Archive pour la Catégorie 'culture'

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Connaissances économiques- Le niveau des connaissances des Français qui expliquent la faiblesse du pays

Connaissances économiques- Le niveau des connaissances des Français qui expliquent la faiblesse du pays

Un sondage Ifop-Fiducial pour la Fondation Concorde montre que les Français, bien qu’intéressés, ne sont pas complétement à l’aise dans ce domaine. Si l’intérêt pour l’économie est majoritaire (66%), moins d’un Français sur deux déclare ne pas se sentir à l’aise avec les sujets relatifs à l’économie en général (PIB, dette, SMIC, taux de chômage, activité des entreprises, etc.) (46%).

Ces résultats sont confirmés par les réponses à la série de 9 questions relatives aux connaissances effectives des personnes interrogées. Seules 6% d’entre elles ont alors obtenu entre 7 et 9 bonnes réponses, tandis que 25% n’ont pas réussi à répondre correctement à plus de 2 questions. La microéconomie apparaît alors comme le domaine dans lequel les connaissances sont les plus partielles. 27% des Français évaluent correctement le coût mensuel d’un salarié au SMIC pour son entreprise , tandis que le dimensionnement d’une PME n’est connu que de 7% des personnes interrogées, contre 84% le sous-estimant.

Le groupe Allianz, de son coté a fait un sondage pour comparer les connaissances dans 19 pays européens. La France s’était classée dernière. De quoi expliquer certains blocages et retards économiques !

Echantillon de 1003 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, catégorie socio-professionnelle) après stratification par région et catégorie d’agglomération. Les interviews ont eu lieu par questionnaire auto-administré en ligne (CAWI – Computer Assisted Web Interviewing) Du 6 au 10 octobre 2017.

Frédéric Beigbeder à l’Académie française ! Pourquoi pas aussi Cyril Hanouna ou Patrick Sébastien

Culture- Frédéric Beigbeder à l’Académie française ! Pourquoi pas aussi Cyril Hanouna ou Patrick Sébastien

le journal Marianne qui n’est pas une contradiction près en matière de populisme suggère finalement l’entrée de Frédéric Beigbeder à l’académie française.
le journal évoque cependant le profil tapageur de l’intéressé  » Journaliste, éditeur médiatique, apprécié et primé, l’auteur de 99 francs (2000), de L’amour dure trois ans (1997), d’Un roman français (2009), est lui aussi un candidat sérieux. Avec un profil certes un peu tapageur. Arrêté en plein Paris pour consommation et détention de cocaïne (en 2008), soutien repenti de l’écrivain Gabriel Matzneff accusé de pédophilie (à la suite de la publication du Consentement, de Vanessa Springora), pointé a posteriori pour inaction dans l’affaire Patrick Poivre d’Arvor, complaisant avec Roman Polanski… Beigbeder collectionne les frasques et sa réputation n’est plus à faire.  »

Pourtant Marianne considère que Frédéric Beigbeder serait un candidat très sérieux et un digne successeur de François Nourissier !

On a pourtant du mal à distinguer la moindre originalité dans l’œuvre et dans les propos de celui qui fréquente les salons médiatiques. Si Beigbeder doit rentrer à l’Académie française alors il faudra aussi rapidement y faire entrer aussi Cyril Hanouna encore beaucoup plus médiatique, plus provocateur et plus exhibitionniste. Les orthodoxes objecteront que l’intéressé n’a jamais rien écrit ou apporter quoi que ce soit à la pensée française mais il ne semble pas que ce soit aujourd’hui un obstacle. Patrick Sébastien pourrait également y avoir sa place pour son œuvre historique « les sardines », sorte d’opéra chanté !

À noter cependant l’œuvre littéraire incontournable de Cyril Hanouna: Les Peopleries – 300 potins de vos stars préférées ! (avec Fabien Lecœuvre), Éditions de la Lagune – juin 2005
Sans parler des » sardines » oeuvre chantée de Patrick Sébastien.

Frédéric Beigbeder à l’Académie française ! Pourquoi pas aussi Cyril Hanouna

Frédéric Beigbeder à l’Académie française ! Pourquoi pas aussi Cyril Hanouna ?

le journal Marianne qui n’est pas une contradiction près en matière de populisme suggère finalement l’entrée de Frédéric Beigbeder à ‘académie française.
le journal évoque cependant le profil tapageur de l’intéressé  » Journaliste, éditeur médiatique, apprécié et primé, l’auteur de 99 francs (2000), de L’amour dure trois ans (1997), d’Un roman français (2009), est lui aussi un candidat sérieux. Avec un profil certes un peu tapageur. Arrêté en plein Paris pour consommation et détention de cocaïne (en 2008), soutien repenti de l’écrivain Gabriel Matzneff accusé de pédophilie (à la suite de la publication du Consentement, de Vanessa Springora), pointé a posteriori pour inaction dans l’affaire Patrick Poivre d’Arvor, complaisant avec Roman Polanski… Beigbeder collectionne les frasques et sa réputation n’est plus à faire.  »

Pourtant Marianne considère que Frédéric Beigbeder serait un candidat très sérieux et un digne successeur de François Nourissier !
On a pourtant du mal à distinguer la moindre originalité dans l’œuvre et dans les propos de celui qui fréquente les salons médiatiques. Si Beigbeder doit rentrer à l’Académie française alors il faudra aussi rapidement y faire entrer aussi Cyril Hanouna encore beaucoup plus médiatique, plus provocateur et exhibitionniste.Les orthodoxes objecteront que l’intéressé n’a jamais rien écrit ou apporter quoi que ce soit à la pensée française mais il ne semble pas que ce soit aujourd’hui un obstacle.

À noter cependant l’œuvre littéraire incontournable de Cyril Hanouna: Les Peopleries – 300 potins de vos stars préférées ! (avec Fabien Lecœuvre), Éditions de la Lagune – juin 2005

Métavers: Substituer le fantasme au réel !

Métavers: Substituer le fantasme au réel !

 

Auteur d’une thèse sur les jeux vidéo, l’universitaire Douglas Hoare esquisse, dans une tribune au « Monde », une critique du métavers et son « fétichisme de la marchandise », dénonçant l’avènement d’un « monde à l’envers », qui reste pour l’instant à l’état de prototype.

 

Le métavers n’existe encore qu’à l’état de projet, et pourtant, il occupe déjà une place considérable dans la sphère médiatique. On en fait l’éloge dans les discours officiels, les reportages télévisés, les colonnes des journaux. D’autres voix mettent en garde contre ses périls, quitte à citer des ouvrages critiques pour se donner un vernis subversif. Mais on débat du dispositif comme s’il était déjà là, sans jamais poser le problème de son existence.

Pour justifier leur enthousiasme, les partisans du métavers nous promettent des communications plus intenses, un lien social renforcé, des simulations permettant un apprentissage ludique, une créativité sans limite, etc. Internet permet déjà le télétravail et les visioconférences ; les jeux vidéo, un dépaysement virtuel. Le métavers se propose de combiner les deux. Au sein du simulacre, la plus ennuyeuse des réunions se donnera des airs de jeu.

Grâce à la réalité virtuelle, le participant sera en immersion dans un jeu vidéo total. Grâce à la réalité augmentée, ce jeu vidéo débordera l’écran, contaminera notre perception du réel au point de faire corps avec lui. Leur association paraîtra réaliser les promesses de l’imaginaire.

Le fantasme régnera en maître, de même que le miracle, puisque, dans la réalité virtuelle, toute contradiction avec le réel peut être suspendue ; et dans la réalité augmentée, le moindre geste pourra acquérir une portée magique, être embelli et agrandi par le simulacre.

Mais cet imaginaire n’est pas aussi libre qu’il en a l’air, dans la mesure où il est objectivé. Ce n’est plus le produit d’une conscience rêveuse, c’est une fantaisie informatique qui implique une procédure à suivre pour que l’on puisse en jouir. C’est ici que l’échange, propre au jeu vidéo, d’une liberté simulée contre un asservissement réel est retrouvé à une tout autre échelle.

