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Politique de défense : une armée complète mais minuscule

Politique de défense : une armée complète mais minuscule
L’ancien sénateur et vice-président de la commission des affaires étrangères, défense et forces armées, Jacques Gautier, plaide pour un renforcement et une accélération du rééquipement de l’armée de terre. Les dernières interventions de l’armée français en opérations extérieures et la guerre en Ukraine confirment que pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Par l’ancien sénateur dans « La Tribune ».

Le groupe « Mars » ou encore le spécialiste Alain Bauer dénoncent le caractère miniature de l’armée française. L’exemple des troupes engagées dans le Conflit ukrainien ou au Proche-Orient devrait démontrer l’extrême faiblesse du dispositif de défense français . La France peut à peine aligner 100 000 militaires dans l’infanterie finalement indispensable en dernier ressort. Dans le même temps la Russie mobilise autour de 1 million de personnes et il y a déjà eu six à 800 000 morts ou blessés russes . Par pure démagogie en outre personne ne voit nécessité un jour ou l’autre de rétablir le service militaire tant pour des questions de défense et des questions sociétales. La France n’a même pas été capable de maintenir ses positions au Sahel ! (NDLR)

Après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’empire soviétique, les Européens ont voulu profiter des « dividendes de la paix » et ont réduit considérablement leurs budgets de défense, limitant leurs armées à l’état embryonnaire. Le retour de la guerre de haute intensité en Europe, la multiplication des conflits et des crises nous obligent à réinvestir fortement dans notre outil militaire. En effet, en dépit des efforts financiers engagés depuis quelques années, les leçons de la guerre en Ukraine montrent que, malgré l’engagement de nos soldats et la technologie de nos équipements, la France serait dans l’incapacité de tenir plus d’une à deux semaines dans ce type de conflit.

Les estimations sont effroyables: les pertes cumulées des armées russes et ukrainiennes dépasseraient les 300.000 soldats tués et plus d’un million de blessés. L’attrition des équipements est impressionnante : plus de 4.000 chars d’assaut hors de combat, autant pour les véhicules blindés et des millions d’obus tirés, des milliers de missiles, roquettes et drones utilisés. Ces chiffres monstrueux, qui concernent très majoritairement les deux armées de terre, nous obligent, dans un temps très court, à faire un effort inégalé pour renforcer et durcir notre défense.
Notre armée de terre ne dispose que de 110.000 militaires et 26.000 réservistes, nos chars, en petit nombre, sont anciens, comme le reste de nos matériels. Les nouveaux équipements, notamment le programme Scorpion, sont en cours de livraison jusqu’en 2035. Ils ont été conçus il y a une douzaine d’années et correspondent surtout aux guerres asymétriques. De plus ces matériels n’existent qu’en nombre très insuffisant et nos missiles, roquettes, drones, obus correspondent à quelques jours d’une guerre de haute intensité.

L’armée de l’air et de l’espace, comme notre Marine nationale ne sont pas mieux loties mais, nos dernières interventions en OPEX et la guerre en Ukraine confirment que, pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Face à ces chiffres, le budget d’investissement qui lui est consacré se limite à 20% du budget total… Cherchez l’erreur !!!!

Les pays européens ne sont pas mieux protégés et beaucoup viennent de lancer des plans ambitieux d’achats et de constructions d’équipements militaires. Mais depuis plus de 30 ans, ils privilégient les équipements américains pour bénéficier de I’« Assurance Vie » de l’OTAN, donc de l’oncle Sam. Au moment où les États-Unis, avec le retour du président Trump, envisagent un certain isolationnisme, ils vont faire payer plus à nos voisins pour leur défense.

La France, compte tenu de son passé et de ses spécificités (dont la dissuasion) a une place particulière et s’appuie sur des industriels de défense compétents et couvrant presque tout le spectre de nos besoins. Quel que soit le nouveau gouvernement et la situation politique, notre pays doit préparer, de toute urgence, une actualisation de sa loi de programmation militaire. Il faut refuser les coupes budgétaires et les reports de crédits que prépare Bercy afin de renforcer les effectifs, de lancer la conception et la production d’équipements correspondants aux guerres de haute intensité.

Il faut s’attaquer aux lourdeurs de la technostructure qui invente au niveau européen et français, des dizaines de normes et caractérisations (y compris environnementales) qui s’appliquent à des équipements de guerre… Le poids de l’administration et de la réglementation ralentissent la conception et la production des matériels (souvent plus d’une dizaine d’années), aggravent les coûts en limitant le nombre et débouchent parfois sur les équipements dépassés lors de leurs admissions opérationnelles !!!

La France doit arrêter de donner des leçons au reste du monde et prendre conscience de ses capacités financières limitées. Elle doit rechercher des partenaires, qui veulent et qui peuvent, travailler avec elle, parfois en coproduction. Cela, si nécessaire, en dehors de l’Europe, avec des pays qui sont nos clients dans le secteur militaire (Inde, Indonésie, EAU, Qatar, Égypte, Arabie saoudite…). Le ministre Sébastien Lecornu, en 2023, n’a pas exclu d’impliquer des pays membres du Club Rafale, pour développer le standard F5 de cet avion omnirole.

Cette démarche et ces partenariats sont à développer, y compris pour les équipements terrestres. L’État doit, bien entendu, réduire, tout à la fois son déficit et son train de vie. Le nouvel exécutif devra faire des choix difficiles sans pénaliser les secteurs essentiels pour nos concitoyens, y compris notre défense nationale.

Défense France : une armée complète mais minuscule

Défense France : une armée complète mais minuscule
L’ancien sénateur et vice-président de la commission des affaires étrangères, défense et forces armées, Jacques Gautier, plaide pour un renforcement et une accélération du rééquipement de l’armée de terre. Les dernières interventions de l’armée français en opérations extérieures et la guerre en Ukraine confirment que pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Par l’ancien sénateur dans « La Tribune ».

 Le groupe « Mars » ou encore le spécialiste Alain Bauer  dénoncent le caractère miniature de l’armée française. L’exemple des troupes engagées dans le Conflit ukrainien ou au Proche-Orient devrait démontrer l’extrême faiblesse du dispositif de défense français . La France peut à peine aligner 100 000 militaires dans l’infanterie  finalement indispensable en dernier ressort. Dans le même temps la Russie mobilise autour de 1 million de personnes et il y a déjà eu six à 800 000 morts ou blessés russes . Par pure démagogie en outre personne ne voit  nécessité un jour ou l’autre de rétablir le service militaire tant pour des questions de défense et des questions sociétales. La France n’a même pas été capable de maintenir ses positions au Sahel ! (NDLR)

Après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’empire soviétique, les Européens ont voulu profiter des « dividendes de la paix » et ont réduit considérablement leurs budgets de défense, limitant leurs armées à l’état embryonnaire. Le retour de la guerre de haute intensité en Europe, la multiplication des conflits et des crises nous obligent à réinvestir fortement dans notre outil militaire. En effet, en dépit des efforts financiers engagés depuis quelques années, les leçons de la guerre en Ukraine montrent que, malgré l’engagement de nos soldats et la technologie de nos équipements, la France serait dans l’incapacité de tenir plus d’une à deux semaines dans ce type de conflit.

