Lutte contre les fake news, le harcèlement et la haine : l’amalgame dangereux
Plusieurs responsables politiques réclament désormais des mesures qui seraient destinées à lutter contre les fake news, le harcèlement et la haine. Une espèce d’amalgame très fumeux même s’il peut exister quelques liens. Par ailleurs chaque type de débordement mérite sans doute un traitement spécifique. Une mesure commune pourrait toutefois être décidée : celle qui consiste à interdire l’anonymat sur Internet. Sur tous les autres supports d’information (bulletin, tracts journaux etc.) le nom de l’éditeur est obligatoire. Pourquoi pas sur Internet. Lorsqu’elle ne comporte pas de nom, l’information sur le net constitue une sorte de lettre numérique anonyme. La levée de l’anonymat faciliterait les poursuites judiciaires qui sont sans doute préférable à une régulation administrative dans une démocratie. Pour le cas particulier des fake, news le débat est particulièrement confus car on ne sait pas quel est le champ d’application (informations générales, informations personnelles, nature de faits ou interprétations etc.). Tout cela renvoie en outre un concept d’objectivité ou de vérité qui est particulièrement subjectif. Selon un sondage Odoxa Dentsu Consulting» pourtant 88% soutiendraient la loi de novembre 2018 visant à lutter contre leur propagation en période électorale et plus généralement les Français seraient de plus en plus nombreux à considérer que l’intox est une question importante (50 %). Ce problème est toutefois complètement ingérable car l’intox est pratiquée partout. En premier, lors des campagnes électorales et pour à peu près tous les candidats. La plupart des promesses relèvent en effet de l’intox et mériteraient d’être sanctionnées quand elles ne sont pas suivies d’effet. Une perspective illusoire évidemment car c’est ce qui caractérise le système politique et même les fondements de notre démocratie. Comment en effet être élu sans promesses dont beaucoup constituent des illusions. En dehors des périodes électorales, le pouvoir lui-même ne cesse de diffuser de fausses informations par exemple sur les perspectives de croissance, sur le budget, sur l’efficacité des institutions, sur le chômage, et sur nombre de questions socio économiques. Il y a aussi les médias pour la plupart dans les mains des financiers qui ne cessent d’intoxiquer l’opinion avec des analyses très orientées, approximatives voire manipulatrices. De toute manière, cette loi applicable pendant les périodes électorales est impossible à mettre en œuvre. Pour 81% des personnes interrogées, cette loi «est une bonne chose.» Le rejet est toutefois important chez les personnes s’informant via les réseaux sociaux et les blogs: pour 33% d’entre eux, cette loi «est une mauvaise chose car elle risque de porter atteinte à la liberté d’expression.» «Le gouvernement pourra se satisfaire de voir l’une de ses lois plébiscitée par l’ensemble du spectre politique», note Gaël Sliman, président d’Odoxa. «Non seulement cette loi enchante les sympathisants LREM (95%), mais elle est aussi approuvée par plus des trois quarts des sympathisants de gauche (84% des PS et 77% des Insoumis) comme de droite (75% des LR et 73% des RN).» En réalité la problématique posée de l’intox est elle-même une manipulation car elle renvoie au concept d’objectivité et de vérité. Deux concepts tout à fait relatifs. Le problème c’est que les uns et les autres ne parlent pas de la même intoxication ! Certains avancent l’idée d’une régulation préventive via des algorithmes qui détecteraient et bloqueraient les fausses nouvelles, la haine ou le harcèlement. Une tâche complètement irréaliste, également très dangereuse car ce serait substituer un pouvoir administratif au pouvoir judiciaire. En clair ce serait le retour de la censure.