La fusion de l’interface et de la réalité permettra d’étendre la quantification de nos actes, et avec elle la rationalisation des conduites. Greffé à notre vue, le programme restituera les données de nos moindres faits et gestes. Le participant sera en autoévaluation constante, enfermé dans des boucles de rétroaction. Il ajustera sa conduite pour faire grimper ou baisser la statistique qu’est devenue sa vie. L’accès au merveilleux informatique se monnaiera donc : il impliquera d’aligner l’ensemble des activités humaines sur un processus de valorisation économique.

Ce processus, déjà bien entamé par les smartphones et leurs applications, a de beaux jours devant lui. C’est finalement une certaine interprétation du monde – celle du fétichisme de la marchandise – paraissant d’autant plus objective qu’elle semblera émaner de la réalité elle-même, qui se substituera au monde.

Cinéma : la crise des scénarios français

Cinéma : la crise des scénarios français

 

Jean Gabin rappelait souvent qu’un bon film suppose premièrement une histoire, deuxièmement une histoire, troisièmement une histoire. Àctuellement le cinéma français connaît une certaine crise du scénario par Jérôme Lachasse sur BFM. 

 

Jugé attendus et sans ambition, le cinéma français semble en décalage avec les attentes du public. La faute aux scénaristes? Ou à un système formaté qu’il faut repenser?

Bâclés, caricaturaux, peu ambitieux… À en croire leurs détracteurs, les scénarios des films français cumulent toutes les tares. C’est même devenu une source récurrente de blagues sur les réseaux sociaux, et un cliché dans la presse. « Le scénario, laissé-pour-compte du cinéma français », titrait déjà en 2014 Le Figaro. Malgré quelques exceptions, comme La Nuit du 12, cet été, ce point de vue a durablement imprégné le public.

Les comédies populaires pas plus que les films d’auteur ne font aujourd’hui recette, et semblent plus que jamais éloignés de ses attentes. « Le dernier Desplechin [Frère et sœur] a exercé un pouvoir de fascination sur moi, parce que presque tout – l’intrigue, la caractérisation des personnages, les dialogues – sonnent comme de la science-fiction à mes yeux », assume ainsi le scénariste Robert Hospyan. « Je comprends que l’on puisse trouver ça rédhibitoire. »

« On a souvent l’impression de films qui ne s’adressent pas au public », acquiesce Liam Engle, lecteur de scénarios et réalisateur. « Quand j’ai vu la bande-annonce du Serge Bozon [Don Juan avec Virginie Efira et Tahar Rahim], je me suis demandé si les gens qui l’avaient fait vivaient dans une bulle et s’ils avaient conscience de la caricature presque digne des Inconnus qu’ils étaient en train de générer. »

Ce décalage est accentué par l’émergence depuis 15 ans dans les séries, d’une écriture de très grande qualité, qui fait défaut à beaucoup de films. « On peut faire la même critique au cinéma américain », modère Alexandre de la Patellière, co-scénariste du revival des Trois Mousquetaires qui sortira en 2023. « On est trop sévère sur le cinéma français, qui ne cesse de se battre pour produire des œuvres très différentes. »

« Le mouvement général est très bon », renchérit la scénariste Fadette Drouard (PatientsHibou), qui siège également à l’aide au développement au CNC: « Il y a beaucoup de vitalité. Il y a une nouvelle génération qui n’a plus envie de rentrer dans les cases. Il n’y a que des gens qui se torturent la tête pour raconter au mieux leur histoire et faire quelque chose que les gens aient envie de voir. »

Anna Marmiesse, lectrice de scénarios, le confirme: « Une bonne idée bien développée, une finesse dans la caractérisation des personnages, une acuité dans le regard sur la société d’aujourd’hui, un sens du gag efficace… Tout cela existe et revient régulièrement. Simplement, ce ne sont pas forcément ces scénarios qui sont produits, et ce pour diverses raisons. »

Mais avec trop de films en projet, et pas assez de producteurs pour les développer, la situation devient intenable. Pour éviter un potentiel échec, de nombreux films « jugés trop médiocres pour la salle, comme Connectés ou Flashback« , ont terminé sur Prime Vidéo, « devenu le dépotoir des pires projets », selon une figure du milieu. Mais là aussi, « les options sont en train de se réduire », prévient Fadette Drouard.

A quoi juge-t-on un bon scénario? « Pour moi, c’est une bonne histoire qui fait le lien entre la subjectivité de l’auteur et la subjectivité du spectateur », assure le scénariste Ludovic du Clary. « C’est à la fois une caractérisation fine des personnages, des rythmes, un morceau d’universalité et des enjeux », estime de son côté l’universitaire Pierre-William Fregonese, auteur de Raconteurs d’histoires (Pix’n Love).

« Un scénario, c’est une structure. C’est ce qu’il y a de plus important et peu savent le faire », insiste le scénariste Laurent Vachaud. « Un très bon scénario est souvent peu spectaculaire à la lecture. Il faut qu’il puisse titiller l’imaginaire de ceux qui vont succéder au scénariste. Dans les grands scénarios, il y a souvent des béances, des choses qui ne sont pas expliquées. Si vous expliquez tout, c’est la mort du scénario. »

François Civil dans « Les Trois Mousquetaires » © Pathé

Malgré ses exigences, le métier de scénariste reste « peu gratifiant », et souvent éclipsé par celui de réalisateur. Car chaque cinéaste se rêve scénariste, même s’il n’en a pas les capacités, déplore encore Laurent Vachaud: « C’est très rare, les réalisateurs qui sont eux-mêmes scénaristes au même titre qu’un scénariste. La plupart ne sait pas écrire, même s’ils sont crédités au scénario de leurs films. »

Cette situation n’est pas aidée par une industrie où cohabitent deux types de projets aussi différents que formatés: d’un côté les comédies populaires faites pour le prime-time et de l’autre les films d’auteur davantage écrits pour les comités de lecture que pour le public. « On a développé une culture du script qui est plus forte dans son évaluation que dans son écriture », résume François Clerc, patron d’Apollo Films.

Un scénario reste « un objet transitionnel », complète Alexandre de la Patellière. « Quand vous êtes scénariste, vous êtes la personne la plus importante d’un film jusqu’à ce que vous en deveniez la moins importante. » « En France, l’histoire n’est jamais mise en avant comme l’un des ingrédients clefs de la réussite – artistique – d’un film », regrette Ludovic du Clary. « L’accent est mis sur l’esthétique, la déconstruction des récits. »

C’est le paradoxe du scénario: pour obtenir les financements des chaînes de télévision, les principaux argentiers du cinéma français, un script doit être à la fois innovant et familier. Il doit donc s’appuyer sur des schémas éculés, comme les chocs culturels (Paris vs. province, banlieue vs. beaux quartiers) ou les conflits de générations (écoliers vs. retraités, jeunes parents vs. beaux-parents).

De quoi créer des frustrations. « Les scénaristes ne savent parfois plus où donner de la tête », reconnaît Anna Marmiesse. « J’ai besoin qu’on me raconte des histoires, qu’on me fasse voyager. J’ai l’impression que c’est un truc que l’on a un peu perdu », critique Sabrina B. Karine, qui a écrit le film de SF La Dernière Vie de Simon. « En France, il y a une frilosité sur l’ambition. »

« Ce n’est pas tellement qu’il n’y a pas d’ambition », répond Robert Hospyan. « C’est qu’il y a des scénaristes qui vont essayer de donner aux producteurs ce qu’ils veulent. Il y a un moment où certains scénaristes savent aussi comment le système fonctionne et où même ceux qui aspirent à faire des choses originales sont obligés de se tourner vers des schémas connus pour réussir. C’est inévitable. »

« Les producteurs et productrices sont la plupart du temps de bonne volonté », modère Anna Marmiesse. « Ils et elles veulent voir aboutir les projets et donc trouver de l’argent pour ce faire. Ce qui implique que parfois, ils cherchent à pousser les scénaristes dans un sens qui selon eux plaira aux financeurs ou au public. » Il ne faut jamais oublier que le cinéma est au croisement d’une industrie et d’un art: « Être scénariste, ça veut aussi dire être une sorte de technicien », martèle Laurent Vachaud.