Les estimations sont effroyables: les pertes cumulées des armées russes et ukrainiennes dépasseraient les 300.000 soldats tués et plus d’un million de blessés. L’attrition des équipements est impressionnante : plus de 4.000 chars d’assaut hors de combat, autant pour les véhicules blindés et des millions d’obus tirés, des milliers de missiles, roquettes et drones utilisés. Ces chiffres monstrueux, qui concernent très majoritairement les deux armées de terre, nous obligent, dans un temps très court, à faire un effort inégalé pour renforcer et durcir notre défense.
Notre armée de terre ne dispose que de 110.000 militaires et 26.000 réservistes, nos chars, en petit nombre, sont anciens, comme le reste de nos matériels. Les nouveaux équipements, notamment le programme Scorpion, sont en cours de livraison jusqu’en 2035. Ils ont été conçus il y a une douzaine d’années et correspondent surtout aux guerres asymétriques. De plus ces matériels n’existent qu’en nombre très insuffisant et nos missiles, roquettes, drones, obus correspondent à quelques jours d’une guerre de haute intensité.

L’armée de l’air et de l’espace, comme notre Marine nationale ne sont pas mieux loties mais, nos dernières interventions en OPEX et la guerre en Ukraine confirment que, pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Face à ces chiffres, le budget d’investissement qui lui est consacré se limite à 20% du budget total… Cherchez l’erreur !!!!

Les pays européens ne sont pas mieux protégés et beaucoup viennent de lancer des plans ambitieux d’achats et de constructions d’équipements militaires. Mais depuis plus de 30 ans, ils privilégient les équipements américains pour bénéficier de I’« Assurance Vie » de l’OTAN, donc de l’oncle Sam. Au moment où les États-Unis, avec le retour du président Trump, envisagent un certain isolationnisme, ils vont faire payer plus à nos voisins pour leur défense.

La France, compte tenu de son passé et de ses spécificités (dont la dissuasion) a une place particulière et s’appuie sur des industriels de défense compétents et couvrant presque tout le spectre de nos besoins. Quel que soit le nouveau gouvernement et la situation politique, notre pays doit préparer, de toute urgence, une actualisation de sa loi de programmation militaire. Il faut refuser les coupes budgétaires et les reports de crédits que prépare Bercy afin de renforcer les effectifs, de lancer la conception et la production d’équipements correspondants aux guerres de haute intensité.

Il faut s’attaquer aux lourdeurs de la technostructure qui invente au niveau européen et français, des dizaines de normes et caractérisations (y compris environnementales) qui s’appliquent à des équipements de guerre… Le poids de l’administration et de la réglementation ralentissent la conception et la production des matériels (souvent plus d’une dizaine d’années), aggravent les coûts en limitant le nombre et débouchent parfois sur les équipements dépassés lors de leurs admissions opérationnelles !!!

La France doit arrêter de donner des leçons au reste du monde et prendre conscience de ses capacités financières limitées. Elle doit rechercher des partenaires, qui veulent et qui peuvent, travailler avec elle, parfois en coproduction. Cela, si nécessaire, en dehors de l’Europe, avec des pays qui sont nos clients dans le secteur militaire (Inde, Indonésie, EAU, Qatar, Égypte, Arabie saoudite…). Le ministre Sébastien Lecornu, en 2023, n’a pas exclu d’impliquer des pays membres du Club Rafale, pour développer le standard F5 de cet avion omnirole.

Cette démarche et ces partenariats sont à développer, y compris pour les équipements terrestres. L’État doit, bien entendu, réduire, tout à la fois son déficit et son train de vie. Le nouvel exécutif devra faire des choix difficiles sans pénaliser les secteurs essentiels pour nos concitoyens, y compris notre défense nationale.

Défense France : une armée « bonzaï »

 

Défense France : une armée « bonzaï »
L’ancien sénateur et vice-président de la commission des affaires étrangères, défense et forces armées, Jacques Gautier, plaide pour un renforcement et une accélération du rééquipement de l’armée de terre. Les dernières interventions de l’armée français en opérations extérieures et la guerre en Ukraine confirment que pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Par l’ancien sénateur dans « La Tribune ».

 

Après la chute du mur de Berlin et l’effondrement de l’empire soviétique, les Européens ont voulu profiter des « dividendes de la paix » et ont réduit considérablement leurs budgets de défense, limitant leurs armées à l’état embryonnaire. Le retour de la guerre de haute intensité en Europe, la multiplication des conflits et des crises nous obligent à réinvestir fortement dans notre outil militaire. En effet, en dépit des efforts financiers engagés depuis quelques années, les leçons de la guerre en Ukraine montrent que, malgré l’engagement de nos soldats et la technologie de nos équipements, la France serait dans l’incapacité de tenir plus d’une à deux semaines dans ce type de conflit.

Les estimations sont effroyables: les pertes cumulées des armées russes et ukrainiennes dépasseraient les 300.000 soldats tués et plus d’un million de blessés. L’attrition des équipements est impressionnante : plus de 4.000 chars d’assaut hors de combat, autant pour les véhicules blindés et des millions d’obus tirés, des milliers de missiles, roquettes et drones utilisés. Ces chiffres monstrueux, qui concernent très majoritairement les deux armées de terre, nous obligent, dans un temps très court, à faire un effort inégalé pour renforcer et durcir notre défense.
Notre armée de terre ne dispose que de 110.000 militaires et 26.000 réservistes, nos chars, en petit nombre, sont anciens, comme le reste de nos matériels. Les nouveaux équipements, notamment le programme Scorpion, sont en cours de livraison jusqu’en 2035. Ils ont été conçus il y a une douzaine d’années et correspondent surtout aux guerres asymétriques. De plus ces matériels n’existent qu’en nombre très insuffisant et nos missiles, roquettes, drones, obus correspondent à quelques jours d’une guerre de haute intensité.

L’armée de l’air et de l’espace, comme notre Marine nationale ne sont pas mieux loties mais, nos dernières interventions en OPEX et la guerre en Ukraine confirment que, pour la grande majorité des combattants, les pertes humaines et les destructions de matériels militaires concernent à plus de 80% les armées de Terre. Face à ces chiffres, le budget d’investissement qui lui est consacré se limite à 20% du budget total… Cherchez l’erreur !!!!

