Archive pour le Tag 'Afrique'

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Vaste intox numérique russe et française en Afrique

Vaste intox numérique russe et française en Afrique

Une vaste opération d’intoxication par voie numérique a été observée par Facebook qui a supprimé de nombreux faux comptes français et russes qui s’impliquent dans les élections d’une douzaine de pays africains.

Un de ces réseaux d’influence était lié à des “individus associés à l’armée française”, indique Facebook; les deux autres étaient en lien avec des individus associés par le passé à des opérations de l’Agence russe de recherche sur internet (IRA) ainsi qu’à son chef, l’homme d’affaire russe Evguéni Prigojine.

Pour la justice américaine de même que les agences de renseignement, Evguéni Prigojine et l’IRA, une “usine à trolls” basée à Saint-Pétersbourg, ont joué un rôle central dans les ingérences russes lors de la campagne présidentielle de 2016 aux Etats-Unis.

Ben Nimmo, chargé d’enquête chez Graphika, une firme spécialisée dans l’analyse des réseaux sociaux, a précisé que les auteurs de ces campagnes de désinformation utilisaient de “faux vrais comptes”, se faisant passer pour des habitants des pays visés et diffusant des photographies falsifiées.

Outre la Centrafrique, qui vote le 27 décembre, 13 autres pays africains sont visés, notamment l’Algérie, le Cameroun, la Libye et le Soudan.

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance 

(Sylvain Félix Semilinko)

Soixante ans après les indépendances, le journaliste Sylvain Félix Semilinko constate dans une tribune du Monde que l’Etat de droit reste un vœu pieux dans de nombreux pays du continent.

 

Tribune. 

Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance ? Alors qu’en Afrique de l’Ouest se profilent une série d’élections présidentielles, ces périodes porteuses de violences, d’arrestations, de musellement des médias, voire de meurtres et de massacres, sont propices à nous poser cette question.

Une grande partie du continent avait poussé des cris d’orfraie pour dénoncer le défunt président français, Jacques Chirac, grand connaisseur de la politique en Afrique, qui laissait entendre que celle-ci n’était pas encore prête pour la démocratie à l’occidentale. Paternalisme et condescendance, hurlait-on alors. Et pourtant, trente ans de pratiques démocratiques sur le continent tendent à prouver qu’il n’était pas loin de la vérité.

Les tares congénitales des démocraties africaines sont multiples. Partout où elle s’est ancrée, la démocratie a pour socle l’Etat de droit, fondé sur une Constitution qui, pour être pérenne, doit être intemporelle, impersonnelle et non taillée sur mesure. Difficile en Afrique de compter sur des textes consacrant ces principes – sauf de rares cas en Afrique australe –, d’où les perpétuels changements constitutionnels contextualisés selon les intérêts du moment.

Ensuite, la plupart des Constitutions d’Afrique sont des copiés-collés de celles des pays développés, avec parfois – quand la fainéantise intellectuelle ne l’emporte pas – une toute petite couche de vernis local. Or il est évident que les paramètres socio-culturels, anthropologiques et politico-économiques ne sont ni semblables ni comparables. Comment faire comprendre une Constitution ou des lois électorales à une population en majorité analphabète ? Sans compter qu’organiser des élections à cycles réguliers, deux ou trois années consécutives, sur un budget de l’Etat plutôt dérisoire est une gageure.

Démocratie ethnique

Les Constitutions africaines sont issues pour la plupart des mouvements politiques des années 1990, sur les ruines et les échecs des partis uniques. Ces derniers, héritiers de la décolonisation, n’ont pu construire des Etats modernes, mais des Etats semi-féodaux et patrimoniaux. L’Etat, c’était le chef, agissant tel un suzerain disposant à sa guise des ressources publiques et ayant droit de vie et de mort sur ses sujets. C’était aussi l’ère des coups d’Etat, commandités ou internes, pour qui veut prendre sa part du maigre gâteau national. Le chef, une fois le coup réussi, pouvait s’octroyer tous les pouvoirs, se faire nommer maréchal (Mobutu dans l’ex-Zaïre) ou changer la forme de l’Etat, qui devenait son empire (Bokassa en Centrafrique).

Les démocraties naissantes des années 1990 n’ont pas tiré les leçons de ces pratiques. Pis encore, elles ont alimenté et aggravé les divisions ethno-régionalistes dans des Etats qui n’étaient déjà pas des nations consolidées, leurs frontières étant un héritage de la conférence de Berlin de 1885. Et la démocratie ethnique s’est substituée à de véritables démocraties nationales. Le chanteur ivoirien Alpha Blondy n’a-t-il pas consacré un titre à la pratique démocratique ? « Démocratie ce n’est pas tribalisme », chantait-il au début des années 1990. Ces pays se sont retrouvés avec des dizaines, voire des centaines de partis politiques du jour au lendemain, et cela a été la naissance du business démocratique, car créer et enregistrer un parti vous ouvre des droits au titre des chartes de partis, même si le nombre d’adhérents déclarés relève de la fiction.

Dès lors, des dissensions et palabres à n’en plus finir sont apparus. Alors pour élargir l’assiette du gâteau, l’inventivité politique a donné naissance aux fameuses commissions électorales dites « indépendantes » ou « autonomes ». Ces mastodontes chargés d’organiser des élections justes et transparentes sont à l’origine de bien des crises pré- et post-électorales : République démocratique du Congo (RDC), Côte d’Ivoire, Bénin… Les budgets alloués à ces structures pour l’organisation des élections dépassent de 10, 20 ou 30 fois les budgets de développement d’une commune moyenne : plusieurs dizaines de milliards de francs CFA (des dizaines de millions d’euros) en Côte d’Ivoire en 2010, une dizaine de milliards pour des législatives en 2015 dans un pays aux ressources modestes comme le Bénin. Toute la classe politique, opposition ou pouvoir, cherche à prendre le contrôle de ces structures, surtout pour en toucher les indemnités de commission et autres oboles.

« Devoir d’ingratitude »

Puis viennent les cours et les conseils constitutionnels. Parfois, ces institutions judiciaires font doublon avec les commissions électorales. Nous n’avons jamais compris pourquoi les élections dans ces pays ne sont pas confiées à des institutions judiciaires crédibles et spécialisées, composées de magistrats expérimentés et d’auxiliaires de justice assermentés. Pourquoi recourt-on aux cours et tribunaux pour les contentieux électoraux, alors qu’ils ne sont pas impliqués en amont dans les opérations électorales ? En Côte d’Ivoire, c’est bien le ministère de la justice qui a piloté les audiences foraines dont est issue la liste électorale en 2010. C’est d’ailleurs l’un des acteurs clés de cette opération qui dirige aujourd’hui la commission électorale. Les élections devraient être l’affaire de la justice et des structures chargées de la décentralisation, alors que les commissions électorales ont fait leur temps et ont montré leurs limites. Quelle crédibilité peut-on accorder à un procès-verbal de vote signé par des commissaires locaux ne sachant ni lire ni écrire ?

Quant aux structures judiciaires spécialisées, sans être un praticien du droit mais au regard des expériences et pratiques courantes, il n’apparaît plus sain que les dirigeants des cours et tribunaux chargés des processus électoraux soient nommés par les pouvoirs en place. En Afrique plus qu’ailleurs, il paraît si difficile d’exercer son « devoir d’ingratitude » vis-à-vis du prince, comme le disait l’ancien président du Conseil constitutionnel français Robert Badinter. Des magistrats ou praticiens du droit expérimentés devraient être majoritaires dans ces juridictions et élire en leur sein les présidents desdites institutions sans voix prépondérante, pour leur garantir un minimum de professionnalisme, d’indépendance et de crédibilité. Les cas de la Côte d’Ivoire, de la RDC ou plus récemment du Mali peuvent aider à repenser les mécanismes de désignation pour ne pas confiner l’Afrique dans des crises électorales à répétition.

Certes, il revient au premier chef aux Africains de s’approprier les réformes du corpus institutionnel de leurs systèmes démocratiques, afin de les revisiter dans le sens d’une plus grande stabilité politique. Cependant, les partenaires et la communauté internationale peuvent les y encourager et y contribuer pour prévenir d’éventuelles crises, plutôt que d’intervenir en pompiers pendant les périodes électorales en Afrique. Aider à mieux articuler le binôme démocratie/développement, comme le plaidait François Mitterrand au sommet de La Baule en juin 1990. Cette articulation participerait à optimiser les ressources au service du plus grand nombre, des jeunes, des femmes et des populations vulnérables, dans cette Afrique qui a chanté et dansé Indépendance Cha Cha depuis soixante ans, sans que cette indépendance soit porteuse de beaucoup de progrès ni d’espérance pour sa jeunesse.

