Société- Quelle place pour le travail ?

Société- Quelle place pour le travail ?

En amont des Rencontres économiques d’Aix-en-Provence, Emilie de Lombarès, présidente du directoire d’Onet, et Claudia Sénik, membre du Cercle des économistes, questionnent la place du travail dans nos vies. Dans l’Opinion.

En France, près d’un salarié sur deux se trouverait en situation de détresse psychologique. Les troubles qui en découlent arrivent, pour la deuxième année consécutive, en tête des causes d’arrêt de travail de longue durée. En tout, deux millions de travailleurs s’estiment en risque de burn-out. La qualité de vie et les conditions de travail sont désormais présentées par l’Organisation internationale du travail comme un enjeu de santé publique.

Ce constat me conforte dans mon combat pour la revalorisation de nos métiers de service. À l’heure où nombre de salariés s’interrogent sur le sens de leur travail, il faut rappeler que le service, c’est d’abord être utile aux autres. Nos collaborateurs contribuent à la création d’un environnement plus sain, plus sûr et plus fiable. Quoi de plus important que de donner un rôle, une mission à chacun dans notre société ? Cela confère aussi à l’entreprise la responsabilité de faire grandir ses équipes et de développer l’employabilité de ses collaborateurs. Telle est la vocation de notre université interne, qui crée pour eux des parcours certifiants.

Si nos métiers méritent d’être considérés et revalorisés, c’est aussi parce qu’ils sont fondamentaux pour le bien-être de tous. Selon la dernière édition du baromètre que nous réalisons avec Ipsos, neuf salariés sur dix se sentent plus performants dans un espace propre et bien rangé et estiment que cela joue favorablement sur leur niveau de stress. Cette perception est similaire pour les usagers des gares, des aéroports, des stades, où nos équipes interviennent quotidiennement pour des missions d’accueil, de sécurité ou de propreté.

Nos métiers s’effectuent chez nos clients. À ce titre, ces derniers ont un rôle clé à jouer. Je me réjouis de constater l’évolution de l’accueil réservé à nos équipes, qui aujourd’hui reçoivent davantage de « bonjour » de la part des usagers et des clients. Plus de 80 % des personnes, qui sont régulièrement en contact avec un agent de propreté ou un agent de sécurité, se disent rassurés par leur présence. Mais, il reste des progrès à accomplir, par exemple sur le travail en journée. Trop rares sont les installations pensées de façon à simplifier le nettoyage et la sécurisation de nos interventions.

La revalorisation de notre travail passe, enfin, par celle de son prix. Il n’est plus concevable que, dans le contexte d’inflation actuel, nous ne puissions pas automatiquement répercuter dans nos prix les revalorisations salariales indispensables de nos salariés. Ces emplois profondément humains, techniques, physiques, occupent dans nos vies une place centrale et méritent mieux que cela.


Le travail devient-il moins important pour les Français, sa place se réduit-elle au profit de la vie personnelle ? La « grande démission » observée depuis deux ans, les difficultés de recrutement des entreprises, la généralisation du télétravail… tous ces signes traduisent-ils une désaffection des Français vis-à-vis du travail ?

Il semble en réalité que ce n’est pas le travail que les Français remettent en question, mais plutôt les modalités de leur emploi. Remarquons pour commencer que l’attachement déclaré par les Français au travail est remarquablement stable depuis les années 1990. Les différentes enquêtes conduites par la Dares, l’Insee ou encore les instituts de sondage montrent qu’une proportion fixe de personnes interrogées (7%) déclarent qu’au sein de tous les domaines de la vie, le travail est la chose la plus importante pour eux. Environ 40% le classent parmi les trois domaines les plus importants de leur vie. Ensuite, pour ce qui concerne le mouvement de démissions post-Covid, il s’agit en réalité d’un phénomène classique : les gens changent d’emploi quand la conjoncture est bonne et qu’ils peuvent facilement en trouver un qui leur convienne davantage.

Le télétravail hybride ressemble fort à un équilibre instable, encore en devenir.

Mais il est vrai que le niveau d’exigence exprimé par les salariés s’est élevé. D’une part, la pause du Covid leur a donné l’occasion de prendre du recul vis-à-vis de leur emploi. D’autre part, au moment de la reprise de l’activité, les termes de la négociation avec les employeurs se sont modifiés en leur faveur grâce à la baisse du taux de chômage. De multiples revendications sont alors apparues, surtout de la part des plus jeunes, mêlant quête de sens et désir de flexibilité. Il ne s’agit pas de minorer l’importance du travail, mais d’en adapter les modalités.

Le télétravail fait partie de ces nouvelles aspirations. Depuis la crise du Covid, la possibilité de télétravailler à raison de quelques jours par semaine est devenue un argument majeur, voire une condition sine qua non, pour recruter et fidéliser les salariés (dont le métier le permet). Grâce aux technologies de communication à distance, économie de temps de transport et emploi du temps plus flexible permettent en principe de mieux concilier travail et vie privée. Mais, ce mode de travail « hybride » pose en lui-même des défis de coordination complexes : il est difficile de faire en sorte que chacun soit certain, les jours où il se rend sur son lieu de travail, d’y retrouver ses collaborateurs, son équipe. Le télétravail hybride ressemble fort à un équilibre instable, encore en devenir.

On voit que la question n’est pas tant la place relative du travail et de la vie personnelle, mais plus généralement les nouvelles modalités revêtues par ces domaines de notre existence.

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