Les pays européens ne sont pas mieux protégés et beaucoup viennent de lancer des plans ambitieux d’achats et de constructions d’équipements militaires. Mais depuis plus de 30 ans, ils privilégient les équipements américains pour bénéficier de I’« Assurance Vie » de l’OTAN, donc de l’oncle Sam. Au moment où les États-Unis, avec le retour du président Trump, envisagent un certain isolationnisme, ils vont faire payer plus à nos voisins pour leur défense.

La France, compte tenu de son passé et de ses spécificités (dont la dissuasion) a une place particulière et s’appuie sur des industriels de défense compétents et couvrant presque tout le spectre de nos besoins. Quel que soit le nouveau gouvernement et la situation politique, notre pays doit préparer, de toute urgence, une actualisation de sa loi de programmation militaire. Il faut refuser les coupes budgétaires et les reports de crédits que prépare Bercy afin de renforcer les effectifs, de lancer la conception et la production d’équipements correspondants aux guerres de haute intensité.

Il faut s’attaquer aux lourdeurs de la technostructure qui invente au niveau européen et français, des dizaines de normes et caractérisations (y compris environnementales) qui s’appliquent à des équipements de guerre… Le poids de l’administration et de la réglementation ralentissent la conception et la production des matériels (souvent plus d’une dizaine d’années), aggravent les coûts en limitant le nombre et débouchent parfois sur les équipements dépassés lors de leurs admissions opérationnelles !!!

La France doit arrêter de donner des leçons au reste du monde et prendre conscience de ses capacités financières limitées. Elle doit rechercher des partenaires, qui veulent et qui peuvent, travailler avec elle, parfois en coproduction. Cela, si nécessaire, en dehors de l’Europe, avec des pays qui sont nos clients dans le secteur militaire (Inde, Indonésie, EAU, Qatar, Égypte, Arabie saoudite…). Le ministre Sébastien Lecornu, en 2023, n’a pas exclu d’impliquer des pays membres du Club Rafale, pour développer le standard F5 de cet avion omnirole.

Cette démarche et ces partenariats sont à développer, y compris pour les équipements terrestres. L’État doit, bien entendu, réduire, tout à la fois son déficit et son train de vie. Le nouvel exécutif devra faire des choix difficiles sans pénaliser les secteurs essentiels pour nos concitoyens, y compris notre défense nationale.

Europe: ou comment financer 800 milliards d’investissement

Europe: ou comment financer 800 milliards d’investissement

Mario Draghi, ancien président de la Banque centrale européenne, propose un remède qui reste dans la théorie de l’économie orthodoxe. Il préconise des investissements à hauteur de 800 milliards d’euros par an, dont une large partie serait de l’argent public. Dans un contexte d’insuffisance budgétaire, n’y a-t-il pas d’autres solutions exemptent d’endettements excessifs ? Par Gabriel Gaspard, Chef d’entreprise à la retraite, spécialiste en économie financière. ( dans la Tribune)

Dans un rapport publié le 09 septembre 2024, l’ancien président de la Banque centrale européenne préconise un plan d’investissement massif de 800 milliards d’euros par an dans les secteurs des nouvelles technologies, de la transition environnementale et de la défense. Ce plan devrait relancer massivement la croissance. Mais l’Europe a besoin de beaucoup d’argent pour reprendre sa place dans le monde face aux États-Unis et à la Chine. À la réunion de la Communauté politique européenne, du 7 novembre 2024 à Budapest, les vingt-sept membres ont validé le diagnostic de M. Draghi sur la perte de compétitivité… La question du financement reste entière…

Dans la vie politique occidentale, l’économie occupe une place centrale. Les dernières élections aux États-Unis, en Europe et en France ont montré que les défaites des partis en place est due principalement à l’économie du quotidien : coût de la vie et la gestion de l’inflation par les Banques centrales ; les réformes structurelles improductives et qui freinent la croissance.

Depuis le traité de Maastricht et le Traité de Lisbonne modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne, c’est la théorie orthodoxe (libérale) qui exerce le plus d’influence sur les décisions des membres de l’Union européenne. Le traité établissant la Communauté européenne, qui a été rebaptisé TFUE réaffirme deux objectifs importants pour la compréhension de la solution proposée par M. Draghi et celle décrite dans cette tribune : le Pacte de stabilité et de croissance (PSC) et l’indépendance de la Banque centrale européenne BCE.

Nous pouvons lire à l’article 126 de ce traité :

« les États membres évitent les déficits publics excessifs … la Commission surveille l’évolution de la situation budgétaire et du montant de la dette publique… le Pacte de stabilité et de croissance est un instrument important pour la réalisation de ces objectifs ».

 Le PSC impose aux États de la zone euro d’avoir à terme des budgets proches de l’équilibre ou excédentaires. Le rétablissement des comptes publics passe par la maîtrise de la dépense publique qui repose principalement sur des réformes structurelles. Le TFUE entend par réformes structurelles ou réformes néolibérales :

« la libéralisation du marché des biens et services (ce qui implique notamment ouverture à la concurrence et privatisations totales ou partielles), flexibilisation du marché du travail (visant à renforcer les incitations au travail par des changements de législation, sur le salaire minimum, le temps de travail, etc.) et, enfin, réduction globale du poids des dépenses publiques, en particulier sociales (réduction de la supposée « générosité » des systèmes publics de retraite, de santé, etc.) et de la « pression fiscale » sur les entreprises et les « créateurs de richesse ».

Nous pouvons lire à l’article 123 de ce traité :

« Il est interdit à la Banque centrale européenne… d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres… le paragraphe 1 ne s’applique pas aux établissements publics de crédit… ».

Pour faire face aux difficultés financières, les pays de l’UE pourront s’endetter uniquement auprès des banques commerciales.

Les résultats de cette politique économique ne sont pas réellement un succès : il y a 16 ans, la production de richesse européenne était de 10,36% supérieure à celle des États-Unis alors qu’en 2023 elle était de 48,77% inférieure. Le PIB de l’Union européenne a augmenté de 2008 à 2023 de 12,58% (mesuré en dollar courant) soit en moyenne 0,79% par an, contre 84,83 % pour les États-Unis et 287,58% pour la Chine (source Banque mondiale).

Quant au poids de la dette publique, la moyenne de la zone euro en 2023 était de 88,6% du PIB et la moyenne de l’UE 81,7% du PIB. L’Europe n’a pas d’argent, les caisses sont vides et les pays membres sont fortement endettés : la dette publique de la France au sens du traité de Maastricht représentait 110,6 % du PIB et se situait à la troisième place de la zone euro, derrière celles de la Grèce (161,9 % du PIB) et de l’Italie (137,3 % du PIB), etc.