Sylvain Félix Semilinko est journaliste et consultant, ancien directeur d’Onuci-FM, la radio de l’opération des Nations unies en Côte d’Ivoire.

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance

Afrique : Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance 

(Sylvain Félix Semilinko)

Soixante ans après les indépendances, le journaliste Sylvain Félix Semilinko constate dans une tribune du Monde que l’Etat de droit reste un vœu pieux dans de nombreux pays du continent.

 

Tribune. 

Qu’avons-nous fait de nos 60 premières années d’indépendance ? Alors qu’en Afrique de l’Ouest se profilent une série d’élections présidentielles, ces périodes porteuses de violences, d’arrestations, de musellement des médias, voire de meurtres et de massacres, sont propices à nous poser cette question.

Une grande partie du continent avait poussé des cris d’orfraie pour dénoncer le défunt président français, Jacques Chirac, grand connaisseur de la politique en Afrique, qui laissait entendre que celle-ci n’était pas encore prête pour la démocratie à l’occidentale. Paternalisme et condescendance, hurlait-on alors. Et pourtant, trente ans de pratiques démocratiques sur le continent tendent à prouver qu’il n’était pas loin de la vérité.

Les tares congénitales des démocraties africaines sont multiples. Partout où elle s’est ancrée, la démocratie a pour socle l’Etat de droit, fondé sur une Constitution qui, pour être pérenne, doit être intemporelle, impersonnelle et non taillée sur mesure. Difficile en Afrique de compter sur des textes consacrant ces principes – sauf de rares cas en Afrique australe –, d’où les perpétuels changements constitutionnels contextualisés selon les intérêts du moment.

Ensuite, la plupart des Constitutions d’Afrique sont des copiés-collés de celles des pays développés, avec parfois – quand la fainéantise intellectuelle ne l’emporte pas – une toute petite couche de vernis local. Or il est évident que les paramètres socio-culturels, anthropologiques et politico-économiques ne sont ni semblables ni comparables. Comment faire comprendre une Constitution ou des lois électorales à une population en majorité analphabète ? Sans compter qu’organiser des élections à cycles réguliers, deux ou trois années consécutives, sur un budget de l’Etat plutôt dérisoire est une gageure.

Démocratie ethnique

Les Constitutions africaines sont issues pour la plupart des mouvements politiques des années 1990, sur les ruines et les échecs des partis uniques. Ces derniers, héritiers de la décolonisation, n’ont pu construire des Etats modernes, mais des Etats semi-féodaux et patrimoniaux. L’Etat, c’était le chef, agissant tel un suzerain disposant à sa guise des ressources publiques et ayant droit de vie et de mort sur ses sujets. C’était aussi l’ère des coups d’Etat, commandités ou internes, pour qui veut prendre sa part du maigre gâteau national. Le chef, une fois le coup réussi, pouvait s’octroyer tous les pouvoirs, se faire nommer maréchal (Mobutu dans l’ex-Zaïre) ou changer la forme de l’Etat, qui devenait son empire (Bokassa en Centrafrique).

Les démocraties naissantes des années 1990 n’ont pas tiré les leçons de ces pratiques. Pis encore, elles ont alimenté et aggravé les divisions ethno-régionalistes dans des Etats qui n’étaient déjà pas des nations consolidées, leurs frontières étant un héritage de la conférence de Berlin de 1885. Et la démocratie ethnique s’est substituée à de véritables démocraties nationales. Le chanteur ivoirien Alpha Blondy n’a-t-il pas consacré un titre à la pratique démocratique ? « Démocratie ce n’est pas tribalisme », chantait-il au début des années 1990. Ces pays se sont retrouvés avec des dizaines, voire des centaines de partis politiques du jour au lendemain, et cela a été la naissance du business démocratique, car créer et enregistrer un parti vous ouvre des droits au titre des chartes de partis, même si le nombre d’adhérents déclarés relève de la fiction.

Dès lors, des dissensions et palabres à n’en plus finir sont apparus. Alors pour élargir l’assiette du gâteau, l’inventivité politique a donné naissance aux fameuses commissions électorales dites « indépendantes » ou « autonomes ». Ces mastodontes chargés d’organiser des élections justes et transparentes sont à l’origine de bien des crises pré- et post-électorales : République démocratique du Congo (RDC), Côte d’Ivoire, Bénin… Les budgets alloués à ces structures pour l’organisation des élections dépassent de 10, 20 ou 30 fois les budgets de développement d’une commune moyenne : plusieurs dizaines de milliards de francs CFA (des dizaines de millions d’euros) en Côte d’Ivoire en 2010, une dizaine de milliards pour des législatives en 2015 dans un pays aux ressources modestes comme le Bénin. Toute la classe politique, opposition ou pouvoir, cherche à prendre le contrôle de ces structures, surtout pour en toucher les indemnités de commission et autres oboles.

« Devoir d’ingratitude »

Puis viennent les cours et les conseils constitutionnels. Parfois, ces institutions judiciaires font doublon avec les commissions électorales. Nous n’avons jamais compris pourquoi les élections dans ces pays ne sont pas confiées à des institutions judiciaires crédibles et spécialisées, composées de magistrats expérimentés et d’auxiliaires de justice assermentés. Pourquoi recourt-on aux cours et tribunaux pour les contentieux électoraux, alors qu’ils ne sont pas impliqués en amont dans les opérations électorales ? En Côte d’Ivoire, c’est bien le ministère de la justice qui a piloté les audiences foraines dont est issue la liste électorale en 2010. C’est d’ailleurs l’un des acteurs clés de cette opération qui dirige aujourd’hui la commission électorale. Les élections devraient être l’affaire de la justice et des structures chargées de la décentralisation, alors que les commissions électorales ont fait leur temps et ont montré leurs limites. Quelle crédibilité peut-on accorder à un procès-verbal de vote signé par des commissaires locaux ne sachant ni lire ni écrire ?

Quant aux structures judiciaires spécialisées, sans être un praticien du droit mais au regard des expériences et pratiques courantes, il n’apparaît plus sain que les dirigeants des cours et tribunaux chargés des processus électoraux soient nommés par les pouvoirs en place. En Afrique plus qu’ailleurs, il paraît si difficile d’exercer son « devoir d’ingratitude » vis-à-vis du prince, comme le disait l’ancien président du Conseil constitutionnel français Robert Badinter. Des magistrats ou praticiens du droit expérimentés devraient être majoritaires dans ces juridictions et élire en leur sein les présidents desdites institutions sans voix prépondérante, pour leur garantir un minimum de professionnalisme, d’indépendance et de crédibilité. Les cas de la Côte d’Ivoire, de la RDC ou plus récemment du Mali peuvent aider à repenser les mécanismes de désignation pour ne pas confiner l’Afrique dans des crises électorales à répétition.

Certes, il revient au premier chef aux Africains de s’approprier les réformes du corpus institutionnel de leurs systèmes démocratiques, afin de les revisiter dans le sens d’une plus grande stabilité politique. Cependant, les partenaires et la communauté internationale peuvent les y encourager et y contribuer pour prévenir d’éventuelles crises, plutôt que d’intervenir en pompiers pendant les périodes électorales en Afrique. Aider à mieux articuler le binôme démocratie/développement, comme le plaidait François Mitterrand au sommet de La Baule en juin 1990. Cette articulation participerait à optimiser les ressources au service du plus grand nombre, des jeunes, des femmes et des populations vulnérables, dans cette Afrique qui a chanté et dansé Indépendance Cha Cha depuis soixante ans, sans que cette indépendance soit porteuse de beaucoup de progrès ni d’espérance pour sa jeunesse.

Sylvain Félix Semilinko est journaliste et consultant, ancien directeur d’Onuci-FM, la radio de l’opération des Nations unies en Côte d’Ivoire.

 

L ‘ONU veut empêcher l’exportations de voitures d’occasion en Afrique

L ‘ONU veut empêcher l’exportations de voitures d’occasion en Afrique

D’une certaine manière, l’ONU à travers le programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) découvre la lune avec le fait des exportations massives de véhicules d’occasion des pays développés vers les pays plus pauvres.

