• Accueil
  • > Archives pour novembre 2024

Archive mensuelle de novembre 2024

Page 19 sur 22

Industrie de défense: L’Europe contre la France

Industrie de défense: L’Europe contre la France 

Après avoir exploré les pièges de la résurrection de la Communauté européenne de défense de 1952, le groupe Vauban décrypte la stratégie de marginalisation de la France par l’Allemagne, l’Italie et la Grande-Bretagne avec l’alliance entre Berlin et Rome dans le domaine terrestre et l’accord de Trinity House avec Londres.

« Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne » 

L’âme de la deuxième coalition est, sans surprise, à Berlin même. Poursuivant sa politique de champions nationaux (Diehl dans les missiles ; OHB dans le spatial ; Rheinmetall plus que KMW, dans les blindés ; Hensoldt dans l’électronique de défense ; TKMS dans le naval ; Renk et MTU dans la propulsion) et de récupération des compétences qui lui font encore défaut (propulsion spatiale, satellites d’observation et aéronautique de combat et missiles), l’Allemagne a compris depuis les années 90 qu’elle obtiendrait beaucoup plus d’une France récalcitrante en faisant des alliances de revers que par la négociation directe.

En ce sens, l’actualité récente est la réédition des années 1997 à 2000, années où Berlin a proposé à Londres des fusions de grande ampleur : Siemens avec BNFL, bourse de Francfort avec celle de Londres, DASA avec British Aerospace. A chaque fois, il s’agissait moins de forger des alliances de revers que de faire pression sur la France. Trop faible pour voir clair dans ses intérêts et le jeu de ses concurrents, trop altruiste pour voir toute la naïveté et la portée de ses actes, la France de Lionel Jospin a offert la parité à l’Allemagne dans le domaine de l’aéronautique, elle qui n’en demandait au mieux que le tiers (qu’elle pesait au demeurant très justement…).

L’Allemagne, l’âme des coalitions de revers

Avec ses alliances en Italie (dans le domaine des blindés) et au Royaume-Uni (sur l’ensemble des segments), Berlin tend à Paris de nouveau le même piège : « cédez sur le MGCS et le SCAF ou nous actionnons l’alliance de revers ». L’Europe de l’industrie d’armement qui se prépare, n’est en réalité qu’une coalition contre les thèses françaises dans la défense et son indispensable corolaire, l’armement. Nulle surprise dans ce constat : dominant ses concurrents militaires et industriels grâce à l’héritage gaullien, possédant le sceptre nucléaire qui lui ménage une place à part dans le concert des grandes nations, influente par son siège au Conseil de sécurité aux Nations-Unies et ses exportations d’armement, la France est le pays à ramener dans le rang des médiocres aigris et jaloux et de la petite bourgeoisie de la défense européenne.

Rien de nouveau sous le soleil européen puisque, si l’on en croit Alain Peyrefitte, le général De Gaulle faisait déjà cette analyse : « Pour la dominer aussi, on s’acharne à vouloir la faire entrer dans un machin supranational aux ordres de Washington. De Gaulle ne veut pas de ça. Alors, on n’est pas content, et on le dit à longueur de journée, on met la France en quarantaine. » (13 mai 1964).

Marginalisée depuis la création de KANT puis de KNDS, méprisée voire sacrifiée en France même par le gouvernement de François Hollande en 2015 avec la complicité des députés UMP, l’industrie terrestre nationale ne vit que par des îlots (canons, tourelles, obus), ayant abandonné les chars (sans que la DGA ne réagisse en 2009 lors de la suppression de la chaîne Leclerc par Luc Vigneron), les véhicules blindés chenillés (choix très contestable du tout-roues), l’artillerie à longue portée et saturante ; écrasée par la férule de Frank Haun, désormais noyé dans KNDS France sans trop oser se défendre lui-même, Nexter est menacé de disparition par la double alliance KMW/Rheinmetall au sein du MGCS et Rheinmetall/Leonardo dans l’ensemble des segments.

Aveuglé par le couple franco-allemand, Paris n’a pas accordé assez d’attention à la montée en puissance de Rheinmetall, vrai champion du terrestre allemand, qui, par commandes et acquisitions, se retrouve enraciné en plein milieu du jeu allemand (comme future actionnaire de TKMS et bras armé de la politique ukrainienne de Berlin), et de la scène européenne qu’il a conquise pas à pas : en Hongrie d’abord, puis au Royaume-Uni, en Lituanie, en Roumanie, en Ukraine, en Croatie et désormais en Italie, sans oublier d’établir la relation transatlantique (avec Lockheed Martin sur le F-35, avec Textron sur la compétition Lynx et en achetant le constructeur Loc Performance Products). La toile tissée par Rheinmetall en Europe est une véritable coalition contre les positions françaises.

Le même coup de faux se prépare avec l’accord germano-britannique de Trinity House qui, même s’il ne réalisera pas toute ses prétentions faute de compétences et de moyens, érige un axe concurrent durable et redoutable dans des domaines clés pour la France : le nucléaire, les systèmes de missile à longue portée, les drones d’accompagnement des avions de combat de future génération, la robotique terrestre, la patrouille maritime.

Fidèles serviteurs de l’OTAN et de Washington, animés d’un désir de mettre la France en position d’infériorité militaire et industrielle, les coalisés se sont partagés l’Europe : à l’Allemagne, la défense du flanc Nord de l’OTAN ; à l’Italie, la défense du flanc Sud joignant théâtre de la Méditerranée orientale à l’Asie-Pacifique ; au Royaume-Uni, la Turquie, la Pologne et les pays baltes en liaison avec l’Allemagne. Les contrats industriels suivent les diplomates, avec une moisson gigantesque de chars de combat Leopard, de véhicules blindés Boxer, de l’artillerie RCH-155, de véhicules blindés de combat d’infanterie Lynx et de chars Panther et de systèmes sol-air (22 pays membres de l’initiative allemande ESSI).

Au bilan, la France est nulle part dans cette Europe qu’elle prétend pourtant bâtir ; elle n’a pas eu le courage politique de s’opposer aux dérives illégales de la Commission européenne en pratiquant la politique de la chaise vide ; son gouvernement est un mélange instable de fédéralisme affirmé, d’atlantisme assumé et de gaullisme à éclipses : comment pourrait-il mener une autre politique que celle « du chien crevé au fil de l’eau » (De Gaulle) consistant à se couler avec facilité et confort dans le mainstream institutionnel otanien au nom de l’Ukraine ? Comme lors de la IVème République, ses partis politiques sont occupés à la tambouille politicienne et ne pensent plus le monde selon les intérêts nationaux mais selon les intérêts de l’OTAN, de l’Ukraine et d’Israël.