M. Draghi propose d’unifier les marchés des capitaux, d’harmoniser la réglementation bancaire, de réviser la taxonomie de l’UE pour les activités durables (qui sert à guider et mobiliser les investissements privés) et de faciliter les instruments de dette en communs. En réalité il y a sept travaux interminables qui compromettent le développement européen :

 

Quant aux instruments de dette en commun, elle divise plusieurs pays européens. L’Allemagne n’est plus très favorable à une nouvelle expérience. Afin de faire face aux conséquences économiques de l’épidémie de la COVID-19, en juillet 2020, l’Union européenne a mis sur pied un plan de relance de 806,9 milliards d’euros, 750 milliards d’euros au prix de 2018 (NextGenerationEU). Ce plan octroie des subventions (338 milliards d’euros) et des prêts pour soutenir les réformes et les investissements (385 milliards d’euros) dans les États membres de l’UE. Ils ont décidé de s’endetter en commun et de rembourser cet emprunt de 2028 à 2058 (30 ans).

Pour aider l’Ukraine, les chefs d’État et de gouvernement de l’UE ont approuvé à l’unanimité une aide de 50 milliards d’euros. Cette aide passera dans le budget pluriannuel européen 2021-2027. La seule réponse du commissaire européen au Marché intérieur pour stimuler la production de l’industrie de la défense de l’UE est la collaboration entre les États membres. M. Draghi propose-t-il de nouveaux emprunts à rembourser peut-être à partir de 2058 ?

Le rapport de M. Draghi se repose en grande partie sur les marchés financiers

Aux côtés de la Banque européenne d’investissement BEI, ce rapport souhaite renforcer le rôle des Banques publiques et nationales de développement … Les actionnaires de la BEI sont les 27 États membres de l’Union européenne, elle a pour mission de favoriser la réalisation des objectifs économiques de l’Union européenne en accordant des prêts à long terme pour financer des investissements viables.

Pour les Banques publiques de développement BPD qui sont autonomes dans leur gestion, elles assurent la déclinaison financière du mandat public qui leur est confié. Elles doivent déployer des instruments financiers générateurs de revenus avec un mandat adossé sur des politiques publiques des États qui possèdent tout ou partie de leur capital. Dans un contexte de déficits budgétaires, les États actionnaires ne peuvent plus augmenter les capitaux de ces institutions. Ces Banques peuvent seulement emprunter sur les marchés financiers pour l’investir dans les entreprises des secteurs stratégiques. En 2023, la BEI a signé uniquement de nouveaux financements pour 87,85 milliards d’euros, soit 10% de la somme énoncée pour le plan Draghi.

Mais comment financer la croissance sans recourir aux banques privées et à l’endettement ?

  • Harmoniser la fiscalité des entreprises

À chaque fois qu’il y a une dérive des comptes publics, plusieurs économistes proposent de taxer les superprofits ou les superdividendes. Pour Thomas Piketty, il suffirait de forcer les plus riches à céder 10% de leurs patrimoines d’une manière exceptionnelle. Cette somme servirait à rembourser la dette publique. À titre d’exemple, à la sortie de la Deuxième Guerre mondiale, l’Allemagne a mis en place un prélèvement sur les fortunes immobilières pour apurer son endettement … Dans un monde de fuite des capitaux et de subventions telles que la loi sur la réduction de l’inflation IRA (États-Unis) et la stratégie « Made in China 2025« , mieux vaut revoir le code du capital et remplacer les aides par un renforcement des quasi-fonds propres.

Dans son livre Le Code du capital - Comment la loi crée la richesse capitaliste et les inégalités Katharina Pistor soutient que le :

« droit conçu par et dans l’intérêt de riches acteurs privés induit à la fois l’accumulation de richesse, l’envol des inégalités et les crises à répétition« .

Mais si la loi qui donne le pouvoir au capital a été réformée dans l’intérêt des milliardaires depuis plusieurs années, « il suffit » de rechanger cette loi pour répartir la richesse dans l’intérêt commun et permettre à l’État de disposer de plus de recettes.

Seuls les pays les moins endettés peuvent se permettre de financer leurs entreprises ce qui pose un problème de concurrence. En Allemagne le financement des entreprises prend la forme de subventions non remboursables, de prêts à faible taux d’intérêt, de garanties, d’investissements ou d’incitations fiscales. En France, aides à l’embauche, aides à la création d’entreprise, prêts garantis… près de 2 000 dispositifs publics bénéficient aux entreprises. L’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) interdit en principe les aides publiques aux entreprises (appelées « aides d’État »), au motif qu’elles sont susceptibles de fausser la libre concurrence et donc le bon fonctionnement du marché intérieur…

La BEI devrait généraliser les financements directs sous forme de quasi-fonds propres pour financer la croissance des entreprises innovantes. La BCE devrait remettre en place un nouveau TLTRO (opérations ciblées de refinancement à long terme à des taux favorables) spécialement pour la BEI, les Banques publiques d’investissements ou de développement et les Caisses de crédit public.

  • Créer des produits d’épargne européens

En 2023, le PIB par habitant en dollar courant est de 81 695,2 pour les États-Unis (334,91 millions d’habitants) à comparer à celui de l’Europe de 40 823,9 (448,76 millions d’habitants). Les économies des ménages aux États-Unis ont atteint une valeur de 911 milliards de dollars en 2023 soit environ 825 milliards d’euros et environ 2 500 euros par Américain. Une nouvelle enquête de la National True Cost of Living Coalition montre que 65% des Américains de la classe moyenne ont des difficultés financières et 46% des Américains n’ont pas 500 dollars d’épargne d’urgence, et 28% n’ont pas d’épargne du tout.

Pour les Européens, les ménages détenaient environ 35 500 milliards d’euros au 31 décembre 2023, soit en moyenne 79 107 euros par Européen. Une grande partie de cette épargne est « exportée » en dehors de la zone euro tandis que les entreprises européennes se procurent une fraction de leurs besoins en fonds propres auprès d’investisseurs non-résidents. Il faut donc repenser totalement la manière de relier en Europe l’épargne et l’investissement.

Ce n’est pas la première fois que la Commission européenne crée un produit d’épargne européen. En 2019, la Commission a introduit le plan d’épargne retraite individuel européen (Pan-European Personal Pension Product, PEPP), qui offre aux citoyens de l’UE la possibilité d’épargner pour la retraite. Ce fut un succès très limité, car chaque pays a ses propres règles internes et chaque banque commerciale a des frais d’entrée ou d’adhésion différents, les versements sont bloqués jusqu’à la retraite…

La manière la plus simple est de créer plusieurs livrets d’épargne européens (nouvelles technologies, transition climatique, défense, etc.) gérés par des établissements de crédit public spécialisés. Chaque citoyen pourra choisir librement où placer ses économies. La structure des livrets doit être exactement la même dans l’ensemble de l’UE : même taux de rémunération, mêmes limites de cotisation, mêmes limites de plafond, mêmes options de retrait, mêmes avantages fiscaux, etc. Les nouveaux Livrets seraient garantis. Ils devraient présenter plusieurs atouts pour les consommateurs : flexibilité, frais de gestion nuls, pas de frais de transfert entre pays européens, etc.