 

L’ONU constate que ces véhicules sont  « vieux, polluants, énergivores et dangereux » . Le constat n’est pas complètement faux mais il manque tragiquement de facteurs explicatifs. En effet ce n’est pas par plaisir de qu’on consomme  davantage de carburant dans ces  les véhicules exportés surtout en Afrique, des voitures  qui sont utilisés simplement pour des raisons économiques.

 

En moyenne, ces véhicules coûtent moitié moins cher qu’un véhicule neuf et sont plus adaptés aux capacités de financement des utilisateurs locaux. Ce n’est pas tellement d’ailleurs l’exportation de véhicules anciens qui participent à la pollution dans certaines villes notamment africaines mais davantage la prolongation de leur vie et le manque d’entretien. En effet, la plupart des véhicules exportés sont encore en bon état. Bien entretenus, ils peuvent être effectuer encore le double de kilométrage alors que dans les pays développés ont met au rebut ces véhicules pour des effets de mode parfois habillés par des préoccupations environnementales. Sauf  avec  la percée des SUV neufs très consommateurs de carburant et donc très polluants !

 

L’ONU ferait mieux de se préoccuper des conditions du développement économique de l’Afrique dans les richesses  sont souvent exploités par des pays développés et les ressources financières détournées. Ou alors il faut interdire en tout cas réglementer la mobilité des Africains qui en plus ne peuvent bénéficier de transports collectifs à la hauteur des besoins . Au lieu de punir l’Afrique en les privant d’automobiles d’occasion, on ferait mieux de prévoir un vaste plan de développement de transports collectifs.

Encore la preuve que l’ONU ne sert pas à grand-chose sinon à nourrir des fonctionnaires incompétents et surpayés

Aider les PME françaises à s’implanter en Afrique

Aider les PME françaises à s’implanter en Afrique

Olivier de Maison Rouge*, avocat d’affaires, spécialiste du droit de l’intelligence économique, docteur en droit, explique qu’il faut aider les PME françaises à s’implanter en Afrique ou se préparer à être marginal sur ce continent. (Chronique dans la tribune)

 

 

Dans l’imaginaire collectif, l’Afrique a longtemps été le pré carré des entreprises françaises. La « Françafrique » a malheureusement véhiculé cette image ternie à tort. Mais comme toutes les idées stéréotypées, celle-ci a pu un temps contenir une part de vérité ; il convient désormais de la nuancer. Si les entreprises françaises n’ont, en valeur absolue, jamais été aussi présentes sur le continent africain, elles sont en net recul relatif sur un marché en pleine croissance : depuis vingt ans, les exportations françaises vers le continent africain ont certes doublé (de 13 à 28 milliards de dollars entre 2000 et 2017), mais dans un marché dont la taille a quadruplé… D’où une division par deux des parts de marché tricolores en Afrique. Sur le plan géographique, le recul est particulièrement important en Afrique francophone. Certes, 50 % du commerce total de la France avec le continent africain s’effectue avec le trio Algérie-Maroc-Tunisie, mais ce trio est suivi de l’Afrique du Sud, du Nigeria et de l’Égypte, tous trois anglophones. La situation des entreprises françaises est également une question de taille : les grands groupes profitent largement des restes de la « Françafrique », les PME sont quant à elle à la peine.

L’importante présence des grandes entreprises francophones a (trop) souvent été le résultat d’activités réalisées « dans l’ombre » et aux marges de la légalité. Les exemples, encore de nos jours, ne sont malheureusement pas rares. La filiale nigérienne de la multinationale des télécoms Orange - qui compte 2,5 millions de clients et a réalisé 86 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2018 - quittera bientôt le pays à la suite d’un contentieux l’opposant aux autorités fiscales, qui ont mis ses locaux sous scellés pendant un mois et lui réclament 33 millions d’euros.

 Un environnement économique sulfureux

Le groupe Bolloré, qui gère 16 terminaux à conteneurs sur le continent africain, a vu son PDG et plusieurs autres de ses cadres être mis en garde à vue dans le cadre d’une information judiciaire ouverte pour « corruption d’agents publics étrangers » et portant sur les conditions d’obtention en 2010 des terminaux de Lomé, au Togo, et de Conakry, en Guinée. Le groupe est soupçonné d’avoir utilisé leur filiale de communication Havas pour faciliter l’arrivée au pouvoir de dirigeants africains en assurant des missions de conseil et de communication sous-facturées, dans le but d’obtenir de lucratives concessions portuaires. Le géant du nucléaire Areva (devenu Orano) a quant à lui été accusé de n’avoir pas respecté ses obligations en matière de santé et de sécurité (manipulations à mains nues et sans protections, absence de dosimètres individuels…) dans le gisement d’uranium – aujourd’hui totalement abandonné – de Bakouma en Centrafrique. Un site minier qui appartenait à la société canadienne Uramin, dont le rachat en 2007 par Areva lui avait valu une enquête judiciaire pour escroquerie.

Cet environnement économique sulfureux dont ont su profiter les grandes entreprises françaises s’est développé par l’entremise de « Messieurs Afrique », le premier et le plus célèbre étant Jacques Foccart. À la tête du Secrétariat général pour les Affaires africaines et malgaches de 1960 à 1974, cet ancien résistant a mis en place un circuit diplomatique parallèle, permettant aux relations avec les États africains fraîchement décolonisés d’être gérées directement au niveau de la présidence française. Parallèlement à ses collaborateurs officiels, Jacques Foccart s’appuyait sur un réseau plus secret, en marge de la légalité républicaine, qu’il appelait lui-même ses « circuits courts ». Depuis son départ, l’Afrique continue à occuper une place à part et les grands principes de la politique foccartienne sont maintenus, tels que la « paix française ».

Un marché aux nombreuses spécificités

Si les grands groupes français ont su tirer profit de cette « zone grise » entretenue depuis soixante ans, la situation des PME est, elle, bien différente. Alors qu’elles sont au cœur du tissu économique de l’Afrique subsaharienne (elles représentent 90 % du tissu entrepreneurial et 60 % des emplois à l’échelle du continent), les très petites, petites et moyennes entreprises font souvent face à d’importants obstacles. Selon un rapport de l’Agence française de développement (AFD) de 2019, les TPE/PME d’Afrique rencontrent, au-delà des problèmes « classiques » partagés par bon nombre d’entreprises partout dans le monde (problèmes liés aux fournisseurs ou sous-traitants, modification des caractéristiques du marché en cours de projet…), des obstacles spécifiques tels que l’état des infrastructures locales, un environnement politique et social instable ou un environnement financier handicapant. Ces problématiques s’incarnent concrètement dans des retards de paiements par les clients (État inclus), ou dans un déficit d’offres de lignes de crédit adaptées aux besoins des PME par les banques africaines.

 

Cette situation concerne bien entendu toutes les entreprises en activité en Afrique, PME françaises comprises. Mais contrairement aux grands groupes qui peuvent se prévaloir d’une présence ancienne sur le continent, d’une importante force de frappe financière et d’un soutien de l’État français, les PME doivent faire face seules aux spécificités d’un marché africain qui est en réalité la somme de dizaines de marchés ayant chacun leurs spécificités (nécessité ou non d’installer des expatriés, gestion du risque de change, protection contre l’instabilité politique…). Une situation difficile pour les PME tricolores, la situation du leader historique de fournitures militaires MagForce International en est un exemple regrettable. Le président de cette entreprise s’est notamment fait connaître pour son efficacité et sa discrétion dans les affaires militaires. Après avoir pris la tête de l’entreprise, créée en 1998, Robert Franchiti a bâti sa réputation sur sa longue tradition de travail avec les pays africains. Une collaboration de plus de vingt ans qui n’aura pourtant pas protégé la PME, cette dernière ayant été victime de concussion.

C’est sur ces PME que l’État français devrait porter son attention en leur assurant un soutien maximal, dans une logique gagnant-gagnant avec les États et les populations d’Afrique. En effet, alors que la croissance économique fulgurante que connaissent de nombreux pays d’Afrique subsaharienne depuis une décennie ne s’est globalement pas accompagnée d’une création d’emplois ni d’une répartition plus équitable des richesses, les entreprises françaises ont créé au bas mot 620.000 emplois formels et non subalternes sur le continent, offrant d’importantes opportunités de mobilité sociale aux jeunes Africains, nos entreprises n’hésitant pas à confier la direction de leurs filiales africaines à des salariés ayant grandi sur le sol africain.

