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Retraites : Même avec la réforme, le système reste déficitaire

Retraites : Même avec la réforme, le système reste déficitaire

Le premier ministre François Bayrou a annoncé remettre la réforme de retraites « en chantier ». S’il n’est pas censuré, les partenaires sociaux devraient se réunir pour trouver de nouvelles pistes. Le cadre budgétaire est très contraint. La réforme de 2023 ne suffira pas à rétablir l’équilibre du système de retraites, selon des estimations convergentes. Des moyens pour redresser la situation existent, encore faut-il être prêt politiquement à les mettre en œuvre. Avec 80 % des actifs hostiles à la dernière réforme des retraites du 13 avril 2023, il n’y a rien d’étonnant à ce que les 8 principaux syndicats forment toujours un front commun uni réclamant son abrogation. Les retraités représentant environ 50 % des votants pour seulement 20 % de la population ; il n’y a rien de surprenant non plus à ce qu’une majorité d’élus exigent une indexation des pensions au moins égale à l’inflation. L’opinion restant largement opposée à l’âge légal de 64 ans, la nouvelle Assemblée nationale divisée en trois blocs irréductibles ne parvient à dégager une majorité que sur l’annulation pure et simple de la réforme même si l’article 40 de la Constitution permet au gouvernement de temporiser alors que la rue est apathique et les actifs résignés.

 

par 

Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School dans The Conversation 
Dans le débat sur les retraites, il faut toujours distinguer les prises de position politique de l’expertise scientifique. Cette dernière a pour mission sociale de poser un diagnostic aussi objectif que possible de l’état actuel du système de retraites français et de sa soutenabilité après une nouvelle réforme paramétrique remplaçant une réforme systémique par points avortée en mars 2020 du fait du Covid.

Les retraites représentent une ponction d’environ 14,4 % du PIB, la richesse créée par le pays chaque année (contre une moyenne de 12,3 % dans la zone euro) et 25 % des dépenses publiques. Au moment de la promulgation de la réforme, nous avions montré qu’elle n’accorderait qu’un répit temporaire au système des retraites. En effet, elle n’autorise qu’une réduction du déficit du système des retraites de 13 milliards, environ soit 0,4 % du PIB en 2030 du fait des diverses mesures d’accompagnement, notamment sur les carrières longues, adoptées au terme du travail parlementaire. Son impact sur l’amélioration des comptes publics devrait s’avérer plus significatif à hauteur de 22 milliards, soit 0,6 % du PIB en 2030.

Le vieillissement de la population est un phénomène lent et pour le moment inéluctable même si le dérèglement climatique pouvait faire apparaître des virus encore inconnus et plus mortels que le Covid qui affecteraient principalement les personnes âgées en réduisant leur espérance de vie. La mécanique démographique est donc une donnée implacable qui fragilise le régime par répartition créé en 1945, dont l’ambition était alors d’assurer une retraite satisfaisante aux personnes âgées, financée exclusivement par les cotisants. Or en 1960 on comptait 4,1 actifs par retraité, 3 pour 1 en 1970 et 1,7 pour 1 aujourd’hui avec une durée de vie moyenne en retraite passée de 15 ans en 1965 à plus 24 ans en 2023.
Trois organismes officiels estiment d’ores et déjà que le système a été déficitaire en 2024 malgré la réforme de 2023. Ainsi, le COR, dans son rapport publié le 13 juin 2024, s’attendait à une perte de 5,8 milliards en 2024 et même de 14 milliards en 2030 avec un scénario de référence pourtant très optimiste fondé sur un taux de chômage de 5 % en 2030 et des gains de productivité annuelle du travail de 1 % [bien au-delà de ces dernières années]. De son côté, le Comité de suivi des retraites dans son avis annuel du 15 juillet 2024 indiquait que de nouvelles mesures seraient à envisager à plus ou moins brève échéance et la Cour des comptes prévoyait un déficit de la branche vieillesse des régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale (hors complémentaire Agirc-Arcco mais y compris le Fonds de solidarité vieillesse) de 5,5 milliards soit une dégradation de 3,7 milliards.

Ironie de l’histoire, l’actuel premier ministre, qui appelle désormais dans son discours de politique générale à une révision de la réforme de 2023, avait, comme haut-commissaire au plan, dénoncé, en décembre 2022, une sous-évaluation flagrante du déficit du système de retraites par le COR. il soulignait alors qu’en 2021 le total des cotisations retraites ne représentait que 273 milliards d’euros (203 milliards dans le privé et 70 milliards pour le public) des 346 milliards de ressources du système soit 79 %. L’équilibre est assuré par des transferts d’organismes sociaux comme la caisse nationale d’allocations familiales (4 %), des subventions de l’État pour couvrir les exonérations de cotisations retraite des employeurs et salariés du privé (2 %), des subventions d’équilibre des régimes spéciaux (2 %) et enfin des recettes fiscales affectées comme la CSG pour 46,3 milliards d’euros soit 13 % des ressources.

En réalité, comme l’avoue le président du COR dans une note toute récente parue le 10 janvier 2025, les trois régimes de la fonction publique ne s’équilibrent que grâce à une subvention publique supplémentaire d’environ 42 milliards d’euros en 2023 (soit 1,4 % du PIB) si l’on retient comme base le taux de cotisation global (employeur et employé) sur le salaire brut des salariés du privé de 27,9 %.

Sans nécessairement lancer une nouvelle réforme d’ampleur susceptible de réveiller la colère d’un pays fracturé, plusieurs leviers existent pour renforcer la pérennité du système de retraite.

Le premier consiste à augmenter les recettes du système sans affaiblir la base taxable c’est-à-dire sans augmenter les cotisations patronales qui sont déjà, malgré l’exonération des cotisations employeur qui coûtent près de 78 milliards par an, les plus élevées des 38 pays de l’OCDE. Rappelons que les cotisations sociales des entreprises sur le coût de la main-d’œuvre sont en France de 26,6 %, très supérieures à l’Allemagne (16,7 %), sans même mentionner le Royaume-Uni (10,1 %) ou les États-Unis (7,5 %). Toute hausse de ces cotisations patronales accroîtrait les difficultés des entreprises, réduirait les embauches et donc la base taxable.

La solution la plus efficace, mais également la plus lente, consisterait à accélérer la hausse du taux d’emploi du pays, toujours bien inférieur à celui de nos voisins. Ainsi en 2023, 58,4 % des personnes âgées de 55 à 64 ans ont un emploi contre 63,9 % dans l’Union européenne. C’est pourquoi l’exécutif s’était fixé en 2023 un objectif de 65 % en 2030. Le COR avait d’ailleurs calculé qu’avec le taux d’emploi de la population en âge de travailler des Pays-Bas (82 % contre 68 % en France), le pays résoudrait à la fois le déficit des retraites et son déficit public… Le recours à l’immigration des actifs est également un moyen utilisé dans de nombreux pays pour accroître la population active.

Une augmentation générale des cotisations salariales, qui réduirait le pouvoir d’achat des actifs, alimenterait la grogne sociale et le conflit des générations est difficilement envisageable. En revanche, la suppression des niches fiscales injustifiées comme l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires (environ 2 milliards de pertes de recettes publiques par an), la prime de partage de la valeur ajoutée ou l’exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement qui profite essentiellement aux salariés des entreprises prospères (pour un coût social et fiscal de plus de 5 milliards), serait socialement équitable et budgétairement rentable. Reste bien sûr le moyen le plus efficace, et le plus contesté par les actifs, celui de l’allongement de l’âge légal et de la durée de cotisation en cours pour rejoindre nos voisins européens qui se situe déjà à plus de 65 ans en moyenne.

Après le tournant de la réforme du gouvernement Balladur (1993) qui a mis un terme à l’indexation des retraites sur les salaires pour l’aligner seulement sur l’inflation, la manière la plus indolore de réduire le poids relatif des pensions dans le PIB est de les sous-indexer.

La prochaine contribution des retraités portera sans doute sur la réduction des niches sociofiscales dont ils bénéficient comme le taux de CSG maximal de 8,3 % contre 9,2 % pour un « smicard » qui fait perdre 1,8 milliard par an aux finances publiques. L’abattement de 10 % sur les pensions, plafonné à 4 321 euros par foyer en 2024, a été créé en 1977 sur le modèle de la déduction des frais professionnels des actifs. Pour le justifier, il s’agissait de prendre en compte le fait que les pensions étaient parfaitement connues du fisc ce qui interdisait toute fraude.