  • Réindustrialisation et création de 15 millions de nouvelles petites entreprises locales financées par les Caisses de crédit public

Ces caisses emprunteraient directement à la BCE. Tous les pays européens doivent avoir, comme l’Allemagne, des Caisses de crédit public en plus des Banques commerciales privées et des Banques coopératives. En Allemagne les banques de droit public regroupent les quelque 500 caisses d’épargne (Sparkasse) et les banques centrales des États (Landesbanken). En France une grande institution financière publique, la Caisse des Dépôts et Consignation CDC gère 48 caisses de retraite, reçoit les dépôts légaux des notaires, etc. Elle est une partenaire de long terme des collectivités locales, en d’autres termes un grand investisseur institutionnel. C’est la BPI Banque publique d’investissement (uniquement 44 milliards d’euros d’actifs) qui accompagne « les entreprises, de l’amorçage jusqu’à la cotation en bourse, du crédit aux fonds propres ».

L’Allemagne a adopté le «Mittelstand» qui est la principale force de l’économie allemande avec 3,5 millions d’entreprises familiales innovantes, tandis que la France a choisi de développer des champions nationaux cotés en Bourse. Les PME du Mittelstand, se financent en majorité via les 500 caisses d’épargne publiques (2 492,8 milliards d’euros).

Macron: même sort que Mac Mahon ?

Macron: même sort que Mac Mahon ?

Depuis une quarantaine de jours, le gouvernement Attal est démissionnaire et les représentants de gauche, sous le label Nouveau Front populaire espéraient imposer le nom de Lucie Castets. Face au refus présidentiel, ils sortent furieux de la réunion, évoquant un « Mac-Macron » à l’Élysée pour dénoncer l’attitude présidentielle. L’allusion des représentants de gauche à l’une des plus importantes mais oubliées crises politiques qu’a connu la France ces deux derniers siècles est évidente. La présidence de Patrice de Mac Mahon (1873-1879) est marquée par la tentative des milieux royalistes et bonapartistes de restaurer un roi sur son trône. Il faut dire qu’ils sont galvanisés par les sentiments monarchistes du nouveau locataire de l’Élysée.

Par , docteur en histoire contemporaine, Université de Bordeaux dans The Conversation 

 

Considérée comme une « arme absolue » par les républicains à l’époque, la dissolution brandie par Emmanuel Macron le 9 juin avait été pour la première fois utilisée par Mac Mahon sous la IIIe République, puis remisée par ses successeurs jusqu’à Jacques Chirac en passant par de Gaulle et François Mitterrand. Or son usage suscite toujours un doute à ce que le régime verse dans le pouvoir personnel. La crise actuelle n’échappe donc pas à la règle.Des analyses de qualité chaque jour dans vos mails, gratuitement.

C’est l’avènement de l’« ordre moral » (1873-1877), alliance politique des droites conservatrices (bonapartistes, orléanistes et légitimistes). Les débats institutionnels font rage entre les partisans d’un régime républicain parlementaire (républicains radicaux et modérés, dits opportunistes) et la droite conservatrice. Un compromis est finalement trouvé entre les républicains modérés (centre gauche) et la droite modérée (centre droit) et aboutit à l’adoption des lois constitutionnelles de février et juillet 1875.

Le président de la République obtient un mandat électif de sept ans (élu par les parlementaires) et le droit de dissolution de la Chambre des députés. Cette arme entre les mains d’un seul provoque l’hostilité des républicains radicaux qui refusent le principe alors que ses partisans sont, à droite, satisfaits d’avoir un levier pour contrer les effets néfastes du parlementarisme (coalition et alliances hétéroclites pour composer des majorités gouvernementales).

Les sénatoriales et législatives de 1876 confirment la progression républicaine. Contraint par le résultat des urnes, Mac Mahon appelle la formation d’un cabinet dirigé par un vieux républicain modéré, Jules Simon, ouvrant une nouvelle page d’histoire institutionnelle : celle d’une cohabitation qui ne dit pas son nom pour la première fois dans l’histoire de la République française.

La crise du 16 mai 1877

La politique républicaine déplaît fortement au président qui n’a pas les moyens constitutionnels de s’y opposer (ses actes, selon la constitution de 1875 sont contresignés obligatoirement par un ministre) sauf la dissolution. Mac Mahon attend l’occasion pour réaliser cet acte.

Il la trouve au printemps 1877 lorsque le pape Pie XI demande à tous les catholiques de militer pour l’indépendance du Vatican vis-à-vis de l’unité italienne.

En effet, en France, depuis le Concordat signé par Napoléon 1ᵉʳ en 1801 avec l’Église catholique, le clergé français est très proche de la politique pontificale et ne peut supporter que Pie IX soit « enfermé » au Vatican (Rome doit devenir la nouvelle capitale du nouveau pays italien mais sans la présence du pape). Ils proposent alors que l’armée française intervienne comme elle l’avait fait en 1849.

En France, cette décision ravive l’anticléricalisme de la gauche française. Gambetta, dénonçant la décision des évêques de France de suivre les injonctions pontificales et craignant une guerre avec l’Italie, déclare à la tribune : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ». Jules Simon ne s’oppose pas à cette prise de position provoquant l’ire présidentielle.

Dans une lettre que Mac Mahon lui adresse le 16 mai 1877, le président fait des reproches sur la politique extérieure du gouvernement. Jules Simon démissionne dans la foulée. C’est le début de la crise du Seize-Mai 1877. Les opposants républicains crient au coup d’État organisé par le palais de l’Élysée. La brutalité de la décision présidentielle autant que son caractère inédit expliquent cette levée de boucliers contre Mac Mahon.

Le président nomme un gouvernement de combat, appelé « le ministère du Seize-Mai » composé de personnalités politiques conservatrices, les orléanistes (monarchistes modérés), les légitimistes (monarchistes radicaux) et les bonapartistes.

Il confie la tête du gouvernement et le ministère de la Justice (cela se faisait souvent en ces débuts de république) à Albert de Broglie, orléaniste modéré mais profondément attaché au catholicisme.

Les ministères sont distribués en respectant l’équilibre politique entre les différentes composantes. Mais c’est surtout l’action du ministre de l’Intérieur Fourtou qui suscite le plus d’opposition de la part des républicains. Ce ministre, déjà en fonction en 1874 a une réputation d’être brutal et sans concession.

La valse des préfets et des sous-préfets ainsi que des fonctionnaires hostiles (donc républicains) au gouvernement provoque un mur de protestations. Dans un manifeste, les 363 députés républicains s’opposent vivement contre la nomination d’un président du Conseil monarchiste alors que la Chambre est majoritairement républicaine.

Cette dernière devient donc un obstacle à la réalisation du projet gouvernemental et Mac Mahon décide de dissoudre le 14 juin 1877, provoquant de facto de nouvelles élections législatives qui se tiennent les 14 et 28 octobre suivants.

