Economie et finances: un monde de casino ?
« Nous vivons mondialement une économie de casino avec des montages financiers toujours plus complexes »
Partant de la myopie des agences de notation qui n’ont pas vu les faillites bancaires, les professeurs de finance Eric André et d’économie Bernard Laurent jugent, dans une tribune au « Monde », que l’endettement privé est plus inquiétant que les déficits publics.
L’actualité économique française est névrotiquement subordonnée aux évaluations données par les agences de notation sur la dette française. Après une semaine d’anxiété à guetter la décision de l’agence Standard and Poor’s, celle-ci a, vendredi 1er décembre, maintenu son évaluation précédente, assortie toutefois d’une perspective négative.
par Eric André
Professeur de finance, EMLyon Business School
Bernard Laurent
Professeur d’économie,EMLyon Business School dans the conversation.
Les commentateurs n’ont pas cessé de rappeler les décisions précédentes des autres agences, la dégradation opérée par Fitch en avril et la moindre sévérité de Moody’s quelques mois plus tard. Le gouvernement, de son côté, n’a pas ménagé sa peine pour convaincre les acteurs des marchés financiers de sa farouche détermination à réduire les déficits publics.
Cette obsession à traquer l’endettement public nous laisse perplexes. Ces agences, qui évaluent la gestion des Etats en les encourageant à respecter l’équilibre budgétaire censé incarner la vertu, sont celles qui n’ont en rien anticipé la chute de la banque Lehman Brothers, en 2008. Par ailleurs, les acteurs des marchés financiers, qui attendent avec impatience le verdict de ces mêmes agences pour mieux faire régner l’orthodoxie libérale, sont ceux-là mêmes qui ont été sauvés par de l’argent public en 2008, puis en 2020.
En 2008, pour éviter l’effondrement des économies sur le modèle de ce que l’on connut dans les années 1930, les Etats et les banques centrales n’ont pas ménagé leurs efforts pour soutenir les banques, les marchés financiers et les entreprises, à telle enseigne que le déficit public américain plongera à 11,2 % du PIB en 2009 tandis que les banques centrales déploieront des trésors d’ingénuité pour multiplier les injections de monnaie en direction des acteurs privés.
Pudiquement on nomma « non conventionnelles » ces politiques que l’on aurait dû qualifier de totalement hétérodoxes, au point que Jens Weidman, l’ancien président de la banque centrale allemande les qualifiera de diaboliques. Au total, vingt-cinq ans plus tard, les bilans des banques centrales sont toujours quatre, six, voire huit fois plus élevés qu’en 2008.
Cet argent magiquement distribué a certes évité l’effondrement des économies, mais il a surtout favorisé la spéculation et, partant, l’envolée des cours de Bourse sans lien avec la santé des économies
0 Réponses à “Economie et finances: un monde de casino ?”