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Environnement–La transition agro-écologique via de nouvelles machines ?

Environnement–La transition agro-écologique via de nouvelles machines ?

 

Alain Savary , directeur général d’Axema, le syndicat français des industriels des agroéquipements – autrement dit le machinisme agricole Estime que la transition agro-écologique se fera via les machines agricoles. Un point de vue intéressant y compris écologiquement mais un peu trop réducteur et pour tout dire un peu trop lobbyiste. Car ce qui est en cause ce n’est pas seulement la manière de cultiver mais aussi le contenu.

 

 

Alain Savary est le directeur général d’Axema, le syndicat français des industriels des agroéquipements – autrement dit le machinisme agricole. Ce secteur, très large, est méconnu du grand public : il inclut ceux qui fabriquent, conçoivent, importent et vendent des équipements pour le secteur agricole. Tracteurs, machines à vendanger, semoirs, pulvérisateurs, moissonneuses, robots, systèmes d’alimentation animale, stabulations, serres, irrigation, mais aussi les tondeuses et les tronçonneuses des professionnels des espaces verts ! Un secteur crucial car c’est aussi sur des équipements de bon niveau que repose la transition agro-écologique. Il recouvre une grande diversité d’entreprises, des grands groupes mondiaux très connus comme John Deere aux ETI et PME françaises, mais aussi des TPE et des start-up, qui emploient 26 000 salariés. Cela reflète la grande évolution en cours dans l’agriculture mondiale. Axema regroupe 203 de ces entreprises qui servent 90 % du marché français.

A la différence des autres secteurs, l’agriculture ne s’est pas vraiment arrêtée pendant la crise. Comment se portent les fournisseurs d’agro-équipements après la crise sanitaire ?

Le secteur a terminé 2020 au même niveau que 2019 – c’est-à-dire environ 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, ce qui est le niveau depuis trois ans. Il anticipe une petite croissance en 2021. La France est le premier ou le second marché européen du secteur, selon les années, cette place se jouant souvent avec l’Allemagne. Notre problème n’est pas la demande ! Elle reste soutenue, autant pour l’agriculture des plantes que pour celle de l’élevage, car la transition agro-écologique nécessite des équipements adaptés, nouveaux. Notre problème, c’est la capacité à produire ! Nous nous heurtons à de très importantes difficultés d’accès aux matériaux de base, aux composants électriques et électroniques, à l’acier. En 2018, un dispositif européen de quotas par produits, dans le cadre de tensions commerciales avec les Etats-Unis, s’est traduit par une majoration des frais de douane de 25 %. Or, les industries mécaniques ont besoin de ces importations, car l’acier européen est insuffisant ! Nous notons une multiplication par deux ou trois des prix depuis fin 2020. Et au cours du dernier mois et demi, ils ont pris 20 %. Dans un cadre de demande forte au niveau mondial, la réglementation européenne est une aberration. Elle nous conduit à ralentir les productions et à en doubler le coût de revient. Plus grave, nous anticipons des manques de fournitures pour le second semestre 2021. Il y aura des arrêts de production…

Le secteur fait souvent état d’une pénurie de main-d’œuvre. Cela s’arrange-t-il ?

Non, la pénurie d’employés formés demeure. Jusqu’à ce nouveau problème de pénurie de matières première industrielles, c’était notre premier facteur limitant. On ne manque pas de bras seulement chez les fabricants que nous sommes, mais à tous les étages de la filière, qui concentre en tout 150 000 emplois ! Cela vaut pour les industriels, mais aussi chez les concessionnaires, dans les coopératives de matériel (cuma), pour la réparation, chez les artisans ruraux… Il y a des dizaines de milliers d’emplois de bon niveau à pourvoir.

«Les évolutions de l’agriculture doivent se prévoir, se concerter. Le mouvement européen qui va exiger la réduction de moitié des intrants doit s’anticiper»

Ces goulets d’étranglement ne risquent-ils pas de handicaper les mises en application des décisions politiques ?

Si. C’est vrai pour ce qui concerne la sortie du glyphosate, notamment en viticulture et en arboriculture, par exemple. Nous allons avoir du mal à fournir les équipements mécaniques qui seront nécessaires pour désherber avec précision entre les rangs de vigne ou au pied des arbres. C’est fait, jusqu’ici, à 90 % avec du glyphosate, il faut bien une alternative ! Nous avons identifié 60 entreprises européennes capables de fournir des solutions adaptées. Nous les avons sondées. Elles nous ont dit qu’il leur faudrait au moins trois ans après l’entrée en vigueur de l’interdiction du produit, qui était prévue début 2021, pour que le maillon industriel soit capable de fournir suffisamment de machines… Et encore. Quand on passe du glyphosate une fois, il faut passer trois fois avec les machines. La France n’a pas les conducteurs pour le faire.