Couvertures santé et formations à la clé

Ces emplois s’effectuent par ailleurs dans de meilleures conditions que dans les entreprises concurrentes, en particulier en matière d’accès à des dispositifs de couverture santé pour les salariés et leur famille. Cet impact qualitatif s’incarne également dans les actions de formation et d’inclusion menées par les entreprises françaises, contribuant ainsi à structurer les écosystèmes locaux. Il est également important de rappeler que les contributions des entreprises françaises aux budgets locaux en impôts dépassent le montant de l’aide publique française au développement : au Tchad par exemple, la vingtaine d’entreprises françaises implantées représentent 9% des recettes fiscales du pays.

La France jouit encore indéniablement d’une relation privilégiée avec de nombreux pays d’Afrique francophone, mais pour combien de temps ? Avant que l’érosion de ce lien historique et culturel au profit des pays émergents - Chine en tête - ne relègue irrémédiablement l’Hexagone au statut de partenaire de second rang, les autorités françaises doivent redéfinir leur politique africaine en misant beaucoup plus sur les PME, plus réactives, et plus à même de s’adapter aux réalités d’un continent africain en pleine mutation.

* Auteur de Droit de l’intelligence économique. Patrimoine informationnel et secrets d’affaires (Lamy, 2012) et de Droit du renseignement. Renseignement d’État, renseignement économique (LexisNexis, 2016).

Afrique et dette chinoise: le piège réciproque

Afrique et dette chinoise: le piège réciproque

 

 

En toute discrétion, la Chine investit depuis des années en Afrique non seulement pour étendre son influence politique mais aussi pour piller les ressources. Le deal consiste pour la Chine à financer  des équipements. Les capitaux investis sont ensuite remboursés soit de manière classique mais à des conditions financières lourdes, soit en fourniture de matières premières. Le prix à payer pour l’Afrique se révèle très onéreux dans cette opération. Pour la Chine depuis la crise sanitaire,  cela pourrait devenir aussi une opération à risque. En effet déjà enfoncée dans une dette insondable, l’Afrique pour s’en sortir n’a comme solution que de faire défaut. Les prêteurs doivent renoncer à une partie de leur dette y compris la Chine qui en détient à peu près 30 %.

Pékin a fait savoir qu’il participe à l’accord du G20 annoncé en avril, qui prévoit une suspension de paiement des remboursements pour les pays les plus pauvres jusqu’à la fin de l’année. Une extension sur 2021 est en discussion. Mais ce report – jugé insuffisant par les pays africains – ne représente qu’une petite partie de l’endettement total du continent, estimé à 365 milliards de dollars, dont un tiers est détenu par la seule Chine.

Selon l’université Johns Hopkins, entre 2000 et 2017, 143 milliards de dollars sont partis de la Chine vers le continent pour construire routes, ponts, stades et hôpitaux sous la bannière des «nouvelles routes de la soie», en prêtant massivement selon des conditions très critiquables. Des conditions cependant acceptées par les pratiques trop habituelles de corruption de la part des dirigeants des pays.

Coronavirus Afrique du Sud : 500.000 cas

Coronavirus Afrique du Sud : 500.000 cas

«Aujourd’hui, l’Afrique du Sud a dépassé la barre du demi-million de personnes contaminées, avec un total de 503.290 cas confirmés de Covid-19», a déclaré le ministre de la Santé, Zweli Mkhize, dans son communiqué quotidien.

Plus d’un tiers des cas ont été recensés dans la province du Gauteng, où se trouvent Johannesburg et Pretoria, les capitales économique et administrative du pays. L’Afrique du Sud est le cinquième pays au monde le plus touché par la pandémie en termes de cas confirmés. A elle seule, elle a enregistré plus de la moitié des cas de nouveau coronavirus sur le continent noir.

Le nombre officiel de décès a dépassé les 8.150, mais il est largement sous-estimé, ont prévenu des experts. Entre 40.000 et 50.000 personnes pourraient mourir du Covid-19 d’ici la fin de l’année dans le pays, selon des projections officielles.

Coronavirus: risque de diffusion en Afrique (Éric Delaporte, médecin épidémiologiste)

Coronavirus: risque de diffusion en Afrique (Éric Delaporte, médecin épidémiologiste)

Le coronavirus en Afrique  »est en train de se diffuser de façon massive », a affirmé vendredi 3 avril dans une interview à franceinfo le professeur Éric Delaporte, médecin épidémiologiste et spécialiste des maladies infectieuses au CHU de Montpellier.
Est-ce qu’on a une idée très précise de l’épidémie sur le continent africain ?

Éric Delaporte : Précise, non. On a simplement le nombre de cas déclarés qui atteint près de 10 000 cas. C’est bien sûr une sous-estimation puisque c’est basé sur des cas symptomatiques. Ces cas ont été déclarés seulement depuis la fin février. C’est une déclaration relativement récente lorsqu’il y a eu vraiment une sensibilisation internationale. Et puis, ça correspondait également à l’arrivée de beaucoup de personnes vivant en Europe qui sont retournées en Afrique au moment des périodes de confinement, où il y a eu beaucoup de mises en place de tests de dépistage. On sait que, malheureusement, c’est en train de diffuser de façon massive.

On a entendu que le virus résisterait mal à la chaleur et que donc l’Afrique pourrait être épargnée. Est-ce que c’est avéré ?

On ne peut pas encore le constater. C’est vraiment une hypothèse. Et il n’y a rien pour soutenir cette hypothèse. On peut simplement dire qu’un certain nombre d’infections dues au coronavirus sont saisonnières et que lorsque arrivent les beaux jours, elles sont moins fréquentes… Est-ce qu’on va le voir pour le Covid ? On n’en sait strictement rien. En revanche, il peut y avoir d’autres facteurs environnementaux, des facteurs démographiques, qui pourraient faire, mais ça reste vraiment du conditionnel, que l’impact de la diffusion ne soit pas exactement la même chose sur le continent africain qu’ailleurs. Par exemple, la pyramide des âges n’a rien à voir avec notre pyramide en Europe, avec beaucoup de populations jeunes et les plus de 70 ans relativement faiblement représentées. Cela veut dire que les populations jeunes vont être potentiellement rapidement contaminées avec rapidement une séroconversion.

Le fait que ces populations jeunes puissent être rapidement contaminées sans faire de pathologies graves pourrait créer une sorte de frein immunitaire par rapport au reste de la population. Mais encore une fois, c’est une hypothèse.Éric Delaporte, médecin épidémiologiste à franceinfo

Et l’autre impact est très intéressant et très important pour l’Afrique, c’est que dans la mesure où, proportionnellement, il y a beaucoup moins de personnes âgées, et comme on sait que chez nous, c’est malheureusement les personnes les plus âgées, les plus de 70 ans qui ont les formes les plus graves, il pourrait y avoir un impact un peu différent en termes de prise en charge.

Est-ce qu’il faut s’inquiéter des systèmes de santé de certains pays africains qui pourraient être mises en difficulté ?

Alors la réponse est clairement oui. Il y a deux aspects. D’abord d’un point de vue diagnostic, les compétences sont là. Malheureusement, on n’est pas sûr que l’on va pouvoir les livrer en réactifs. Et c’est un vrai cri d’alarme, c’est-à-dire qu’il y a pas mal de tests qui sont mis sur le marché. Et quand on essaye de commander pour l’Afrique, la priorité, ce sont les États-Unis ou c’est l’Europe.

Ça va être très dur, potentiellement pour l’Afrique, de pouvoir s’approvisionner en tests réactifs. Eric Delaporte, médecin épidémiologiste à franceinfo

Ce sont les fournisseurs ou les pays qui leur donnent l’ordre de ne pas exporter et qui prennent la priorité, entre guillemets, nationale. Et donc, là, il y a un vrai souci pour que les pays africains puissent avoir accès eux aussi aux tests commerciaux. Deuxième aspect par rapport au système de santé, c’est la prise en charge. On sait qu’il y a 15% de personnes qui font des formes qui nécessitent une hospitalisation. Cette hospitalisation, on arrive à faire passer le cap de nos patients grâce à des respirateurs, de l’oxygénothérapie. Par exemple à Kinshasa [capitale de la RDC], pour une ville de plus de 10 millions d’habitants, il y a simplement 50 respirateurs. Cela veut dire que pour les formes graves, il va y avoir un vrai problème de prise en charge et c’est là qu’il risque d’y avoir une mortalité importante. Et puis, à côté de ça, il y a toutes les autres maladies. Il ne faut pas oublier que le Sida tue encore 700 000 personnes par an en Afrique. Donc, il y a beaucoup de populations dites vulnérables. Les personnes qui sont infectées par le virus du sida, par exemple, si elles ne sont pas sous traitement, ont un fort risque de faire des formes graves.