Alors que la France s’épuise en débats stériles politiciens dans un régime devenu instable (les deux vont de pair), ses positions stratégiques en Europe se dégradent :

  • La cohérence de son système de défense reposant sur la souveraineté nationale et la défense des intérêts nationaux, au profit d’un fédéralisme européen sous tutelle américaine décrété urgent par la guerre en Ukraine et la menace russe ;
  • Sa dissuasion nucléaire, au profit d’un projet de missile conventionnel à très longue portée et d’une défense anti-missile germano-américano-israélienne à vocation européenne, deux projets promus, comme par hasard, par l’Allemagne ;
  • Son modèle d’industries nationales, monopolistiques, seules capables de concevoir, développer, produire et maintenir des systèmes d’armes souverains, au profit de fusions industrielles européennes qui placeront les armées et l’industrie françaises en position de dépendance complète des deux Bruxelles (OTAN et Union européenne) ;
  • La conduite de ses programmes d’armement, réalisée par ses ingénieurs de l’armement dont c’est le métier et la vocation, au profit de bureaucrates européens ne connaissant rien aux domaines de l’armement mais ayant le pouvoir juridique et financier ;
  • Sa liberté souveraine d’exporter de l’armement à qui elle l’entend et sans frein autre que ses intérêts et sa morale à elle, au profit de règlements européens, spécialement édictés pour la restreindre, autre projet porté par l’Allemagne.

Le pire est que ces développements ont été portés par la classe politique elle-même qui les a encouragés à coup de proposition de « dialogue sur la dissuasion »« d’autonomie stratégique européenne » ou de programmes en coopération mal négociés, en mettant de côté les aspects gênants comme les divergences de doctrine, de niveau technologique et d’analyses sur les exportations.

Le pire est également que ces développements se profilent au moment même où la France, faute de limiter son gouvernement aux seuls domaines régaliens et de créer la richesse au lieu de la taxer et de la décourager, n’a plus les moyens de sa défense : comment celle-ci pourrait-elle en effet continuer de résister à la dérive des finances publiques, à la sous-estimation systématique de tous ses besoins (des capacités négligées aux infrastructures délaissées en passant par les surcoûts conjoncturels prévisibles mais ignorés) et à la mauvaise gestion de ses finances propres (comme en témoigne le montant faramineux des reports de charges) ?

Si la LPM est officiellement maintenue en apparence, ses fondements financiers, déjà minés dès sa conception par un sous-financement général, apparaissent pour ce qu’ils sont : insuffisants à porter le réarmement national de manière durable et soutenu. Faudra-t-il comme Louis XIV vendre l’argenterie royale ? Faudra-t-il vendre des biens nationaux comme la Révolution le fit dans son incurie ? Ou lui faudra-t-il écraser d’impôts les Français comme le Premier Empire s’y est résigné pour éviter l’emprunt ?

La rupture avec les deux Bruxelles est la double condition de la renaissance nationale. Face à l’Europe coalisée contre son système de défense, la France n’aura pas d’autre choix qu’un sursaut passant par une révision fondamentale du rôle de l’État, c’est-à-dire la réduction drastique de ses interventions sociales et économiques ruineuses et inefficaces, et d’une révision complète de son cadre d’alliances, afin que celles-ci la fortifient au lieu de l’atrophier.

La guerre froide n’a pas empêché ni la politique de la chaise vide ni le retrait du commandement intégré de l’OTAN, c’est-à-dire de quitter les deux Bruxelles au profit d’une politique du grand large, et pourtant le général de Gaulle qui a pris ces deux décisions majeures, n’était ni irresponsable ni irréfléchi. Les fruits de la grande politique qu’il a voulue, sont connus : un rayonnement considérable de sa diplomatie et de ses exportations d’armement.

Fret SNCF : une liquidation anti économique et anti environnementale

Fret SNCF : une liquidation anti économique et anti environnementale

Bruxelles aura obtenu la peau de fret SNCF en raison du fallacieux motif de subvention à l’activité marchandise de l’entreprise. En réalité, il s’agit d’un règlement de compte notamment des pays du Nord qui n’apprécie pas spécialement le dynamisme de l’économie ferroviaire en France.

 

La vérité, c’est que la quasi-totalité des réseaux ferroviaires sont très largement subventionnés par leurs Etats. À commencer par la société allemande l’ancienne DB dont la totalité de la dette a été reprise par les pouvoirs allemands mais qui continue cependant à additionner les déficits. La SNCF de son côté n’a bénéficié que de la reprise partielle de sa dette. Elle traîne encore environ e 25 milliards qui hypothèquent ses résultats et surtout l’équilibre de « SNCF réseau » en charge de la gestion des infrastructures. Le problème général du ferroviaire provient du fait qu’on a confiée aux mêmes sociétés la gestion des équipements lourds comme les infrastructures et la gestion de l’exploitation.

Or dans aucun autre mode de transport les infrastructures ne sont gérées par les sociétés exploitation. Ainsi bien entendu le transport routier ne gère pas les routes et les autoroutes, les compagnies aériennes ne gèrent pas les aéroports, les compagnies maritimes ne gèrent pas les ports etc. Ces sociétés ne versent qu’une contribution et le reste est pris en charge par la collectivité. Structurellement le ferroviaire ne peut supporter les charges financières de la gestion des infrastructures. Une charge qui plombe sa compétitivité actuelle et son avenir.

En Allemagne par exemple en dépit de la reprise de la totalité de la dette, le réseau est dans un état lamentable, les retards chroniques et globalement la qualité très mauvaise sans parler encore une fois des nouveaux  mauvais résultats financiers.

Le transfert de l’activité fret SNCF pour les trains complets au privé est un non-sens économique et environnemental. C’est un effet sur ce créneau que la SNCF était la plus performante. On ne lui laisse que des miettes. Une situation à comparer à celle de la messagerie progressivement mise à part, ensuite privatisée puis liquidée.

Certes dans ce manque de compétitivité la direction de la SNCF et les syndicats de cheminots eux-mêmes ont leur responsabilité du fait de leur immobilisme et du corporatisme. Pour autant, ils ont raison de défendre l’intégrité de SNCF fret car c’est l’avenir du transport par rail qui est posé à un moment où précisément l’enjeu environnemental imposerait au contraire un recours accru du transport de marchandises par chemin de fer.( Or en Europe c’est tout le fret ferroviaire qui recule).  S’ajoute à cette question économique évidemment l’avenir des conditions sociales des intéressés … simplement oubliés !