« Je n’ai jamais trouvé dans mon expérience – qui n’est que la mienne – de grand satan que ce soit chez les chaînes ou chez les distributeurs », ajoute Alexandre de la Patellière. « Personne n’impose de schémas. Il se trouve que l’on retrouve les mêmes schémas dans la dramaturgie depuis des siècles. Le marché a toujours été celui-là: il y a toujours eu des films qui se ressemblent. »

Reste que le cinéma français est le champion du concept aguicheur mal exploité. « Un peu trop souvent à mon goût au cinéma, je me dis qu’une ou deux versions de plus n’auraient pas fait de mal », désespère Sabrina B. Karine. « Il y a toujours ce moment, dans la seconde partie du second acte, où on sent que les auteurs galèrent à arriver jusqu’au climax, qui est souvent un peu mieux, ou moins pire », regrette Liam Engle.

Ce dernier regrette fréquemment des « dialogues mal écrits » et une « réticence à l’efficacité »: « On retrouve souvent des répliques ambiguës avec entre parenthèses, ‘en colère’ ou ‘blagueur’. Un autre fléau que je remarque souvent en France est la présence de points de suspension à la fin des répliques. Ça témoigne d’une volonté de réalisme, mais ça crée dans la grande majorité des cas des répliques molles. »

« Il n’y a pas de bon ou de mauvais script.​​ Il n’y a que des scripts qui sont prêts ou pas prêts », abonde le distributeur François Clerc. Certains producteurs sont plus efficaces que d’autres à développer des scénarios. C’est le cas de Nicolas et Éric Altmayer (OSS 117Pattaya). « Quand un script sort de chez eux, il est tournable », assure François Clerc. Inversement, certains scénarios médiocres écrits par des stars bankables sont produits pour ménager leur susceptibilité et éviter la fin d’un fructueux partenariat.

Mais au fil des années, une qualité d’écriture s’est perdue. Jean-Loup Dabadie et Jean-Claude Carrière n’ont pas d’équivalent de nos jours. « Un certain type d’artistes a disparu », constate Laurent Vachaud, qui lie la qualité déclinante des films à la perte d’intérêt du public pour le 7e Art. Les résidences d’écriture peuvent aider à faire éclore de nouvelles plumes. « Ça fait du bien de parler entre nous », se réjouit Fadette Drouard.

 

Moins pessimiste, Ludovic du Clary estime qu’il faut du temps pour devenir bon scénariste et savoir écrire une histoire qui va accrocher le public: « Il faut une bonne dizaine d’années ». Puis il y a l’imaginaire des auteurs, leur sens de la comédie et du suspense, la poésie de leurs dialogues, glisse Alexandre de la Patellière: « Ce sont des choses qui se construisent, mais qui ne s’apprennent pas complètement. »

Mais contrairement aux Etats-Unis, où l’histoire est reine, le scénario répond à beaucoup moins d’exigences en France: « On peut financer une comédie de 125 pages sans aucun problème, et ça pose problème », révèle Liam Engle. « C’est l’héritage de la Nouvelle Vague où on préfère suivre le mouvement naturel de l’histoire au lieu de proposer un récit mécanique. Du coup, on se retrouve avec des dialogues écrits au fil de l’eau. »

Ce qui explique pourquoi les corrections suggérées par les lecteurs de scénarios ne sont pas toujours prises en compte. Si des « blagues beaufs et racistes » ont pu être retirées de Maison de retraite, le dernier acte « imbitable » de Bac Nord, « où le film se dégonfle », n’a pas été changé, se souvient une autre figure de la profession: « C’était l’un des péchés du scénario et ça ne l’a pas empêché de faire deux millions d’entrées. »

La qualité d’un scénario est aussi toujours tributaire des conditions dans lesquelles il a été écrit, souligne François Clerc: « Le script passe par trop de mains aujourd’hui: le distributeur, le producteur, les chaînes de télé et depuis un an les plateformes sans oublier les Sofica (sociétés de financement, ndlr) et les régions, qui peuvent apporter jusqu’à 10% du budget d’un film. Les scripts changent de décor en fonction de la région qui les soutient. »

Difficile dans ces conditions de conserver l’âme d’un projet. Quand on crie au loup, une comédie familiale co-écrite par Robert Hospyan, a ainsi beaucoup perdu en humour au fil de la production. Une blague sur Johnny Hallyday a notamment été coupée. « On nous dit que ça n’allait pas être compris par le public », soupire-t-il. Du projet d’origine il ne reste dans le produit fini que la structure de l’histoire.

« Il y avait peut-être trop de personnes à contenter », analyse le scénariste. « Il y avait des réunions où il y avait une responsable de développement, un producteur, un consultant en scénario, des scénaristes et un réalisateur. C’était une usine à gaz. Ce n’est pas possible d’arriver à un résultat. Ce n’est pas comme ça qu’on fait un film. »

Ce type de parasitage est un problème récurrent. Il se souvient de l’ajout d’un « sous-entendu un peu homophobe » à un projet de comédie dramatique qu’il a écrit il y a cinq ans: « Il leur fallait un personnage de ‘folle’, pour répondre à des clichés de comédie. » « Le souci d’éviter les blagues de ce type n’est pas au cœur des préoccupations des chaînes lorsqu’elles sélectionnent un projet… », confirme Anna Marmiesse.

Et une fois l’écriture terminée, le script peut changer une nouvelle fois lors du tournage ou de la post-production (scènes supprimées, répliques improvisées, choix de montage). Un film n’est pas toujours le reflet de son scénario.

Face à la complexité de monter les projets, le scénario est souvent le premier élément sacrifié. Certains projets se montent si vite qu’il faut tourner alors que la dernière version du script n’est pas complètement satisfaisante. « Un producteur m’a dit un jour qu’il voulait tourner l’été prochain et me demandait d’écrire un script en quatre mois », se souvient Sabrina B. Karine. « C’était tourner pour tourner. Ce n’est pas possible. »

« Notre politique de natalité des films fait qu’à un moment donné on fait des films pour remplir un line-up », reconnaît François Clerc. Dans la plupart des cas, le choix de tourner est fait pour éviter de perdre la star bankable et de devoir attendre trois ans qu’elle soit à nouveau disponible, note le distributeur: « Au moment où le script arrive dans vos mains, c’est un train qui part. Il n’y a rien de plus difficile que de le freiner. »

Des conditions de travail rudes, aggravées par une rémunération faible, qui contraint les scénaristes à multiplier les missions (script doctor, prof, lecteur) pour maintenir une régularité financière. Le salaire d’un scénariste est versé par palier, à chaque étape de l’écriture (synopsis, traitement, première version de continuité dialoguée, etc.). En cas d’abandon du projet, seules les premières échéances, assez faibles, sont versées.

« Quand on signe un contrat, on signe pour un montant défini, par exemple 50.000 euros. Sur ces 50.000 euros, il y a une grosse partie de la somme – on va dire environ 50%, parfois plus, parfois un peu moins – qu’on ne touche qu’à la mise en production, soit à l’embauche des principaux chefs de poste, soit au plus tard au premier jour de tournage. Généralement, c’est au premier jour de tournage, voire au cinquième », détaille Robert Hospyan.

Sachant que l’écriture d’un scénario peut s’étaler sur plusieurs années, il est difficile d’en vivre. « J’ai mis trois ans pour gagner des sous », se souvient Sabrina B. Karine. « J’étais au RSA, avec les APL. » « En moyenne, les scénaristes sont payés 10.000 euros par an », complète Ludovic du Clary. « Quand vous êtes payé 3.000 euros pour le synopsis sur lequel vous avez passé six mois, ce n’est pas assez. »

« Le problème, c’est [que les producteurs] exploitent la passion des gens », dénonce Laurent Vachaud. « Ils exploitent l’idée que les gens sont prêts à tout pour voir leur film se tourner. Ils peuvent être prêts à être payés au lance-pierre, à y mettre beaucoup de leur temps libre. C’est complètement crapuleux. Il y a des cantiniers qui sont mieux payés que des scénaristes sur certains films et ce n’est pas sérieux. »

Pourquoi est-ce si mal payé? « Parce qu’il faut payer le scénario alors qu’il n’y a pas encore de budget! », répond-t-il. « Il faut souvent payer de sa poche, avec les subventions, avant que l’on sache si le film peut se faire. Ça ne va pas chercher loin. Ça peut être un investissement à perte. Personne ne veut dépenser de l’argent pour rien. » Le scénario ne représente souvent que 3% du budget final d’un film.