Dès le départ, le président fait savoir qu’il envisage une résistance si les élections ne sont pas favorables à son camp. Gambetta prévient :

« Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. » (Discours de Lille août 1877)

Le ministre Fourtou ordonne aux préfets de suivre étroitement, dans leur département, les républicains : une surveillance étroite des journaux, des cafés, des fermetures de bibliothèques, de loges maçonniques dans lesquels les opposants ont leurs habitudes.

Fourtou réactive la candidature officielle, pratique d’un principe d’un Second Empire déchu. Le postulant reçoit d’une manière tout à fait illégitime le soutien financier et matériel de l’État alors que ce dernier se soit d’être neutre et de garantir le bon déroulement du scrutin.

La campagne dans les départements fait rage et les décisions ministérielles s’accélèrent : des suspensions ou de révocations de fonctionnaires, des arrestations comme celle de Gambetta après son discours de Lille en août, se succèdent.

À l’époque où les sondages n’existent pas, le gouvernement redoute une victoire républicaine qui est confirmée dès la fin octobre : sur 533 sièges, la gauche en remporte 313.

Certes, c’est moins que les 363 sortants mais ce n’est pas une victoire de la droite puisqu’aucun des partis (bonapartistes, monarchistes) n’obtient la majorité.

La Chambre des députés demeure républicaine. Logiquement, le président devrait démissionner mais rien dans la constitution ne le contraint. Dans un premier temps, il demande au gouvernement de Broglie de tenter à nouveau de renverser la vapeur (élections cantonales en novembre 1877) mais cela devient impossible. Les républicains réclamant le pouvoir. Mac Mahon tente, dans un second temps, de nommer un cabinet sous l’autorité d’un monarchiste modéré, le général de Rochebouet mais la Chambre lui refuse sa confiance.

Il faut à la France un gouvernement républicain. À contrecœur, Mac Mahon le 13 décembre nomme Jules Dufaure (centre gauche). Il a pensé un temps à dissoudre (la constitution ne prévoit pas un délai entre deux dissolutions comme celle de la Ve République) mais le Sénat refuse.

Une fois de plus, Mac Mahon aurait pu démissionner mais il décide de résister depuis l’Élysée. Il y parvient jusqu’en janvier 1879, date à laquelle son camp perd la direction de l’assemblée, ravie par Léon Gambetta.

Alors que son mandat allait jusqu’en mai 1880, le 30 janvier 1879, Mac Mahon quitte le pouvoir. Les républicains choisissent un des leurs, modéré, ancien président du Sénat, Jules Grevy. La mémoire de cet épisode reste ancré dans notre culture politique car le droit de dissolution est demeuré le principe point d’achoppement des forces politiques jusqu’à nos jours.

Macron: même sort que Mac Mahon ?

Macron: même sort que Mac Mahon ?

 

Mardi 3 septembre 2024, la France n’a toujours pas de gouvernement. Le président de la République consulte beaucoup à droite et à gauche pour trouver, selon ses vœux, une majorité la plus stable possible compte tenu des résultats législatifs après la dissolution de juin dernier. Depuis une quarantaine de jours, le gouvernement Attal est démissionnaire et les représentants de gauche, sous le label Nouveau Front populaire espéraient imposer le nom de Lucie Castets. Face au refus présidentiel, ils sortent furieux de la réunion, évoquant un « Mac-Macron » à l’Élysée pour dénoncer l’attitude présidentielle. L’allusion des représentants de gauche à l’une des plus importantes mais oubliées crises politiques qu’a connu la France ces deux derniers siècles est évidente. La présidence de Patrice de Mac Mahon (1873-1879) est marquée par la tentative des milieux royalistes et bonapartistes de restaurer un roi sur son trône. Il faut dire qu’ils sont galvanisés par les sentiments monarchistes du nouveau locataire de l’Élysée.

Par , docteur en histoire contemporaine, Université de Bordeaux dans The Conversation 

 

Considérée comme une « arme absolue » par les républicains à l’époque, la dissolution brandie par Emmanuel Macron le 9 juin avait été pour la première fois utilisée par Mac Mahon sous la IIIe République, puis remisée par ses successeurs jusqu’à Jacques Chirac en passant par de Gaulle et François Mitterrand. Or son usage suscite toujours un doute à ce que le régime verse dans le pouvoir personnel. La crise actuelle n’échappe donc pas à la règle.Des analyses de qualité chaque jour dans vos mails, gratuitement.

C’est l’avènement de l’« ordre moral » (1873-1877), alliance politique des droites conservatrices (bonapartistes, orléanistes et légitimistes). Les débats institutionnels font rage entre les partisans d’un régime républicain parlementaire (républicains radicaux et modérés, dits opportunistes) et la droite conservatrice. Un compromis est finalement trouvé entre les républicains modérés (centre gauche) et la droite modérée (centre droit) et aboutit à l’adoption des lois constitutionnelles de février et juillet 1875.

Le président de la République obtient un mandat électif de sept ans (élu par les parlementaires) et le droit de dissolution de la Chambre des députés. Cette arme entre les mains d’un seul provoque l’hostilité des républicains radicaux qui refusent le principe alors que ses partisans sont, à droite, satisfaits d’avoir un levier pour contrer les effets néfastes du parlementarisme (coalition et alliances hétéroclites pour composer des majorités gouvernementales).

Les sénatoriales et législatives de 1876 confirment la progression républicaine. Contraint par le résultat des urnes, Mac Mahon appelle la formation d’un cabinet dirigé par un vieux républicain modéré, Jules Simon, ouvrant une nouvelle page d’histoire institutionnelle : celle d’une cohabitation qui ne dit pas son nom pour la première fois dans l’histoire de la République française.

La crise du 16 mai 1877

La politique républicaine déplaît fortement au président qui n’a pas les moyens constitutionnels de s’y opposer (ses actes, selon la constitution de 1875 sont contresignés obligatoirement par un ministre) sauf la dissolution. Mac Mahon attend l’occasion pour réaliser cet acte.

Il la trouve au printemps 1877 lorsque le pape Pie XI demande à tous les catholiques de militer pour l’indépendance du Vatican vis-à-vis de l’unité italienne.

En effet, en France, depuis le Concordat signé par Napoléon 1ᵉʳ en 1801 avec l’Église catholique, le clergé français est très proche de la politique pontificale et ne peut supporter que Pie IX soit « enfermé » au Vatican (Rome doit devenir la nouvelle capitale du nouveau pays italien mais sans la présence du pape). Ils proposent alors que l’armée française intervienne comme elle l’avait fait en 1849.

En France, cette décision ravive l’anticléricalisme de la gauche française. Gambetta, dénonçant la décision des évêques de France de suivre les injonctions pontificales et craignant une guerre avec l’Italie, déclare à la tribune : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi ». Jules Simon ne s’oppose pas à cette prise de position provoquant l’ire présidentielle.