Quelles leçons en tirer pour la suite ?

Les évolutions de l’agriculture doivent se prévoir, se concerter. Le mouvement européen qui va exiger la réduction de moitié des intrants doit s’anticiper. Deux exemples : dans les itinéraires culturaux de demain, on sera sans doute amené à cultiver simultanément des protéagineux et du blé, pour ramener de l’azote dans le sol avec moins d’engrais. Mais il faut réfléchir dès maintenant et de façon concertée aux équipements nécessaires… Sinon, on ne pourra pas récolter et moissonner correctement des plantes aussi différentes sans les mélanger. Même chose pour le développement du bio-contrôle. Il y a une limite à son développement faute de technologies adaptées aux applications. Une solution de chimie, ça marche, on sait faire, et avec précision… Mais des larves, des spores de champignons pour lutter contre des maladies, on ne sait pas forcément comment s’y prendre. Il y a beaucoup à imaginer en fonction des exigences de demain, des solutions complètes plus que les équipements, mais nous avons besoin de réfléchir de façon transversale, avec les développeurs de ces solutions, les instituts techniques, les organismes de recherche, les utilisateurs… Il faut aussi bien prendre en compte le fait que toutes les nouvelles technologies, si elles sont prometteuses, doublent le prix des équipements ! Bien sûr, le coût va diminuer avec les amortissements des investissements industriels et de la R & D… Mais le moment que nous vivons est crucial. A ce jour, ces technologies représentent un surcoût que les agriculteurs ne peuvent payer.

«La totalité du plan de relance a été consommée en un temps record. Les mesures de développement de la filière protéine représentaient 100 millions d’euros, dont 10 millions pour les agro-équipements»

Le plan de relance prévoit des soutiens à l’achat d’agro-équipements. Une bonne nouvelle ?

C’était une bonne idée… Mais la mise en œuvre est difficile ! En fait, la totalité du budget a été consommée en un temps record. Les mesures de développement de la filière protéine représentaient 100 millions d’euros, dont 10 millions pour les agro-équipements. Les demandes ont atteint 60 millions en quelques jours alors que le plan devait durer deux ans. Il enveloppe de 10 millions a été ajoutée, elle a duré deux jours. Ces politiques d’incitations spot désorganisent la filière… Nous ne pouvons pas produire autant en si peu de temps. Des politiques de long terme seraient peut-être plus efficaces pour accompagner les agriculteurs. Des crédits d’impôts permettant le suramortissement non de la totalité de l’équipement, mais des options technologiques, numériques permettant une montée en gamme, plus de précision pour réduire les intrants, cela aurait vraiment du sens. Un pulvérisateur, c’est un pulvérisateur. Si on lui ajoute un guidage GPS ou des technologies de détection qui permettent de n’appliquer un produit que là où c’est précisément nécessaire, de voir précocement les maladies, de cibler les zones qui manquent d’eau… C’est déjà tout autre chose.

Vous vous réjouissez de la spécificité de cet écosystème français de l’agroéquipement. Qu’a-t-il de si particulier ?

Il est intéressant de le comparer avec l’écosystème allemand, qui repose sur des ETI industrielles, sur une puissance mécanique. La France incarne la créativité et l’inventivité. En témoigne, par exemple, l’existence de Robagri, une association qui compte 60 membres engagés pour la robotique agricole. La France est aux avant-postes de l’agriculture de précision, de la numérisation et de l’automatisation du secteur. Elle compte des entreprises prometteuses comme NaioVitibotVitirover, qui développement par exemple des robots désherbeurs… Des start-up d’imagerie, comme Bilbery, qui a inventé une technologie qui, grâce à des capteurs et algorithmes de reconnaissance des végétaux, permet des usages très variés allant du tri des pommes de terre ou des grains de raisin à la reconnaissance optique des bonnes et des mauvaises plantes, des carences des cultures, de la détection précoce des maladies par analyse multispectrale. Ce ne sont que quelques exemples de technologies qui concourent à la réduction des intrants agricoles. Depuis cinq ans, il y a une accélération ahurissante de ces progrès et c’est en France que cela se passe ! Cela intéresse le monde entier.

La transition agro-écologique via de nouvelles machines ?

La transition agro-écologique via de nouvelles machines ?

 

Alain Savary , directeur général d’Axema, le syndicat français des industriels des agroéquipements – autrement dit le machinisme agricole Estime que la transition agro-écologique se fera via les machines agricoles. Un point de vue intéressant y compris écologiquement mais un peu trop réducteur et pour tout dire un peu trop lobbyiste. Car ce qui est en cause ce n’est pas seulement la manière de cultiver mais aussi le contenu.

 

 

Alain Savary est le directeur général d’Axema, le syndicat français des industriels des agroéquipements – autrement dit le machinisme agricole. Ce secteur, très large, est méconnu du grand public : il inclut ceux qui fabriquent, conçoivent, importent et vendent des équipements pour le secteur agricole. Tracteurs, machines à vendanger, semoirs, pulvérisateurs, moissonneuses, robots, systèmes d’alimentation animale, stabulations, serres, irrigation, mais aussi les tondeuses et les tronçonneuses des professionnels des espaces verts ! Un secteur crucial car c’est aussi sur des équipements de bon niveau que repose la transition agro-écologique. Il recouvre une grande diversité d’entreprises, des grands groupes mondiaux très connus comme John Deere aux ETI et PME françaises, mais aussi des TPE et des start-up, qui emploient 26 000 salariés. Cela reflète la grande évolution en cours dans l’agriculture mondiale. Axema regroupe 203 de ces entreprises qui servent 90 % du marché français.

A la différence des autres secteurs, l’agriculture ne s’est pas vraiment arrêtée pendant la crise. Comment se portent les fournisseurs d’agro-équipements après la crise sanitaire ?

Le secteur a terminé 2020 au même niveau que 2019 – c’est-à-dire environ 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, ce qui est le niveau depuis trois ans. Il anticipe une petite croissance en 2021. La France est le premier ou le second marché européen du secteur, selon les années, cette place se jouant souvent avec l’Allemagne. Notre problème n’est pas la demande ! Elle reste soutenue, autant pour l’agriculture des plantes que pour celle de l’élevage, car la transition agro-écologique nécessite des équipements adaptés, nouveaux. Notre problème, c’est la capacité à produire ! Nous nous heurtons à de très importantes difficultés d’accès aux matériaux de base, aux composants électriques et électroniques, à l’acier. En 2018, un dispositif européen de quotas par produits, dans le cadre de tensions commerciales avec les Etats-Unis, s’est traduit par une majoration des frais de douane de 25 %. Or, les industries mécaniques ont besoin de ces importations, car l’acier européen est insuffisant ! Nous notons une multiplication par deux ou trois des prix depuis fin 2020. Et au cours du dernier mois et demi, ils ont pris 20 %. Dans un cadre de demande forte au niveau mondial, la réglementation européenne est une aberration. Elle nous conduit à ralentir les productions et à en doubler le coût de revient. Plus grave, nous anticipons des manques de fournitures pour le second semestre 2021. Il y aura des arrêts de production…

Le secteur fait souvent état d’une pénurie de main-d’œuvre. Cela s’arrange-t-il ?

Non, la pénurie d’employés formés demeure. Jusqu’à ce nouveau problème de pénurie de matières première industrielles, c’était notre premier facteur limitant. On ne manque pas de bras seulement chez les fabricants que nous sommes, mais à tous les étages de la filière, qui concentre en tout 150 000 emplois ! Cela vaut pour les industriels, mais aussi chez les concessionnaires, dans les coopératives de matériel (cuma), pour la réparation, chez les artisans ruraux… Il y a des dizaines de milliers d’emplois de bon niveau à pourvoir.

«Les évolutions de l’agriculture doivent se prévoir, se concerter. Le mouvement européen qui va exiger la réduction de moitié des intrants doit s’anticiper»

Ces goulets d’étranglement ne risquent-ils pas de handicaper les mises en application des décisions politiques ?

Si. C’est vrai pour ce qui concerne la sortie du glyphosate, notamment en viticulture et en arboriculture, par exemple. Nous allons avoir du mal à fournir les équipements mécaniques qui seront nécessaires pour désherber avec précision entre les rangs de vigne ou au pied des arbres. C’est fait, jusqu’ici, à 90 % avec du glyphosate, il faut bien une alternative ! Nous avons identifié 60 entreprises européennes capables de fournir des solutions adaptées. Nous les avons sondées. Elles nous ont dit qu’il leur faudrait au moins trois ans après l’entrée en vigueur de l’interdiction du produit, qui était prévue début 2021, pour que le maillon industriel soit capable de fournir suffisamment de machines… Et encore. Quand on passe du glyphosate une fois, il faut passer trois fois avec les machines. La France n’a pas les conducteurs pour le faire.

