurrents, à gauche comme à droite. Il a effectué, avec sa femme Brigitte, un véritable travail de réseautage, mais cela va au-delà. Il ne s’est pas uniquement investi dans les réseaux du monde économique ou de Bercy, dont il était issu, mais aussi dans les réseaux de la défense, de la sécurité, de la diplomatie, ou de la Françafrique, ces réseaux qui traversent l’histoire de la Ve République. Le « en même temps ​» macronien lui a permis de récupérer ce qu’on appelle généralement les réseaux transversaux, qui ont toujours été utilisés par les partis traditionnels de gauche et de droite ces trente dernières années. Dans les coulisses, l’homme du « ​nouveau monde ​» s’est en réalité fortement appuyé sur « ​l’ancien monde ​».

 

En quoi cette stratégie est-elle exceptionnelle ?

Elle est exceptionnelle d’abord par sa rapidité : il est parvenu au pouvoir après à peine deux ans de réseautage proprement politique, avec les fameux dîners à Bercy par exemple. Ce qui est original ensuite, c’est qu’il ne dispose pas de parti traditionnel, comme les autres responsables politiques et donc pas de contre-pouvoir, y compris parmi ses sympathisants. Il est seul, avec ou face à ces réseaux, et surtout il n’existe pas de tampon entre l’Elysée et certaines personnes qui ont pu lui rendre des services au moment de son ascension. Bien sûr, il y a toujours eu des hommes de l’ombre dans la Ve, il y a toujours eu des réseaux particuliers, notamment dans la sécurité, le renseignement. Mais ce qui frappe chez Macron, c’est que, malgré sa jeunesse, il ne renouvelle pas la pratique du pouvoir, contrairement à ce qu’il avait promis aux Français lors de sa campagne de 2017. Au contraire, il épouse les ambiguïtés de la Ve République, y compris dans ses aspects les plus sombres, comme on a pu le voir avec l’affaire Benalla. Aussi, dès qu’il y a un incident, il se retrouve en première ligne. C’est un peu comme s’il manœuvrait une voiture sans amortisseurs : dès qu’il y a un choc sur la route, il est atteint directement.

On a beaucoup dit, au moment de l’affaire Benalla, qu’Emmanuel Macron n’avait pas de réseau dans la police. Est-ce le cas ?

Oui et non. Comme dans tous les ministères purement régaliens, il avait effectivement peu de réseaux. Mais place Beauvau, il s’est appuyé sur les réseaux historiques de Pierre Joxe, qui sont encore puissants trente ans après, et il a utilisé les réseaux Sarkozy. Macron a par exemple régulièrement reçu, pendant la campagne, les conseils d’Ange Mancini (N.D.L.R.: ancien coordonnateur national du renseignement auprès de l’Elysée). Pour autant, il s’est retrouvé en difficulté avec ce ministère. Il n’a pas réussi à contrôler entièrement cette administration. Peut-être parce qu’il n’a pas mis à Beauvau de ministres forts : Collomb n’avait pas de réel pouvoir, et le directeur de cabinet de Castaner a été choisi par l’Elysée. Plus généralement, Macron est un colosse aux pieds d’argile : il concentre beaucoup de choses sur sa personne ou sur l’Elysée, or il ne peut tout contrôler. Il est dans ce rêve de toute-puissance, mais dans ces institutions de la République complexes, c’est extrêmement difficile.

Vous consacrez un chapitre à l’Afrique : Emmanuel Macron met-il en œuvre une diplomatie parallèle en Afrique?

Je démontre que les réseaux de la Françafrique, notamment ceux de Sassou-Nguesso au Congo Brazzaville, ont parfois été en contact direct avec Macron, bien en amont de la présidentielle. C’est le cas de l’Algérie également : lors de son voyage à Alger de février 2017, derrière ses déclarations sur « ​les crimes contre l’humanité ​» qui ont attiré l’attention des médias, Emmanuel Macron a rencontré en coulisses les réseaux affairistes algériens, alors au pouvoir, sans prendre beaucoup de précautions. Ces oligarques autour de Bouteflika sont aujourd’hui en prison, du fait des événements. Mais j’ai surtout découvert qu’Alexandre Benalla était au cœur de réseaux qui ont aidé Macron sur l’Algérie, et qui, pour certains, sont « ​nouveaux ​» de l’aveu même d’un ancien responsable algérien. Cette « ​affaire Benalla ​» n’a donc pas qu’un volet russe, elle a aussi une clé algérienne.