Dans une lettre que Mac Mahon lui adresse le 16 mai 1877, le président fait des reproches sur la politique extérieure du gouvernement. Jules Simon démissionne dans la foulée. C’est le début de la crise du Seize-Mai 1877. Les opposants républicains crient au coup d’État organisé par le palais de l’Élysée. La brutalité de la décision présidentielle autant que son caractère inédit expliquent cette levée de boucliers contre Mac Mahon.

Le président nomme un gouvernement de combat, appelé « le ministère du Seize-Mai » composé de personnalités politiques conservatrices, les orléanistes (monarchistes modérés), les légitimistes (monarchistes radicaux) et les bonapartistes.

Il confie la tête du gouvernement et le ministère de la Justice (cela se faisait souvent en ces débuts de république) à Albert de Broglie, orléaniste modéré mais profondément attaché au catholicisme.

Les ministères sont distribués en respectant l’équilibre politique entre les différentes composantes. Mais c’est surtout l’action du ministre de l’Intérieur Fourtou qui suscite le plus d’opposition de la part des républicains. Ce ministre, déjà en fonction en 1874 a une réputation d’être brutal et sans concession.

La valse des préfets et des sous-préfets ainsi que des fonctionnaires hostiles (donc républicains) au gouvernement provoque un mur de protestations. Dans un manifeste, les 363 députés républicains s’opposent vivement contre la nomination d’un président du Conseil monarchiste alors que la Chambre est majoritairement républicaine.

Cette dernière devient donc un obstacle à la réalisation du projet gouvernemental et Mac Mahon décide de dissoudre le 14 juin 1877, provoquant de facto de nouvelles élections législatives qui se tiennent les 14 et 28 octobre suivants.

Dès le départ, le président fait savoir qu’il envisage une résistance si les élections ne sont pas favorables à son camp. Gambetta prévient :

« Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, il faudra se soumettre ou se démettre. » (Discours de Lille août 1877)

Le ministre Fourtou ordonne aux préfets de suivre étroitement, dans leur département, les républicains : une surveillance étroite des journaux, des cafés, des fermetures de bibliothèques, de loges maçonniques dans lesquels les opposants ont leurs habitudes.

Fourtou réactive la candidature officielle, pratique d’un principe d’un Second Empire déchu. Le postulant reçoit d’une manière tout à fait illégitime le soutien financier et matériel de l’État alors que ce dernier se soit d’être neutre et de garantir le bon déroulement du scrutin.

La campagne dans les départements fait rage et les décisions ministérielles s’accélèrent : des suspensions ou de révocations de fonctionnaires, des arrestations comme celle de Gambetta après son discours de Lille en août, se succèdent.

À l’époque où les sondages n’existent pas, le gouvernement redoute une victoire républicaine qui est confirmée dès la fin octobre : sur 533 sièges, la gauche en remporte 313.

Certes, c’est moins que les 363 sortants mais ce n’est pas une victoire de la droite puisqu’aucun des partis (bonapartistes, monarchistes) n’obtient la majorité.

La Chambre des députés demeure républicaine. Logiquement, le président devrait démissionner mais rien dans la constitution ne le contraint. Dans un premier temps, il demande au gouvernement de Broglie de tenter à nouveau de renverser la vapeur (élections cantonales en novembre 1877) mais cela devient impossible. Les républicains réclamant le pouvoir. Mac Mahon tente, dans un second temps, de nommer un cabinet sous l’autorité d’un monarchiste modéré, le général de Rochebouet mais la Chambre lui refuse sa confiance.

Il faut à la France un gouvernement républicain. À contrecœur, Mac Mahon le 13 décembre nomme Jules Dufaure (centre gauche). Il a pensé un temps à dissoudre (la constitution ne prévoit pas un délai entre deux dissolutions comme celle de la Ve République) mais le Sénat refuse.

Une fois de plus, Mac Mahon aurait pu démissionner mais il décide de résister depuis l’Élysée. Il y parvient jusqu’en janvier 1879, date à laquelle son camp perd la direction de l’assemblée, ravie par Léon Gambetta.

Alors que son mandat allait jusqu’en mai 1880, le 30 janvier 1879, Mac Mahon quitte le pouvoir. Les républicains choisissent un des leurs, modéré, ancien président du Sénat, Jules Grevy. La mémoire de cet épisode reste ancré dans notre culture politique car le droit de dissolution est demeuré le principe point d’achoppement des forces politiques jusqu’à nos jours.

JO : Une parenthèse heureuse

JO : Une parenthèse heureuse

 

dans la Tribune par Jean Viard sociologue

 

 Paris 2024 suscite un extraordinaire engouement : les drapeaux tricolores remplissent les stades et les fan zones, le Club France affiche complet… Comment l’expliquez-vous ?

JEAN VIARD - J’ai toujours pensé qu’il en serait ainsi, je l’ai dit de nombreuses fois, contre l’esprit décliniste qui envahit trop souvent les médias parisiens et les élites politiques. Les Jeux olympiques sont, par définition, un moment historique pour le pays où ils se déroulent. On s’en souviendra toute notre vie. Les Français se sont organisés en circonstance : s’ils ne sont pas au restaurant le soir ni encore partis en vacances, c’est parce qu’ils regardent les épreuves à la télévision. Ils en ont fait la priorité à un moment unique de l’année : la compétition se tient au milieu de la période de congés, quand tout le pays s’arrête en même temps ou presque. Cette année, les vacances, c’est d’abord les JO en France !

Les supporters français sont souvent déchaînés, y compris pour soutenir des athlètes en bleu peu connus. Que nous arrive-t-il ?

Il y a d’abord le plaisir de la gagne. Suivre un match sans soutenir personne, ça ne fait ni chaud ni froid. Donc on soutient les Bleus. Ils nous font exulter s’ils l’emportent et on pleure avec eux s’ils perdent : l’émotion est garantie quel que soit le résultat. Cela montre la capacité d’un groupe à constituer une communauté nationale. Le sentiment patriotique en sort renforcé – avec des athlètes de toutes les couleurs de peau. Il constitue une force constructive qui se transmet du public aux sportifs par les encouragements, les chants, les applaudissements. Il faut distinguer ce sentiment du nationalisme qui, lui, est une force destructive, mais qui n’est jamais très loin, malheureusement.

On voit beaucoup de jeunes supporters dans le public, pourquoi ?

Les jeunes peuvent s’identifier plus facilement aux sportifs que les autres générations : ce sont des gens du même âge qui sont engagés dans les épreuves. Ils ont sacrifié leur adolescence pour un rêve. Leur dévouement est magnifique, ils vivent le moment le plus intense de leur vie. On peut noter que le pays forme à la fois des champions et des Français : ces athlètes revêtent les mêmes costumes, on leur transmet l’histoire sportive du pays, celle de Pierre de Coubertin, ils chantent La Marseillaise et nous la chantons avec eux.