Pour Ludovic du Clary, il y a une corrélation directe entre ce mode de financement et les scénarios bâclés. « Il y a un sous-financement chronique dans le cinéma, notamment au début des écritures. Et quand on est scénariste, on sait à quel point les débuts sont fondamentaux. Comme on construit la vision du film, c’est beaucoup de discussions, ça prend du temps, pendant lequel on n’est pas payé. »

Une situation liée à la SACD (société des auteurs et compositeurs dramatiques), qui ne reconnaît pas la notion de rémunération du travail en amont, mais l’œuvre finie. Plusieurs syndicats (la Guilde des scénaristes, le SCA, la FAMS) et organisations culturelles (La Cité Européenne des Scénaristes) se mobilisent pour obtenir une meilleure considération et une meilleure rémunération. Mais impossible de les unifier pour le moment.

Écrire un scénario requiert une force mentale qu’aucune école ne peut apprendre. « C’est vraiment un sacerdoce », insiste celui qui a consacré quatre ans à écrire Paternel, un drame avec Grégory Gadebois et Géraldine Nakache qui sortira en 2023. « À la télévision, vous avez beaucoup moins de liberté, mais vous gagnez beaucoup mieux votre vie et vous avez plus de travail. Le cinéma, c’est vraiment pour les warriors. »

Il y a toujours une part magique dans la création d’un film, qui rend sa réussite miraculeuse. « C’est un peu la chance de ce métier », insiste Alexandre de la Patellière. « Il y a une forme de justice. On doit toujours revenir à des choses qui nous touchent pour qu’elles fonctionnent. Il faut aimer les films qu’on écrit, et après on voit si ça plaît. On ne sait jamais ce que les films vont devenir. On construit des prototypes. »

« La seule chose que l’on puisse faire pour essayer que les gens aillent voir nos histoires, c’est de leur faire une promesse forte, et de tenir nos promesses », conclut Fadette Drouard. Deux sérieux candidats se profilent dans les prochaines semaines: L’Origine du mal, thriller implacable avec Laure Calamy, et Jack Mimoun et le secret de Val Verde, comédie d’aventure signée Malik Bentalha.

Culture: Netflix ou l’aliénation de masse

Culture: Netflix ou  l’aliénation de masse

Dans son ouvrage incisif, Romain Blondeau évoque les raisons qui ont fait de l’entreprise américaine un géant du streaming. En France, selon lui, c’est grâce à la proximité idéologique du patron Reed Hastings et d’Emmanuel Macron que Netflix a pu s’imposer. ( papier du Monde)

 

. Lors de la récente cérémonie des Emmys, les trophées de la télévision américaine, il était de bon ton de brocarder Netflix. Ces derniers mois, la plate-forme de streaming fondée par Reed Hastings a perdu des abonnés, licencié des employés et restreint ses investissements dans la production. Le court pamphlet que Romain Blondeau, naguère journaliste, aujourd’hui producteur, adresse à la plate-forme – Netflix, l’aliénation en série – semble arriver un peu tard. Mais Netflix compte toujours plus de 200 millions d’abonnés dans le monde, dont une dizaine de millions en France, qui passent des siècles et des siècles à consommer ses contenus (on ne dit plus programmes), puisque c’est désormais ainsi – en additionnant les minutes passées devant les écrans par chaque consommateur (on ne dit plus spectateur) – qu’on comptabilise le succès ou l’échec.

Romain Blondeau retrace brièvement l’évolution de la société, dont la raison d’être était initialement d’irriguer les déserts cinématographiques américains en proposant aux spectateurs privés de salles la location de DVD qu’ils recevaient par la poste. En 2007, la firme propose une première version de son site de vidéo à la demande sur abonnement. Six ans plus tard, elle se lance dans la production de contenus originaux avec les séries Orange Is the New Black et House of Cards. En 2012, la firme a entrepris une campagne de développement international qui lui permet aujourd’hui d’être présente dans le monde entier, à l’exception de la Chine, de la Corée du Nord, de la Syrie et – depuis l’invasion de l’Ukraine – de la Russie.

L’argument central du texte de Blondeau tient à la mise en parallèle de l’emprise croissante de Netflix sur la création et la consommation de fictions en images (séries et longs-métrages) et le triomphe des thèses économiques défendues par Emmanuel Macron. Pour l’auteur, Reed Hastings et le président français sont des jumeaux idéologiques, « fans de la destruction créatrice ». Selon lui, c’est grâce à cette proximité que Netflix a pu déborder les défenses naturelles que lui opposait l’organisation du financement du cinéma et de l’audiovisuel français, réussissant même à en devenir le bénéficiaire.

Romain Blondeau ne veut rien entendre de la part des défenseurs des communautés virtuelles qui se créent autour des séries. Il n’accorde pas plus de crédit à l’implication de Netflix dans la vie publique américaine, attribuant aussi bien le colorblind casting (distribution des rôles oublieuse de l’appartenance ethnique des interprètes) de la série La Chronique des Bridgerton que la diffusion de 13th, documentaire militant d’Ava DuVernay, à des considérations mercantiles. Comme toutes les saintes colères, la sienne est parfois injuste. Il n’empêche : pour l’instant, les seules forces capables d’arrêter Netflix ne relèvent pas du sursaut de la politique culturelle que l’auteur appelle de ses vœux. Ce sont celles dont disposent ses concurrents, Disney, Warner Discovery, Apple ou Amazon.

L’influence culturelle de la France en danger

L’influence culturelle de la France en danger

Un an après sa prise de fonctions, la présidente de l’Institut français qui œuvre au rayonnement français à l’étranger donne un aperçu de sa feuille de route, dans un entretien avec « Le Monde ».

 

Nommée à la présidence de l’Institut français le 1er juillet 2021, Eva Nguyen Binh, ancienne ambassadrice de France au Cambodge, entend donner une nouvelle impulsion à cette institution qui œuvre au rayonnement de la culture française à l’étranger, au moment où celle-ci célèbre son 100e anniversaire.

Quel regard portez-vous sur la diplomatie culturelle de la France ?

L’influence de la France n’est pas un acquis. Elle est remise en cause, questionnée, battue en brèche dans un certain nombre de pays, notamment en Afrique. En même temps, cette politique culturelle fait envie. Je rencontre beaucoup de gens, des ministres de pays étrangers qui me disent : « Mais comment faites-vous, comment êtes-vous organisés ? »

En quoi cette défiance change-t-elle votre action ?

Nous sommes dans un moment de défis, où l’Institut français, dans toutes ses composantes et tous ses relais, doit être extrêmement ouvert sur les autres et parler à tout le monde. Dans l’histoire de notre maison, il y a eu des périodes où nous parlions beaucoup aux autorités locales et aux artistes. Aujourd’hui, nous parlons à toutes les composantes d’une société, c’est-à-dire aussi les ONG, les entrepreneurs, les représentants des sociétés civiles, etc. Le débat d’idées prend désormais une place essentielle. J’en veux pour preuve le cycle de forums que nous lançons en Afrique, en octobre [Notre Futur. Dialogues Afrique-Europe, dès le 7].

Comment abordez-vous ce type de rencontres ?

Le changement de paradigme vient du fait que nous n’organisons rien s’il n’y a pas de partenaires locaux, si, localement, nos interlocuteurs trouvent que cela n’a pas d’intérêt. Ce n’est plus une approche verticale. Nous n’imposons rien, au contraire, nous nous plaçons dans la coconstruction. Cela me paraît important comme orientation, parce que cela irrigue tout ce qu’on va faire, y compris dans le domaine artistique.