Michelin : Cholet et de Vannes liquidées

Michelin : Cholet et de Vannes liquidées

C’est évidemment un énorme choc pour les deux villes moyenne concernées par  la liquidation des usines de Michelin située à Cholet et V annes. Joué-lès-Tours étant  pour l’instant épargnée. C’est toute l’économie locale qui va se trouver bouleversée. En cause notamment le manque de compétitivité en particulier sur les pneus  Premium venus d’Asie. 
La direction de Michelin estime que cela découle, « de l’arrivée massive de produits importés d’Asie à bas coût ». Cela a transformé le marché au détriment des segments premium de Michelin. La direction de Michelin regrette aussi« la dégradation continuelle des conditions de compétitivité ».

Michelin se dit « conscient des conséquences de cette décision »« Notre engagement, c’est de ne laisser personne au bord du cheminNous mettrons tous les moyens nécessaires pour que tous les salariés puissent rebondir professionnellement. »

Alors que l’avenir d’un autre site, celui de Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire), était aussi menacé, Michelin affirme que son activité se poursuivra….pour linstant (NDLR). Cette usine, qui compte 155 salariés, fabrique notamment des membranes de cuisson utilisées pour la fabrication des pneus, et des tissus calandrés. 

Élection présidentielle États-Unis : Trump en tête à 5 heures

Élection présidentielle États-Unis : Trump en tête à  5 heures

Même si les élections sont encore loin d’être jouées,  il semble bien que Donald Trump possède ce jour à cinq heures du matin une légère avance.

Le président sortant est donné vainqueur dans 21 États mais aucun État-clé n’a pour l’instant été remporté ni par lui, ni par Kamala Harris.

La vice-présidente est en très grande difficulté en Géorgie et en Caroline du Nord où Donald Trump a dans ces deux États plus de 95% de l’emporter selon une estimation du New York Times.

Seule sortie de secours en cas de défaite pour elle dans ces deux États-Unis: l’emporter dans le Wisconsin, le Michigan et la Pennsylvanie, les autres États-clés où elle est toutefois distancée à ce stade du dépouillement.

Auchan: Un train de licenciements pourrait en cacher un autre

Auchan: Un train de licenciements pourrait en cacher un autre 

Officiellement l’entreprise a déclaré vouloir supprimer environ 2500 emplois mais il se pourrait bien que cette décision cache un second train de suppressions de postes Surtout après la reprise de magasins Casino par un groupe Auchan déjà fragile. Le groupe compte aujourd’hui 53.000 salariés en France.

Après une perte nette de 379 millions d’euros l’année dernière, la holding Elo – maison mère d’Auchan – a encore perdu un milliard d’euros sur les six premiers mois de 2024.

Avec 9% de part de marché en France, loin derrière E.Leclerc (24%), Carrefour (21,5%), Les Mousquetaires/Intermarché (17,5%) et Coopérative U (12%), Auchan peine plus que ses concurrents à obtenir des prix compétitifs de ses fournisseurs. Ce qui engendre un cercle vicieux, en éloignant encore plus les consommateurs, pour qui le prix est devenu le premier critère d’achat.

La réduction des coûts risque de ne pas suffire, notamment si l’on considère qu’Auchan vient de reprendre 98 points de vente à Casino dans des régions où il estimait être trop peu présent, dont 5 hypermarchés de plus de 9.000 mètres carrés et 21 hypermarchés de taille inférieure.

Certains, très peu rentables au moment de la cession, ont de fortes chances de devenir, au moins à court terme, des sources de pertes additionnelles.

Ferroviaire: Grève le 21 novembre suite à la liquidation de fret SNCF

Ferroviaire:  Grève le 21 novembre suite à la liquidation de fret SNCF

 
Bruxelles a imposé à la SNCF de transférer au privé la quasi-totalité des trains complets de marchandises. Une décision économiquement et écologiquement incompréhensible et contradictoire. Se pose aussi la question de l’avenir social de la nouvelle société dont les activités marchandises seront réduites comme peau de chagrin. Un aspect que le pouvoir avait oublié de traiter alors que fret SNCF doit disparaître au 1er janvier. De quoi déclencher la colère de syndicats qui ont décidé une première grève Le 21 novembre qui pourrait être suivie en décembre de grèves reconductibles. t reconductible en décembre.

Présidentielle États-Unis : quasi égalité

Présidentielle États-Unis : quasi égalité

Les deux prétendants sont dans une situation de quasi égalité qui va imposer le dépouillement de la totalité des bulletins avant de déclarer le vainqueur. en effet, les deux prétendants à la Maison-Blanche sont dans un mouchoir de poche ;cependant l’ex-président républicain est désormais en tête dans cinq États-clés. Par précaution manipula toire Trump a déjà déclaré qu’il n’accepterait le résultat que dans certaines conditions. Bref, qui serait prêt à favoriser le chaos s’il n’est pas élu.

La plupart des observateurs s’accordent pour décrire l’élection, entre deux candidats que tout oppose et dans un pays extraordinairement polarisé, comme l’une des plus serrées de l’histoire américaine.

Economie, politique, société: les plus lus 5 novembre 2024

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Dette publique: 10.000 milliards d’euros, le vrai montant

Dette publique: 10.000 milliards d’euros, le vrai montant 

 La dette souveraine de l’État français approche les 10 000 milliards d’euros soit la moitié du patrimoine économique national. Pour résorber cette dette, la solution du bon sens est-elle la dernière à laquelle songe le gouvernement ? Par Gabriel Gaspard, Chef d’entreprise à la retraite, spécialiste en économie financière. ( dans La Tribune)

La dette souveraine de l’État français c’est l’ensemble des emprunts et des engagements souscrits par l’État et qu’il doit rembourser. Elle inclut la dette publique, les dettes hors bilan, les dettes isolées, la dette des entreprises du secteur public, la dette du déficit commercial, les dettes cachées et les dettes invisibles, etc. Elle représente environ la moitié du total du patrimoine économique national de 2023 (19 084,3 milliards d’euros). Cette dette est de fait garantie par ce patrimoine national. Accroitre sa valeur et réduire les dettes est impératif pour les épargnants et pour l’État. Explications et solution.

La dette publique c’est l’ensemble des emprunts contractés par l’État, la Sécurité sociale, les organismes divers d’administration centrale et les collectivités territoriales. À la fin de l’année 2023, la dette publique au sens de Maastricht s’est établie à 3 101,2 milliards d’euros soit 110,6% du PIB. D’après les chiffres de la Banque de France, 52% de la dette des administrations publiques françaises étaient détenus par des investisseurs étrangers. La France a payé 50,1 milliards d’euros en charge d’intérêts de cette dette et 26,05 milliards d’euros  à des non-résidents à comparer au déficit des transactions courantes de 28,1 milliards d’eurosCette dette était de 2 218,4 milliards d’euros à la fin du quatrième trimestre 2017, soit une augmentation d’environ 1 000 milliards d’euros depuis les élections présidentielles de 2017. Cette dette est restée élevée et s’est accrue rapidement. Elle a fait apparaitre des comportements d’épargne de précaution et elle a affaibli la croissance avec des conséquences préjudiciables pour les personnes les plus vulnérables.

