Semaine en 4 jours : quid de la valeur travail….et de la compétitivité ?
Alors que perdurent les difficultés de recrutement, la question de la qualité de vie et des conditions de travail revient au cœur du débat. Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre Gabriel Attal a demandé à ses ministres d’expérimenter au sein de leurs administrations la semaine « en » 4 jours, à salaire et temps de travail constants, afin de renforcer l’attractivité et la fidélisation de la fonction publique, et d’offrir un meilleur équilibre de vie aux agents.
Dans la fonction publique, l’intérêt d’une carrière linéaire et statutaire compense en effet de moins en moins, pour les jeunes diplômés, le manque de reconnaissance salariale et sociale. La semaine en 4 jours pourrait aussi permettre d’allonger l’amplitude horaire d’ouverture des services publics aux usagers.
Et si cette quantité accrue s’accompagnait d’une qualité de service renforcée, elle pourrait véritablement améliorer la satisfaction des usagers.
Mais les risques sont nombreux, pour la fonction publique comme pour l’entreprise privée du reste. L’expérimentation augure d’abord mal d’une volonté d’agir de l’exécutif dans le domaine de la réforme de la fonction publique, pourtant indispensable pour contribuer à réduire la dette publique et à restaurer notre souveraineté financière. Elle pourrait également réduire les jours ouvrés de service des administrations.
Avec 1h50 de plus par jour, le nouveau rythme de travail risque d’augmenter la pénibilité du travail, altérant non seulement la qualité de vie au travail, mais aussi la qualité de service des administrations et des entreprises. Ce rythme risque encore de compliquer l’exercice des responsabilités familiales. L’expérimentation n’a d’ailleurs pas rencontré le succès chez les agents des Urssaf de Picardie où elle était testée pour la première fois pendant un an…
La semaine de travail en 4 jours revient à accorder 47 jours de temps libre supplémentaires par an. C’est reléguer un peu plus le travail dans l’organisation de la semaine et de l’année. C’est apporter de l’eau au moulin des chantres de la remise en cause de la valeur travail, qu’ils annoncent la fin du travail ou dénoncent les bullshit jobs.
Depuis l’humanisme des Lumières, le travail a pourtant toujours occupé un rôle structurant pour l’homme dans la société. Et plus que toute autre organisation économique, les TPE-PME accordent une grande valeur au travail. Car c’est par les statuts individuels et collectifs que les individus reçoivent considération et reconnaissance. Valoriser le travail permet ainsi de faire société au double sens économique, de l’entreprise, et citoyen, de la collectivité.
Expérimenter la semaine en 4 jours, c’est finalement ne pas travailler moins pour risquer de ne pas travailler mieux ! En tout état de cause, l’expérimentation ne saurait aboutir à l’élaboration d’une norme générale. Dans la fonction publique comme dans l’entreprise privée, il faut du cas par cas, sur la base du volontariat ou des recommandations de branches.
Alors que près de deux entrepreneurs de TPE-PME sur trois renoncent encore à des marchés ou réduisent leur activité en raison des difficultés de recrutement, de trop nombreux candidats à l’emploi continuent de décliner des offres, parfois à la moindre contrainte. C’est pourquoi la priorité des priorités doit être de redonner le goût et la fierté du travail « bien fait » à ceux qui s’en détournent, parfois pour lui préférer des revenus sociaux. Dans cette perspective, la « valeur travail » doit redevenir une valeur plus consensuelle au sein de la société, à droite, à gauche et ailleurs.
À cette fin, il est nécessaire de réfléchir, de se positionner et d’agir sur le nouveau sens du travail et le nouvel engagement au travail dans une société, tout à la fois de plus en plus complexe et éduquée, où « l’individu citoyen » ne se contente plus de satisfaire ses besoins élémentaires au travail mais veut satisfaire, et à raison, son besoin de s’accomplir pleinement.
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