Il ne se justifie donc plus et il est en outre par nature régressif puisqu’il ne profite qu’aux foyers imposables tout en représentant un manque à gagner de 4,2 milliards d’euros par an pour l’État. Enfin, les pensions des retraités fiscalement domiciliés hors de France qui échappent aux prélèvements sociaux (jusqu’à 10,1 % de la pension brute) pourraient voir leur cotisation d’assurance maladie (Cotam) (actuellement de 3,2 % sur la retraite de base des salariés et fonctionnaires, de 4,2 % sur la retraite complémentaire et de 7,1 % pour les indépendants) augmenter au niveau de la CSG et CRDS par souci d’équité.

Malgré leur poids électoral, il est clair que les retraités devront contribuer à l’équilibre d’un système dont ils sont par définition les bénéficiaires exclusifs et que l’exception française leur assurant un niveau de vie moyen supérieur à celui des actifs ne perdurera pas. On peut, sans grand risque, prédire la fin de l’âge d’or des retraités français.

Légère révision à la hausse de la croissance mondiale

Légère révision à la hausse de la croissance mondiale

 

Le Fonds monétaire international (FMI) a publié vendredi ses prévisions de croissances mises à jour pour l’économie mondiale, désormais attendue à 3,3% pour 2025 (révision de +0,1 point de pourcentage), mais avec des divergences de plus en plus marquées entre les pays et régions. Des prévisions toutefois à relativiser compte tenu des mesures draconiennes que pourrait prendre Trump en matière de droits de douane et de contraintes sur le commerce international sans parler du contexte géostratégique qui pourrait affecter une croissance déjà faible.

À l’occasion de la publication de l’actualisation de son rapport sur l’économie mondiale (WEO), le Fonds a également souligné l’existence de risques persistants, de résurgence de l’inflation aux États-Unis par exemple mais aussi de déflation dans d’autres pays tels que la Chine, ainsi que les conséquences de l’instabilité politique dans plus plusieurs économies majeures.

Parmi les principales économies mondiales, les États-Unis connaissant la révision la plus marquée (+0,5 point de pourcentage), avec une croissance désormais attendue à 2,7% cette année, augmentant de fait l’écart avec les autres économies avancées, en particulier l’Union européenne.

Pourquoi la baisse de natalité

Pourquoi la baisse de natalité

 

La baisse de la natalité est un phénomène que l’on observe partout dans le monde aujourd’hui. En Afrique subsaharienne, la baisse est plus lente, et ce continent reste l’unique région où la croissance démographique continue fortement, représentant environ 80 % de l’accroissement démographique mondial d’ici à la fin du siècle. Ailleurs, la natalité est souvent inférieure à deux enfants par femme. En Asie de l’Est, notamment en Chine, au Japon et en Corée du Sud, ainsi qu’en Europe de l’Est et du Sud, les taux de natalité sont extrêmement faibles et le déclin de la population a déjà commencé. Des pays comme la France, les pays scandinaves, ou encore les États-Unis, maintiennent des taux de natalité un peu plus élevés. Cependant, selon l’Insee, en France, à partir de 2035 environ, le nombre de décès devrait dépasser celui des naissances.

 

par 

Professeur d’Economie, ENSAE ParisTech dans The Conversation 

Que nous enseignent ces pays plus « avancés » dans leur vieillissement ?

Dans les pays d’Asie de l’Est, cela fait plusieurs décennies que le taux de fécondité est inférieur au seuil de remplacement des générations. Une fois que la natalité atteint un seuil très bas – proche d’un enfant par femme –, il semble difficile de la faire remonter. Ces pays sont pris dans un cercle vicieux : les familles ayant peu d’enfants investissent massivement dans leur éducation. La concurrence entre familles pousse à inscrire les enfants dans des activités coûteuses et élitistes, rendant l’éducation encore plus onéreuse. Par contraste, dans des pays plus égalitaires, comme les pays d’Europe du Nord, la pression sur les enfants est moins forte et ils coûtent moins cher aux parents.
Quels sont les principaux mécanismes qui provoquent la baisse de la natalité ?

Il y a deux grands types de raisons : d’une part, les contraintes et, d’autre part, les préférences individuelles et les normes sociales. Les contraintes concernent les personnes qui aimeraient avoir plus d’enfants mais qui ne le peuvent pas. Elles peuvent être financières, comme le coût du logement ou de l’éducation ; temporelles, car les rythmes de travail ne laissent pas assez de temps pour s’occuper d’un autre enfant ; ou biologiques, avec l’augmentation de l’âge au premier enfant et de l’infertilité. Ces contraintes sont des leviers sur lesquels l’État peut agir. Son rôle est d’aider les citoyens à faire les choix qui leur conviennent, en levant au maximum ces obstacles.

Dans ce cadre, l’intervention de l’État est légitime. En revanche, il y a une autre catégorie de raisons, liées aux normes sociales et aux préférences individuelles : ce que les gens souhaitent vraiment pour leur vie. Ici, je pense que l’État n’a pas à intervenir. Ce n’est pas son rôle de dire aux citoyens qu’ils devraient avoir d’autres préférences ou aspirations. Historiquement, les tentatives des États pour influer sur ces préférences ont rarement abouti. C’est pourquoi, j’organise la réflexion de cette manière : d’un côté, les contraintes, sur lesquelles l’État peut agir ; de l’autre, les préférences, qui relèvent des individus et des dynamiques sociales plus profondes.

Dans vos travaux, vous avez étudié l’impact des politiques familiales. Qu’est-ce qui détermine l’efficacité de ces politiques ? Y a-t-il des limites à celles-ci dans leur capacité à influencer les décisions familiales ?

On pense tout de suite aux incitations financières, comme les allocations familiales. Ce type de politique a été étudié dans de nombreux pays, dont la France. La conclusion générale est qu’elles ont peu d’effet sur la natalité. Même en Corée du Sud, où les allocations sont très élevées, la natalité a peu bougé. En France, une grande partie de la subvention au coût de l’enfant passe en fait par l’éducation et la santé, qui sont quasiment gratuites comparées aux pays anglo-saxons ou asiatiques. L’éducation, en particulier, représente une part énorme du coût d’un enfant. Les Français ne s’en rendent peut-être pas toujours compte, mais avoir un enfant coûte relativement peu cher aux parents en France.

Sur la contrainte de temps, il est crucial de permettre aux femmes de concilier carrière et vie familiale. Pendant longtemps, on observait une corrélation négative entre le taux d’emploi des femmes et la natalité : ou bien les femmes travaillaient, ou bien elles avaient des enfants. Mais au XXIᵉ siècle, cette corrélation s’est inversée. Aujourd’hui, dans les pays européens où les femmes travaillent le plus, comme la France, la natalité est aussi plus élevée. En revanche, dans des pays où le taux d’emploi des femmes est plus bas, comme l’Italie ou l’Allemagne, la natalité est également faible. L’explication est simple : dans les pays où les femmes doivent choisir, certaines privilégient le travail, d’autres, les enfants ; alors que dans les autres pays, elles peuvent concilier les deux. Cela passe par une prise en charge collective des enfants, avec des crèches accessibles et des écoles aux horaires adaptés, comme c’est le cas en France. Il y a aussi la question, complexe, de la répartition des tâches entre hommes et femmes. Par exemple, le congé paternité vise à encourager les hommes à s’impliquer davantage, mais une étude espagnole récente montre que les couples où les hommes prennent leur congé paternité ont moins souvent un autre enfant. Ce n’est pas encore un résultat généralisé, mais il invite à nuancer l’idée que la participation des hommes à l’éducation des jeunes enfants stimulerait automatiquement la natalité.

Enfin, il y a la contrainte biologique, notamment avec le développement de la procréation médicalement assistée (PMA) et d’autres innovations médicales. Je n’ai pas encore lu d’études quantifiant leur effet causal agrégé sur la natalité, mais c’est un sujet à explorer. Sur la contraception, les études ont montré qu’elle a permis aux femmes de repousser la première naissance, avec des effets positifs sur leurs études et leurs carrières. Cela change le timing des naissances, mais l’impact sur le nombre total d’enfants reste faible.

 

À côté de ces politiques, quel est le poids des normes sociales et des préférences individuelles dans le choix d’avoir des enfants ?

Le poids des normes sociales et des préférences individuelles est important. Elles sont façonnées par trois facteurs majeurs. Le premier, déjà mentionné, concerne le niveau de concurrence et d’inégalités entre familles. Dans des sociétés où il est crucial que les enfants soient en tête de la course, les parents investissent beaucoup de temps et de ressources, ce qui limite le nombre d’enfants. C’est particulièrement visible en Asie. Le deuxième facteur est lié à l’évolution des motivations économiques. Autrefois, les enfants jouaient un rôle essentiel, en tant que main-d’œuvre dans les fermes ou en tant que soutien des parents vieillissants.