« La valeur des engagements hors bilan donnés par l’État atteint 4 188 milliards d’euros au 31 décembre 2023. Ce montant représente plus de douze ans de produits régaliens et est en hausse de 266 milliards d’euros par rapport à 2022. Il se compose de plusieurs parties : les engagements de retraite des fonctionnaires, pour 1 841 milliards d’euros, les engagements de l’État au titre de sa mission de régulateur économique et social, pour 680 milliards d’euros (incluant les régimes spéciaux de retraite (SNCF, RATP) à hauteur de 262 milliards d’euros) et enfin les engagements financiers (1 591 milliards d’euros) qui comprennent notamment la protection de l’épargne réglementée, les prêts garantis par l’État et les garanties et engagement vis-à-vis de l’Union européenne«  Cour des comptes. La dette hors bilan, qui est moins commentée par la presse a aussi des conséquences lourdes sur le déficit, etc.

Au sens du traité de Maastricht, la dette de la Sécurité sociale doit être incorporée à la dette publique. Ce qui n’est pas entièrement le cas. C’est 145,1 milliards d’euros qui sont encore retirés de la dette publique et gérés par la CADES. La Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) a été créée en 1996. Sa mission est de financer et d’éteindre la dette cumulée de la Sécurité Sociale. « Fin 2023, 242,6 milliards d’euros de dette sociale ont ainsi été amortis par la CADES sur les 387,7 milliards d’euros repris depuis sa création (y compris les 27,2 milliards d’euros au titre de 2023)« .

Le total des passifs financiers comptabilisé par l’agence de participation de l’État (APA) s’élevait à environ 238,525 milliards d’euros fin 2023. Cette dette n’est pas prise en compte dans la dette publique. L’endettement de ses entreprises demeure un risque pour l’État, particulièrement aujourd’hui avec une croissance lente de l’activité économique, qui compliquerait le remboursement des dettes ainsi contractées.

La dette du déficit commercial correspond au solde négatif de la balance commerciale d’un pays. En France, la balance commerciale enregistre uniquement les flux liés aux exportations et importations de biens. En 2023, le déficit commercial de la France s’est établit à 99,6 milliards d’euros. Si la balance commerciale reste longtemps déficitaire (depuis 2006), elle peut devenir un problème économique lorsque la dette qu’elle engendre devient très lourde à supporter.

La France touchera 40 milliards d’euros de l’UE (plan de relance Européen Next EU de 750 milliards d’euros) comme subvention pour son plan de relance de 100 milliards d’euros. A priori l’argent doit être remboursé par l’Europe sur 40 ans si elle arrive à mettre en place ses propres taxes. Dans le cas où les 27 pays ne s’entendraient pas, la France doit rembourser 67 milliards d’euros, équivalent à 17,3% du budget européen (contribution de la France au budget de l’UE). De plus dans le plan global de 750 milliards d’euros il y a 360 milliards d’euros de prêts potentiels mis au service des pays européens, une possibilité de nouveaux emprunts pour la France de 62,28 milliards d’euros. La contribution de la France aux ressources propres de l’Union européenne était de 26,1 milliards d’euros en 2023. Celle-ci est directement affectée à l’UE sans passer par le budget de l’État.

L’Europe n’est pas la seule à venir au secours de la France. Le FMI vient de voter une allocation de droits de tirage spéciaux de 650 milliards de dollars (DTS). Le DTS n’est pas considéré comme un emprunt. La France peut donc emprunter sans l’intégrer à sa dette publique jusqu’à 145% de sa quote-part (qui est de 5,2%). D’après le FMI, les dettes cachées nuisent à l’économie. Les lois nationales doivent être révisées pour assurer la transparence des obligations publiques. En France, la transparence n’est pas totale sur les prêts garantis, sur les formes inédites et complexes de financement et sur les accords de confidentialité, etc.

Les dettes invisibles correspondent au manque d’investissement dans l’entretien des infrastructures, le coût de la transition retardée ou de l’inaction climatique.

Pour l’entretien des infrastructures, il y a besoin d’investissements directs considérables pour assurer l’avenir. Selon les avis de CESE en 2020 : « si la France possède l’un des meilleurs réseaux d’infrastructures au monde, les besoins d’investissement sont énormes tant pour entretenir l’existant que pour relever les grands défis du siècle que sont la transition écologique et la révolution numérique » En 2023, les dépenses de l’État consacrée aux investissements directs étaient de 4,3% du PIB, en 2020 moins de 5%, alors qu’au début des années 1990, elles représentaient près de 20% du budget. Le pourcentage réel à retenir aujourd’hui est proche de 10% du PIB soit 282 milliards d’euros (145 milliards d’euros pour les projets en études).

Dans le PLF 2024 on trouve une différence de 7 milliards d’euros en faveur de la planification écologique. La France n’est qu’à la neuvième place au classement 2023 des pays les plus écologiques et engagés. Elle se prépare à mal vivre les +4°C à l’Horizon 2100. Le troisième plan national d’adaptation au changement climatique dévoilé le 25 octobre 2024 reste flou et loin de la réalité. D’après la direction générale du trésor DGT, les besoins nécessaires sont de 100 milliards d’euros par an de 2024 à 2030. D’après l’ADEME, pour une élévation des températures mondiales de près de +3,5°C par rapport à l’ère préindustrielle, dans le scénario de transition retardée, la somme nécessaire serait de 1 100 milliards d’euros de 2030 à 2050.

« Les nouvelles règles encourageront davantage les réformes structurelles et les investissements publics qui renforcent la durabilité et la croissance ». La France a mis en œuvre d’importantes réformes structurelles au cours des dernières décennies. Ces réformes n’ont pas permis pour autant de combler l’écart de PIB par habitant avec les pays les plus performants. Avec une Assemblée nationale divisée, le gouvernement évite d’engager de nouvelles réformes des retraites, du chômage, etc. Il a choisi, en même temps, de réduire les dépenses et d’augmenter les impôts et taxes. Ce choix hasardeux ne défend pas la crédibilité financière de la France… « Les États membres seront invités à élaborer un plan budgétaire et structurel national à moyen terme qui s’étende sur 4 à 5 ans…Les États membres seront autorisés à demander une prolongation du plan jusqu’à sept ans au maximum s’ils s’engagent à mettre en œuvre un ensemble de réformes et d’investissements qui améliorent la croissance potentielle et le potentiel de résilience… ».

Avec 10 000 milliards d’euros  de dette souveraine, le défi serait de réduire la dette publique de 1 408 milliards d’euros sur 4 à 5 ans (revenir à 60% du PIB) et de limiter le déficit public à 3% au lieu de 6,2% prévu en 2024. Une seule solution reste possible : orienter l’épargne des ménages vers les investissements productifs publics.