Coronavirus Afrique: catastrophe sanitaire annoncée

Coronavirus Afrique: catastrophe sanitaire annoncée

 

 S’il n’est pas aidé, ce continent, où le confinement est impossible, risque de servir de réservoir au virus, qui reviendra alors dans les pays du Nord. Le pire danger de la crise sanitaire serait qu’il touche massivement l’Afrique, un continent complètement désarmé pour faire face à une telle situation et dont  les systèmes sanitaires sont  complètement anecdotiques. Non seulement on manque d’équipements hospitaliers mais en plus le plus souvent les patients doivent payer les traitements . Le risque c’est que le virus installe en Afrique s’y développe et revienne ensuite vers les pays développés

Comme le souligne la Fondation Mo Ibrahim, dans un rapport publié de 30 mars, l’Afrique «est la plus faible capacité» de réponse, et «si le virus se répand, les dégâts seront substantiels sur les citoyens et sur l’économie». Les signes qui poussent à l’optimisme sont rares. La question de la chaleur, qui pourrait être un barrage au développement du Covid, n’a jamais été démontrée.

La démographie pourrait certes représenter un avantage. L’Afrique est un continent très jeune. L’âge médian est de moins de 20 ans et les plus de 65 ans, qui représentent la majorité des cas sévères, compte pour moins de 3 %. Mais ces bonnes données sont contrebalancées par des facteurs aggravants, notamment la forte présence de maladies pulmonaires, comme la tuberculose ou de maladies endémiques, à commencer par le paludisme, qui affaiblissent l’organisme. Le paludisme pourrait d’ailleurs être confondu avec le Corona virus compte tenu de la similitude de certains symptômes

Surtout, la possibilité de se calquer sur le modèle asiatique ou européen pour endiguer l’épidémie est peu réaliste. Le confinement, appliqué dans une vaste partie du globe, est un défi pour les mégalopoles africaines. Dans les bidonvilles, la promiscuité comme la pauvreté sont extrêmes. Le président du Bénin, Patrice Talon, l’a reconnu, lundi, sans ambages. «Comment peut-on, dans un tel contexte où la plupart de nos concitoyens donnent la popote avec les revenus de la veille, décréter sans préavis, un confinement général de longue durée?», s’est-il interrogé, évoquant le risque «d’affamer tout le monde». Moins directs, bien des présidents sont arrivés à des conclusions identiques, et ont donc opté pour des solutions intermédiaires afin de limiter la circulation dans les villes: fermeture des aéroports, des lieux de culte et des bars, couvre-feu, barrages… mais pas de confinement complet. Les Congolais qui devaient l’appliquer quatre jours par semaine, à partir de vendredi, à l’immense Kinshasa, près de 12 millions d’habitants dont plus de la moitié dans la grande pauvreté, ont finalement reculé. Le risque d’émeutes était trop grand. L’Afrique du Sud, à la capacité sanitaire supérieure, s’y est risqué, mais non sans difficulté. Le Nigeria a aussi annoncé un arrêt total des activités des 21 millions de résidents de la tentaculaire Lagos.

Pour éviter le pire, l’Afrique a besoin d’une «réponse unique», analyse John Nkengasong, le directeur de Centres for Disease Control (DCD) Africa, une structure de l’Union africaine. Mais, pour l’instant, par manque de moyens techniques et financiers, rien n’avance. «Il faut faire de l’Afrique une priorité absolue de la communauté internationale avec un investissement massif», a souligné mardi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dans un rapport. Les experts estiment qu’il faut une mobilisation pour aider les finances des pays les plus faibles, au risque de connaître «des millions et des millions de contaminations».

L’ONU estime à 3 000 milliards de dollars la somme nécessaire, tant pour combattre l’épidémie que pour soutenir l’économie des pays en voie de développement. Il faut aussi un moratoire sur la dette africaine et une nette augmentation des capacités d’action du Fonds monétaire internationale (FMI).

. Pour Antonio Guterres, il faut pourtant se presser: «Plus il y aura de malades et plus le risque de mutation du virus est grand. Dès lors, tous les investissements faits sur un vaccin seront perdus et la maladie reviendra du Sud vers le Nord.»

Afrique Coronavirus : les mesures d’urgence progressent

Afrique Coronavirus : les mesures d’urgence progressent

si l’on se fie aux chiffres, l ‘Afrique semble moins concernée par le Coronavirus que dans le reste du monde ; au moins 1 628 cas, dont une cinquantaine de morts, ont été déclarés sur le continent, contre plus de 360 000 cas d’infection et 16 000 décès au total sur la planète, selon un bilan établi par l’AFP à partir de sources officielles. La grande faiblesse du continent, c’est l’état de son système sanitaire aussi sans doute la difficulté à faire respecter les mesures d’urgence qui commencent à être décideés. Ainsi l’Afrique du sud vient d’annoncer le  confinement. En Côte d’Ivoire et au Sénégal des mesures d’urgence ont été prisess . Le problème, c’est que de diagnostic risque d’être difficile avec la confusion possible du palu qui présente quelques symptômes communs avec le Coronavirus.

Le coronavirus « gagne notamment  du terrain » dans plusieurs régions sénégalaises (79 cas officiellement recensés), selon Macky Sall. En Côte d’Ivoire (25 cas, aucun décès selon le dernier bilan publié dimanche), un confinement progressif se met en place, « par aires géographiques ». Les déplacements entre Abidjan, la capitale économique où se concentre la majorité des cas, et l’intérieur du pays, seront soumis à autorisation.

« Dans cette lutte contre la propagation du Covid-19, notre principal ennemi sera l’indiscipline et le non-respect des consignes de prévention », a souligné le président Ouattara, appelant à « l’union sacrée ».

 

 

«Coronavirus : risque d’explosion en Afrique»

«Coronavirus : risque d’explosion en Afrique»

 

D’énormes risques d’explosion du Coronavirus en Afrique par ailleurs de système sanitaire est souvent défaillant. le Dr Cheikh Sokhna, épidémiologiste au Sénégal craint le pire dans une interview au monde.

 

Service médical des étudiants au Sénégal, le 16 mars.

« Nous pouvons nous interroger sur le nombre de cas détectés, estimé à 450 contre 50 il y a une semaine. Environ 40 pays peuvent détecter les patients atteints par ce virus, les autres pas. Et encore, les structures sanitaires ne permettent pas de réaliser les tests nécessaires dans toutes les régions des pays touchés. Nous pouvons donc avoir de sérieux doutes sur l’état de la situation qui nous est présenté. Certaines régions du continent sont enclavées, d’autres en guerre. Toutes les conditions sont réunies pour que le nombre de cas explose en Afrique dans les prochains jours et semaines.

De plus en plus d’Etats décrètent la fermeture de leurs frontières aériennes et l’interdiction des rassemblements. Est-ce suffisant ?

Non, ce n’est pas assez. Dans les aéroports, les mesures mises en place ne suffisent pas. Les caméras thermiques permettent de voir si un patient a une fièvre dépassant les 38° mais elles ne permettent de détecter les porteurs du virus qui n’ont pas de fièvre. Il faut mettre en œuvre des interrogatoires systématiques des passagers pour connaître l’origine de leur voyage, la présence de symptôme comme la toux, la congestion nasale, les maux de gorge ou la diarrhée. Cette surveillance sanitaire permettra de détecter plus tôt les cas contagieux, c’est comme cela que l’on arrêtera la chaîne de transmission. Elle devra aussi être mise en œuvre aux frontières terrestres. Le principal problème est que celles-ci sont très poreuses. On peut passer d’un pays à l’autre sans trop de difficulté à l’heure du coronavirus, en empruntant la voiture ou les transports en commun.

Certains affirment que le virus ne peut survivre à plus de 20 ou 26 degrés. Fake news ?

Cela fait partie des fausses informations qui compliquent la mise en œuvre des stratégies de prévention. Le virus a résisté dans la ville de Touba, à Nouakchott, à Ouagadougou où la température dépasse quotidiennement ces températures, et de loin.

