Faire l’inventaire des dépenses publiques (Jean Pisani-Ferry)
Par Jean Pisani-Ferry , Professeur d’économie à Sciences Po (Paris), à l’Institut Bruegel (Bruxelles) et au Peterson Institute for International Economics (Washington) dans » Le Monde ».
Le péril financier n’a rien d’immédiat, mais il doit conduire à un réexamen collectif du budget et de son financement, sans exclure ni emprunt, ni impôt, ni réductions, plaide l’économiste dans sa chronique.
L’annonce, fin mars, d’un déficit des comptes publics sensiblement plus élevé que prévu (5,5 % du PIB en 2023, contre 4,9 % retenus dans la loi de finances) a signifié la fin du « quoi qu’il en coûte » et marqué l’entrée de la France dans une crise budgétaire qui est appelée à durer. Les 10 milliards d’euros d’économies annoncées en février ne suffiront pas, à l’évidence, à colmater la brèche, et pour le budget 2025 Bercy envisage déjà 20 milliards de coupes supplémentaires.
A ce stade, cependant, le choc est plus politique que financier. L’écart des coûts de financement entre la France et l’Allemagne reste aux alentours de 50 points de base (0,5 point de taux) et si la nervosité est forte à l’approche du verdict des agences de notation, les conséquences d’une éventuelle dégradation de la note française resteraient sans doute limitées : le coût des emprunts souverains de l’Espagne, qui est moins bien notée que la France, n’est que de 80 points de base supérieur à celui de l’Allemagne. Le péril n’est donc pas immédiat.
Si l’énervement n’est pas de mise, trois questions lourdes se posent en revanche pour les années à venir : celle des objectifs à retenir, celle des redéploiements envisageables et celle du financement des priorités.
Que faut-il viser ? Comme le dit à juste titre Olivier Blanchard, l’objectif pour la France à horizon cinq-dix ans devrait être de ramener à zéro le déficit hors charge d’intérêts, de façon à stabiliser le ratio de dette publique et à écarter le risque d’une évolution explosive. Or ce déficit, dit « primaire », a été de 104 milliards en 2023, soit 3,7 % du PIB.
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