Le multiplicateur d’investissement ou multiplicateur budgétaire établit un rapport entre les dépenses publiques et leurs effets sur les revenus globaux disponibles. Quand l’État investit, les dépenses produiront un effet démultiplié sur la production, l’emploi, le niveau de vie des citoyens et l’indépendance industrielle. Dans une économie, l’investissement joue le rôle d’un accélérateur, l’épargne celui d’un frein. Pour rejeter le multiplicateur d’investissement, l’analyse libérale met en avant son inefficacité à cause des emprunts qu’il faudra rembourser par des impôts à venir. Pour éviter la hausse des taux due aux emprunts bancaires, l’augmentation de la dette publique, la relance de la demande extérieure et la hausse des impôts, la meilleure solution serait d’investir en recourant aux épargnes des ménages gérés par des établissements de crédits publics (conformément au traité de Rome, les caisses de crédit publiques peuvent emprunter directement à la Banque centrale).

D’après la Fédération Bancaire Française « L’épargne est toujours abondante en France et les flux d’épargne restent dynamiques en 2023 à 315 milliards d’euros »L’épargne financière des ménages est estimée à 4 427,7 milliards d’euros en 2023, dont 935,5 milliards d’euros déposés sur les produits d’épargne réglementée. Une partie de cette manne peut être utilisée pour créer de nouveaux livrets réglementés au lieu d’augmenter la dette extérieure nette de la France qui a atteint 1 102 milliards d’euros soit 39,1% du PIB. Avec des plafonds de versement, les nouveaux produits d’épargne seraient garantis et rémunérés. Les nouveaux contrats devraient présenter plusieurs atouts pour les consommateurs : flexibilité, frais de gestion nuls, pas de frais de transfert, avantages fiscaux, etc.

Les investissements retenus doivent être de haute qualité, nécessaires et utiles tels que la transition écologique, la santé et la dépendance, la ruralité et les infrastructures, etc. La France ne devrait pas opérer de dépenses publiques de fonctionnement pour des raisons électorales, ni pratiquer une politique économique de l’offre.

La dernière étude du FMI en 2020, portant sur les pays avancés et les pays émergents, a montré que financer par un accroissement de la dette « une augmentation de l’investissement public égale à 1% du PIB renforcerait la confiance dans le redémarrage de l’activité et dynamiserait le PIB de 2,7%, l’investissement privé de 10% et l’emploi de 1,2% ».

Fret SNCF: Transfert avant liquidation ?

Fret SNCF: Transfert avant liquidation ?

 

La direction du groupe public SNCF a annoncé que son entreprise chargée du transport de marchandises va disparaître le 1er janvier prochain. Elle va laisser la place à deux sociétés distinctes : d’une part, Hexafret, pour le transport de marchandise, et d’autre part …. Technis pour la maintenance des locomotives !

Cette disparition de Fret SNCF « est très dure pour les cheminots », a reconnu Frédéric Delorme, le président de Rail Logistics Europe, la holding regroupant toutes les activités fret de la SNCF (Fret SNCF, Captrain, transport combiné…). Malgré l’affaiblissement de l’entreprise, il estime que les conditions sont réunies « pour se développer sur le plan économique ». « Ces sociétés (Hexafret et Technis) vont bénéficier de facteurs favorables », assure-t-il !

Fret SNCF est actuellement leader du fret ferroviaire en France. L’entreprise représente près de la moitié des parts de marché avec un chiffre d’affaires de 700 millions d’euros annuel.

Fret SNCF pourrait bien suivre le chemin des autres activités déjà abandonnées par l’entreprise : le trafic express, le transport de messagerie, le wagon isolé et de nombreuses lignes et points de desserte. Exemple pour la messagerie d’abord isolée dans un service spécifique le Sernam, , puis privatisé enfin liquidé.

D’une certaine manière c’est une réforme à l’envers car s’il y a bien un créneau où le fer  est compétitif c’est celui des trains complets et non l’inverse. En la circonstance, il ne s’agit pas de concurrence mais tout simplement de transfert pur et simple des trains complets au privé.

Dans un communiqué publié le même jour, la CGT-Cheminots, l’Unsa-Ferroviaire, Sud-Rail et la CFDT-Cheminots s’indignent des « multiples réorganisations, déstructurations du système ferroviaire public ». Elles « viennent percuter de plein fouet le nécessaire développement d’un outil public ferroviaire voyageurs et marchandises performant », fustigent les syndicats. Ils demandent donc de « mettre fin » au plan de discontinuité et dénoncent aussi le processus d’ouverture à la concurrence dans le transport de voyageurs. « Le point commun de ces stratégies est de remettre en cause l’unité du Groupe et son cadre social dans le cadre d’un abaissement du niveau des droits et garanties des cheminots », dénoncent-ils.

 

Stratégie énergétique : une consultation publique bidon !

Stratégie énergétique : une consultation publique bidon !

Le gouvernement français veut lancer une consultation publique sur l’énergie tout simplement pour éviter l’obstacle du Parlement où les contradictions sont rédhibitoires. Une énième consultation sur la question et qui devrait se traduire non pas par une loi mais par la publication d’un décret simple en 2025.Théoriquement il faut évidemment se réjouir de voir le débat sur les grandes questions stratégiques qui structurent l’avenir élargi à l’ensemble de l’opinion. En réalité , cette consultation sera comme les autres : bidon. Il y aura deux ou trois grandes réunions solennelles, de grands discours et on ne retiendra pas grand-chose de la vision d’avenir. De toute manière, les points de vue sont relativement inconciliables entre les partisans du tout nucléaire qui représente un atout économique et écologique indiscutable et les écolos politisés qui ne jurent que par des énergies alternatives sans doute utiles  mais complètement inadaptés aux besoins globaux.

Cette grande consultation sur le plan démocratique ressemblera sans doute à ce » grand débat nationa »l qu’avait lancé le président de la république et dont aucune synthèse ni aucune orientation n’ont été tirées.

On objectera qu’ici ou là dans quelques grandes villes on va organiser entre les deux camps opposés quelques séminaires ou réunions solennelles. Quelques articles dans les journaux locaux. Globalement comme d’ailleurs à chaque fois lors des consultations publiques seulement une infime partie de la population aura l’occasion de donner son avis et en six semaines.
En cause l’organisation même de nos pratiques démocratiques. Ces débats publics type « conventions citoyennes » sont bidons tout simplement parce qu’on ne peut pas brusquement devenir en quelques jours ou quelques semaines un expert capable de prendre en compte la problématique globale, la question énergétique bien sûr mais plus généralement la question économique mais aussi sociale, sociétale voire culturelle.