«A Dakar, l’hôpital de référence de Fann ne compte que 36 lits avec une assistance respiratoire au sein du service des maladies infectieuses et tropicales. Hormis l’Afrique du sud, les pays sont presque tous en sous-capacité»

Certains pays ont affronté des épidémies comme Ebola. Les autorités sanitaires y sont-elles rodées ?

L’Afrique n’a pas tiré suffisamment les leçons de la crise sanitaire en Asie et en Europe et du retard pris dans le processus d’endiguement de l’épidémie. Malgré les premières mesures prises (fermeture d’écoles, contrôle dans les aéroports puis fermeture des liaisons avec certains pays, suspension de rassemblements…), rien n’atteste d’un confinement des populations. Les gens continuent à emprunter les transports en commun qui sont bondés, et n’adoptent pas les bonnes mesures de prévention. Un émigré de retour d’Italie a contaminé récemment 20 personnes dans la ville de Touba au Sénégal, qui devient l’épicentre de l’épidémie. C’est le problème des familles élargies qui peuvent compter plus de 20 membres en Afrique. Les Etats doivent donc aller plus vite, mobiliser l’armée, la gendarmerie, les pompiers pour mettre en œuvre le confinement et faire davantage de sensibilisation auprès des plus démunies et des analphabètes.

Quelle est la capacité d’accueil des patients dans les structures de réanimation ?

Nous avons mis en œuvre des cellules d’alerte et des numéros verts mais toute la chaîne de soins est très contrainte. La capacité d’accueil en réanimation est très faible par rapport au nombre d’habitants. A Dakar, par exemple, l’hôpital de référence de Fann ne compte que 36 lits avec une assistance respiratoire au sein du service des maladies infectieuses et tropicales. Hormis l’Afrique du sud, les pays sont presque tous en sous-capacité en Afrique subsaharienne. Nous manquons aussi de réanimateurs, de pneumologues, de gériatres. Nous n’avons pas de réserve sanitaire. Les équipements comme les oxygénateurs sont limités. Il faut donc changer les comportements en insistant sur la prévention et décentraliser au maximum le traitement des patients. Il s’agit notamment de développer le traitement en ambulatoire pour éviter que les gens se pressent à l’hôpital et se contaminent entre eux.

Comment minimiser les risques de la propagation ?

Il faut surtout se laver régulièrement les mains avec une solution hydroalcoolique ou à l’eau et au savon. Le savon est accessible à tous à un coût réduit. Les études menées au Pakistan et au Sénégal montrent une diminution de 50 % des maladies diarrhéiques et respiratoires chez les populations se lavant régulièrement les mains. Le plus important est donc l’hygiène corporelle en Afrique. Ensuite, comme ailleurs, il faut aussi respecter les règles de distanciation, se couvrir la bouche et le nez avec le pli du coude ou avec un mouchoir en cas de toux ou d’éternuement et jeter le mouchoir immédiatement après dans une poubelle fermée. Cette stratégie de prévention doit être déployée au niveau des communautés et de manière coordonnée au niveau sous-régional.

Les grandes ONG ont-elles commencé à agir ?

Les institutions bilatérales et multilatérales vont commencer à se mobiliser pour nous venir en aide afin d’acquérir les équipements nécessaires au diagnostic et à la lutte. Nous avons besoin d’experts pour combattre l’épidémie. Et nous devons aussi demander l’appui de pays comme la Chine et la Corée du Sud qui ont testé des protocoles thérapeutiques et publié des résultats recherches. Il faut profiter de leur expérience.

Crise alimentaire avec l’invasion de criquets en Afrique de l’Est

Crise alimentaire avec  l’invasion de criquets en Afrique de l’Est

Selon la FAO, l’Ethiopie et la Somalie n’avaient pas vu d’essaims de criquets pèlerins d’une telle ampleur ( l’équivalent de la surface du Luxembourg) depuis 25 ans, et le Kenya n’avait pas eu à affronter de menace acridienne d’une telle force depuis 70 ans,  menace alimentaire.

Le criquet pèlerin, appelé « criquet du désert » en anglais, est originaire de la péninsule arabique, de l’Arabie saoudite, d’Oman et du Yémen. Une zone dont les côtes ont été frappées par deux cyclones en 2018. Ces précipitations importantes ont favorisé la pousse de végétation et créé les conditions idéales pour la reproduction des insectes.

Pour l’expert Cyril Piou, la meilleure manière de lutter contre l’insecte est de traiter préventivement les zones de reproduction. « Cela se fait avec épandage de pesticides, généralement chimiques même si on en essaye de plus en plus d’utiliser un champignon entomopathogène », décrit le spécialiste de l’insecte. Mais une fois que l’essaim est formé, la tâche est bien plus ardue : il faut traiter beaucoup plus d’hectares et répandre beaucoup plus de pesticides, par avion.

 

Selon lui, les crises passées se sont terminées grâce à la conjonction de plusieurs facteurs compliqués à réunir : de mauvaises conditions climatiques pour la reproduction, une baisse de la disponibilité des végétaux et l’application de pesticides chimiques. Faute de quoi, « le criquet va toujours trouver des endroits où se reproduire. Si on le laisse faire, il va trouver d’autres zones. (…) On est en face d’une catastrophe humanitaire et environnementale du fait des épandages sur de grandes superficies », souligne l’expert.
La crise actuelle pourrait donc durer de longs mois. Fin janvier, la FAO a lancé un appel pour réunir 76 millions de dollars (environ 69 millions d’euros) afin d’aider les pays concernés à lutter contre l’insecte qui menace leur sécurité alimentaire, mais peine à réunir les fonds : seuls 15,4 millions de dollars (14 millions d’euros) ont été récoltés.

 

« Afrique: démocratie ou développement » (Thierry Amougou)

« Afrique: démocratie ou développement » (Thierry Amougou)

 

L’économiste Thierry Amougou à partir de l’exemple du Rwanda ( avec ses limites) s’interroge sur l’efficacité  de la démocratie en tant que moyen privilégié du développement en Afrique. Pas vraiment un plaidoyer pour le despotisme éclairé mais pas loin quand même. (tribune au « Monde »)

 

Tribune.

 

«  L’image que renvoie le Rwanda de nos jours est celle d’une Afrique qui gagne. Elle est de moins en moins celle, lugubre, d’amas de crânes témoins d’une humanité en mode off, mais plutôt celle, rayonnante, des inaugurations en cascade d’écoles à la pointe du numérique, d’une filiale de Volkswagen ou du lancement du premier smartphone complètement « made in Africa ». Quelles sont les principales caractéristiques du modèle rwandais de développement ? Quelles sont ses limites ? Que peut-on en dire concernant l’Afrique et la pensée sur le développement au XXIe siècle ?

Généralement, ce qu’on entend par « nation » évoque des groupements humains qui partagent le même destin et la même volonté de poursuivre un pari sur l’avenir au sens de « projet de vie ». Ce qui est très souvent moins souligné, c’est le fait que faire nation, du moins en avoir la dynamique, n’est pas seulement le fruit du partage d’une mythologie, d’une histoire, d’ancêtres et de terres aussi glorieux que les futurs caressés, mais aussi le surgissement d’un assentiment collectif dont la fondation peut être un grand malheur commun.

Un traumatisme commun, réel ou onirique, peut faire naître un sentiment national et fonder une nation au point d’en devenir « the glue that links us together » (la colle qui nous unit). L’exode réel ou mythologique du peuple juif joue ce rôle pour la nation juive, autant que le génocide de 1994 donne au Rwanda un dénominateur commun qui, quoique tragique, est un « input » dont les effets sont difficiles à évaluer par la fonction de production économique. En fait, un bonheur commun ou un malheur commun est une ressource politique, culturelle et anthropologique en soutien à un projet de développement, au sens où il mobilise tout le monde, discipline les populations et donne des arguments pour le respect et la poursuite d’un cap censé perpétuer le bonheur passé ou sortir du grand malheur commun.

 

Le rôle d’une conjoncture historique favorisant l’émergence d’un leader politique est donc crucial. Oui, il faut le dire, un leader est très souvent quelqu’un qui, malgré ses qualités intrinsèques, est servi par une conjoncture historique qui lui permet de devenir la locomotive d’un peuple en mettant ainsi ses qualités de leadership en évidence. Autant le général de Gaulle devint un leader pour la France grâce ou à cause de l’occupation de l’Hexagone par le régime nazi, autant Paul Kagame est devenu l’homme fort du Rwanda grâce ou à cause du génocide de 1994, articulation décisive dans le processus de consolidation nationale et d’obtention gracieuse de quelques dividendes budgétaires sur le plan international. 