« A l’heure du 2.0, Macron est un Président qui court-circuite beaucoup les jeux de pouvoir institutionnels, de par ses multiples prises de contact informelles, via la messagerie Telegram. Cela lui permet de récupérer en direct beaucoup d’informations »

Le Président a-t-il partie liée avec ces réseaux algériens qui l’ont aidé ?

En « ​off ​», beaucoup de mes interlocuteurs s’interrogeaient sur la gêne et le silence de l’Elysée ces derniers mois sur le dossier algérien. Macron a surtout un rapport de realpolitik en diplomatie, il ne fait pas de morale. Par exemple, comment expliquer autrement le fait que Sassou-Nguesso, plutôt mis à l’écart par François Hollande, ait pu participer en bonne place à une conférence diplomatique sur la Libye organisée par la France ? Par ailleurs, à l’heure du 2.0, Macron est un Président qui court-circuite beaucoup les jeux de pouvoir institutionnels, de par ses multiples prises de contact informelles, via la messagerie Telegram. Cela lui permet de récupérer en direct beaucoup d’informations. Les diplomates s’en plaignent. Le Quai se sent dépossédé par une pratique extrêmement personnelle et secrète d’Emmanuel Macron.

On a beaucoup présenté Emmanuel Macron comme le candidat, puis le Président, des grandes fortunes du CAC 40. Est-ce effectivement le cas, selon vous ?

Une phrase est revenue souvent dans mon enquête : « ​Macron séduit, il utilise, il jette ​». S’il est redevable à beaucoup de gens, il leur rend peu. Et s’il a profité de proximités avec des grands patrons, il n’a pas bénéficié du soutien de l’ensemble du CAC 40. Il ne faut pas oublier qu’à la présidentielle, une partie d’entre eux soutenait François Fillon. Le grand patronat est un univers divers : il ne faut pas sous-estimer les luttes internes et les intérêts contradictoires en son sein. Et paradoxalement, le candidat Macron, qu’on a présenté comme le candidat de la « ​nouvelle économie ​», n’a pas reçu suffisamment d’argent dans un premier temps ​​: fin 2016, il n’avait levé que 5 millions d’euros via les dîners de collecte et les dons sur internet. Enfin, certains grands patrons sont aujourd’hui assez déçus par la pratique du pouvoir d’Emmanuel Macron. Le climat social dans le pays s’est extrêmement dégradé avec les Gilets jaunes. Ils s’aperçoivent qu’un homme seul, y compris dans le cadre de la Ve République, ne peut avoir toutes les solutions aux blocages du pays.

 

 

 

Retraites rapport Delevoye : L’âge et le montant, les deux ambigüités

Retraites rapport Delevoye : L’âge et le montant, les deux ambigüités

 

La plupart des médias et des experts saluent le rapport Delevoye. À noter que Delevoye a évité  l’imposition de mesures budgétaires d’autorité des 2020. Son plan ne s’appliquerait qu’à partir de 2025. Ce rapport contient des orientations intéressantes aussi de grandes ambiguïtés. Les plus importantes porte sur l’âge  de la retraite et le montant, finalement les deux aspects importants. Certes on a maintenu l’âge légal  de départ en retraite à 62 ans mais pour le compléter par un nouveau concept : l’âge d’équilibre. En réalité, un âge très mobile qui dépendra de beaucoup de choses ;  bien sûr de l’équilibre démographique, du rapport actif retraité et du contexte de croissance. On commencera à 64 ans sans doute pour passer rapidement à 65 voir bien au-delà. Il n’y a plus d’âge certain pour un départ à la retraite à taux plein pour la plupart des actifs d’aujourd’hui. L’équilibre en question concerne les aspects  financiers. Un équilibre qui devra être atteint dans des périodes de cinq ans. La variable d’ajustement sera précisément le montant des retraites.  C’est précisément pourquoi on n’a pas fixé de mécanisme automatique de calcul de la retraite en évoquant ce sulfureux régime universel. Or régime à points ne veut rien dire tant que la valeur du point n’est pas établie. Il est vraisemblable que ce gouvernement et les autres en fonction de la conjoncture pèseront sur la valeur de ce point à fin de freiner l’évolution des retraites.