Ces débats d’une grande complexité exigent un minimum de sérieux et de connaissances que seules les organisations et institutions représentatives peuvent aborder avec pertinence. Or précisément depuis l’ère Maco,n la plupart des institutions et organisations intermédiaires ont été ignorées encore davantage que naguère.

Lae gouvernement a donc  lancé ce lundi une consultation publique sur la « Programmation pluriannuelle de l’énergie » (PPE), c’est-à-dire la feuille de route pour la production et la consommation de chaque source d’énergie dans l’Hexagone sur les dix ans à venir (2025-2035).

Le document devrait entraîner la publication d’un décret « d’ici à la fin du premier trimestre 2025 », après plus d’un an et demi de retard. Et non d’une loi, comme l’avait pourtant promis par Emmanuel Macron en 2019, afin d’éviter les débats parlementaires sur ce sujet explosif. Il s’agissait en effet d’une obligation légale, d’ailleurs inscrite dans le Code de l’Energie.

Concrètement, pendant six semaines, chacun pourra donner son avis sur les documents soumis à consultation, qui ont été mis en ligne cet après-midi. L’idée : établir une « planification » des sources de production d’énergie (nucléaire, renouvelables…) avec des cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre associées, mais aussi des objectifs sur la sobriété, sans devoir passer par le Sénat et l’Assemblée nationale. Et pour cause, une grande partie de la gauche entend diminuer le poids du nucléaire, tandis que la droite se refuse au développement massif du renouvelable.

Il  faudra utiliser davantage d’électricité pour se passer du gaz, du fioul et du pétrole, puisque la part de ces fossiles dans la consommation finale passera de 60% en 2022 à 42% en 2030, indiquent les documents. Ce qui ne signifie pas que la demande globale d’énergie montera en flèche. À l’inverse, celle-ci devrait même décliner de 20% en 2030 par rapport à 2012. Sobriété, efficacité et électrification seront donc les maîtres-mots.

 

Élections présidentielles États-Unis : les Américains vont-ils choisir un abruti et un voleur ?

Élections présidentielles   États-Unis : les Américains vont-ils choisir un abruti et un voleur ?

 

 On peut à juste titre s’interroger sur le risque que pourraient prendre les Américains en choisissant comme futur président un abruti et un voleur. On objectera qu’en France le niveau politique général bien qu’affaibli est cependant supérieur à celui des États-Unis ou le fric commande tout. En outre, le fait d’avoir choisi l’inconsistant Macron nous discrédite un peu quant à la pertinence de nos choix politiques. La France a en effet élu un adolescent condescendant et incompétent là où il y avait besoin de maturité et de vision stratégique.

Aux États-Unis où tout est permis on peut exprimer toutes les promesses, dire toutes les insultes y compris les plus personnelles. Trump fait du Trump. Ce qu’il a toujours fait en évitant d’ailleurs de faire des études et en trichant en permanence sur son patrimoine porté à bout de bras par des banques auxquels il a menti mais qui d’une façon ou d’une autre sont contraintes d’être solidaire des folies du milliardaire.

La vérité c’est que Trump n’a aucun projet, aucune visée stratégique voire aucune idéologie. Il peut changer de position à chaque instant en l’enveloppant dans son délire verbal inconsistant et d’une pauvreté intellectuelle qui désarme.

Il promet tout simplement de régler tous les problèmes mondiaux d’un claquement de doigt. En face évidemment les autres grandes puissances politiques se réjouissent de la médiocrité d’un tel responsable notamment Poutine et les Chinois..
L’Europe subira sans doute aussi les conséquences de ce choix irrationnel avec la volonté américaine de ce désengager d’un continent qui présente moins d’intérêt pour elle que par exemple la zone asiatique.

Notons cependant que l’ascension de Trump est également due à un excès de bureaucratisation chez les démocrates englués eux aussi comme en Europe et en France dans des systèmes procéduriers et le copinage.

 

États-Unis : une démocratie au point de rupture

 

États-Unis : une démocratie au point de rupture

Les Démocrates semblent avoir pris le dessus sur les Républicains en juillet 2024, en changeant le scénario de la campagne avec le retrait de Joe Biden. Ils ont, ce faisant, libéré une véritable énergie, visible à la fois dans l’augmentation des collectes de fonds et dans l’enthousiasme des foules aux rassemblements de la nouvelle candidate, Kamala Harris. Mais l’élection est loin d’être gagnée pour autant. À vrai dire, elle va se jouer dans un mouchoir de poche, non pas tant du fait de la volatilité de l’électorat, que parce que la planche électorale des Démocrates a été largement savonnée par les Républicains depuis 2021. Concentrés à empêcher une autre victoire d’un candidat démocrate en 2024, ils ont creusé les failles de l’élection présidentielle au point de sa potentielle rupture.Pour comprendre l’hypothèse d’un scénario catastrophe du blocage de l’élection de novembre 2024 si celle-ci se soldait par une victoire de Kamala Harris, il faut revenir au caractère contre-majoritaire, voire anti-démocratique selon certains commentateurs, du système électoral américain.

 

par 

Professeur des Universités en histoire contemporaine, Aix-Marseille Université (AMU) dans The Conversation 

 

Au commencement de la République, les concepteurs de la Constitution fédérale, soit les 55 délégués de la Convention de Philadelphie (1787), ont défini le pouvoir du président et fixé son mode de désignation. Le président du gouvernement fédéral n’est pas élu directement par le peuple américain mais par un collègue électoral issu des États (article 2, section 1 de la Constitution). Les conventionnels, attachés au souverainisme local dans l’architecture fédérale, ont fabriqué une organisation alambiquée de l’élection collégiale à travers le suffrage indirect et à deux niveaux au sein de chaque État, à laquelle se sont rajoutées – on l’a vu – toutes les limitations des lois électorales laissées à la compétence des États, dont celle du droit de vote lui-même, réservé par le passé aux hommes blancs, libres, et de plus de 21 ans.

Les chambres locales forment des listes de « grands électeurs » qui représentent chaque candidat national. Hormis le Maine et le Nebraska qui ont un système un peu différent, chaque liste partisane comprend un nombre fixe de grands électeurs, correspondant au nombre d’élus que l’État envoie au Congrès fédéral (deux sénateurs pour chaque État, et un certain nombre de représentants, proportionnel à la population de l’État), soit par exemple 40 grands électeurs au Texas contre 3 au Wyoming. Par le principe du winner takes all, le candidat présidentiel qui arrive en tête dans un État à l’issue des décomptes de toutes ses circonscriptions obtient la totalité des grands électeurs dudit État.