Comment cela se manifeste-t-il sur le terrain ?

Nous allons soutenir des projets portés par des galeries, des incubateurs, des entreprises, des associations. Quitte à ce qu’on ne porte pas le projet, mais que nous soyons dans l’accompagnement. Si vous voulez, on laisse le projet se structurer, s’épanouir. On a des projets comme ça au Cameroun, encouragés par l’Institut français sur place. Quand on propose des concepts comme La Nuit des idées, Novembre numérique ou les Dialogues Afrique-Europe, ce n’est pas une injonction, on est dans la collaboration.

Or, aujourd’hui, La Nuit des idées [créée en 2016], c’est dans plus de cent pays, et Novembre numérique, lancé en 2017, dans soixante-dix pays. Et ce qui m’importe, c’est aussi des sujets sociétaux qui sont forts partout, et dont je considère que l’Institut français ne s’est pas totalement emparé.

Société : Netflix, l’aliénation de masse

Société :  Netflix, l’aliénation de masse

Dans son ouvrage incisif, Romain Blondeau évoque les raisons qui ont fait de l’entreprise américaine un géant du streaming. En France, selon lui, c’est grâce à la proximité idéologique du patron Reed Hastings et d’Emmanuel Macron que Netflix a pu s’imposer. ( papier du Monde)

 

. Lors de la récente cérémonie des Emmys, les trophées de la télévision américaine, il était de bon ton de brocarder Netflix. Ces derniers mois, la plate-forme de streaming fondée par Reed Hastings a perdu des abonnés, licencié des employés et restreint ses investissements dans la production. Le court pamphlet que Romain Blondeau, naguère journaliste, aujourd’hui producteur, adresse à la plate-forme – Netflix, l’aliénation en série – semble arriver un peu tard. Mais Netflix compte toujours plus de 200 millions d’abonnés dans le monde, dont une dizaine de millions en France, qui passent des siècles et des siècles à consommer ses contenus (on ne dit plus programmes), puisque c’est désormais ainsi – en additionnant les minutes passées devant les écrans par chaque consommateur (on ne dit plus spectateur) – qu’on comptabilise le succès ou l’échec.

Romain Blondeau retrace brièvement l’évolution de la société, dont la raison d’être était initialement d’irriguer les déserts cinématographiques américains en proposant aux spectateurs privés de salles la location de DVD qu’ils recevaient par la poste. En 2007, la firme propose une première version de son site de vidéo à la demande sur abonnement. Six ans plus tard, elle se lance dans la production de contenus originaux avec les séries Orange Is the New Black et House of Cards. En 2012, la firme a entrepris une campagne de développement international qui lui permet aujourd’hui d’être présente dans le monde entier, à l’exception de la Chine, de la Corée du Nord, de la Syrie et – depuis l’invasion de l’Ukraine – de la Russie.

L’argument central du texte de Blondeau tient à la mise en parallèle de l’emprise croissante de Netflix sur la création et la consommation de fictions en images (séries et longs-métrages) et le triomphe des thèses économiques défendues par Emmanuel Macron. Pour l’auteur, Reed Hastings et le président français sont des jumeaux idéologiques, « fans de la destruction créatrice ». Selon lui, c’est grâce à cette proximité que Netflix a pu déborder les défenses naturelles que lui opposait l’organisation du financement du cinéma et de l’audiovisuel français, réussissant même à en devenir le bénéficiaire.

Romain Blondeau ne veut rien entendre de la part des défenseurs des communautés virtuelles qui se créent autour des séries. Il n’accorde pas plus de crédit à l’implication de Netflix dans la vie publique américaine, attribuant aussi bien le colorblind casting (distribution des rôles oublieuse de l’appartenance ethnique des interprètes) de la série La Chronique des Bridgerton que la diffusion de 13th, documentaire militant d’Ava DuVernay, à des considérations mercantiles. Comme toutes les saintes colères, la sienne est parfois injuste. Il n’empêche : pour l’instant, les seules forces capables d’arrêter Netflix ne relèvent pas du sursaut de la politique culturelle que l’auteur appelle de ses vœux. Ce sont celles dont disposent ses concurrents, Disney, Warner Discovery, Apple ou Amazon.

Plates-formes et cinéma: le débat

Plates-formes et cinéma: le débat

 

Un article qui tente de réhabiliter le rôle des plates-formes par rapport au  cinéma ( quand d’autres au contraire considèrent que les plates-formes contribuent à la pénalisation de la médiocrité des contenus NDLR) . Pour Jean‑Marc Quinton, Consultant à La Fémis (École nationale supérieure des métiers de l’image et du son), dans l’histoire des médias, chaque nouveau mode de diffusion (théâtre, cinéma, télévision, vidéo) a entraîné la création d’un type de contenu spécifique avec sa dramaturgie propre. Ce que l’on appelle le « film de cinéma » a été conçu initialement pour la salle de cinéma c’est-à-dire pour un mode de consommation particulier de contenu, non pas par idéal artistique.

Par la suite, les réalisateurs se sont emparés de cette contrainte pour inventer un art spécifique. Au fil du temps, le cinéma a institutionnalisé des pratiques professionnelles (montage, gros plan, travellings, effets spéciaux) et une grammaire spécifique (durée, structure, profondeur de champs, éclairage, décors, maquillage, etc.). Un peu plus tard, la télévision a inventé sa propre grammaire et ses propres contenus : reportages, variétés, débats, feuilletons, news. C’est pourquoi le film de cinéma n’est pas mort avec l’arrivée de la télévision. Les salles de cinéma sont restées un moment clé de la vie d’un film qui se poursuit naturellement à la télévision.

Les plates-formes ont quant à elle réinventé « la série » comme grammaire spécifique. En effet, le streaming, le wifi et la 4G permettent un visionnage individuel à la demande d’un contenu très long, ce que les cassettes ou les DVD ne permettaient pas. La série moderne constituerait un équivalent audiovisuel du roman : une histoire qui s’inscrit dans le temps, une multiplicité de personnages, une complexité narrative permise par la possibilité de visionner à son rythme et de revenir en arrière.

En théorie donc, au regard de ce qui s’est passé pour la télévision, les plates-formes devraient prolonger positivement la vie d’un film de cinéma au côté des séries. Mais les plates-formes créent une lame de fond qui est en train de bouleverser le paysage économique et les acteurs traditionnels de la télévision et du cinéma au plan internationalLes studios traditionnels se fondent aujourd’hui dans un paysage complexe et changent de mains. Il n’y a plus d’un côté le cinéma et de l’autre les plates-formes mais des gros acteurs qui deviennent à la fois plate-forme de diffusion, acquéreur de droits ou producteur en fonction des cas. Quels sont les impacts de cette nouvelle économie sur le film de cinéma ?

Certains experts pensent que la créativité et la liberté de création n’ont jamais été aussi importantes qu’aujourd’hui, car les plates-formes ont une base de clients tellement importante qu’il est plus facile de sortir du cadre classique pour produire des films exigeants avec une masse critique d’audience internationale suffisante. Par exemple, Netflix a financé des films d’auteur qui n’auraient pas été financés sans son intervention. Rappelons que personne ne voulait distribuer Roma d’Alfonso Cuarón, ce long-métrage austère en noir et blanc au budget de 15 millions de dollars qui a finalement été récompensé par 3 oscars en 2019 dont celui de meilleur réalisateur (10 nominations), un Lion d’Or à la Mostra de Venise et un Golden Globe du meilleur film en langue étrangère. Mais Netflix y a cru et a fait un pari stratégique.