 

Retraites : l’âge et le montant, les deux ambigüités

Retraites : l’âge et le montant, les deux ambigüités

 

La plupart des médias et des experts saluent le rapport Delevoye. À noter que Delevoye a évité  l’imposition de mesures budgétaires d’autorité des 2020. Son plan ne s’appliquerait qu’à partir de 2025. Ce rapport contient des orientations intéressantes aussi de grandes ambiguïtés. Les plus importantes porte sur l’âge  de la retraite et le montant, finalement les deux aspects importants. Certes on a maintenu l’âge légal  de départ en retraite à 62 ans mais pour le compléter par un nouveau concept : l’âge d’équilibre. En réalité, un âge très mobile qui dépendra de beaucoup de choses ;  bien sûr de l’équilibre démographique, du rapport actif retraité et du contexte de croissance. On commencera à 64 ans sans doute pour passer rapidement à 65 voir bien au-delà. Il n’y a plus d’âge certain pour un départ à la retraite à taux plein pour la plupart des actifs d’aujourd’hui. L’équilibre en question concerne les aspects  financiers. Un équilibre qui devra être atteint dans des périodes de cinq ans. La variable d’ajustement sera précisément le montant des retraites.  C’est précisément pourquoi on n’a pas fixé de mécanisme automatique de calcul de la retraite en évoquant ce sulfureux régime universel. Or régime à points ne veut rien dire tant que la valeur du point n’est pas établie. Il est vraisemblable que ce gouvernement et les autres en fonction de la conjoncture pèseront sur la valeur de ce point à fin de freiner l’évolution des retraites.

 

Travailleurs détachés : ambiguïtés et démagogie (Gilles Savary)

Travailleurs détachés : ambiguïtés et démagogie (Gilles Savary)

 

Dans une interview à l’Opinion, Gilles Savary, ancien député, auteur de la loi contre la «concurrence sociale déloyale» du 10 juillet 2014 relativise l’enjeu des travailleurs détachés tout en soutenant un processus d’harmonisation. Il note toutefois que le travail détaché se développe aussi du fait des réticences des français à effectuer certaines tâches manuelles. Dans certaines zones pourtant économiquement défavorisées des entreprises notamment agricoles ne parvient pas à recruter lors des campagnes de récolte.  Tribune :

