Le monde malade de sa division

Le monde malade de sa division

Autrefois envisagée comme un remède aux troubles géopolitiques, l’idée d’un monde dans lequel le pouvoir et l’influence sont répartis entre un certain nombre de puissances contribue aujourd’hui à la remise en cause du droit international, estime l’universitaire Jean-Yves Heurtebise dans une tribune au « Monde ».

On l’ignore peut-être, parce que tous n’en meurent pas encore, mais le monde est frappé d’une nouvelle maladie humorale : le trouble multipolaire. En 1980, par l’entremise de l’Association américaine de psychanalyse, le « trouble bipolaire » faisait son apparition. Caractérisé par une alternance d’épisodes maniaques et dépressifs, ce « trouble de l’humeur » était diagnostiqué au niveau individuel au moment même où, au niveau collectif, la bipolarité du monde semblait à son apogée avec l’invasion soviétique de l’Afghanistan.

Alors que « bipolaire » était signe de maladie, « multipolaire » en vint à être vu comme symbole de remède. Les organisations internationales n’ont eu de cesse, depuis plus de vingt ans, de promouvoir la « multipolarité » comme solution à tous nos troubles « hégémoniques » ou « bipolaires ». Ainsi, en septembre 2020, 111 chefs d’Etat se prononcèrent à l’ONU en faveur du multilatéralisme, reconnu comme « une nécessité pour un monde plus égalitaire, plus résilient et plus durable ».

Trois ans plus tard, le lancement du troisième forum La Ceinture et la Route pour la coopération internationale a lieu le 17 octobre à Pékin. Des portes dorées s’ouvrent et, au premier plan, s’avançant, sûr de lui, paraît un dirigeant contre lequel la Cour pénale internationale (CPI) a émis un mandat d’arrêt le 17 mars pour crimes de guerre : Vladimir Poutine, aux côtés du président chinois, Xi Jinping, auquel les dirigeants de vingt-deux autres pays emboîtent le pas.

Il y avait eu un précédent : Xi Jinping avait déjà fait au criminel de guerre Bachar Al-Assad l’honneur de le recevoir pour une visite d’Etat quelques semaines auparavant, mettant ainsi fin (victoire multipolaire !) à l’isolement diplomatique de Damas – les milliers de Palestiniens tués en Syrie ne semblant pas avoir, pour Pékin, la même valeur que ceux tués à Gaza.

Mais avec la mise en avant de Vladimir Poutine, l’insulte faite à une institution symbole de l’avancée des droits humains dans la sphère géopolitique, à savoir la CPI, est cette fois-ci avalisée par les puissances présentes, faire-valoir du mépris mis en scène par la Chine à l’égard du droit international.

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