Des jeux olympiques aux jeux politiques
Pour Ariel Weil, maire PS de Paris Centre) , la politique « est un art, pour lequel il faut néanmoins des talents, comme ceux des athlètes, et une crédibilité ». dans La Tribune
Un ballon qui s’envole chaque soir dans les cieux de Paris en charriant la vasque olympique, un piano renversé dans les airs, des athlètes en surf, à vélo ou dans l’eau, qui semblent défier les lois de la physique quantique devant des monuments qui charrient les réminiscences de la Grèce ou de l’Égypte antiques. On a tout vu et tout dit sur ces jeux. S’ils ont tant fasciné, c’est qu’il se sont inscrits dans les 4 dimensions de l’espace et du temps. L’espace, on l’a bien vu avec ces clichés déjà mythiques d’athlètes dans toutes les positions. Le temps aussi a semblé suspendu, mêlant les images des derniers jeux de Paris en 1924 aux souvenirs et aux records dépassés des éditions précédentes, de Los Angeles à Tokyo, d’Athènes à Londres, de Munich à Rio.
Ces jeux nous ont aussi dit quelque chose sur le service public à la française, sa capacité de mobilisation autour d’un événement exceptionnel en surmontant les complexités administratives qui le minent au quotidien. A l’image des forces de l’ordre omniprésentes, cette surmobilisation face à la crise, qui évoque celle des athlètes français, cette capacité à faire travailler dans le même sens l’ensemble des acteurs – de la ville à la métropole et de la région à l’Etat – nous l’avions déjà expérimentée lors de la crise sanitaire.
Politiquement, quel héritage en espérer ? Je ne reviens pas sur l’idée mystérieuse de dissoudre l’Assemblée immédiatement après la défaite du gouvernement aux européennes. Elle semblait absurde à la veille des jeux olympiques, qu’elle prenait le risque de fragiliser, elle le paraît davantage à leur lendemain, alors qu’ils se sont si bien passés. Il n’était pas nécessaire de dissoudre mais tant qu’à le faire, mieux valait attendre la rentrée pour en prendre la décision ou en programmer l’échéance. Nul doute, les résultats auraient favorisé le camp de ceux qui ont planifié et géré cet événement planétaire sans accroc, plutôt que les Cassandre qui prédisaient le pire ou en dénonçaient le principe.
Et si c’était ce camp, c’est-à-dire au fond celui des gestionnaires plutôt que des populistes, celui de l’action plutôt que de la parlote, dont pouvait aujourd’hui émerger la solution ? En réalité, il n’y a pas tellement le choix puisque l’équation de cette chambre introuvable rend impossible toute solution aux extrémités de l’échiquier politique.
Oui, mais à condition de tenir compte du vote tel qu’il s’est exprimé dans les urnes. Ce vote ne rend possible un gouvernement d’union qui serait une simple ouverture du gouvernement de la majorité. Une coalition, certes, mais une coalition de cohabitation. On pourrait même tenter le néologisme : une « cohalitation ». Ceux qui ont dit qu’ils avaient gagné avec une minorité des voix ont eu tort ; ceux qui avec la même minorité des voix ont dit qu’ils n’avaient pas perdu aussi. Le camp présidentiel battu, il ne peut prétendre diriger la coalition. Et les oppositions minoritaires, elles, doivent forcément composer.
Comment ? Bien entendu en partant d’un programme négocié autour de mesures qui paraissent porteuses de consensus, sur la qualité du service public, la sécurité, le logement, le climat, le pouvoir d’achat, la santé ou la fin de vie. Il faut partir de là.
Et ensuite ? Tony Estanguet, Teddy Riner ou Marie-José Perec à la barre ? Certains ont évoqué en plaisantant à moitié un athlète à la tête du gouvernement. On comprend l’intuition qui cherche à installer quelqu’un qui fait l’unanimité des Français. Mais à chacun son talent. Si à la rigueur un ancien sportif ayant fait ses preuves à l’organisation d’un événement majeur n’est pas absurde, il est temps de nommer une ou un ministre d’expérience politique, quelqu’un à même de piloter cette coalition de cohabitation si peu française et pourtant si nécessaire.
J’ai suffisamment dit et écrit que la politique n’était pas un métier. Elle est un art, pour lequel il faut néanmoins des talents, comme ceux des athlètes, une expérience et une crédibilité. Bien sûr, en tant que premier soutien de la Convention de Bernard Cazeneuve, je suis persuadé qu’il répond à chacune de ces exigences. Mais le point de départ, et même l’urgence, c’est l’écriture de ce programme de « cohalitation ».
Que les femmes et les hommes de bonne volonté se mettent au travail !
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