Attentat d’Arras : la résistance des familles et de l’école, leviers majeurs
Le linguiste Alain Bentolila estime, dans une tribune au « Monde », que l’école et la famille doivent mener aujourd’hui ensemble le combat pour séparer le spirituel du rituel et les valeurs universelles des préceptes dogmatiques, en développant les capacités d’analyse et de critique.
Les tueries arbitraires s’enchaînent encore et encore. A chaque meurtre on dénonce le manque de moyens pour nous défendre contre la violence du terrorisme et pour protéger notre jeunesse contre les marchands de mort qui rôdent sur Internet. On nous promet, la main sur le cœur, l’augmentation des forces de police et de gendarmerie, on jure de multiplier les portiques à l’entrée des écoles et enfin on s’engage à exercer une vigilance plus ferme sur les réseaux sociaux.
Mais peut-on raisonnablement penser que toutes ces mesures – certes nécessaires – nous garantiront la victoire finale ? Qu’adviendra-t-il, en effet, lorsque nous aurons épuisé nos forces et nos moyens contre des barbares pour lesquels le temps et la vie n’ont pas la même valeur que pour nous ? Qu’adviendra-t-il lorsque notre dernière bombe aura été larguée sur l’avant-dernier djihadiste.
A long terme, on peut craindre que nos armées s’épuisent à devoir couvrir trop de fronts, que la traque policière se perde dans un dédale de réseaux de soutiens communautaires inavoués et enfin que les médiocres actions de « déradicalisation » en viennent à confondre analyse du contexte sociopolitique et complaisance idéologique.
Après chaque attentat, le petit monde politique continue de répéter : « C’est inacceptable ! », « Nous ne lâcherons pas un pouce de terrain ! », « Nous terroriserons les terroristes ! ». Indignation et rodomontades, promesses vaines et menaces sans effets sont les seules réponses d’une classe politique qui ne voit pas plus loin que le bout de son mandat et pour laquelle toute mesure qui ne ferait pas effet le lendemain matin serait sans intérêt.
Tous, quelles que soient leurs appartenances partisanes, sont en effet incapables de comprendre que seule la résistance intellectuelle de tous les enfants de ce pays pourra faire barrage à la barbarie. Comment s’en étonner, alors que, depuis des dizaines années, leur absence d’ambition et d’exigence en matière d’éducation et de culture a offert en sacrifice, sur l’autel du Web, les mots imprécis, les mémoires vides et le dégoût de soi d’une partie de notre jeunesse.
Et nous risquons de voir, de plus en plus nombreux, ceux qui n’ont jamais eu de point d’appui s’abandonner à l’insulte, au harcèlement ou au meurtre pour se sentir vivants.
0 Réponses à “Attentat d’Arras : la résistance des familles et de l’école, leviers majeurs”