L’ensemble des grands électeurs « élus », soit un total de 538 personnes, vote à son tour depuis le niveau local pour le candidat qu’ils représentent. Il faut un résultat de 270 votants minimum pour être élu président. Chaque État transmet officiellement le résultat de ce vote au Congrès. Ce dernier proclame, État par État, le résultat obtenu et le valide, toujours État par État, lors de la cérémonie de certification nationale du 6 janvier, sous la supervision du vice-président sortant. Et c’est le vice-président qui annonce publiquement le nom du nouveau président.

Ce système complexe présente de nombreux défauts, que les Républicains ont creusés ces dernières années. Il fait difficilement correspondre le vote réel avec les listes gagnantes des grands électeurs, un problème qui s’est aggravé du fait des charcutages de circonscription auxquels se rajoutent les tracasseries des lois électorales locales. Cela provoque un effet « mouchoir de poche ». Il suffit de quelques voix de plus dans une circonscription au coude à coude pour qu’une liste rafle la victoire dans un État, comme les 537 voix finales (sur 6 millions de votants), décomptées en faveur de George W. Bush en 2000 en Floride, après trois recomptages manuels et l’intervention de la Cour suprême. La Floride comptant 25 grands électeurs, Bush Jr. avait ainsi gagné non seulement la Floride, mais aussi l’élection présidentielle…

Le paradoxe inverse est bien que le candidat qui a cumulé le plus de voix dans le décompte national n’obtienne pas nécessairement la majorité des grands électeurs. Ainsi, en 2016, Donald Trump a obtenu 74 grands électeurs de plus qu’Hillary Clinton, alors que cette dernière avait gagné le vote populaire avec une avance de 3 millions de voix. Trump a été le cinquième président des États-Unis depuis 1876 à être élu sans gagner le vote populaire.

Le scénario aurait pu se reproduire en 2020. Cette fois-ci, c’est bien Joe Biden qui a gagné, avec 74 grands électeurs et 7 millions de voix de plus que son adversaire. Mais il aurait suffi que Trump ait remporté 12 000 voix supplémentaires en Géorgie (16 grands électeurs), 81 000 en Pennsylvanie (20 grands électeurs) et 27 000 dans le Wisconsin (10 électeurs) pour être élu.

Dans un tel contexte, il est particulièrement tentant de s’en prendre aux résultats des circonscriptions et des États bascules (swing states), qui changent le profil majoritaire des grands électeurs. De fait, dès le printemps 2020, Donald Trump, alors président, a commencé à dénoncer, accompagné par de nombreux ténors du Parti républicain, un prétendu trucage démocrate de l’élection à venir, à travers l’extension du vote par correspondance, alors que cette extension était en réalité due à la nécessité de concilier précautions sanitaires et participation, dans un contexte marqué par la pandémie de Covid-19.

L’accusation de fraude, aussi vieille que les premières campagnes électorales, a refait surface, doublée d’un imaginaire complotiste. Outre la défiance exacerbée des électeurs républicains, elle a donné naissance au mouvement Stop the Steal, (arrêtez le vol) au soir des élections de novembre 2020, dont les actions ont atteint leur paroxysme avec l’occupation du Capitole le jour de la certification nationale. Le Parti républicain n’a pas été en reste. La majorité n’a pas désavoué le président dans son refus chaotique d’accepter les résultats électoraux. Beaucoup ont été complices de ses efforts pour invalider les résultats.

Les campagnes Trump locales ont cherché à mobiliser tout l’arsenal juridique à leur disposition pour remettre en question les résultats des États bascules. Même après l’attaque du 6 janvier contre le Congrès fédéral, 138 des 209 représentants républicains présents, soit les deux tiers de la représentation républicaine et 11 sénateurs républicains se sont opposés à la certification des résultats de l’Arizona et de la Pennsylvanie. Ce sont des individus attachés au respect des procédures et institutions, convaincus du scrupule démocratique de tous les acteurs de la certification – comme le vice-président Mike Pence et la Speaker républicaine de la Chambre Liz Cheney –, bien plus que le système constitutionnel des checks and balances, qui ont permis d’empêcher l’invalidation des élections de 2020.

Par la suite, après les résultats du recensement de 2020, les Républicains ont continué à restreindre l’accès au vote de l’électorat démocrate, et ont déployé beaucoup d’énergie pour monopoliser le contrôle politique de tout le système électoral local, dont les dépouillements et les certifications de résultats. En effet le Secretary of State de l’État local est à la tête du système administratif, s’assurant du bon déroulement des élections. Il certifie les élections et peut demander aux fonctionnaires d’appliquer certains aspects de la loi électorale plus que d’autres. Comme la décentralisation opère aussi au sein des États, les élections sont également gérées au niveau de chaque comté qui possède un conseil électoral (board of elections). Ses membres sont traditionnellement nommés par le gouverneur.

Chaque échelon administratif du processus électoral est donc accompagné d’officiels politiques. Les conseils de comté ainsi que leur sommet, le conseil électoral étatique, ont normalement des mécanismes de supervision fédérale instaurés par le Civil Rights Act de 1965, pour empêcher les abus liés à la partialité des élus locaux. Mais la Cour suprême a jugé inconstitutionnelle la supervision de la composition des conseils électoraux (Shelby County, 2013), dans une jurisprudence très commentée. En conséquence, la course au monopole des conseils électoraux et à l’élargissement de leurs compétences dans le contrôle des résultats a été relancée.

Le cas de la Géorgie est à ce point illustratif qu’il a fait l’objet d’un reportage inquiétant du New York Times, quant à son effet papillon potentiel, qui doublerait l’effet mouchoir de poche.

Dans cet État, Trump a accusé les Démocrates d’avoir bourré les urnes et trafiqué les machines de comptage en 2020, avant de tenter de renverser les résultats, en faisant pression sur le Secrétaire d’État républicain de Géorgie (janvier 2021), initiative qui lui a valu une inculpation pénale. En mai 2024, le conseil électoral de Géorgie a été noyauté par des élus trumpistes. Il a entériné, entre autres, le principe de l’enquête raisonnable par les conseils électoraux des comtés qui certifient l’élection dans leur circonscription, en cas de doute ou de suspicion de fraude.

Si Kamala Harris gagne la Géorgie à la manière étroite de Joe Biden en 2020 (de 12 000 voix), il suffirait de lancer une enquête pour suspicion de fraude dans un comté passé aux démocrates – comme Fulton ou DeKalb – pour retarder le plus longtemps possible le processus de dépouillement et bloquer la certification, non seulement au niveau du comté mais aussi de l’État local et, de fil en aiguille, au niveau national. Et s’il fallait monter jusqu’à la Cour suprême pour trancher le litige afin de tenir les délais de la certification nationale, les Républicains peuvent espérer que cette dernière tranche contre Harris, comme elle l’a fait en 2000 contre Al Gore.

