L’attentat meurtrier qui s’est déroulé en plein cœur de Moscou à l’initiative de l’État islamique constitue un terrible échec pour Poutine et plus généralement pour le système. Du coup, on va faire payer la facture à tout ce qui apparaît comme de près ou de loin comme des formes d’opposition voire des adversaires intérieurs ou extérieurs et l’Ukraine en particulier.
L’échec est double pour Poutine. Alors qu’il voulait se parer de la gloire de son résultat à 87 % lors de l’élection présidentielle, le président russe est évidemment discrédité sur son propre terrain de la sécurité. En outre à l’extérieur, il apparaît comme la cible privilégiée des islamistes et des pays bienveillants à leur égard.
Poutine essaye de s’en sortir encore avec un énorme mensonge en affirmant« Les quatre auteurs directs de l’attaque terroriste, tous ceux qui ont tiré et tué des personnes, ont été retrouvés et arrêtés. »
En réalité les quatre auteurs n’ont nullement été identifié et encore moins arrêtés.
Moins d’une semaine après la réélection en grande pompe du président et ses démonstrations de puissance, l’Ukraine, contre laquelle la Russie est en guerre depuis deux ans, est en fait le parfait bouc émissaire pour l’ancien chef du FSB. Les terroristes « ont tenté de se cacher et se sont dirigés vers l’Ukraine, où, selon des données préliminaires, une fenêtre leur était ouverte du côté ukrainien pour franchir la frontière de l’État », a affirmé Vladimir Poutine devant la caméra hier. Rien d’étonnant pour le politologue français Nicolas Tenzer : « Les ennemis déclarés de Poutine sont les « nazis » en Ukraine, et les autorités russes ont toujours été démunies devant ce genre de phénomène qui montre une très grande déficience et des failles des services de sécurité. » « Tout comme les nazis ont commis autrefois des massacres dans les territoires occupés, a ajouté le chef du Kremlin, ils ont planifié une exécution spectaculaire, un acte d’intimidation sanglant. »
L’Ukraine a démenti à plusieurs reprises toute implication dans l’attaque, dénonçant une manipulation du Kremlin. « On s’attendait à ce que la version des responsables russes soit la « piste ukrainienne », a déclaré sur X le conseiller de la présidence ukrainienne Mykhaïlo Podoliak. Les déclarations des services spéciaux russes concernant l’Ukraine sont absolument intenables et absurdes. L’Ukraine n’a pas le moindre lien avec l’incident. »
Selon Meduza, site d’informations russophone basé à Riga, en Lettonie, « les médias russes fidèles à l’État et au gouvernement ont reçu l’instruction de l’administration présidentielle russe de souligner la possible « trace ukrainienne » dans leurs publications sur l’attaque terroriste ».
L’opposition russe a dénoncé les manquements des services de sécurité, dans l’incapacité de protéger la société des menaces réelles. « L’attaque terroriste avait été annoncée mais le FSB était trop occupé à combattre les politiciens, les activistes et les journalistes ; ils n’ont pas eu le temps de s’occuper des terroristes », a martelé sur X vendredi soir Maria Pevchikh, proche collaboratrice de l’ancien opposant Alexeï Navalny, mort en prison le 16 février.