Cela ne suffit cependant pas, car un leader doit avoir une vision au service d’un projet. Celui du Rwanda semble s’articuler sur plusieurs éléments.

Premièrement, une volonté de moderniser le pays et l’acceptation d’appliquer rigoureusement les modèles de modernisation des institutions financières internationales. Kigali, la capitale rwandaise, ressemble de moins en moins à une ville subsaharienne, suite à une fonctionnalisation moderne de l’espace, de l’habitat et des comportements calqués sur l’urbanisme et les civilités modernes. La modernisation du secteur agricole par spécialisation culturale, remembrement des terres paysannes et regroupement des paysans en coopératives par le biais d’un renouveau de la révolution verte, est un autre marqueur de cette volonté de moderniser le Rwanda.

Deuxièmement, la promotion, en l’absence d’une révolution industrielle africaine, d’une économie de services haut de gamme comme le tourisme, l’informatique et la sous-traitance automobile, comme en témoigne la récente joint-venture avec Volkswagen.

 

Troisièmement, une dimension écologique liée à l’interdiction drastique de toute production et importation de sacs en polyéthylène (plastique) depuis 2004 et à la sauvegarde des gorilles, principales ressources touristiques du pays. 

Quatrièmement, la promotion du capital humain diasporique, en chassant et en recrutant des têtes rwandaises et africaines bien faites en Occident et en promouvant l’émancipation de la femme rwandaise par son intégration au pouvoir décisionnel. Les femmes détiennent 40 % des portefeuilles ministériels et représentent plus de 60 % des députés en 2019. Cette réforme qui corrige des inégalités de genre est une innovation qui compte en matière de développement, dans une Afrique où les femmes sont très souvent invisibles des lieux de décision politique, alors que leur apport est inestimable dans tous les domaines de la vie quotidienne.

Le basculement de l’expression officielle du pays en anglais, langue de l’économie mondialisée, est aussi une innovation dans ce modèle rwandais. L’anglais est censé assurer à moyen et long termes la réduction des coûts de communication, de transactions, de diffusion des savoirs technologiques et de contractualisation.

Derrière la lumineuse, la disciplinée, la coquette et l’ordonnée Kigali, l’outrage ? Oui, répondent de nombreux observateurs et travaux sur le Rwanda.

De nombreux auteurs pointent en effet le fait que Kigali est une vitrine moderne, une carte postale qui cache des paysans rwandais connaissant des disettes chroniques à quelques kilomètres des lumières de la capitale. Paysans obligés d’abandonner la polyculture traditionnelle grâce à laquelle ils s’assuraient une autosuffisance alimentaire, pour appliquer une spécialisation culturale qui fait dépendre l’accès aux denrées alimentaires d’un pouvoir d’achat qui leur fait défaut, dans la mesure où leur richesse, qui ne consistait qu’en terres, n’est plus entre leurs mains mais dans celles des coopératives et de l’agro-industrie.

Il s’ensuit que la réussite rwandaise est limitée au bien-être d’un petit groupe au pouvoir, une élite politique qui a pris le pouvoir depuis l’extérieur et se montre insensible aux souffrances des paysanneries, dont le sort fait peu de cas dans les décisions d’une politique de révolution verte axées sur la répression de la polyculture traditionnelle, la spécialisation à outrance, le remembrement des terres paysannes pour l’agro-industrie, le mode coopératif et l’interdiction des méthodes et techniques de l’habitat traditionnel.

 

La transformation de Kigali en ville moderne a également entraîné une gentrification qui a repoussé les pauvres à la périphérie d’une ville désormais élitiste et chère. A cela s’ajoute la répression de l’opposition politique interne et externe, la modification constitutionnelle pour un troisième mandat de Kagame et sa réélection par un score stalinien (98 %). 

Autant de paramètres qui font du modèle rwandais une modernisation cosmétique et autoritaire axée sur la politique des « premiers de cordées » à préserver et sur la croyance au « trickle-down effect », c’est-à-dire au ruissellement de la richesse de la minorité urbaine vers les majorités rurale et populaire. Le plan d’émergence du Rwanda, en 2020, semble donc consubstantiel d’une violence sociale dont d’autres éléments non négligeables sont la répression des moyens de l’habitat populaire, des sanctions infligées aux démunis qui n’arrivent pas à se payer la sécurité sociale et l’imposition impérative de l’anglais comme lingua franca porteuse de modernité dans toute l’étendue du territoire.

En Afrique subsaharienne, les politiques d’ajustement structurel ont, depuis 1980, mis fin au modèle de modernisation autoritaire basé depuis 1960 sur un Etat dirigé par un homme fort sans légitimité démocratique. C’est le marché qui doit désormais assurer le développement économique, et la démocratie le développement politique. Le consensus de Washington, corpus théorico-politique commun imposé à tous les pays africains, a montré de si grandes limites qu’on y a ajouté des aspects institutionnels afin de signaler l’importance des institutions inclusives dans le développement.

Les résultats sont très peu réjouissants aujourd’hui en Afrique, où la pauvreté augmente autant que l’endettement international consécutif aux prêts chinois. A côté de cette morosité généralisée (en dehors de la Côte d’Ivoire et du Ghana), le Rwanda, quoique petite économie dont le modèle ne peut être extrapolé à toute l’Afrique, rayonne avec une économie à la pointe et un environnement national attractif pour l’investissement international.

 

Du coup, si nous prenons en compte l’exemple de la Chine qui se développe sans démocratie, on assiste au renouveau d’un questionnement en Afrique subsaharienne par rapport aux ingrédients du développement : une dictature éclairée qui construit des routes, assainit des villes, ouvre des écoles, donne de l’eau potable, offre du travail, construit des hôpitaux, soigne et loge les populations, n’est-elle pas plus utile aux Africains qu’une démocratie libérale postcommuniste qui, en s’accommodant avec les inégalités, la pauvreté, la dictature des marchés et l’impérialisme, se confond de plus en plus avec un capitalisme enrobé de considérations politiques ? 

La légitimité d’un dirigeant africain doit-elle être davantage basée sur ses résultats concrets de développement que sur le principe électif ? Si la légitimité démocratique vient à faire défaut, comme cela est majoritairement le cas en Afrique, la légitimité fondée sur des résultats n’est-elle pas plus réaliste pour satisfaire les besoins fondamentaux ?

Ce sont ces grandes questions que remet en lumière le modèle rwandais, rejoignant ainsi de nombreux économistes qui, d’une part, pensent que la démocratie est un bien de luxe très coûteux pour des pays au revenu par tête très faible et, d’autre part, estiment que des institutions inclusives se mettent en place de façon volontariste, comme le fait Paul Kagame avec l’inclusion politique des femmes rwandaises.

In fine, un drame, une nation, un leadership et une vision n’ont pas suffi pour l’érection d’un modèle rwandais de développement. Il a fallu aussi créer un avenir désirable et lui donner forme. De là le fait que le plus grand mérite de Paul Kagame est d’avoir assuré la renaissance du Rwanda en créant un désir d’avenir malgré les limites ci-dessus évoquées. Une vision ne doit pas seulement exister. Elle doit être désirable via certains de ses résultats concrets. Cet espoir suscité est basé moins sur des innovations éculées du passé des pays industrialisés que sur une habileté et une capacité intrinsèque qu’il a de donner forme à l’avenir.

 

C’est ce qu’Aline Frankfort et Jean-Louis Baudoin appellent le « shapership », c’est-à-dire la capacité qu’a un leader de donner des formes à l’avenir d’une entreprise, d’une organisation ou d’un pays. D’une société qui devait être malade et paralysée par son génocide, Paul Kagame a fait une société certes avec encore beaucoup de problèmes à résoudre, mais désormais capable de se regarder dans le miroir sans se désoler de l’image que lui renvoie celui-ci.

C’est la preuve qu’en plus du marché et de l’Etat, assurer le développement a besoin d’un écosystème du développement où leadership, « success stories », capital humain, réseaux internationaux, culture nationale, institutions inclusives et « shaperschip » sont des paramètres d’une importance capitale. La démocratie réelle apparaît alors comme une norme qualitative qui rend un écosystème du développement plus attentif aux questions sociales, populaires et des droits humains. »

 

Thierry Amougou, économiste et professeur à l’Université catholique de Louvain, est l’auteur de L’Esprit du capitalisme ultime. Démocratie, marché et développement en mode kit (PUL, 2018). 