Le spectre d’un tel scénario est néanmoins contrebalancé par la vigilance du procureur général de l’État et celle du Secrétaire d’État, le Républicain Brad Raffensperger, qui a résisté à Trump en 2021 et qui a honnêtement veillé, depuis son arrivée en 2018, à ce que la participation électorale dans son État soit la plus large possible.

La Cour suprême, comme nous venons de le dire, ne paraît pas le meilleur rempart contre les dérives du système électoral national. Le fait que les membres de la Cour soient nommés par le président de l’Union – un tiers des neuf juges ont été nommés sous Donald Trump – permet une fluctuation de leur sensibilité politique, laquelle paraît de plus en plus favorable aux Républicains, au point que sa dernière jurisprudence en la matière, le 1er juillet 2024, a confirmé l’immunité de Donald Trump dans l’affaire du Capitole.

La Cour a émis un certain nombre d’autres jurisprudences qui vont à l’encontre des lois fédérales sur la transparence et l’égalité électorale dans les États. Elle a redonné une large marge de manœuvre aux États sur leur droit électoral, comme accepter le financement des candidats et campagnes par des entreprises (corporations) décrétées « personnes morales » tout comme les groupes d’intérêt religieux (Citizens United, 2010). Elle a mis fin à la tutelle fédérale de vérification des mesures locales à effet discriminatoire (Shelby County, 2013), ce qui a conduit à accepter le charcutage partisan des circonscriptions (Rucho et al. v. Common Cause de 2019 et surtout Brnovich v. Democratic National Committee de 2021).

In fine, comment protéger la démocratie électorale américaine et redonner au vote universel – sans discrimination d’aucune sorte entre les citoyens – son caractère prioritaire ? À lire les analyses, il faudrait rebooster la loi fédérale sur les droits civils et modifier voire mettre fin au système des grands électeurs.

Une mobilisation existe en faveur d’un suffrage national semi-direct pour les élections présidentielles, le National Popular Vote Interstates Compact. Les États signataires de ce projet, comme le Maine récemment, s’engagent à attribuer toutes les voix de leurs grands électeurs au candidat qui gagne le vote populaire au niveau national. 17 États plus le district de Columbia ont adopté ce protocole. Il manque 61 grands électeurs de plus pour que le protocole entre en vigueur : ce serait alors la fin du principe du collège électoral, puisque le vainqueur du vote populaire serait nécessairement élu.

Par ailleurs, deux projets de loi fédérale, le Freedom to Vote Act, bloqué par le Sénat en 2019 et 2021, et le John Lewis Voting Rights Act bloqué par le Sénat en 2022, peuvent être relancés par les Démocrates, afin de rétablir certains principes visant à assurer l’égalité dans le vote : ces textes imposent la vérification fédérale des effets discriminatoires de tout changement de lois électorales locales (federal pre-clearance), y compris le charcutage partisan des circonscriptions (gerrymandering). Ils proposent aussi l’amélioration du réseau des bureaux de vote et leur accessibilité physique et temporelle (vote anticipé), l’élargissement des procédures de vote par correspondance, la réforme du financement des candidats et de leur campagne, la mixité politique des conseils électoraux locaux, etc. Tous les dysfonctionnements du système électoral américain sont à portée de correction des élus du Congrès… pour peu que le Sénat fédéral ne soit pas dominé par des Républicains récalcitrants.

Bolloré Videndi : Spoliation d’actionnaires ?

Bolloré Videndi : Spoliation d’actionnaires ?

Caroline Ruellan, présidente du Cercle des administrateurs, dénonce, dans une tribune au « Monde », le projet de scission de Vivendi en trois entités cotées sur trois places différentes, au détriment de celle de Paris.

 

L’annonce par le conseil de surveillance de Vivendi, mardi 29 octobre, du projet de scission visant à « libérer pleinement le potentiel de développement des différentes activités de Vivendi » n’est pas sans poser plusieurs questions, notamment sur le capitalisme que nous voulons et sur l’avenir de la place financière de Paris.

Si la séparation des trois entités du groupe est censée permettre de réduire la décote de holding dont elles pâtiraient, on voit mal en quoi le choix des trois places de cotation que sont Londres pour Canal+, Amsterdam (avec une fondation) pour Havas et Euronext Growth pour Hachette contribuerait à cet objectif.

Pour Canal+, on conçoit les bénéfices d’accès au marché anglo-saxon, alors même que les deux tiers des abonnés se trouvent hors de France. On comprend également les mérites de l’opération au regard d’une réorganisation de l’empire Bolloré dans une perspective successorale, cette scission permettant de dégager quatre entités nouvelles.

De façon plus fondamentale, cette opération soulève quelques interrogations cardinales que les actionnaires devront bien avoir à l’esprit, le 9 décembre, lors de la prochaine assemblée générale de Vivendi.
En effet, cette scission consistant à coter trois futures entités sur trois marchés réglementés, selon une ingénierie juridique complexe, aura pour conséquence de soustraire Vivendi à l’obligation de lancer une OPA résultant du franchissement de seuil de 30 % du capital ou des droits de vote….

La dernière élection démocratique aux États-Unis ?

La dernière élection démocratique aux États-Unis ?

 

L’écrivain américain affiche son inquiétude, dans une tribune au « Monde », en cas de nouvelle victoire de Donald Trump, qui risque de gouverner comme si le pays était une société privée qu’il pourrait détruire à sa guise.

Les Etats-Unis s’apprêtent à descendre au fond d’un gouffre, et qui sait si nous en sortirons un jour. Le 5 novembre 2024 pourrait être la date de la dernière élection légitime dans notre pays. J’ai pris conscience que quelque chose n’allait pas quand Donald Trump a annoncé que sa horde d’adeptes du « Make America great again » devait absolument venir voter pour lui le jour de l’élection car ils n’auraient plus besoin de voter par la suite. J’avais supposé qu’il s’agissait d’une démonstration flamboyante de sa superbe, et que notre ex-président, avec sa fausse chevelure orange et son étrange teint orange, fanfaronnait auprès de ses potes. Aujourd’hui je n’en suis plus si sûr.Trump a échoué dans sa première tentative de coup d’Etat en 2021. [Pour la présidentielle de 2020], il avait mis au point une combine pour trouver de faux grands électeurs en sa faveur, mais le plan n’a pas fonctionné, grâce à Mike Pence, son vice-président, qui, dans un geste de résistance, a certifié le nombre de votants dans chaque Etat.

Pourtant, Trump n’a pas abandonné. Il a encouragé les Proud Boys et d’autres suprémacistes blancs à prendre d’assaut le Capitole, à Washington, le 6 janvier 2021, à tenter de pendre Mike Pence et d’assommer Nancy Pelosi, alors présidente démocrate de la Chambre des représentants, afin de pouvoir continuer à résider sur Pennsylvania Avenue [où se situe la Maison Blanche], en victime d’une élection truquée.

1...171819202122



L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol