Pour une taxe internationale sur les transactions financières
Plus de 70 économistes internationaux, dont Joseph Stiglitz, Jayati Ghosh et Laurence Tubiana, appellent dans une tribune au « Monde » à créer une taxe mondiale sur les transactions boursières pour financer la lutte contre la pauvreté et le réchauffement. Le Sommet international pour un nouveau pacte financier mondial, qui se tient à Paris les 22 et 23 juin, est pour eux l’occasion idéale.
« Taxe Robin des bois », taxe Tobin ou TTF, quel que soit le nom qu’on lui donne, l’idée d’une taxe sur les transactions financières pour rééquilibrer les effets néfastes de la mondialisation gagne en popularité à chaque nouvelle crise économique. Et pour cause, son principe est simple : étant donné l’ampleur des transactions réalisées sur les marchés financiers, il suffit d’appliquer une taxe à taux extrêmement faible pour lever des recettes fiscales importantes, sans qu’il n’y ait d’incidences sur le fonctionnement des marchés.
La TTF présente tous les atouts qui font un bon impôt : elle est peu distorsive, avec des effets redistributifs forts, ses recettes sont potentiellement élevées et ses frais de recouvrement minimes. Si la TTF est si populaire, c’est également en réaction à l’explosion des volumes de transactions que l’on observe avec la déréglementation des marchés et le développement du trading haute fréquence. Depuis les années 1970, au niveau mondial, la valeur des transactions boursières a été multipliée par plus de 500. En France, le montant annuel des transactions à la Bourse de Paris était de 3,5 milliards d’euros en 1970, de 9 milliards en 1980, 100 milliards en 1990, 1 000 milliards en 2000, pour atteindre plus de 2 000 milliards aujourd’hui.
C’est sans doute pour toutes ces raisons qu’elle est aujourd’hui appliquée, sous diverses formes, dans plus d’une trentaine de pays : en France, en Italie, en Espagne, en Suisse, à Hongkong ou à Taïwan notamment, et de façon ininterrompue depuis plus de trois siècles au Royaume-Uni – la stamp duty y est même le plus vieil impôt en vigueur. A l’évidence, les taxes sur les transactions financières en vigueur n’ont pas empêché le développement des places financières qui les appliquent, et qui figurent parmi les plus importantes au monde.
Les discussions autour de la TTF portent invariablement sur son incidence : les uns espèrent réduire l’instabilité des marchés en décourageant la spéculation, tandis que les autres rejettent en bloc son principe même, redoutant une hausse de la volatilité par manque de liquidités. Les études empiriques donnent tort aux premiers comme aux seconds. Telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, la TTF a très peu d’impact sur les marchés. Ce n’est ni l’apocalypse redoutée par certains, ni la panacée espérée par d’autres. Il ne s’agit donc ni de punir les banquiers, ni les marchés, puisqu’une taxe avec une assiette large et un taux faible n’engendre pratiquement pas de distorsions, mais rapporte des recettes élevées.
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