Quelles leçons en tirer pour la suite ?

Les évolutions de l’agriculture doivent se prévoir, se concerter. Le mouvement européen qui va exiger la réduction de moitié des intrants doit s’anticiper. Deux exemples : dans les itinéraires culturaux de demain, on sera sans doute amené à cultiver simultanément des protéagineux et du blé, pour ramener de l’azote dans le sol avec moins d’engrais. Mais il faut réfléchir dès maintenant et de façon concertée aux équipements nécessaires… Sinon, on ne pourra pas récolter et moissonner correctement des plantes aussi différentes sans les mélanger. Même chose pour le développement du bio-contrôle. Il y a une limite à son développement faute de technologies adaptées aux applications. Une solution de chimie, ça marche, on sait faire, et avec précision… Mais des larves, des spores de champignons pour lutter contre des maladies, on ne sait pas forcément comment s’y prendre. Il y a beaucoup à imaginer en fonction des exigences de demain, des solutions complètes plus que les équipements, mais nous avons besoin de réfléchir de façon transversale, avec les développeurs de ces solutions, les instituts techniques, les organismes de recherche, les utilisateurs… Il faut aussi bien prendre en compte le fait que toutes les nouvelles technologies, si elles sont prometteuses, doublent le prix des équipements ! Bien sûr, le coût va diminuer avec les amortissements des investissements industriels et de la R & D… Mais le moment que nous vivons est crucial. A ce jour, ces technologies représentent un surcoût que les agriculteurs ne peuvent payer.

«La totalité du plan de relance a été consommée en un temps record. Les mesures de développement de la filière protéine représentaient 100 millions d’euros, dont 10 millions pour les agro-équipements»

Le plan de relance prévoit des soutiens à l’achat d’agro-équipements. Une bonne nouvelle ?

C’était une bonne idée… Mais la mise en œuvre est difficile ! En fait, la totalité du budget a été consommée en un temps record. Les mesures de développement de la filière protéine représentaient 100 millions d’euros, dont 10 millions pour les agro-équipements. Les demandes ont atteint 60 millions en quelques jours alors que le plan devait durer deux ans. Il enveloppe de 10 millions a été ajoutée, elle a duré deux jours. Ces politiques d’incitations spot désorganisent la filière… Nous ne pouvons pas produire autant en si peu de temps. Des politiques de long terme seraient peut-être plus efficaces pour accompagner les agriculteurs. Des crédits d’impôts permettant le suramortissement non de la totalité de l’équipement, mais des options technologiques, numériques permettant une montée en gamme, plus de précision pour réduire les intrants, cela aurait vraiment du sens. Un pulvérisateur, c’est un pulvérisateur. Si on lui ajoute un guidage GPS ou des technologies de détection qui permettent de n’appliquer un produit que là où c’est précisément nécessaire, de voir précocement les maladies, de cibler les zones qui manquent d’eau… C’est déjà tout autre chose.

Vous vous réjouissez de la spécificité de cet écosystème français de l’agroéquipement. Qu’a-t-il de si particulier ?

Il est intéressant de le comparer avec l’écosystème allemand, qui repose sur des ETI industrielles, sur une puissance mécanique. La France incarne la créativité et l’inventivité. En témoigne, par exemple, l’existence de Robagri, une association qui compte 60 membres engagés pour la robotique agricole. La France est aux avant-postes de l’agriculture de précision, de la numérisation et de l’automatisation du secteur. Elle compte des entreprises prometteuses comme NaioVitibotVitirover, qui développement par exemple des robots désherbeurs… Des start-up d’imagerie, comme Bilbery, qui a inventé une technologie qui, grâce à des capteurs et algorithmes de reconnaissance des végétaux, permet des usages très variés allant du tri des pommes de terre ou des grains de raisin à la reconnaissance optique des bonnes et des mauvaises plantes, des carences des cultures, de la détection précoce des maladies par analyse multispectrale. Ce ne sont que quelques exemples de technologies qui concourent à la réduction des intrants agricoles. Depuis cinq ans, il y a une accélération ahurissante de ces progrès et c’est en France que cela se passe ! Cela intéresse le monde entier.




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