Les palestiniens seraient unanimes dans leur soutien au Hamas !
Leila Seurat, politiste affirme dans le Monde que : « A Gaza comme en Cisjordanie, les Palestiniens sont unanimes dans leur soutien au Hamas ». Une affirmation un peu rapide et pas très pertinente. Pour preuve d’abord en Cisjordanie, la mobilisation des palestiniens en faveur du Hamas est finalement modeste. Les palestiniens vivants en Israël ont plutôt tendance à condamner la brutalité du Hamas. Même à Gaza, le soutien au Hamas est très discuté eu égard à la corruption du Hamas et son incapacité à gérer la zone.
L’injonction au qualificatif du Hamas comme terroriste est désormais un préalable à toute discussion. Proportionnelle à la déstabilisation que connaît Israël, cette mise à l’agenda politico-médiatique ne permet toutefois pas de saisir la nature protéiforme de cet acteur politique (tout à la fois mouvement social, groupe armé et acteur gouvernemental), ni les raisons de son irrésistible ascension. Depuis 2013, le Hamas est parvenu à produire une réflexion sur l’évolution de la lutte armée et de son rôle en Palestine. Perçu comme l’incarnation même de la résistance qui, pour les Palestiniens, est une composante centrale de leur identité, ce mouvement ne saurait donc être considéré comme un groupe sectaire exogène à sa société.
Ouvrant une période de grandes difficultés diplomatiques et économiques, le coup d’Etat du maréchal Al-Sissi, en Egypte, en juillet 2013, favorise la réévaluation stratégique du mouvement. La priorité pour le Hamas est l’établissement de bonnes relations avec ce pays, qui dispose d’une frontière avec la bande de Gaza. Pourtant à la tête de l’axe anti-Frères musulmans, aux côtés de l’Arabie saoudite et des Emirats arabes unis, Le Caire trouve son intérêt à coopérer avec le Hamas pour assurer la sécurité du Sinaï. Ces relations de relatif bon voisinage amènent les autorités égyptiennes à supprimer le Hamas de sa liste des organisations terroristes. Ultime concession à l’Egypte, le Hamas ne fait plus mention de son affiliation aux Frères musulmans dans son « Document de principes et de politique générale » publié en 2017.
L’autre évolution qui caractérise l’après-2013 est la volonté du Hamas de se détacher des institutions officielles palestiniennes. Dès l’accord de réconciliation d’Al-Shati conclu avec son rival du Fatah au printemps 2014, le Hamas avait laissé à ce dernier la responsabilité de former à lui seul le gouvernement. Si l’existence de divisions internes au Hamas avait à l’époque empêché la mise en œuvre de cet accord, l’arrivée au pouvoir de Yahya Sinwar en 2017 ne permet plus l’expression de voix dissidentes. Profondément opposé à l’établissement d’un mini-Etat à Gaza, le nouvel homme fort de l’enclave impose la signature d’une nouvelle réconciliation. Par cet accord signé au Caire à l’automne 2017, le Hamas réitère son souhait de se désengager des structures de l’Autorité palestinienne. La légitimation du mouvement ne peut plus passer par ces institutions largement discréditées.
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