De la transition écologique à la transition militaire ?

De la transition écologique à la transition militaire ?

La bulle des investissements « verts » a éclaté face aux bouleversements géopolitiques, laissant place à un engouement pour le secteur de la défense, révélant la rapidité avec laquelle les priorités financières peuvent changer.

par Marc Fiorentino, expert financier dans la Tribune 

 

Avant l’Ukraine, l’investissement dans les valeurs « vertes » était l’un des thèmes majeurs sur les marchés financiers. La planète était en feu. Les énergies fossiles et les voitures thermiques étaient vouées à la disparition. Il fallait miser sur les valeurs de la transition écologique. C’était une évidence répétée à loisir.

Au-delà des valeurs « vertes », il fallait que les investissements soient « socialement responsables » (ISR) et que les entreprises cochent les cases ESG (environnement, social, gouvernance) pour que les gérants de fonds puissent les alimenter en capitaux précieux pour la croissance et le développement.

Cette « évidence » a évidemment provoqué un emballement des valeurs et des fonds d’investissement dont la couleur, parfois badigeonnée à la hâte, ressemblait de près ou de loin au vert. Greenwashing, excès et donc bulle. Classique. Ça, c’était avant. Avant l’Ukraine. Avant la réélection de Donald Trump. Avant la mise à l’écart de l’Europe dans les projets de règlement du conflit ukrainien.

Face au virage radical imposé par la nouvelle administration Trump, la bulle verte a explosé. Entraînant dans son sillage l’ISR et l’ESG, qui vont devoir, dans la panique, se réinventer. On ne parle plus sur les marchés boursiers de transition écologique. La mode est passée, alors que la planète brûle toujours.
Et l’un des thèmes honnis d’investissement pendant la vague verte, l’armement – pardon, la défense, car ce terme est plus boursièrement correct – est devenu la nouvelle évidence du jour. Avec des contorsions amusantes sur le fait que l’on peut considérer l’industrie de l’armement comme un investissement socialement responsable. Un retournement de veste spectaculaire, même si la couleur d’une veste de treillis est très proche du vert.

Bref, maintenant, ne vous posez pas de questions, il faut investir dans la défense. Le raisonnement est implacable : les États-Unis ne veulent plus jouer gratuitement le rôle de gendarme du monde et encore moins de l’Europe. Pour bénéficier de la protection de l’Otan et éviter d’être envahis par la Russie, les pays européens vont devoir dépenser plus de 3 % de leur PIB dans la défense, et peut-être 5 % si Trump obtient gain de cause. Une masse d’argent financée, une fois de plus, par la dette, car la Commission européenne s’apprête à lever encore le plafond du déficit à 3 % du PIB, une aubaine pour la France qui en était très loin. Car il y a urgence. Urgence militaire. Dans la défense, dans les énergies fossiles… et dans les voitures thermiques.

Je ne remets pas en question ces thèmes d’investissement. C’était l’opprobre dont ils étaient frappés qui était ridicule. Non, ce qui me fascine, c’est la vitesse à laquelle l’industrie financière brûle (en émettant toujours autant de CO2) ce qu’elle a adoré, et porte aux nues ce qu’elle a piétiné. On a beau avoir l’habitude, ça surprend toujours. Oubliée, donc, la transition écologique ; le clairon sonne pour la transition militaire. En avant donc, et on ne veut voir qu’une seule tête !

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