Avec l’émergence de l’État providence, des systèmes de retraite et d’assurance maladie, cette fonction économique des enfants a disparu. L’État ayant pris en charge ces risques, le besoin d’avoir plusieurs enfants s’est considérablement réduit. Enfin, l’émancipation des femmes a eu un impact majeur. La fin du baby-boom coïncide avec une avancée significative des droits des femmes dans les démocraties occidentales : accès à l’emploi, indépendance financière. Autrefois, devenir mère était souvent la seule option de vie pour les femmes. Aujourd’hui, avec un éventail de choix beaucoup plus large, il n’est pas surprenant que certaines optent pour des parcours différents. Ces transformations sont des choix de société qui vont bien au-delà des questions de natalité.

Les enjeux sont très différents pour des pays vieillissants et pour des pays « jeunes ». Si les premiers peuvent avoir intérêt à stimuler les naissances, les seconds cherchent à les limiter. Finalement, y a-t-il une situation démographique optimale ?

Je dirais : non. Selon les contextes, les préoccupations varient. Dans les pays où la natalité est élevée, on s’inquiète de l’explosion démographique : comment loger, nourrir, éduquer et intégrer les nouvelles générations dans l’économie et la société ? À l’inverse, dans les pays où la natalité est basse, la question devient : comment financer notre système de protection sociale ? Comment continuer à innover et à produire avec une main-d’œuvre vieillissante ? Ces deux situations sont souvent perçues comme des menaces. Cependant, il est aussi possible de les voir sous un autre angle. Une population jeune peut être vue comme un atout, car elle est plus dynamique, créative et capable d’innover. Et il y a beaucoup d’actifs pour prendre en charge les inactifs. À l’inverse, une croissance démographique faible, voire négative, a aussi des avantages, en termes de stabilité politique, préservation des ressources, intégration des jeunes sur le marché de l’emploi. On se focalise souvent sur l’objectif de deux enfants par femme, car cela permet de maintenir une population stable. Mais, en réalité, un tel équilibre ne doit pas être perçu comme l’idéal, car il peut aussi signifier une stagnation. Chaque situation démographique présente des avantages et des inconvénients. L’important est d’identifier ces enjeux pour tirer parti des opportunités tout en minimisant les risques.

Espace : Succès pour la fusée de Jeff Bezos et échec de Musk

Espace : Succès pour la fusée de Jeff Bezos  et échec de Musk

Dans le cadre d’un essai, la fusée de Space X de Musk a perdu son deuxième étage là où  doivent se trouver les astronautes . Parallèlement par contre c’est un succès pour la fusée de Jeep Bezos.

L’entreprise SpaceX d’Elon Musk a perdu jeudi 16 janvier tout contact avec le second étage de sa mégafusée Starship lors d’un nouveau vol d’essai au cours duquel elle a toutefois réussi la complexe manœuvre de rattrapage du premier étage, une prouesse. Ce vol test devait être une démonstration de force pour SpaceX, quelques heures après le succès signé par Blue Origin, l’entreprise spatiale du fondateur d’Amazon Jeff Bezos, qui a mené son premier vol en orbite.

Réforme des retraites : opportunité pour la CFDT

Réforme des retraites : opportunité pour la CFDT

La décision de re remettre « en chantier » la réforme des retraites constitue une « opportunité inédite » qu’il faut « saisir » estime  la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon. D’entrée la CFDT, majoritaire dans le pays désormais, réaffirme dans sa position de syndicat constructif  (comme la CGC, l’UNSA ou la CFTC ) sans doute pour se distinguer des syndicats gauchistes qui de toute façon s’opposent à tout .
Les  renégociation de trois mois, « sans aucun tabou », sur la réforme des retraites constitue un signal à saisir , parce qu’il n’y en a eu aucun de la part de l’exécutif de l’époque, malgré des millions de travailleurs dans la rue dit Maryse Léon.  Ce serait les trahir que de ne pas saisir cette opportunité », ajoute-t-elle.

Pour Marylise Léon, « la réforme est bien sur pause puisque le calendrier est restreint et qu’il faut conclure dans un délai qui permet ensuite de renvoyer le sujet à l’Assemblée nationale pour ce qui nécessite une transposition législative ». La réforme de 2023, qui avait été adoptée au forceps grâce à l’article controversé 49.3 de la Constitution, a notamment porté de 62 à 64 ans l’âge légal de la retraite.

« Il faut bouger sur les 64 ans. Il faudra aussi une mesure sur la pénibilité, une mesure sur l’égalité hommes-femmes et une mesure sur l’âge », énumère Marylise Léon. Les syndicats doivent discuter jeudi après-midi en intersyndicale des premiers contours de la négociation.

Retraites : Même avec la réforme, le système reste déficitaire

Retraites : Même avec la réforme, le système reste déficitaire

Le premier ministre François Bayrou a annoncé remettre la réforme de retraites « en chantier ». S’il n’est pas censuré, les partenaires sociaux devraient se réunir pour trouver de nouvelles pistes. Le cadre budgétaire est très contraint. La réforme de 2023 ne suffira pas à rétablir l’équilibre du système de retraites, selon des estimations convergentes. Des moyens pour redresser la situation existent, encore faut-il être prêt politiquement à les mettre en œuvre. Avec 80 % des actifs hostiles à la dernière réforme des retraites du 13 avril 2023, il n’y a rien d’étonnant à ce que les 8 principaux syndicats forment toujours un front commun uni réclamant son abrogation. Les retraités représentant environ 50 % des votants pour seulement 20 % de la population ; il n’y a rien de surprenant non plus à ce qu’une majorité d’élus exigent une indexation des pensions au moins égale à l’inflation. L’opinion restant largement opposée à l’âge légal de 64 ans, la nouvelle Assemblée nationale divisée en trois blocs irréductibles ne parvient à dégager une majorité que sur l’annulation pure et simple de la réforme même si l’article 40 de la Constitution permet au gouvernement de temporiser alors que la rue est apathique et les actifs résignés.

 

par 

Professeur et directeur du Mastère Spécialisé Patrimoine et Immobilier, Kedge Business School dans The Conversation 

 
Dans le débat sur les retraites, il faut toujours distinguer les prises de position politique de l’expertise scientifique. Cette dernière a pour mission sociale de poser un diagnostic aussi objectif que possible de l’état actuel du système de retraites français et de sa soutenabilité après une nouvelle réforme paramétrique remplaçant une réforme systémique par points avortée en mars 2020 du fait du Covid.

Les retraites représentent une ponction d’environ 14,4 % du PIB, la richesse créée par le pays chaque année (contre une moyenne de 12,3 % dans la zone euro) et 25 % des dépenses publiques. Au moment de la promulgation de la réforme, nous avions montré qu’elle n’accorderait qu’un répit temporaire au système des retraites. En effet, elle n’autorise qu’une réduction du déficit du système des retraites de 13 milliards, environ soit 0,4 % du PIB en 2030 du fait des diverses mesures d’accompagnement, notamment sur les carrières longues, adoptées au terme du travail parlementaire. Son impact sur l’amélioration des comptes publics devrait s’avérer plus significatif à hauteur de 22 milliards, soit 0,6 % du PIB en 2030.

Le vieillissement de la population est un phénomène lent et pour le moment inéluctable même si le dérèglement climatique pouvait faire apparaître des virus encore inconnus et plus mortels que le Covid qui affecteraient principalement les personnes âgées en réduisant leur espérance de vie. La mécanique démographique est donc une donnée implacable qui fragilise le régime par répartition créé en 1945, dont l’ambition était alors d’assurer une retraite satisfaisante aux personnes âgées, financée exclusivement par les cotisants. Or en 1960 on comptait 4,1 actifs par retraité, 3 pour 1 en 1970 et 1,7 pour 1 aujourd’hui avec une durée de vie moyenne en retraite passée de 15 ans en 1965 à plus 24 ans en 2023.
Trois organismes officiels estiment d’ores et déjà que le système a été déficitaire en 2024 malgré la réforme de 2023. Ainsi, le COR, dans son rapport publié le 13 juin 2024, s’attendait à une perte de 5,8 milliards en 2024 et même de 14 milliards en 2030 avec un scénario de référence pourtant très optimiste fondé sur un taux de chômage de 5 % en 2030 et des gains de productivité annuelle du travail de 1 % [bien au-delà de ces dernières années]. De son côté, le Comité de suivi des retraites dans son avis annuel du 15 juillet 2024 indiquait que de nouvelles mesures seraient à envisager à plus ou moins brève échéance et la Cour des comptes prévoyait un déficit de la branche vieillesse des régimes obligatoires de base de la Sécurité sociale (hors complémentaire Agirc-Arcco mais y compris le Fonds de solidarité vieillesse) de 5,5 milliards soit une dégradation de 3,7 milliards.

