Renforcer la présence économique en Afrique
«Nous devons renforcer notre présence économique en Afrique en adoptant une attitude d’égal à égal, sans arrogance, mais sans craindre de promouvoir nos valeurs et nos intérêts», défend le président du Cian, Etienne Giro.
Depuis quelque temps, l’Afrique n’a pas bonne presse. Il faut dire que l’actualité de ces dernières semaines n’a pas été avare en mauvaises nouvelles pour la France. Fermeture du lycée français de Niamey après 60 ans d’activité, annonce de la réduction des bases militaires françaises, sortie de trois pays du Sahel de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), rencontre à Moscou des présidents Poutine et Déby — ce dernier qualifiant la Russie de pays frère —, sommet Italie-Afrique au cours duquel le gouvernement italien cherche à profiter des difficultés françaises sur le continent, défaut de paiement du Niger sur sa dette, et enfin report de l’élection présidentielle au Sénégal. Arrêtons là !
Alors que plane
un sentiment anti-français, ou plutôt anti-politique française, cela fait beaucoup et il ne faut pas s’étonner qu’une certaine morosité, voire une frilosité, s’installe au sein des entreprises françaises vis-à-vis de l’Afrique. Tout cela est d’abord la manifestation d’une évolution profonde du continent depuis trente ans. Avec la fin de l’hégémonie occidentale, elle se traduit par l’émergence d’une nouvelle Afrique, mondialisée, digitalisée et souveraine, pilotée par de nouvelles générations d’Africains plus jeunes. Si l’on ajoute à ces transformations profondes les menaces terroristes, les manipulations sur les réseaux sociaux, certaines maladresses relationnelles franco-africaines, l’excès des normes et les risques réputationnels, il n’est pas surprenant que des entreprises s’interrogent sur leur futur développement sur le continent.
Et pourtant… la réalité est bien différente. Au-delà de ces signaux négatifs, si l’on veut bien regarder le long terme, il est clair que le potentiel de l’Afrique est toujours là. Ses fondamentaux et la réalité des faits font toujours de ce continent une future grande puissance économique, une région d’avenir et prometteuse.
Rentabilité. Il faut d’abord savoir qu’il existe des réponses techniques à tous les risques supposés ou réels qui inquiètent les entreprises, qu’il s’agisse des impayés, de la sécurité, de la santé ou même des désordres politiques. La présence économique française sur le continent est forte et répartie dans tous les pays : plus de 5 000 entreprises répertoriées, près de 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires, 500 000 emplois, le second stock d’investissement direct à l’étranger (IDE) et une bonne rentabilité. En outre le comportement de nos entreprises en Afrique est remarquable, elles ne craignent pas la comparaison avec leurs concurrentes :
action sociale et RSE, attitude citoyenne, africanisation des cadres et des dirigeants, contenu local et partenariats. Elles se comportent bien.
Et nous bénéficions de liens étroits et de relations profondes et anciennes avec l’Afrique : historiques, culturels, linguistiques, techniques (
Ohada ou franc CFA), et enfin des institutions expérimentées et dynamiques au service des entreprises (
Agence française de développement, Business France, Expertise France, BPI).
Voilà pourquoi nous devons renforcer notre présence économique en Afrique en adoptant une attitude d’égal à égal, sans arrogance, mais sans craindre de promouvoir nos valeurs et nos intérêts. A l’instar de celles qui sont déjà installées, les entreprises françaises qui auront cette dynamique ne le regretteront pas. Le secteur privé français peut écrire une nouvelle page des relations entre la France et l’Afrique.
Etienne Giros est président du Conseil français des investisseurs en Afrique.
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