Dans la même veine, on peut également citer Okja de Bong Joon-ho ou The Irishman de Scorsese. The Irishman, qui réunit un casting prestigieux d’acteurs (Joe Pesci, Robert De Niro, Al Pacino) est un exemple particulièrement emblématique de cette tendance. Netflix a déboursé 100 à 150 millions de dollars pour racheter les droits d’une œuvre qui était en cours de préparation depuis au moins 10 ans. Scorsese le reconnait lui-même : aucun autre studio n’a accepté de financer le projet. Netflix a donc réellement pris des risques. Résultat : The Irishman est un succès en ligne avec 13,2 millions de spectateurs en cinq jours aux États-Unis après son lancement. Certains experts montrent que des professionnels très divers (réalisateurs, membres du CNC, etc.) considèrent qu’il est plus facile aujourd’hui de trouver un financement pour des créations originales. Le monde du cinéma regarderait finalement avec ambivalence Netflix, Amazon ou Apple ; avec méfiance bien entendu mais aussi comme une aubaine en matière de prise de risques créatifs que les autres producteurs refusent aujourd’hui de prendre. Au risque d’être provocateur, on assisterait à une inversion : le cinéma d’auteur est l’apanage des plates-formes tandis que les blockbosters mondiaux sont les seuls à être distribués en salle.

Voir un film d’auteur sur un téléphone portable est-il vraiment souhaitable ? L’expérience de Scorsese avec The Irishman est édifiante. Fin novembre 2019, 40 millions de personnes ont déjà vu le film en streaming. Néanmoins, le film n’aurait été vu en moyenne qu’à 70 % Le médium change complètement le rapport au film. Dans une salle, on voit mal 70 % des spectateurs partir avant la fin. Sur les plates-formes, l’audience est beaucoup plus importante. Curiosité peut-être… Mais n’est-ce pas un nouveau rôle social pour ces plates-formes aux larges audiences… initier les non-initiés ? Notons également l’émergence de très nombreuses plateformes SVOD de niche (courts-métrages, cinéma de patrimoine, films politiques et sociaux, etc.) Pour le cinéma indépendant, on trouve par exemple la plate-forme anglaise Mubi ou la française UniversCiné. Portant un discours de diversité culturelle et de lutte contre l’uniformisation des contenus, ces plates-formes considèrent que les plates-formes comme Netflix représentent finalement plus une opportunité qu’une menace en acculturant les spectateurs…

Pour Jean‑Marc Quinton, ce rapport individuel au support, qu’il soit une tablette ou un smartphone, peut laisser entrevoir des risques pour l’avenir. Finalement, pourquoi mettre autant d’argent dans l’image, puisque les films seront visionnés sur petit écran ? Ce nouveau rapport ouvre aussi plusieurs débats. Laisser le cinéma d’auteur au seul streaming, n’est-ce pas le condamner d’avance ? Pour l’instant les grandes plates-formes sont dans un environnement tellement concurrentiel qu’elles jouent leur image en concourant pour les meilleures récompenses dans les festivals. Le film d’auteur est donc un vecteur d’image, pas d’audience. Mais pour combien de temps ? Et que peuvent devenir les producteurs et diffuseurs traditionnels de cinéma d’auteur face au nouveau pouvoir des plates-formes ?

Événement symbolique : le 22 janvier 2019, Netflix est devenu septième membre de la Motion Picture Association of America (MPAA) après les Studios Disney, Paramount, Sony, Universal, 20th Century Fox et Warner Bros. C’est la seule organisation à ne pas être « née » studio de cinéma. Néanmoins, est-ce que Netflix est complètement accepté dans le monde du cinéma ? La réponse est non. The Irishman avait 10 nominations aux Oscar 2020. Malgré des budgets de lobbying multipliés par 10 par rapport aux usages du monde du cinéma, le film n’a remporté aucune statuette.

Au festival de Cannes, depuis 2019, les films Netflix ne peuvent plus faire partie de la compétition, car ils ne sortent pas en salle. En cause, notre système de chronologie des médias qui aurait imposé à Netflix 36 mois pour pouvoir diffuser le film sur sa plate-forme. Cela n’empêche pas Netflix de racheter des films primés au festival. Le paradoxe, c’est que les films primés achetés par Netflix sont accessibles sur la plate-forme presque partout au monde sauf en France. Ce fut le cas, par exemple, d’Atlantique, de Mati Diop, grand prix du jury, et de J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin, grand prix de la Semaine de la Critique, deux films dont les droits ont été acquis par Netflix à la fin du festival de Cannes 2019.

Quand Le Monde titre le 30 novembre 2019, « The Irishman sur Netflix, symbole d’un cinéma mondial en péril » ou que Nathanaël Karmitz, le directeur général de MK2 qui est également producteur déclare « que les plates-formes se comportent comme des prédateurs en achetant un Roma par un réalisateur déjà oscarisé pour en faire une tête de gondole, tout en voulant s’affranchir des règles du système audiovisuel », cela montre le désarroi du monde du cinéma devant les mutations actuelles.

Culture et cinéma : une crise de création

Culture  et cinéma : une crise de création 

 

Prisonnier du non-risque imposé par l’industrie du divertissement, ravagé par la standardisation, le formatage, le goût moyen, le cinéma est devenu étranger à lui-même et à la vraie vie, accuse, dans une tribune au « Monde », le journaliste et écrivain Jean-Michel Djian.

 

Pas de firmes légendaires ni de films à jeter en pâture, encore moins de méchants patrons à vilipender. Mais juste un malaise à exprimer : le charme des salles obscures, travesties en complexes cinématographiques ou relookées pour attirer le chaland, n’opère plus. Il a fallu deux années de diète pour s’en apercevoir, des masques obligatoires, un peu de bon sens et une certaine dose de lucidité pour comprendre que le cinéma n’y respire plus.

Trop de pub, de technologies, de bornes interactives, de pop-corn, de halls glaçants, de contraintes sécuritaires pour qu’un bon film se sente chez lui au cinéma. Car dans un multiplexe, la fête est à peine commencée qu’elle s’achève : le spectateur sait déjà qu’il paiera deux fois. La première pour regarder de la publicité – jusqu’à vingt minutes –, la seconde pour y voir un film.

Dans les deux cas, il acquittera la bagatelle de 15 euros pour être l’otage d’une poignée de loups-garous du divertissement lui faisant croire qu’il va à la rencontre d’une œuvre. Le pire, c’est que la chose est possible. Mais à la condition que le client s’abonne, donne de sa personne et accepte de subir une triple peine : en sus de la pub, la fureur des rongeurs de confiseries et le diktat des bornes de délivrance de billets, évidemment muettes comme des carpes.

Pas de sourire, encore moins de conversation. La victime est même conviée à choisir le numéro du siège sur lequel elle passera ses nerfs si « l’œuvre » ne la convainc pas. Parlons plutôt de « productions », terme plus adéquat pour désigner ces drames ou comédies qui le plus souvent laissent le « client » sceptique. Il ne le criera pas sur les toits mais c’est un fait, le spectateur sort de la salle avec le sentiment de ne plus en avoir pour son argent.

Certes, les quelque 600 films en provenance du monde entier qui, chaque année, sont à l’affiche ne sont pas tous mauvais, non, loin de là, ils manquent simplement de piquant, de génie, d’une folie créatrice laissant penser que l’extase a sa place sur un grand écran. Normal, tout le monde et à tous les étages veut mettre son grain de sel dans le processus de création.

Culture: Netflix, l’aliénation de masse

 Culture:  Netflix, l’aliénation de masse

Dans son ouvrage incisif, Romain Blondeau évoque les raisons qui ont fait de l’entreprise américaine un géant du streaming. En France, selon lui, c’est grâce à la proximité idéologique du patron Reed Hastings et d’Emmanuel Macron que Netflix a pu s’imposer. ( papier du Monde)

 

. Lors de la récente cérémonie des Emmys, les trophées de la télévision américaine, il était de bon ton de brocarder Netflix. Ces derniers mois, la plate-forme de streaming fondée par Reed Hastings a perdu des abonnés, licencié des employés et restreint ses investissements dans la production. Le court pamphlet que Romain Blondeau, naguère journaliste, aujourd’hui producteur, adresse à la plate-forme – Netflix, l’aliénation en série – semble arriver un peu tard. Mais Netflix compte toujours plus de 200 millions d’abonnés dans le monde, dont une dizaine de millions en France, qui passent des siècles et des siècles à consommer ses contenus (on ne dit plus programmes), puisque c’est désormais ainsi – en additionnant les minutes passées devant les écrans par chaque consommateur (on ne dit plus spectateur) – qu’on comptabilise le succès ou l’échec.

