Crises : une Europe plus pragmatique et plus forte ?
Pour protéger les citoyens de la hausse des prix du gaz et de l’électricité, l’Europe sera bien plus efficace si les Vingt-Sept agissent ensemble et de façon coordonnée. Cette prise de conscience qui s’opère montre que l’UE sait faire preuve, quand il le faut, d’une capacité d’adaptation spectaculaire estime un papier du Monde.
Une prospective peut-être un peu optimiste concernant la future régulation de l’énergie qui restera sans doute encore soumise à la régulation par le marché. Même en cas d’évolution significative on voit mal le lien avec la droitisation constatée dans plusieurs pays. Une droitisation qui vient surtout des dérives de l’immigration et non pas des questions énergétiques NDLR
Cela ne va pas sans frictions ni remises en cause, mais l’Union européenne (UE) parvient depuis plus de six mois à maintenir une surprenante unité face au plus grand défi géopolitique de son histoire : le retour de la guerre entre Etats à ses portes. Cette résistance, qui dément la thèse d’un affaiblissement occidental, n’était sans doute pas anticipée par Vladimir Poutine. Elle constitue un autre revers de taille pour le maître du Kremlin, qui s’ajoute aux déboires de son armée en Ukraine comme au renforcement de l’Alliance atlantique.
Cette unité a pour moteur principal la capacité des Européens à s’adapter à une nouvelle donne internationale. Il s’agit un défi considérable, pour des institutions dont la rigidité n’a pas peu contribué à leur diabolisation par les populismes qui travaillent les Etats membres.
La volonté de transformation dans l’urgence se heurte aujourd’hui à une nouvelle épreuve, avec la crise énergétique que l’invasion de l’Ukraine par la Russie a précipitée. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a tracé le cap d’une Europe protectrice, en matière d’énergie dans son discours sur l’état de l’Union prononcé le 14 septembre. Elle a en effet pour ambition de protéger les citoyens européens devant la flambée des prix du gaz et de l’électricité.
Pour y parvenir, la Commission se dit prête à réformer en profondeur des mécanismes de marché qui ont montré leurs limites, voire leurs dysfonctionnements, avec notamment un système de fixation des prix aberrant. L’enjeu est double. A court terme, il faut reprendre le contrôle du marché. A long terme, il s’agit de consolider une souveraineté énergétique trop longtemps négligée. Une notion préside désormais à la poursuite de ces deux ambitions : la solidarité.
Qu’il s’agisse du stockage du gaz, des efforts de sobriété, du plafonnement des prix de l’électricité et du gaz, des prélèvements sur les superprofits des énergéticiens ou du développement d’un futur marché de l’hydrogène, une prise de conscience est en train de s’opérer : l’Europe sera bien plus efficace si les Vingt-Sept agissent ensemble et de façon coordonnée.
Le contenu de ces propositions doit maintenant être finalisé avant de pouvoir recueillir l’assentiment des Etats membres, qui pourraient se prononcer d’ici à la fin du mois de septembre. Mais qu’en aussi peu de temps un tel aggiornamento énergétique soit prêt à être appliqué démontre que l’UE sait faire preuve, quand il le faut, d’une capacité d’adaptation spectaculaire.
Un sursaut s’était déjà manifesté lors de la pandémie de Covid-19. L’UE n’avait pas hésité à rompre avec ses dogmes en mutualisant les dettes engendrées par le plan de relance européen adopté au sortir de la crise sanitaire. Les avocats d’une efficacité renforcée, au besoin en rompant avec le carcan de l’unanimité des Etats membres, se font également entendre, qu’il s’agisse d’Olaf Scholz ou d’Emmanuel Macron, en dépit de l’affaiblissement du moteur franco-allemand provoqué par l’invasion par la Russie de l’Ukraine.
Cette Europe pragmatique et protectrice se veut également une réponse à la montée des forces politiques qui menacent de remettre en cause le projet européen au nom d’un nationalisme étriqué, particulièrement inadapté à l’amplitude des bouleversements en cours. Il s’agit d’une course contre la montre, à la veille des élections prévues en Italie, en Lettonie et en Bulgarie, qui interviennent après celles tenues en France et en Suède, toutes marquées par une poussée nationale populiste.
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