La France vient de traverser une période de très forte tension politique. Les Jeux sont-ils un exutoire ?

Qu’est-il sorti de la dissolution ? La France est politiquement divisée, car nous traversons une période historique de rupture radicale, avec des sujets tels que le climat, l’immigration, le populisme, l’IA… La crise politique a tendu le pays comme un élastique. Les JO, c’est une parenthèse durant laquelle on se rassemble. Il faut pouvoir en sortir avec élégance. Cela repose sur le chef de l’État. Il doit trouver un Premier ministre, plutôt une femme de centre gauche ou un gaulliste social, capable de dépasser les passions. Que des personnalités telles que Carole Delga et Xavier Bertrand travaillent ensemble, cela serait positif.

Cela montre la capacité d’un groupe à constituer une communauté nationale

 

On peut s’être déchirés politiquement il y a trois semaines et se taper sur l’épaule aujourd’hui ?

Oui, et c’est la démonstration de la force de notre communauté nationale. Les Jeux olympiques offrent une image plus conforme à la réalité que certains discours. Deux enfants sur dix qui naissent en France n’ont pas la peau blanche. Ils seront à leur tour fiers d’être français. Et pourtant, ils seront probablement moins bien formés et moins considérés que les autres. Les difficultés ne disparaissant pas, il faudrait pouvoir transformer cela en force. Mais d’abord y avoir pensé.

Peut-on établir une comparaison avec d’autres moments de communion nationale, comme la Coupe du monde 1998 ou les funérailles de Johnny Hallyday ?

Oui, à condition que l’élan soit entretenu. Après la victoire de 1998, on a célébré la France multiculturelle, il le fallait. Mais les effets furent de courte durée. Il n’y a pas eu d’accompagnement, car le sport n’est pas central dans la constitution du pays. Nous avons peu de réflexions de fond sur le sujet. Certes, il est fréquent de valoriser, pour les garçons, les vertus du sport dans les cités. Mais on ne s’intéresse pas assez au lien social qu’il crée, on parle surtout d’exploits individuels et de paix sociale.

La cérémonie d’ouverture a hérissé l’extrême droite. C’était prévisible ?

Le bashing était déjà à l’œuvre bien auparavant. Une partie des élites et des médias avait décidé que les Jeux olympiques, ce n’était pas bien. Par déni ou idéologie, ils n’ont pas voulu croire à ce que nous voyons. Cette cérémonie était géniale. Certes, il a manqué les sous-titres, les noms des artistes à l’écran, des explications… Je regrette surtout qu’il n’y ait pas eu de tableau valorisant le monde du travail manuel, les ouvriers, les paysans. Ce monde-là reste un peu loin des priorités du monde de la culture. Mais gardons en mémoire le génie français de cette inauguration et des compétitions dans des lieux historiques sublimes.

Les JO donnent-ils de nous l’image dont nous rêvons ?

L’image de la France est donnée au monde entier, ce n’est pas seulement un miroir. Le spectacle est à la gloire de notre architecture, de l’art de vivre, de compétences très haut de gamme, de l’ouverture aussi à des artistes du monde entier. C’est la marque France qui est portée aux sommets. Cela aura un impact sur les ventes de voitures, d’objets culturels, de produits de luxe, le tourisme… L’après-vente compte beaucoup : il s’agit de faire perdurer le désir. Garder les anneaux sur la tour Eiffel et la vasque aux Tuileries est une idée magnifique. On pourrait aussi donner aux rues ou aux places des noms d’athlètes qui auront marqué cette édition. L’après-Jeux olympiques porte des enjeux considérables.

* Dernier ouvrage paru : Pour une société du compromis, avec Laurent Berger, L’Aube.

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Peut-on éviter la crise de régime ?

Peut-on  éviter la crise de régime ?

 Tout en rappelant le contexte politique et historique de la situation politique française abracadabrantesque, le groupe Mars analyse les possibles conséquences des élections législatives d’une victoire du RN ou du Front populaire dans le domaine de la défense. Par le groupe de réflexions Mars. ( dans la Tribune)

Les sondages disaient donc vrai ! Aux élections européennes du 9 juin dernier, près d’un électeur sur trois a choisi, parmi 38, la liste Bardella et 40% des électeurs ont voté pour une liste classée à l’extrême-droite. En cumulant l’ensemble des listes classées à l’extrême-gauche, le total des votes hostiles à la construction européenne actuelle est majoritaire en France. Le chef de l’État en a tiré une conclusion politique tout aussi radicale que ce vote annoncé : il a dissous l’Assemblée nationale et convoqué de nouvelles élections législatives dès que possible. La France aura donc un nouveau Premier ministre le 14 Juillet …

A vrai dire, cet enchaînement institutionnel ne devrait pas constituer une surprise. La crise politique couvait depuis que les précédentes élections législatives il y a deux ans n’avaient pas permis de donner au président une majorité claire. La surprise est ailleurs : dans l’ampleur du soutien populaire dont jouit dorénavant le Rassemblement national (RN), tant géographiquement que sociologiquement. Un exemple suffit à illustrer l’ampleur du phénomène : à l’exception d’une poignée restée fidèles à la tradition de vote rouge, dans toutes les communes de Haute-Vienne le RN est arrivé en tête, et largement.

A Oradour-sur-Glane, où le chef de l’État se trouvait au lendemain de sa déroute électorale, le RN a séduit 36% des votants. Le résultat est similaire dans les communes environnantes et dans quasiment tout le département, y compris Limoges. Inimaginable encore en 2017, un tel résultat devrait provoquer une remise en cause radicale du discours et de la pensée politique. Il n’en est rien.

 Plutôt que de reconnaître son erreur historique d’avoir abandonné l’électorat populaire à l’extrême-droite, la gauche se fait plaisir en annonçant un nouveau « Front populaire ». Sympathique, mais pitoyable. N’est-ce pas Karl Marx qui disait que lorsque l’histoire se répète, c’est la première fois comme une tragédie, et la seconde comme une farce. Il est malgré tout intéressant de tenter de comparer les deux époques. Quand, en 1934, la gauche marxiste française décide d’oublier pour un temps les haines recuites du congrès de Tours, rejointe par des radicaux en perte d’influence, la France, atteinte avec un temps de retard par la crise économique, est menacée par le révisionnisme des dictatures fascistes qui s’installe chez ses plus grands voisins : Italie, Allemagne et prochainement Espagne.

Sur le front intérieur, la menace fasciste semble également se concrétiser depuis les évènements du 6 février qui ont vu les Ligues d’extrême-droite s’en prendre au Parlement. Quant à la condition ouvrière, elle est encore très difficile : en-dehors du paternalisme du patronat chrétien, les a