« Le président de la République a décidé de européenne visant à durcir le projet de révision de la directive européenne de 1996 sur le détachement des travailleurs, porté par la commissaire Marianne Thyssen et farouchement combattu par les Etats-membres de l’est. Cette initiative est louable mais elle n’est pas sans risques. Le véritable business de main-d’œuvre qui s’est développé sur les écarts sociaux et salariaux au sein de l’Union européenne constitue en effet une aubaine politique pour les partis populistes  et anti-européens qui n’ont pas manqué de s’en saisir, sans faire dans la nuance. Car aucun salarié, ni de l’ouest ni de l’est, ne peut accepter de perdre son emploi et de précariser sa famille pour les beaux yeux du marché intérieur européen. La Commission européenne l’a enfin compris, aiguillonnée notamment par l’émergence de législations nationales unilatérales à l’exemple de celle de la France, mais aussi par le constat que la directive de 1996 était mal adaptée à une Europe où l’intégration des pays de l’Est avait considérablement accru les écarts salariaux et sociaux entre Etats-membres. Le soutien engagé du président de la République française au projet européen de révision de la directive est un signal politique fort mais reste exposé à un effet de ciseau politique entre une position minimaliste du Conseil européen et les traditionnelles surenchères françaises, tellement notre débat intérieur sur le sujet reste miné par une démagogie et des postures qui ne facilitent ni sa compréhension, ni sa solution. Certains, europhobes, prônent l’interdiction du détachement, mais la France trouverait en retour des rétorsions particulièrement pénalisantes pour son économie et son rayonnement culturel, sans pour autant régler le problème de l’immigration de travail. D’autres invoquent légitimement le préalable d’une harmonisation sociale européenne. Mais pour être immédiate, elle nécessiterait de gigantesques et interminables transferts financiers de nos pays vers les pays de l’est, à l’exemple démultiplié de ce qui s’est passé en 1991 entre les deux Allemagne. Et personne n’est prêt à payer en Europe de l’ouest un impôt supplémentaire pour que les Etats-membres de l’est puissent supporter à brève échéance des niveaux de protection sociale et de salaires identiques aux nôtres… S’il faut encourager et multiplier les réglementations sociales européennes, le « grand soir » de l’harmonisation sociale sur les standards français n’est pas pour demain. Enfin, d’autres encore avancent la proposition d’exiger un rattachement social des travailleurs détachés au pays d’accueil, mais quel ingénieur ou commercial français accepterait des missions professionnelles à l’étranger avec l’obligation de ressortir de la sécurité sociale bulgare ou grecque ? En réalité, il n’y a guère d’autre voie crédible que de renforcer les réglementations européennes et nationales contre les fraudes et les effets pervers du détachement transnational. Avec les lois Savary, Macron, Rebsamen, El Khomri, la France a déjà fait le maximum envisageable dans un cadre national. Faute d’une majorité politique au Conseil européen pour envisager la mesure simple et radicale d’interdire le détachement à l’intérim (prestation de service internationale), qui est à la source des réseaux de main-d’œuvre low cost et des fraudes les plus sophistiquées et les plus complexes à démêler, la moindre ambition de la proposition Thyssen obtiendra sans doute un compromis qui introduira des restrictions réglementaires bienvenues mais qui exigera des moyens accrus de contrôle du travail pour en assurer l’application et le contrôle. A cet égard, les pays de l’est doivent être convaincus qu’à trop invoquer la subsidiarité, ils finiront par encourager les Etats-membres les plus exposés à durcir leurs réglementations nationales et leurs contrôles, à l’instar de la France. Toute avancée européenne est donc bonne à prendre, et pour tous les Etats-membres, même si la simplicité comme l’esprit du détachement commanderaient que le détachement d’intérim ressorte du droit d’établissement dans les pays d’accueil à leurs conditions sociales et salariales puisque le métier du travailleur intérimaire « détaché » – maçon, ouvrier agricole… – est disjoint de celui de placement de main-d’œuvre de son agence d’intérim. Mais ne nous le cachons pas, une grande part du problème réside aussi chez nous. Une étude de la direction du Trésor démontre précisément que le détachement de travailleurs européens en France n’est plus tant une question de coût du travail que de souplesse, de pénurie mais aussi de qualité de la main-d’œuvre française dans de très nombreux métiers, y compris dans des emplois qualifiés. Et cette dépréciation française du travail manuel est autrement redoutable à réformer qu’une directive européenne ! Du coup, si le détachement n’existait pas, il faudrait l’inventer. A défaut, l’on reviendrait aux bons vieux réseaux d’immigration de travail, du temps où les Polonais extrayaient notre charbon, les Italiens travaillaient dans nos vallées agricoles, les Maghrébins fabriquaient nos voitures et les Espagnols et les Portugais construisaient nos maisons. Le risque politique de ce dossier réside dans la diabolisation sans nuance du détachement sur fond de xénophobie subliminale car, au royaume de l’ambiguïté, les démagogues sont rois et inépuisables. Pourtant, en l’état actuel des progrès accomplis dans la lutte contre les fraudes au détachement et de l’alignement des coûts de main-d’œuvre, il serait temps de conjuguer nos exigences de régulation européenne avec la reconnaissance de ce qu’apporte le détachement de travailleurs, entrants comme sortants, à notre économie. On y gagnerait en compréhension par l’opinion publique française et sans doute aussi en force de conviction européenne. »

 




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