Romain Blondeau retrace brièvement l’évolution de la société, dont la raison d’être était initialement d’irriguer les déserts cinématographiques américains en proposant aux spectateurs privés de salles la location de DVD qu’ils recevaient par la poste. En 2007, la firme propose une première version de son site de vidéo à la demande sur abonnement. Six ans plus tard, elle se lance dans la production de contenus originaux avec les séries Orange Is the New Black et House of Cards. En 2012, la firme a entrepris une campagne de développement international qui lui permet aujourd’hui d’être présente dans le monde entier, à l’exception de la Chine, de la Corée du Nord, de la Syrie et – depuis l’invasion de l’Ukraine – de la Russie.

L’argument central du texte de Blondeau tient à la mise en parallèle de l’emprise croissante de Netflix sur la création et la consommation de fictions en images (séries et longs-métrages) et le triomphe des thèses économiques défendues par Emmanuel Macron. Pour l’auteur, Reed Hastings et le président français sont des jumeaux idéologiques, « fans de la destruction créatrice ». Selon lui, c’est grâce à cette proximité que Netflix a pu déborder les défenses naturelles que lui opposait l’organisation du financement du cinéma et de l’audiovisuel français, réussissant même à en devenir le bénéficiaire.

Romain Blondeau ne veut rien entendre de la part des défenseurs des communautés virtuelles qui se créent autour des séries. Il n’accorde pas plus de crédit à l’implication de Netflix dans la vie publique américaine, attribuant aussi bien le colorblind casting (distribution des rôles oublieuse de l’appartenance ethnique des interprètes) de la série La Chronique des Bridgerton que la diffusion de 13th, documentaire militant d’Ava DuVernay, à des considérations mercantiles. Comme toutes les saintes colères, la sienne est parfois injuste. Il n’empêche : pour l’instant, les seules forces capables d’arrêter Netflix ne relèvent pas du sursaut de la politique culturelle que l’auteur appelle de ses vœux. Ce sont celles dont disposent ses concurrents, Disney, Warner Discovery, Apple ou Amazon.

Livres: de plus en plus internationaux

Livres: de plus en plus internationaux

Par François Lévêque, Professeur d’économie, Mines Paris dans the Conversation 

 

Qu’avez-vous lu cet été ? Je ne vous demande pas de citer un livre parmi les 100 millions de titres jamais publiés au monde, mais de préciser sa provenance. S’agit-il d’un livre numérique descendu du nuage ? Importé ou fabriqué en France s’il est imprimé ? En français langue originale ou traduit d’une langue étrangère ? Au moment même où la mondialisation marque le pas, le livre poursuit son internationalisation. Et c’est heureux ! Le Petit Prince a conquis le cœur de 200 millions de petits et de grands. « S’il vous plaît… dessine-moi un mouton ! » se murmure désormais dans plus de 300 langues.

La planète compte également près d’une centaine de traductions d’Harry Potter and the Philosopher’s Stone (Harry Potter à l’école des sorciers) ou, pour rester dans le registre des aventures initiatiques, d’O Alquimista (L’Alchimiste) du Brésilien Paulo Coelho. Le livre voyage par traduction plutôt qu’en conteneur. La traduction est l’équivalent pour les textes du coût de transport des marchandises.

Le livre traverse les frontières, mais pour en prendre l’exacte mesure il faut s’accorder sur sa définition. En 1964, l’Unesco le décrit ainsi : une publication imprimée, non périodique, offerte au public, et comptant au moins 49 pages, pages de couverture non comprises est-il précisé.

Difficile à adopter à l’ère du livre numérique téléchargeable. Remarquez que même sans cela, cette définition écartait déjà les courts recueils de poèmes aussi bien que le livre audio. La définition de la poste américaine ne fait pas mieux même si elle retient un seuil de 22 pages en ajoutant qu’elles doivent être composées principalement de texte et ne pas comporter de publicité autre que celle pour d’autres ouvrages. Le type de texte dont il s’agit n’est naturellement pas spécifié. À propos, rappelons d’emblée qu’il ne faut pas confondre livre et littérature. En France, par exemple, cette catégorie éditoriale représente moins du quart des ventes.

Pour inclure sa version numérique, certains ont proposé de définir le livre par sa composition : un titre, une couverture, des pages numérotées, des chapitres, etc. ; ou, de façon plus savante, par sa double nature d’objet matériel et de discours.

D’autres ont mis l’accent sur la lecture que le livre réclame par opposition aux textes courts que nous parcourons chaque jour sur nos téléphones et tablettes – souvent d’ailleurs en regrettant d’y consacrer trop de temps. Une lecture longue dans tous les cas, immersive et absorbante pour certains livres comme les romans ou les bandes dessinées, approfondie lorsqu’il s’agit d’acquérir de nouvelles connaissances ou d’enrichir sa pensée ou son vocabulaire. Le support du livre, écran ou papier, n’est plus alors distinctif. À noter tout de même que les recherches sur la lecture tendent à montrer une infériorité du numérique en termes de compréhension des textes longs…

Ces difficultés de définition n’aident pas le recueil et l’agrégation de données sur le livre. De plus, dans de nombreux pays, les statistiques professionnelles et nationales sont lacunaires. Difficile d’avancer des chiffres exacts qui valent pour la planète. Donnons simplement trois ordres de grandeur. Nombre d’ouvrages parus : autour de 100 millions. Il est issu d’un comptage par Google qui aboutit précisément à 129 864 880. Nombre de nouveaux titres publiés par an : de l’ordre d’un million ; une compilation de données nationales par Wikipedia conclut à un total de 2,2 millions, mais ce chiffre comprend les rééditions. Montant des ventes annuelles de livres : environ 100 milliards de dollars, soit plus que la musique ou le jeu vidéo. Impressionnant, non ?

Comme pour n’importe quelle marchandise, les douanes veillent à comptabiliser les entrées et sorties du territoire du livre physique, mais allez savoir pourquoi elles distinguent les atlas et les encyclopédies des livres proprement dits. La France exporte un peu moins d’ouvrages qu’elle n’en importe.

Attention toutefois, les sorties du territoire sont des livres destinés à l’étranger alors que les entrées sont des livres fabriqués à l’extérieur pour des raisons économiques, par exemple en provenance de Belgique et d’Italie, plus rarement d’Asie. Le livre, bon marché pour son poids, ne repose pas sur de longues chaînes d’approvisionnement. La Chine n’est pas devenue l’imprimerie du monde ! Le Royaume-Uni est le plus grand exportateur, juste devant les États-Unis. Ces deux pays bénéficient du vaste marché de la population anglophone de naissance (près d’un demi-milliard d’hommes et de femmes) ou formée à l’anglais par les études.

Dématérialisé, le livre électronique traverse les frontières à l’insu des douaniers. La numérisation facilite l’accès aux ouvrages venus d’ailleurs, mais elle empêche d’en connaître les flux pour qui veut rendre compte plus précisément du commerce international.

 

 

Heureusement, l’échange d’ouvrages prend également une autre forme, plus importante sans doute, mieux comptabilisée en tout cas : le passage des frontières par la traduction. La traduction est en effet une autre façon de faire voyager et circuler le livre. Sans elle qui aurait lu en France L’amica geniale (L’amie prodigieuse) d’Elena Ferrante ou Man som hatar kvinnor (Millénium Tome 1) de Stieg Larsson ? Sans elle, la bande dessinée japonaise n’aurait pas quitté son archipel.

La mondialisation du livre par la traduction a pu être finement pistée pendant quelques décennies de l’entre-deux siècles grâce à l’Index translationum. Il recense près de 2 millions d’ouvrages traduits, de et vers, à peu près toutes les langues écrites de la planète.

On sait ainsi que le nombre total annuel de nouvelles traductions a plus que doublé entre 1979 et 2007. L’évolution depuis n’est pas connue. La mise à jour de ce catalogue universel des traductions par l’Unesco a pris fin faute de moyens pour faire face à l’ampleur croissante de la tâche. C’est bien dommage, notamment car l’Index translationum a permis d’observer un début de retournement : à la fin des années 1990, la part des traductions de l’anglais, largement dominante, cesse de progresser ; elle diminue même légèrement.