Afrique : la corruption responsable du surendettement

« Afrique : la corruption responsable du  surendettement»

 

Face à une dette qui a pratiquement doublé en 10 ans pour atteindre maintenant 7000 milliards d’euros dans les pays pauvres notamment d’Afrique, Uzziel Ndagijimana, ministre rwandais de la planification économique et des finances pointe la  corruption comme un des responsables de l’endettement. Il signale notamment que la fuite illégale de capitaux est même supérieure à l’aide au développement.. (Interview dans le Monde)

Les pays à bas revenus sont-ils menacés par une crise de la dette ?

Les pays à faibles revenus n’ont plus les ressources pour financer le développement ; la dette sert maintenant à rembourser la dette. Son poids s’est alourdi avec la chute du prix des matières premières et la baisse de la croissance en Afrique. Les dons et l’aide publique au développement ont diminué, alors que nos besoins en financement augmentent pour construire des infrastructures, nous adapter au réchauffement climatique et atteindre les objectifs de développement durable. Les prêts à taux préférentiels délivrés par les banques multilatérales comme la Banque mondiale ou la Banque africaine de développement sont insuffisants. Les pays doivent donc chercher des financements ailleurs, sur les marchés financiers.

Les pays à bas revenus profitent-ils d’une baisse des taux d’intérêts sur les marchés européens et américains ?

C’est la question que je me pose moi-même, car l’argent qu’on emprunte via ces obligations ne va pas forcément dans les secteurs où on en a le plus besoin, comme l’éducation ou la santé. Ces obligations ne peuvent financer que des projets qui ont un rendement élevé à court ou moyen terme. Dans le cas du Rwanda, nous avons émis en 2013 des obligations libellées en devises étrangères pour construire un centre de congrès et développer le secteur du tourisme. Nous ne pourrions pas en faire usage dans le domaine de l’éducation ou de la santé, par exemple. Et malgré la baisse des taux d’intérêts sur les marchés européens et américains, les obligations libellées en devises étrangères nous coûtent cher.

Les pays les plus pauvres étant plus risqués, le coût de l’emprunt y est plus élevé que dans les économies développées. Cela une incidence non seulement sur le volume de la dette, mais aussi sur sa qualité. Si elle est constituée de prêts concessionnels de long terme, c’est-à-dire avec des conditions favorables et des périodes de grâce, alors elle est saine. Si le poids des emprunts à court terme augmente, alors elle est plus fragile. Le problème, c’est que dans les pays pauvres, la qualité de la dette se dégrade, elle est davantage soumise à la volatilité des flux financiers.

La dette ne peut être transparente que si elle est contractée auprès des marchés financiers ou des bailleurs de fonds internationaux. Lorsqu’elle est négociée en bilatéral, de pays à pays, il est difficile de dévoiler les conditions de l’emprunt. Ce qui importe surtout dans la gestion de la dette, c’est la visibilité à long terme ; et nous devons surtout surveiller le risque de dette cachée.

Le moyen le plus efficace, c’est d’attirer les investissements étrangers. Et il faut pour cela améliorer la gouvernance, faciliter les démarches des entreprises, simplifier l’acquisition des terres, améliorer la transparence, raccourcir les procédures. Et si les investissements augmentent, alors les recettes fiscales aussi, et le poids de la dette diminuera.

 

Les pays pauvres doivent aussi combattre la corruption. Ils souffrent de surendettement parce que les capitaux qui arrivent chez eux sont détournés par la corruption et fuient vers les pays riches. En Afrique, les fuites illégales de capitaux dépassent la totalité de l’aide publique au développement qu’elle reçoit. Il faut aussi améliorer le système de collecte des impôts, ce qui demande de la volonté politique mais aussi l’aide et l’expertise d’institutions comme la Banque mondiale et le FMI. 

L’origine de l’homme, Homo sapiens sapiens, confirmée en Afrique

L’origine de l’homme, Homo sapiens sapiens, confirmée en Afrique

La région initiale de l’homme moderne, homo sapiens sapiens, serait localisée dans l’actuel Botswana.  Il s’agit d’une région d’Afrique australe, dans le nord de l’actuel Botswana, où notre ancêtre commun a vécu il y a 200.000 ans avant de migrer 70.000 ans plus tard, selon une étude internationale publiée lundi dans la prestigieuse revue Nature et reprise par France Info.

« Remontant aux racines de notre arbre génétique, l’étude affirme avoir localisé pour la première fois la « patrie ancestrale » de l’homme moderne, Homo sapiens sapiens. « Nous savons depuis longtemps que l’homme moderne était apparu en Afrique il y a environ 200.000 ans. Mais nous ignorions jusqu’ici où se situait précisément cette patrie« , a déclaré l’Australienne Vanessa Hayes, auteure principale, lors d’une conférence de presse.

L’équipe de chercheurs a fondé ses travaux sur la généalogie génétique, qui permet de tracer des modèles de migrations. Elle a analysé 200 génomes mitochondriaux, marqueurs génétiques de la généalogie maternelle, prélevés sur des populations vivant actuellement en Namibie et en Afrique du Sud, une région d’Afrique depuis longtemps considérée comme étant l’un des berceaux de l’homme moderne.

Les tests ADN ont révélé la présence rare du plus ancien lignage génétique maternel, appelé « L0″, encore porté par ces populations. « En observant ce lignage, nous nous sommes demandés d’où venaient ces personnes, où vivaient-elles? Nous avons donc étudié la dispersion géographique de ce lignage« , explique Vanessa Hayes. « Nous avons fait des analyses spatiales pour remonter le temps, car à chaque fois qu’une migration intervient, c’est enregistré dans notre ADN, qui change. Il est comme une horloge de notre histoire« , poursuit la généticienne.

En comparant les génomes, les chercheurs ont réussi à isoler un ancêtre commun qui était un ancien Khoïsan, peuple de chasseur-cueilleurs vivant toujours aujourd’hui. Selon l’étude, tous les hommes vivant actuellement en Afrique et hors d’Afrique, partagent ce même ancêtre.

« Je crois que nous étions tous des Khoïsans à un moment donné« , affirme Vanessa Hayes. Ces Khoïsans, première communauté humaine moderne, auraient vécu dans la même région pendant 70.000 ans, sans en bouger. Comme le sait-on ? Parce que le génome est resté identique, sans diverger, de -200.000 ans à -130.000 ans environ.

La communauté aurait prospéré dans cette région (grande comme la Nouvelle-Zélande), située au sud du fleuve Zambèze, qui part de l’actuelle Namibie, traverse le nord du Botswana et va jusqu’au Zimbabwe.  Aujourd’hui désertique – appelée le Kalahari – elle était à l’époque humide, verdoyante et luxuriante. Des analyses géologiques combinées à des modèles climatiques ont montré qu’elle abritait un immense lac, deux fois grand comme le lac Victoria, appelé Makgadikgadi, disparu depuis.

Le climat a ensuite commencé à changer, à la faveur d’une « modification de l’orbite terrestre« , détaille Axel Timmermann, océanographe, co-auteur de l’étude. Le lac s’est disloqué, la région s’est peu à peu asséchée, et les populations ont commencé à migrer via des « corridors verts« , en direction du nord-est, puis du sud-ouest.

Ces premiers départs ont ouvert la voie à la future migration des hommes modernes hors d’Afrique. Mais certains sont restés, s’adaptant à la sécheresse. Leurs descendants y vivent toujours, et sont restés chasseurs-cueilleurs. Du fait de ce mode de vie ancestral, Vanessa Hayes se doutait que ces Khoïsans portaient en eux cet ancien lignage.

Autre signe: ils parlent un langage « à clic« , qui fait claquer certaines consonnes avec la langue. « Or nous avons que le langage à clic est le plus ancien« , souligne la chercheuse. « Les Khoïsans qui vivent ici n’ont jamais quitté la patrie ancestrale. Eux savent qu’ils ont toujours été ici, ils se le racontent de génération en génération. Moi, je devais le prouver scientifiquement au reste du monde« , se réjouit Vanessa Hayes, qui a mis dix ans à mettre au jour cette généalogie génétique. « C’est comme si on regardait un grand arbre, dont les Européens et les Asiatiques seraient des toutes petites branches au sommet« , conclut-elle. »

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