Ironie de l’histoire, l’actuel premier ministre, qui appelle désormais dans son discours de politique générale à une révision de la réforme de 2023, avait, comme haut-commissaire au plan, dénoncé, en décembre 2022, une sous-évaluation flagrante du déficit du système de retraites par le COR. il soulignait alors qu’en 2021 le total des cotisations retraites ne représentait que 273 milliards d’euros (203 milliards dans le privé et 70 milliards pour le public) des 346 milliards de ressources du système soit 79 %. L’équilibre est assuré par des transferts d’organismes sociaux comme la caisse nationale d’allocations familiales (4 %), des subventions de l’État pour couvrir les exonérations de cotisations retraite des employeurs et salariés du privé (2 %), des subventions d’équilibre des régimes spéciaux (2 %) et enfin des recettes fiscales affectées comme la CSG pour 46,3 milliards d’euros soit 13 % des ressources.

En réalité, comme l’avoue le président du COR dans une note toute récente parue le 10 janvier 2025, les trois régimes de la fonction publique ne s’équilibrent que grâce à une subvention publique supplémentaire d’environ 42 milliards d’euros en 2023 (soit 1,4 % du PIB) si l’on retient comme base le taux de cotisation global (employeur et employé) sur le salaire brut des salariés du privé de 27,9 %.

Sans nécessairement lancer une nouvelle réforme d’ampleur susceptible de réveiller la colère d’un pays fracturé, plusieurs leviers existent pour renforcer la pérennité du système de retraite.

Le premier consiste à augmenter les recettes du système sans affaiblir la base taxable c’est-à-dire sans augmenter les cotisations patronales qui sont déjà, malgré l’exonération des cotisations employeur qui coûtent près de 78 milliards par an, les plus élevées des 38 pays de l’OCDE. Rappelons que les cotisations sociales des entreprises sur le coût de la main-d’œuvre sont en France de 26,6 %, très supérieures à l’Allemagne (16,7 %), sans même mentionner le Royaume-Uni (10,1 %) ou les États-Unis (7,5 %). Toute hausse de ces cotisations patronales accroîtrait les difficultés des entreprises, réduirait les embauches et donc la base taxable.

La solution la plus efficace, mais également la plus lente, consisterait à accélérer la hausse du taux d’emploi du pays, toujours bien inférieur à celui de nos voisins. Ainsi en 2023, 58,4 % des personnes âgées de 55 à 64 ans ont un emploi contre 63,9 % dans l’Union européenne. C’est pourquoi l’exécutif s’était fixé en 2023 un objectif de 65 % en 2030. Le COR avait d’ailleurs calculé qu’avec le taux d’emploi de la population en âge de travailler des Pays-Bas (82 % contre 68 % en France), le pays résoudrait à la fois le déficit des retraites et son déficit public… Le recours à l’immigration des actifs est également un moyen utilisé dans de nombreux pays pour accroître la population active.

Une augmentation générale des cotisations salariales, qui réduirait le pouvoir d’achat des actifs, alimenterait la grogne sociale et le conflit des générations est difficilement envisageable. En revanche, la suppression des niches fiscales injustifiées comme l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires (environ 2 milliards de pertes de recettes publiques par an), la prime de partage de la valeur ajoutée ou l’exonération des sommes versées au titre de la participation, de l’intéressement qui profite essentiellement aux salariés des entreprises prospères (pour un coût social et fiscal de plus de 5 milliards), serait socialement équitable et budgétairement rentable. Reste bien sûr le moyen le plus efficace, et le plus contesté par les actifs, celui de l’allongement de l’âge légal et de la durée de cotisation en cours pour rejoindre nos voisins européens qui se situe déjà à plus de 65 ans en moyenne.

Après le tournant de la réforme du gouvernement Balladur (1993) qui a mis un terme à l’indexation des retraites sur les salaires pour l’aligner seulement sur l’inflation, la manière la plus indolore de réduire le poids relatif des pensions dans le PIB est de les sous-indexer.

La prochaine contribution des retraités portera sans doute sur la réduction des niches sociofiscales dont ils bénéficient comme le taux de CSG maximal de 8,3 % contre 9,2 % pour un « smicard » qui fait perdre 1,8 milliard par an aux finances publiques. L’abattement de 10 % sur les pensions, plafonné à 4 321 euros par foyer en 2024, a été créé en 1977 sur le modèle de la déduction des frais professionnels des actifs. Pour le justifier, il s’agissait de prendre en compte le fait que les pensions étaient parfaitement connues du fisc ce qui interdisait toute fraude.

Il ne se justifie donc plus et il est en outre par nature régressif puisqu’il ne profite qu’aux foyers imposables tout en représentant un manque à gagner de 4,2 milliards d’euros par an pour l’État. Enfin, les pensions des retraités fiscalement domiciliés hors de France qui échappent aux prélèvements sociaux (jusqu’à 10,1 % de la pension brute) pourraient voir leur cotisation d’assurance maladie (Cotam) (actuellement de 3,2 % sur la retraite de base des salariés et fonctionnaires, de 4,2 % sur la retraite complémentaire et de 7,1 % pour les indépendants) augmenter au niveau de la CSG et CRDS par souci d’équité.

Malgré leur poids électoral, il est clair que les retraités devront contribuer à l’équilibre d’un système dont ils sont par définition les bénéficiaires exclusifs et que l’exception française leur assurant un niveau de vie moyen supérieur à celui des actifs ne perdurera pas. On peut, sans grand risque, prédire la fin de l’âge d’or des retraités français.

 

Épargne : baisse de la rémunération du livret A

Épargne : baisse de la rémunération du livret A

 

 
Sur proposition du gouverneur de la Banque de France, le ministère de l’Économie a décidé de baisser le taux de rémunération du Livret de 3 % à 2,4 % à partir du 1er février.

Notons que l’évolution du taux de rémunération tient compte notamment de la hausse des prix à la consommation. Cela à partir d’un indice des prix à la  consommation de l’INSEE largement obsolète du fait du changement de structure des achats des consommateurs. En gros, la principale caractéristique est l’augmentation du coût des abonnements, du logement et services.

La hausse des prix à la consommation a atteint 1,3% sur un an en décembre, un niveau identique au mois précédent.

En moyenne toutefois cette hausse aura été de près de 2 % en 2024 par rapport à 2023.

Brailler ridiculise la démocratie

 

 

Le dernier spectacle des brailleurs de l’Assemblée nationale a sans doute portéun grave préjudice à l’image de la politique est au-delà de la démocratie de l’Assemblée nationale.« Hissons-nous au niveau des enjeux de la Liberté d’expression », défendent Thaima Samman, avocate, fondatrice du Cabinet Samman et co-présidente du groupe de travail de La villa numeris sur la liberté d’expression, et David Lacombled, président du groupe. Pour eux, si la liberté est un droit fondamental, la liberté d’expression « ne constitue pas un droit absolu pour autant ». ( dans la « Tribune »)

 

Alors que X et TikTok deviennent de véritables torrents de boue, les éructations du dirigeant du premier et le silence du second ne contribuent pas à porter un débat digne, à la hauteur des enjeux du droit fondamental que représente la liberté d’expression.
Il est pour le moins paradoxal que les chantres de la liberté d’expression, le prochain président des Etats-Unis et son vice-président officieux Elon Musk, monopolisent à ce point la parole et semblent décidés à prendre les décisions pour le reste du monde. Au prétexte de pouvoir tout dire, on n’entend plus qu’eux.

Rappelons les fondamentaux de la liberté d’expression. Ce n’est pas tout dire et n’importe quoi. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen précise que « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Ni plus, ni moins. Nul ne saurait y déroger. Et pourtant.

Nos démocraties tirent leur force de leur capacité à permettre un débat équilibré et fructueux, même s’il n’est ni toujours consensuel, ni forcément apaisé. C’est comme ça que les idées progressent. A cet égard, les réseaux sociaux sont apparus comme de nouvelles agoras où chacun peut s’exprimer, où il suffit de prendre la parole dans le respect des règles de droit et aussi de son prochain. Y arriver avec un mégaphone plombe l’ambiance et rend zinzin une partie de ses membres qui s’agitent tels des électrons à l’énergie négative.
Lorsque Elon Musk fait de son réseau social son principal porte-voix, ne rechignant pas à manipuler, à l’aide de sa propre solution d’intelligence artificielle Grok, les messages qu’il y poste, se faisant apôtre et juge, se rêvant en démiurge, ce sont les principes fondamentaux de la démocratie qu’il remet en cause. Son ingéniosité et son éclectisme unanimement loués hier par la plupart des dirigeants, deviennent aujourd’hui des menaces pour les droits humains.

Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun.
Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun. Mais la tentative de préemption du monde par les futurs dirigeants américains risque de mettre fin à des années de dialogues entre les différents acteurs privés et publics de chaque côté de l’Atlantique, aussi complexes que la matière technologique, du Web à l’intelligence artificielle en passant par les réseaux sociaux, qu’ils traitent. Dès lors, chaque prise de position fait l’effet d’une bombe.

Aussi puissante soit l’annonce de Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook devenu Meta, de mettre fin à la vérification des faits par des professionnels, médias ou fondations, elle ne remet pas pour autant, à ce stade, tout en cause. A vrai dire, les grandes plateformes, déjà rentables, ne peuvent se payer le luxe d’inquiéter leurs actionnaires et leurs annonceurs outre mesure. Sauf à tenter des paris hasardeux, elles devront maintenir une exigence de qualité passant par une modération irréprochable.

Mais si son annonce ne concerne que les Etats-Unis, c’est sans doute aussi grâce à la législation européenne et plus particulièrement au Digital Service Act (DSA) qui vise à renforcer la protection des consommateurs en encadrant mieux l’activité des plus grandes plateformes. Voyons le verre à moitié plein, la réglementation européenne contraint Elon Musk et Mark Zuckerberg à respecter un certain standard. Il n’en reste pas moins que cela constitue une mauvaise nouvelle pour des médias à l’économie déjà précaire, socle fragile de démocraties friables.

En l’espèce, le dirigeant de Meta appuie aussi là où l’Europe a mal avec sa maladie chronique d’inflation réglementaire pour traiter tout nouveau bobo, sans se donner la peine d’utiliser ou de vérifier l’effectivité des outils déjà existants. Plutôt que d’accumuler et d’enchevêtrer les lois, avant de les appliquer avec zèle, donnons une chance à celles en vigueur et surtout veillons à ce qu’elles soient appliquées.

La culture de la régulation doit aussi être celle de la modération. Déjà, l’absence de neutralité des plateformes pourrait permettre de les soumettre aux mêmes règles de détention et de pluralité que les médias traditionnels quand elles sortent de leur rôle de passeuses d’idées pour prendre parti.

Un récent rapport du groupe de travail de La villa numeris visant à « Réaffirmer la liberté d’expression » montre que notre arsenal juridique permet de réaffirmer la liberté d’expression comme principe et de faire respecter ses exceptions, comme pour tout droit fondamental, dans les sociétés démocratiques. Encore faut-il se donner les moyens d’appliquer les règles existantes qui nécessitent un engagement humain et politique inédit.

Il est encore temps de former les juges mais aussi les professeurs, les élèves, les familles. Il est encore temps d’initier une coordination et une collaboration de l’ensemble des acteurs, opérateurs et plateformes, pouvoirs publics, médias, consommateurs, universitaires. Il est encore temps de permettre à la justice de jouer son rôle, plutôt que d’inventer de nouvelles règles qui rejoindront la poussière des textes jamais ou peu utilisés.

Déjà, arrêtons de nous enfermer dans des fausses réalités : la liberté d’expression pour les robots n’existe pas et nous pouvons déjà faire cesser nombre de campagnes de haine ou de manipulation artificielle sans augmenter les contraintes à la liberté d’expression. Terre d’inventivité, de créativité, d’originalité et d’ambitions, l’Europe, forte de ses 750 millions d’habitants, plus de deux fois la population des Etats-Unis, peut et doit montrer la voie de développements numériques respectueux des humains. Ce qui nous distingue nous portera.

Biden dénonce la prise du pouvoir par les ultra riches

Biden dénonce la prise du pouvoir par les ultra riches

 

Le président des États-Unis a prononcé mercredi soir un discours d’adieu à la nation, à quelques jours du retour à la Maison-Blanche de Donald Trump. Il en a profité pour surtout dénoncer la prise du pouvoir par les ultra riches qui ont largement facilité le triomphe de Trump pour servir leur intérêt financier et faire sauter les barrières de réglementation qui limitent leur influence et leur profit.

 

Le président des États-Unis Joe Biden a mis en garde mercredi 16 janvier au soir dans un discours d’adieu contre une «oligarchie qui prend forme» en Amérique, à quelques jours du retour à la Maison-Blanche de Donald Trump. Le dirigeant démocrate a également alerté dans cette ultime adresse à la Nation sur une «concentration dangereuse des pouvoirs dans les mains d’une poignée de personnes ultra-riches».
Joe Biden transmettra lundi le pouvoir à son rival républicain conservateur Donald Trump, lequel s’est allié, entre autres dirigeants des hautes technologies, à l’homme le plus riche du monde Elon Musk. Le président sortant âgé de 82 ans s’est alarmé des «conséquences dangereuses si leur abus de pouvoir n’est pas contrôlé». «Aujourd’hui une oligarchie prend forme en Amérique, (dont) l’ultra richesse, la puissance et l’influence menacent concrètement toute notre démocratie, nos droits fondamentaux, nos libertés», a déclaré Biden .

Politique-Vitupérer, caricature de la démocratie

Vitupérer caricature la démocratie

 « Vitupérer nuit gravement au débat », « Hissons-nous au niveau des enjeux de la Liberté d’expression », défendent Thaima Samman, avocate, fondatrice du Cabinet Samman et co-présidente du groupe de travail de La villa numeris sur la liberté d’expression, et David Lacombled, président du groupe. Pour eux, si la liberté est un droit fondamental, la liberté d’expression « ne constitue pas un droit absolu pour autant ». ( dans la « Tribune »)

 

Alors que X et TikTok deviennent de véritables torrents de boue, les éructations du dirigeant du premier et le silence du second ne contribuent pas à porter un débat digne, à la hauteur des enjeux du droit fondamental que représente la liberté d’expression.
Il est pour le moins paradoxal que les chantres de la liberté d’expression, le prochain président des Etats-Unis et son vice-président officieux Elon Musk, monopolisent à ce point la parole et semblent décidés à prendre les décisions pour le reste du monde. Au prétexte de pouvoir tout dire, on n’entend plus qu’eux.

Rappelons les fondamentaux de la liberté d’expression. Ce n’est pas tout dire et n’importe quoi. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen précise que « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Ni plus, ni moins. Nul ne saurait y déroger. Et pourtant.

Nos démocraties tirent leur force de leur capacité à permettre un débat équilibré et fructueux, même s’il n’est ni toujours consensuel, ni forcément apaisé. C’est comme ça que les idées progressent. A cet égard, les réseaux sociaux sont apparus comme de nouvelles agoras où chacun peut s’exprimer, où il suffit de prendre la parole dans le respect des règles de droit et aussi de son prochain. Y arriver avec un mégaphone plombe l’ambiance et rend zinzin une partie de ses membres qui s’agitent tels des électrons à l’énergie négative.
Lorsque Elon Musk fait de son réseau social son principal porte-voix, ne rechignant pas à manipuler, à l’aide de sa propre solution d’intelligence artificielle Grok, les messages qu’il y poste, se faisant apôtre et juge, se rêvant en démiurge, ce sont les principes fondamentaux de la démocratie qu’il remet en cause. Son ingéniosité et son éclectisme unanimement loués hier par la plupart des dirigeants, deviennent aujourd’hui des menaces pour les droits humains.

Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun.
Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun. Mais la tentative de préemption du monde par les futurs dirigeants américains risque de mettre fin à des années de dialogues entre les différents acteurs privés et publics de chaque côté de l’Atlantique, aussi complexes que la matière technologique, du Web à l’intelligence artificielle en passant par les réseaux sociaux, qu’ils traitent. Dès lors, chaque prise de position fait l’effet d’une bombe.

Aussi puissante soit l’annonce de Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook devenu Meta, de mettre fin à la vérification des faits par des professionnels, médias ou fondations, elle ne remet pas pour autant, à ce stade, tout en cause. A vrai dire, les grandes plateformes, déjà rentables, ne peuvent se payer le luxe d’inquiéter leurs actionnaires et leurs annonceurs outre mesure. Sauf à tenter des paris hasardeux, elles devront maintenir une exigence de qualité passant par une modération irréprochable.

Mais si son annonce ne concerne que les Etats-Unis, c’est sans doute aussi grâce à la législation européenne et plus particulièrement au Digital Service Act (DSA) qui vise à renforcer la protection des consommateurs en encadrant mieux l’activité des plus grandes plateformes. Voyons le verre à moitié plein, la réglementation européenne contraint Elon Musk et Mark Zuckerberg à respecter un certain standard. Il n’en reste pas moins que cela constitue une mauvaise nouvelle pour des médias à l’économie déjà précaire, socle fragile de démocraties friables.

En l’espèce, le dirigeant de Meta appuie aussi là où l’Europe a mal avec sa maladie chronique d’inflation réglementaire pour traiter tout nouveau bobo, sans se donner la peine d’utiliser ou de vérifier l’effectivité des outils déjà existants. Plutôt que d’accumuler et d’enchevêtrer les lois, avant de les appliquer avec zèle, donnons une chance à celles en vigueur et surtout veillons à ce qu’elles soient appliquées.

La culture de la régulation doit aussi être celle de la modération. Déjà, l’absence de neutralité des plateformes pourrait permettre de les soumettre aux mêmes règles de détention et de pluralité que les médias traditionnels quand elles sortent de leur rôle de passeuses d’idées pour prendre parti.

Un récent rapport du groupe de travail de La villa numeris visant à « Réaffirmer la liberté d’expression » montre que notre arsenal juridique permet de réaffirmer la liberté d’expression comme principe et de faire respecter ses exceptions, comme pour tout droit fondamental, dans les sociétés démocratiques. Encore faut-il se donner les moyens d’appliquer les règles existantes qui nécessitent un engagement humain et politique inédit.

Il est encore temps de former les juges mais aussi les professeurs, les élèves, les familles. Il est encore temps d’initier une coordination et une collaboration de l’ensemble des acteurs, opérateurs et plateformes, pouvoirs publics, médias, consommateurs, universitaires. Il est encore temps de permettre à la justice de jouer son rôle, plutôt que d’inventer de nouvelles règles qui rejoindront la poussière des textes jamais ou peu utilisés.

Déjà, arrêtons de nous enfermer dans des fausses réalités : la liberté d’expression pour les robots n’existe pas et nous pouvons déjà faire cesser nombre de campagnes de haine ou de manipulation artificielle sans augmenter les contraintes à la liberté d’expression. Terre d’inventivité, de créativité, d’originalité et d’ambitions, l’Europe, forte de ses 750 millions d’habitants, plus de deux fois la population des Etats-Unis, peut et doit montrer la voie de développements numériques respectueux des humains. Ce qui nous distingue nous portera.

Les enjeux de la définition de l’IA open source

Les enjeux de la  définition de l’IA open source 

Une définition étroite et peu rigoureuse de l’IA open source laisserait la porte ouverte à des entreprises comme Meta, qui pourraient changer de cap et cesser de publier des parties de leurs modèles d’IA si ceux-ci ne servent plus leurs intérêts. Un sujet crucial à l’approche du Sommet pour l’action sur l’IA, qui se tiendra en février. Par Mark Surman, président de Mozilla dans « La Tribune ».

Un document de 500 mots a été publié il y a quelques semaines, qui aura un impact significatif sur l’avenir d’Internet. L’Open Source Initiative (OSI) a publié une définition quasi définitive de l’IA open source qui permettra à la vaste communauté des développeurs d’IA de créer un mouvement florissant pour l’innovation, à l’instar de la création d’Internet.

Les logiciels libres sont à la base de l’infrastructure du web ains que de la plupart des applications utilisées aujourd’hui. Cela s’explique par le fait que les pionniers de l’open source ont défini ce dernier comme un logiciel dont l’utilisation et la modification seraient toujours libres, permettant ainsi une adoption généralisée des logiciels libres et donc de l’innovation qui sous-tend notre vie numérique.

Nous assistons à une vague de modèles d’IA – dont beaucoup proviennent des plus grandes entreprises technologiques – qui sont présentés comme étant « open source » mais ne reflètent pas l’esprit de la définition originale du logiciel open source. Bien que cela puisse sembler sémantique, les mots ont leur importance. Un langage approximatif autour de l’IA open source peut faire échouer des trillions de dollars d’innovations futures et laisser les termes de l’IA entre les mains de quelques grandes entreprises.

 Il y a beaucoup à perdre si l’on n’instaure pas une éthique et une communauté de développement de l’IA véritablement ouvertes. Une étude récente de l’université de Harvard a montré que les logiciels libres avaient créé une valeur économique d’environ 8 000 milliards de dollars. Toute cette innovation repose sur les assurances données dans la définition originale de l’open source écrite en 1998 : tout logiciel se disant open source sera toujours libre d’utilisation, d’étude, de modification et de partage. Cela signifie que vous pouvez créer ce que vous souhaitez – une entreprise, un service gouvernemental – à partir d’un logiciel libre sans craindre que quelqu’un vous fasse payer ou modifie les conditions d’utilisation de ce logiciel à l’avenir.

Nous verrons les mêmes avantages avec l’IA, mais seulement si les développeurs peuvent librement utiliser, étudier, modifier et partager tous les éléments d’un système d’IA. Dans cette dernière phrase, le passage « tous les éléments d’un système d’IA » est essentiel. L’IA et les logiciels présentent des différences essentielles. Un système d’IA comprend un code logiciel construit à partir de modèles d’IA fonctionnels et de données d’entraînement sous-jacentes utilisées pour créer le modèle.

La nouvelle définition de l’OSI affirme que le code et les modèles doivent être ouverts et que les données doivent être transparentes et reproductibles. Supposons que nous voulions ouvrir une nouvelle ère de créativité et d’innovation. Dans ce cas, il faut que les chercheurs en IA – y compris les grands acteurs commerciaux – adoptent cette définition avant de qualifier ce qu’ils publient d’« open source ». Sans cela, les développeurs risquent d’éviter les modèles ouverts et l’ensemble de l’écosystème open source risque de s’arrêter prématurément.

Les grandes entreprises technologiques ont multiplié les grands modèles de langage (LLM) – le Llama de Meta étant le plus connu – qui ont été présentés comme des logiciels libres. Ces modèles facilitent la création d’applications d’IA sans les coûts exorbitants requis pour les créer à partir de zéro. Nous avons vu des applications d’IA de grande valeur, allant de la découverte de médicaments à l’éducation médicale, construites sur la base de ces modèles. Il est indéniable qu’il s’agit d’un pas dans la bonne direction, mais ne soyons pas dupes : ces modèles d’IA ne sont pas vraiment ouverts.

Dans une lettre ouverte publiée dans The Economist, Mark Zuckerberg et Daniel Ek (PDG de Spotify) ont défini l’IA open source comme « des modèles dont les poids des paramètres sont rendus publics avec une licence permissive » et citent le Llama comme exemple.

Cette définition étroite laisse la porte ouverte à des entreprises comme Meta, qui pourraient changer de cap et cesser de publier des parties de leurs modèles d’IA si ceux-ci ne servent plus leurs intérêts. Dans ce cas, les développeurs qui se sont appuyés sur ces modèles pourraient voir leurs produits inopérants ou, au minimum, sévèrement limités. Cela soulève de réelles inquiétudes quant à la viabilité à long terme des applications conçues à partir de ces modèles et, d’une manière générale, quant à la viabilité d’un écosystème d’IA open source dynamique.

En février, Mozilla et l’université de Columbia ont réuni d’éminents experts pour étudier ce que l’open source devrait signifier à l’ère de l’IA. Le document qui en a résulté a mis en évidence les risques d’une utilisation étroite et peu rigoureuse du terme « open source » dans le domaine de l’IA. Il met également en garde contre les licences soi-disant « ouvertes » – à l’instar de la licence Llama – qui n’autorise la libre utilisation que pour les produits comptant moins de 700 millions d’utilisateurs mensuels. Pouvez-vous imaginer créer votre startup sur la base d’un logiciel ouvert qui serait verrouillé dès que votre entreprise serait prospère ? C’est ce que feraient de telles licences.

Le projet de définition vise à remédier à ces risques en traçant des frontières claires autour de ce qui est considéré comme de l’IA open source, afin que les développeurs sachent à quoi ils peuvent se fier. Cela donnera du souffle aux laboratoires d’IA construisant des modèles d’IA open source qui ne disparaîtront pas ou ne fermeront pas.

Parmi les exemples, citons le modèle GPT-NeoX-20B d’EleutherAI, publié sous la licence Apache 2.0, qui permet à quiconque d’utiliser le modèle. De même, le modèle OLMo de l’Allen Institute offre un accès complet au code, aux données, aux poids et à la suite d’évaluation utilisés pour le développer, ce qui permet aux chercheurs de l’étudier et de l’affiner. Contrairement à Llama, ces modèles permettent aux chercheurs d’étudier et de tester pleinement le fonctionnement interne des systèmes d’IA et de les adapter à leurs propres besoins.

Il convient également de noter que les laboratoires comme Eleuther et AI2 sont des organisations à but non lucratif, ce qui donne aux développeurs l’assurance que ces ressources resteront disponibles et à jour, garantissant ainsi la durabilité de leurs produits construits sur la base de ces modèles. C’est ce même principe de soutien durable qui a permis aux projets open source tels que Linux et Apache d’être si répandus dans les serveurs du monde entier. Les développeurs savent que les fondations Linux et Apache continueront à faire fonctionner leurs logiciels dans l’intérêt du public.

Le travail de ces organisations à but non lucratif a le potentiel de créer un avenir de l’IA qui contribue à la fois à un bien public plus large et constitue une boîte à outils véritablement ouverte pour l’ère de l’IA. Les décideurs politiques, les philanthropes et la communauté technologique au sens large devraient s’engager et soutenir des initiatives de ce type.

Les géants de la tech devraient s’inspirer de ces projets et modifier leur approche pour la rendre plus conforme à la nouvelle définition de l’OSI. Si nous y parvenons, nous pourrons donner à chacun – et à toute communauté – les moyens de façonner l’IA, d’en profiter et de lui faire confiance. L’avenir de notre infrastructure numérique et notre capacité d’innovation en dépendent.

Changer la constitution pour éviter le chaos ?

Changer la constitution pour éviter le chaos ?

La légitimité du régime présidentiel de la Ve République est questionnée depuis longtemps. Mais, jusqu’à l’été 2022, ses partisans avaient beau jeu de vanter la stabilité gouvernementale qu’elle offrait. Or cette stabilité a disparu : François Bayrou, ne semble pas plus assuré de rester en poste que son prédécesseur, Michel Barnier. Alors, est-ce le moment d’envisager sérieusement un changement de constitution ? La disparition du « fait majoritaire » aux élections de juin 2022 nous a plongés dans une période d’instabilité que la dissolution de l’Assemblée nationale, deux plus tard, est loin d’avoir résolue. Depuis l’élection de la nouvelle assemblée en juillet 2024, on observe au contraire une exaspération de la crise institutionnelle, avec le vote, pour la première fois depuis soixante ans, d’une motion de censure d’un gouvernement – celui de Michel Barnier, le 4 décembre. Pourtant, alors que la représentativité de nos institutions ne cesse de s’amoindrir, l’Élysée semble vouloir garder le cap de sa politique. La chambre basse, élue directement par le peuple, est aux deux tiers hostile à cette politique. Mais le président a les moyens de passer outre en maintenant un gouvernement compatible avec la ligne qu’il défend et en nommant en conséquence des premiers ministres qui, à l’image de Michel Barnier ou de François Bayrou, sont issus de groupes parlementaires minoritaires. Il fait ainsi la démonstration ad nauseam du potentiel de « coup d’État permanent » que permet l’actuel régime, dénoncé en son temps par un certain François Mitterrand. Dans ce contexte, nombreux sont aujourd’hui les chercheurs, mais aussi les mouvements citoyens, qui en appellent à un changement de Constitution, sans parler des candidats qui font cette proposition à chaque élection présidentielle. Faut-il sortir de la Ve République ? La crise actuelle réactive cette question de façon pressante.

 

par

, Maître de conférence associé, membre du centre de droit pénal et de criminologie, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières

, Professeure de droit public, Université Paris Nanterre – Université Paris Lumières dans The Conversation 

Dans une société démocratique, les textes constitutionnels visent à encadrer l’action du pouvoir de sorte à garantir qu’il s’exerce conformément à la volonté du peuple souverain. Cela passe en France, en particulier, par le fait que les gouvernants respectent les droits fondamentaux et par l’interdiction de concentrer le pouvoir dans les mains d’un seul, comme le rappelle la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789 :

« Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. »

C’est donc moins à sa capacité à assurer la stabilité du régime, qu’à la façon dont elle garantit – ou non – la représentativité des institutions qu’il faut juger une Constitution.

Or, de ce point de vue, la Constitution de la Ve République ne remplit pas véritablement sa fonction. Quand, scrutin après scrutin, le taux de participation électorale ne cesse de s’effriter, quand la composition sociale de l’Assemblée nationale et du Sénat, mais également, de plus en plus, de leurs électeurs, ne reflète qu’une minorité de la société française – l’Assemblée nationale ne compte que 4,6 % d’employés et aucun ouvrier alors que ces catégories socio-professionnelles sont majoritaires) – quand la révolte des classes populaires en « gilets jaunes » de l’hiver 2018 tourne aussi rapidement à la confrontation violente, que reste-t-il de la représentativité des gouvernants ?

Certes, la Constitution ne saurait être la seule explication à cette crise institutionnelle. Mais en raison de sa fonction d’organisation de l’exercice du pouvoir d’État, elle en est nécessairement l’une des plus déterminantes.

Depuis 1958, la Constitution organise invariablement une hégémonie du pouvoir exécutif au sein de l’appareil d’État.

Moins de la moitié des lois adoptées sont d’origine parlementaire alors que les propositions de loi sont beaucoup plus nombreuses que les projets de loi d’origine gouvernementale.

Toute une série de dispositifs constitutionnels accumulés au cours de la longue existence du régime ont donné à ce dernier une légitimité passant désormais exclusivement par le président de la République, quitte à enjamber le pouvoir législatif. On pense ainsi à l’abandon de l’investiture obligatoire des gouvernements, au pouvoir de révocation du gouvernement par le président, au fait majoritaire renforcé par le quinquennat rendant fictive la responsabilité gouvernementale et improbable une nouvelle cohabitation.

S’y ajoutent un mode de scrutin très majoritaire et une opportune « inversion du calendrier » qui a consolidé la subordination de la majorité parlementaire au pouvoir exécutif. Ainsi dépossédé de l’essentiel de sa fonction, le parlement ne peut plus être le lieu privilégié du débat public sur les grandes orientations politiques de la Nation, un lieu où s’exprimerait une réelle diversité de points de vue.

La situation du pouvoir judiciaire n’est guère plus enviable. Ravalé au rang de simple « autorité » dans les termes de la Constitution elle-même, il n’est pas suffisamment à l’abri de l’influence du gouvernement, qui conserve la main sur les nominations des magistrats. Or le degré d’indépendance de la Justice conditionne directement l’effectivité des droits et libertés des citoyens.

Mais cette subordination des pouvoirs législatif et judiciaire serait impossible sans la domination exclusive du pouvoir présidentiel que permet le texte constitutionnel.

Le président de la République concentre en sa personne un nombre de prérogatives sans commune mesure avec ce qui se pratique dans les autres États européens dont la plupart relèvent d’une tradition parlementaire, mais, également, outre-Atlantique, où le régime présidentiel oblige toujours le chef de l’exécutif à composer avec les autres pouvoirs. Le locataire de l’Élysée, lui, est non seulement le chef de l’État, supposé garant des institutions, mais aussi le chef du gouvernement, dont il nomme et révoque discrétionnairement les membres.

Irresponsable en tout, en ce sens qu’il n’a de comptes à rendre à aucun autre pouvoir et notamment devant le Parlement, puisqu’il a le pouvoir de le dissoudre à sa guise.

L’article 16 de la Constitution lui donne en outre la possibilité de s’arroger les pleins pouvoirs s’il estime – seul – que sont menacées « les institutions de la République, l’indépendance de la nation, l’intégrité de son territoire ». D’autres prérogatives pour lesquelles le chef de l’État n’a aucune autorisation à demander sont énumérées dans la constitution qui, toutes, tendent à un exercice vertical et autoritaire du pouvoir. Depuis l’inscription dans la constitution de la désignation du président au suffrage universel direct en 1962, sa légitimité est d’ailleurs réputée incontestable.

Le pouvoir du président est littéralement illimité puisqu’il s’exerce sans que puissent s’y opposer ni les autres pouvoirs ou autorités constitués. Si la destitution semble la seule limite, elle demeure d’usage assez improbable dans la pratique.

Ni le pouvoir législatif ou judiciaire, ni le peuple lui-même, à l’occasion d’une élection intermédiaire défavorable ou d’un référendum négatif ne peuvent donc s’opposer à la volonté du président. Tout dans le texte de la Constitution concourt à en faire un dirigeant sans partage, contrairement à l’idée que l’on peut se faire d’un régime démocratique où le peuple demeure souverain même entre deux élections présidentielles.

Le texte constitutionnel organise enfin une très large centralisation du pouvoir assurant l’hégémonie de l’État central sur toutes les autres institutions publiques.

En dépit des réformes intervenues depuis 1982, les collectivités locales n’ont qu’un pouvoir d’influence très limité dès lors que leurs dotations restent essentiellement décidées par le ministère des finances.

Sur fond d’austérité budgétaire persistante, la décentralisation s’est ainsi régulièrement traduite par le recul des services publics qui leur étaient confiés. Il en est de même pour d’autres organismes publics censément indépendants et officiellement investis d’une fonction de contre-pouvoir, mais qui, à l’image de l’Université ou de la Justice, ne sont pas dotés des moyens à la hauteur de leurs missions.

C’est dire si, d’un point de vue démocratique, les raisons pour modifier profondément la Constitution et changer de régime ne manquent pas, que l’on en appelle ou non à une « VIᵉ République ».

Vitupérer caricature la démocratie

Vitupérer caricature la démocratie

 « Vitupérer nuit gravement au débat », « Hissons-nous au niveau des enjeux de la Liberté d’expression », défendent Thaima Samman, avocate, fondatrice du Cabinet Samman et co-présidente du groupe de travail de La villa numeris sur la liberté d’expression, et David Lacombled, président du groupe. Pour eux, si la liberté est un droit fondamental, la liberté d’expression « ne constitue pas un droit absolu pour autant ». ( dans la « Tribune »)

 

Alors que X et TikTok deviennent de véritables torrents de boue, les éructations du dirigeant du premier et le silence du second ne contribuent pas à porter un débat digne, à la hauteur des enjeux du droit fondamental que représente la liberté d’expression.
Il est pour le moins paradoxal que les chantres de la liberté d’expression, le prochain président des Etats-Unis et son vice-président officieux Elon Musk, monopolisent à ce point la parole et semblent décidés à prendre les décisions pour le reste du monde. Au prétexte de pouvoir tout dire, on n’entend plus qu’eux.

Rappelons les fondamentaux de la liberté d’expression. Ce n’est pas tout dire et n’importe quoi. La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen précise que « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi ». Ni plus, ni moins. Nul ne saurait y déroger. Et pourtant.

Nos démocraties tirent leur force de leur capacité à permettre un débat équilibré et fructueux, même s’il n’est ni toujours consensuel, ni forcément apaisé. C’est comme ça que les idées progressent. A cet égard, les réseaux sociaux sont apparus comme de nouvelles agoras où chacun peut s’exprimer, où il suffit de prendre la parole dans le respect des règles de droit et aussi de son prochain. Y arriver avec un mégaphone plombe l’ambiance et rend zinzin une partie de ses membres qui s’agitent tels des électrons à l’énergie négative.
Lorsque Elon Musk fait de son réseau social son principal porte-voix, ne rechignant pas à manipuler, à l’aide de sa propre solution d’intelligence artificielle Grok, les messages qu’il y poste, se faisant apôtre et juge, se rêvant en démiurge, ce sont les principes fondamentaux de la démocratie qu’il remet en cause. Son ingéniosité et son éclectisme unanimement loués hier par la plupart des dirigeants, deviennent aujourd’hui des menaces pour les droits humains.

Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun.
Les nouveaux outils de la liberté d’expression sont toujours une bonne nouvelle même s’ils exigent de bien penser l’organisation et l’équilibre de la prise de parole de chacun. Mais la tentative de préemption du monde par les futurs dirigeants américains risque de mettre fin à des années de dialogues entre les différents acteurs privés et publics de chaque côté de l’Atlantique, aussi complexes que la matière technologique, du Web à l’intelligence artificielle en passant par les réseaux sociaux, qu’ils traitent. Dès lors, chaque prise de position fait l’effet d’une bombe.

Aussi puissante soit l’annonce de Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook devenu Meta, de mettre fin à la vérification des faits par des professionnels, médias ou fondations, elle ne remet pas pour autant, à ce stade, tout en cause. A vrai dire, les grandes plateformes, déjà rentables, ne peuvent se payer le luxe d’inquiéter leurs actionnaires et leurs annonceurs outre mesure. Sauf à tenter des paris hasardeux, elles devront maintenir une exigence de qualité passant par une modération irréprochable.

Mais si son annonce ne concerne que les Etats-Unis, c’est sans doute aussi grâce à la législation européenne et plus particulièrement au Digital Service Act (DSA) qui vise à renforcer la protection des consommateurs en encadrant mieux l’activité des plus grandes plateformes. Voyons le verre à moitié plein, la réglementation européenne contraint Elon Musk et Mark Zuckerberg à respecter un certain standard. Il n’en reste pas moins que cela constitue une mauvaise nouvelle pour des médias à l’économie déjà précaire, socle fragile de démocraties friables.

En l’espèce, le dirigeant de Meta appuie aussi là où l’Europe a mal avec sa maladie chronique d’inflation réglementaire pour traiter tout nouveau bobo, sans se donner la peine d’utiliser ou de vérifier l’effectivité des outils déjà existants. Plutôt que d’accumuler et d’enchevêtrer les lois, avant de les appliquer avec zèle, donnons une chance à celles en vigueur et surtout veillons à ce qu’elles soient appliquées.

La culture de la régulation doit aussi être celle de la modération. Déjà, l’absence de neutralité des plateformes pourrait permettre de les soumettre aux mêmes règles de détention et de pluralité que les médias traditionnels quand elles sortent de leur rôle de passeuses d’idées pour prendre parti.

Un récent rapport du groupe de travail de La villa numeris visant à « Réaffirmer la liberté d’expression » montre que notre arsenal juridique permet de réaffirmer la liberté d’expression comme principe et de faire respecter ses exceptions, comme pour tout droit fondamental, dans les sociétés démocratiques. Encore faut-il se donner les moyens d’appliquer les règles existantes qui nécessitent un engagement humain et politique inédit.

Il est encore temps de former les juges mais aussi les professeurs, les élèves, les familles. Il est encore temps d’initier une coordination et une collaboration de l’ensemble des acteurs, opérateurs et plateformes, pouvoirs publics, médias, consommateurs, universitaires. Il est encore temps de permettre à la justice de jouer son rôle, plutôt que d’inventer de nouvelles règles qui rejoindront la poussière des textes jamais ou peu utilisés.

Déjà, arrêtons de nous enfermer dans des fausses réalités : la liberté d’expression pour les robots n’existe pas et nous pouvons déjà faire cesser nombre de campagnes de haine ou de manipulation artificielle sans augmenter les contraintes à la liberté d’expression. Terre d’inventivité, de créativité, d’originalité et d’ambitions, l’Europe, forte de ses 750 millions d’habitants, plus de deux fois la population des Etats-Unis, peut et doit montrer la voie de développements numériques respectueux des humains. Ce qui nous distingue nous portera.

Sénat : Un siège à 34 000 € pour la présidence !

Sénat : Un siège à 34 000 € pour la présidence !

 Le Canard enchaîné a révélé mardi que le Sénat avait commandé un nouveau siège pour la présidence pour 40 000 euros hors taxe.

Interrogé à ce sujet, le sénateur Les Républicains a rectifié le prix, évoquant « 34 000 euros exactement pour deux fauteuils et un prototype ». « Nous avons du mobilier qui a une histoire et donc un coût », a justifié Gérard Larcher, tout en reconnaissant qu’ »on aurait dû être plus exigeant sur le prix ». Le président du Sénat a affirmé qu’il n’avait pas été informé de cet achat et a « demandé une enquête ».

« On ne peut pas prôner la réduction des dépenses publiques et ne pas se l’appliquer à soi-même », a-t-il poursuivi. Dans cette interview, le président du Sénat a dit attendre du nouveau gouvernement de François Bayrou, qui doit prononcer mardi sa déclaration de politique générale devant le Parlement, qu’il poursuive « la réduction du déficit et de la dépense publique avec des actes concrets » !

Darmanin veut supprimer la dispense de visas aux responsables algériens

Darmanin veut supprimer la dispense de visas aux responsables algériens

 

En réplique à la décision de l’Algérie de refuser le retour d’un de ses ressortissants délinquant, Gerard Darmanin durcit aussi la position du pays vis-à-vis des responsables d’Alger. Le ministre de la Justice Gérald Darmanin a annoncé dimanche sur LCI vouloir «supprimer» l’accord intergouvernemental franco-algérien de 2013 qui permet à la nomenklatura algérienne de se rendre en France sans visa.

«Il y a un accord de 2013 qui est un accord gouvernemental qui permet à ceux qui ont un passeport officiel, un passeport diplomatique algérien, il y en a des milliers», de «venir en France sans visa pour pouvoir circuler librement», a-t-il précisé.

Les relations entre l’Algérie et la France, déjà tumultueuses, se sont envenimées ces derniers jours avec l’arrestation à Montpellier d’un influenceur algérien de 59 ans, «Doualemn», après une vidéo litigieuse sur TikTok. Mis dans un avion jeudi pour l’Algérie, il a été renvoyé en France le soir-même. Sa rétention a été prolongée de 26 jours dimanche par un juge.

L’ex-Premier ministre Gabriel Attal avait, lui, appelé à «dénoncer» l’accord de 1968, qui confère un statut particulier aux Algériens en matière de circulation, de séjour et d’emploi en France. Cet accord, «on peut le dénoncer, le réviser, il a été révisé quatre fois, il est d’ailleurs devenu un peu obsolète», a abondé M. Darmanin.

 

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