Cette tendance à une plus grande place des langues originales traduites autres que l’anglais s’est-elle poursuivie depuis ? Oui, si l’on se fie aux données disponibles de quelques pays d’Europe. Pour l’Allemagne, la France ou encore l’Espagne, la part des traductions à partir de l’anglais régresse.

Phénomène remarquable : une partie de cette baisse s’explique par la croissance des traductions de textes de langues originales peu courantes. C’est le cas du japonais et du suédois. Un mouvement aidé bien sûr par l’essor des mangas et des polars scandinaves.

Un autre indice est fourni par la place de l’anglais d’origine parmi les livres traduits à succès. Elle décline aussi légèrement en tendance. Oui, mais ne partait-elle pas de très haut ? Eh bien non, les traductions de l’anglais représentent seulement le tiers des 20 best-sellers traduits répertoriés depuis 2006 dans les listes d’une petite dizaine de pays occidentaux. Comparaison instructive, la proportion des traductions de l’anglais dans tous les livres traduits, qu’ils aient connu un grand succès commercial ou non, est de l’ordre de deux tiers. Contrairement à des craintes parfois exprimées, la mondialisation n’est pas vouée à une marginalisation inexorable des livres de langue originale de l’Europe continentale.

L’internationalisation du livre par la traduction s’arrête néanmoins à la porte des États-Unis. Seuls 3 % des titres publiés outre-Atlantique proviennent de traductions, soit dix fois moins que pour la France et près de vingt fois moins que pour l’Italie.

Il est vrai qu’il est plus facile pour un éditeur français ou italien de lire un ouvrage en anglais avant de se décider à le publier que pour un éditeur américain d’aller au-delà du titre français ou italien. Le progrès de la traduction par les machines pourrait changer la donne. Il pourrait entraîner une formidable baisse de son coût et faciliter encore les échanges du livre. Les algorithmes ne remplaceront sans doute jamais totalement les cerveaux des traducteurs. C’est une évidence pour la littérature, moins cependant pour les textes de bandes dessinées ou de récits de vedettes.

Dans tous les cas les machines, par leur utilisation partielle et complémentaire, promettent des gains de productivité. Pour un texte simple comme celui que vous venez de lire par exemple, un passage initial par Google Translate réduit d’environ un tiers le temps nécessaire à sa traduction vers l’anglais.

Cet été, j’ai lu Lonesome Dove un roman western de Larry McMurtry en version papier, imprimé en France et traduit de l’américain par Laura Derajinsky. Je vous le recommande chaudement si vous avez envie de mener un troupeau dans la peau d’un Texas Ranger du Mexique au Montana et d’échapper aux Indiens sans quitter votre transat.

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Par François Lévêque, Professeur d’économie, Mines Paris

François Lévêque a publié chez Odile Jacob « Les entreprises hyperpuissantes. Géants et Titans, la fin du modèle global ? ». Son ouvrage a reçu le prix lycéen du livre d’économie.

Les dégâts du streaming sur la création musicale

Les dégâts du streaming sur la création musicale

 

L’économiste Paul Muller souligne, dans une tribune au « Monde », les conséquences néfastes du streaming sur l’état du secteur de la musique enregistrée et de la création musicale, au-delà la récente affaire Rogan.

 

Tribune.

La plate-forme de streaming audio Spotify a récemment défrayé la chronique à la suite d’une lettre ouverte publiée par le chanteur Neil Young. Celui-ci lui reprochait de mettre en avant les podcasts de Joe Rogan, dont le contenu contribue, selon Young, à diffuser de la désinformation au sujet de la pandémie de Covid-19. Au final, Spotify a préféré supprimer l’œuvre de Young plutôt que de sacrifier son podcasteur star. La carrière et l’importance artistique de son œuvre ne semblent donc avoir pesé que bien peu…

Plus globalement, cet épisode récent montre bien la position paradoxale qu’est celle du secteur de la musique enregistrée à l’ère des plates-formes de streaming numérique. Côté pile, l’industrie de la musique s’est rarement portée aussi bien. Le chiffre d’affaires mondial généré avoisinait les 21,6 milliards de dollars en 2020, en bonne voie pour rattraper les niveaux connus à la fin des années 1990. Le streaming y contribue à hauteur de 62 %.

 

Côté face, malgré son omniprésence dans notre vie quotidienne, de la conception d’habillages sonores dans les magasins ou pour des marques (le fameux jingle de la SNCF) aux jeux vidéo, la musique est parvenue à un stade avancé de commodification, ravalée au rang de simple ressource productive et non plus vue comme le résultat d’une démarche artistique.

Pour comprendre cela, il faut se rappeler le fait que, auparavant, la musique était au cœur du modèle économique des artistes, au travers de la perception de droits issus de la commercialisation de leur musique ou des revenus de tournées. A présent, au même titre que la présence sur les réseaux sociaux, la production musicale n’est plus qu’un élément de visibilité permettant de valoriser économiquement l’artiste au travers de la commercialisation de son image publique à des annonceurs.

Le modèle économique des plates-formes de streaming a joué un rôle non négligeable dans cette évolution. Son principe est simple : les revenus du streaming, issus de la publicité ou des abonnements sont rassemblés dans une sorte de cagnotte qui sera ensuite redistribuée aux ayants droit (en général, les auteurs, compositeurs, interprètes).

 

Le mode de répartition privilégié est au prorata du nombre de morceaux écoutés (rémunération market centric). Les revenus générés restent très faibles en comparaison de la vente de musique sur support physique ou à télécharger. Certains artistes estiment les revenus par écoute sur Spotify à 0,00317 dollar, voire moins.

La décoration des Arts et Lettres pour Jennifer !

La décoration des Arts et Lettres pour Jennifer !

La chanteuse Jenifer a reçu ce lundi les insignes de chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres, remis par la ministre de la Culture Roselyne Bachelot.  Sans commentaire ! Ou presque. Pourquoi pas aussi à Carla Bruni qui a dû vendre 50 disques dans le monde entier ou à son ancien époux Sarkozy à la production littéraire époustouflante si l’on s’en tient effectivement au  nombre de livres vendus. Un nouveau Proust. Pour Bachelot, on attendra un peu avant de la faire entrer au Panthéon ou de la reconvertir comme animatrice sur la chaîne télé  comédie plus .

 

Ecologie politique : Entreprise de déconstruction de la civilisation occidentale

Ecologie politique : Entreprise de déconstruction de la civilisation occidentale

 

Selon Bérénice Levet, derrière la nécessité de préserver notre environnement, l’écologie politique s’est lancée dans une vaste entreprise de déconstruction de notre civilisation. ( dans le Figaro)

 Dans son nouvel essai, L’Écologie ou l’Ivresse de la table rase, la philosophe dénonce l’écologie telle qu’elle s’incarne aujourd’hui chez les Verts et dans les mouvements associatifs ou militants.

Dans votre dernier livre, vous dénoncez une victoire à la Pyrrhus des écologistes. Qu’entendez-vous par là?

Victoire à la Pyrrhus, en effet. Victoire parce que l’écologie a gagné la bataille des idées et des esprits. La maison Terre brûle et nous ne regardons plus jamais ailleurs. Films, expositions, festivals, la réquisition est perpétuelle. Vous empruntez le réseau ferroviaire et au terme de votre trajet l’agent de la SNCF se mue en grand prêtre assermenté: «La planète vous remercie d’avoir pris le train.» Mais à la Pyrrhus, c’est-à-dire défaite, parce que, préemptée par la gauche, l’écologieest, avec le féminisme et l’antiracisme décolonial ou indigéniste, de ces grandes machines à fabriquer des dogmes, des slogans, des hashtags, ces hallalis numériques du XXIe siècle, des imprécations propres à terroriser, une langue exsangue, sans couleur, sans saveur, sans parfum, un récit accusatoire et une jeunesse instituée en tribunal de l’inquisition, ânonnant catéchisme vert et sentences comminatoires…

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