Personne ne veut vraiment réduire la dette !
Les avertissements pleuvent, avant comme après les élections européennes et législatives. Agences de notation financière, FMI, Commission européenne, Conseil d’orientation des retraites, Haut Conseil des finances publiques, Cour des comptes… Ces institutions partagent une même préoccupation : les dérapages de la dette publique et du déficit budgétaire en France et ses conséquences. Pour le pays, ses voisins et l’euro. Le FMI a émis un appel en faveur de nouvelles économies dès le 23 mai, et Standard & Poor’s a dégradé la note de Paris huit jours plus tard. Avant que la Commission européenne n’enclenche cette semaine une procédure pour déficit excessif contre la deuxième économie de la zone euro, dont la dette est la deuxième plus élevée des 20 États membres, derrière celle de l’Italie, et dont le déficit frôle le double du maximum de 3 % imposé par les règles européennes.
un papier de Marie-Pierre Gröndahl dans La Tribune
Le même jour, le 16 juillet, le rapport annuel sur l’économie du FMI a rappelé l’urgente nécessité de contenir la dette publique (3 160 milliards à la fin mars, soit 110,6 % du PIB) ainsi que le déficit budgétaire (5,6 % du PIB, au lieu des 4,9 % prévus), alors que les perspectives de croissance, à 0,9 % en 2024, restent faibles. « La France doit rapidement agir sur sa trajectoire budgétaire si elle veut recréer des marges de manœuvre, a estimé le chef économiste du Fonds, Pierre-Olivier Gourinchas. Sans ajustement sérieux, il sera difficile d’atteindre les objectifs d’un retour du déficit à 3 % du PIB pour 2027. » D’autant plus que la charge de la dette s’est alourdie avec les hausses de taux d’intérêt. Son coût s’élèvera cette année à 55 milliards d’euros, puis à 83 milliards par an d’ici à 2027.
Alors que le déficit budgétaire s’est accru, en raison d’un manque inattendu de recettes fiscales en 2023, les prévisions de sa réduction par l’ex-gouvernement n’ont convaincu ni Bruxelles ni Washington. L’instabilité politique amplifie les inquiétudes. « Qui que ce soit qui gouvernera demain la France devra s’emparer de cette situation des finances publiques. Il devra réduire notre endettement », a déclaré le 16 juillet Pierre Moscovici, président de la Cour des comptes et ancien ministre de l’Économie, qui avait pourtant plaidé contre les hausses d’impôt lors de son passage à Bercy. Selon lui, la précarité des finances publiques s’aggravera avec la facture de la transition énergétique, jusqu’à 7 points de pourcentage jusqu’à 2030.
Face à ces risques, aucune des forces politiques n’a proposé de mesures de rééquilibrage budgétaire. « Le NFP et le RN ont au contraire présenté des programmes comportant des dépenses supplémentaires », s’alarme le chef économiste d’une grande banque française. Parmi les mesures prônées par le FMI figurent la réduction des allocations chômage, la baisse de la masse salariale du secteur public et la limitation des « chevauchements » entre niveaux administratifs. Toutes politiquement explosives. Un autre levier serait de renoncer à l’indexation totale des pensions de retraite sur l’inflation (revalorisées de plus de 5 % au 1er janvier, pour un coût de 14 milliards d’euros). Une option rejetée par Laurent Wauquiez (LR) il y a quelques jours. Atteindre les 3 % de déficit en 2027 suppose de réaliser 80 milliards d’euros d’économies en trois ans. Reste à définir comment y parvenir.
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