«Arrêter d’emmerder les agriculteurs !

«Arrêter d’emmerder les agriculteurs !

 

C’est le titre d’une tribune de 44 sénateurs de droiteQui attire l’attention sur le véritable labyrinthe administratif et juridique qui étouffe la liberté des agriculteurs. Un cri qu’on peut entendre tellement les procédures administratives et les contrôles se complexifient. Reste qu’on ne pourra faire l’économie sur le long terme d’une transition écologique rendant possible une agriculture au contenu partagé par tous.

tribune:

Les élus appellent le président de la République et son nouveau ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, à protéger les agriculteurs face à la multiplication de procédures à leur encontre, et estiment qu’une réponse politique, juridique et pratique s’impose afin de rassurer la profession

Fabien Le Coidic, 46 ans, agriculteur à Adainville dans les Yvelines, a vu son projet d’installation d’un élevage paralysé pendant plus de deux ans par plusieurs voisins qui prétendaient qu’il occasionnerait des « nuisances olfactives, sonores et visuelles accentuées par l’humidité de l’air et la rose des vents », mais dont le tribunal administratif de Versailles a heureusement rejeté les recours le 7 janvier.

Etienne Fourmont, 38 ans, éleveur de vaches laitières en Viré-en-Champagne dans la Sarthe, a dû affronter ses agresseurs le 28 février dernier devant le tribunal correctionnel du Mans, soit neuf militants de la cause animale, jugés pour une dizaine de faits de diffamation et dégradations de biens, notamment sur plusieurs bâtiments dont l’agriculteur est le propriétaire.

Vincent Verschuere, 33 ans, éleveur de vaches laitières à Saint-Aubin-en-Bray dans l’Oise, quant à lui, fait l’objet de recours de la part de voisins depuis douze ans, et a été condamné le 7 mars par la cour d’appel d’Amiens à verser plus de 110 000 euros de dommages et intérêts pour de prétendues nuisances sonores et olfactives liées à l’exercice de son exploitation agricole.

Minorité. Fabien, Etienne et Vincent sont les visages de notre agriculture qui ont profondément marqué le début de l’année 2022. Leurs points communs ? Il sont tout d’abord le reflet de nos jeunes paysans dans un contexte où le nombre d’exploitations agricoles ne cesse de se réduire comme une peau de chagrin. Alors que la France comptait 1 600 000 exploitations agricoles en 1970, ce chiffre n’a cessé de diminuer au fil des années, et a été divisé par quatre en cinquante ans,pour atteindre un peu moins de 400 000 en 2020.

Ensuite, ils sont tous attaqués par une minorité de personnes qui estime avoir le droit de réglementer l’exercice de leurs activités agricoles. A cet égard, les atteintes à l’encontre des agriculteurs sont en hausse, selon les chiffres publiés par le ministre de l’Intérieur : au 1er novembre 2019, près de 15 000 faits étaient déjà enregistrés pour l’année 2019, soit deux toutes les heures. Ils se battront, enfin, jusqu’au bout pour le maintien d’une agriculture de proximité appelée de leurs vœux par les Français. Or le déploiement d’une agriculture de proximité est un préalable nécessaire pour renforcer notre souveraineté alimentaire, sans laquelle nous continuerons à subir de plein fouet toutes les crises.

Nos trois agriculteurs ne sont, hélas, pas les seuls à se retrouver devant les prétoires et une lecture assidue de la presse régionale suffit pour s’en convaincre. Dans ce contexte, une triple réponse politique, juridique et pratique s’impose. La réaction politique, tout d’abord, doit être à la hauteur de l’enjeu pour toute la profession. La question de reconnaître la ruralité comme grande cause nationale, comme déjà proposé le 5 octobre 2018 par les sénateurs, doit se poser une nouvelle fois. Parce que les agriculteurs sont un maillon essentiel de l’aménagement de notre territoire, parce que la ruralité compte 20 % de notre population sur 80 % de notre territoire, cette proposition de loi doit être votée. La ruralité est une chance pour la France. C’est ainsi qu’elle doit être traitée et non comme un fardeau.

Une réponse juridique est tout aussi importante. A cet égard, la loi du 29 janvier 2021 visant à définir et protéger le patrimoine sensoriel des campagnes françaises, adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale et le Sénat, constitue un premier pas. Elle part du constat que les maires de communes rurales sont confrontés à de nombreux conflits de voisinage entre agriculteurs et riverains, du fait des sons et odeurs inhérents à la campagne et à l’exercice d’activités agricoles.

. Cette loi offre d’ailleurs aux régions la faculté de mettre en place un inventaire répertoriant les sons et odeurs caractéristiques de « l’identité culturelle » de chaque territoire, et dont la rédaction permettra de cartographier et protéger en amont nos agriculteurs de potentiels litiges. Encore faut-il que les régions, aidées par l’Etat, disposent des financements et des équipes qualifiées pour réaliser ce travail titanesque. « L’inventaire servira de première base pour un dialogue constructif entre élus locaux et administrés, qu’il s’agisse d’habitants de longue date, de nouveaux arrivants ou de personnes de passage », comme le rappelle maître Timothée Dufour, avocat de nombreux agriculteurs.

Une réponse pratique, enfin, en multipliant les échanges entre ruraux et urbains. Les journées portes ouvertes, pour expliquer aux nouveaux arrivants ce que sont une exploitation agricole et ses contraintes, et les chartes de bon voisinage sont autant d’instruments au service du règlement à l’amiable de litiges qui peuvent survenir à tout moment.

Aujourd’hui, la multiplication de recours à l’encontre des agriculteurs témoignent de la volonté d’une poignée d’intolérants d’aseptiser la campagne et de la mettre sous Cellophane. C’est inadmissible ! Nous, sénateurs, sommes engagés depuis longtemps pour rassurer et conforter nos agriculteurs dans l’exercice de leurs activités. Après cinq années d’inertie et de la laxisme face aux agressions subies par nos agriculteurs, nous attendons du président de la République et de son nouveau ministre de l’Agriculture le même engagement, non au travers de belles paroles mais par des actes.

Être agriculteur est un métier difficile mais peut-être aussi l’un des plus beaux et des plus essentiels à la vie humaine puisqu’il touche à notre alimentation, donc aussi à notre santé. Nous nourrir est leur métier, les protéger est notre devoir !

Christine Bonfanti-Dossat est sénatrice du Lot-et-Garonne, Laurent Duplomb sénateur de Haute-Loire.
Cette tribune est également signée par les sénateurs Henri Leroy, Valérie Boyer, Gilbert Bouchet, Claudine Thomas, Jean-Pierre Vogel, Laurence Muller-Bronn, Olivier Paccaud, Sylviane Noel, Jérôme Bascher, Christian Klinger, Toine Bourrat, Martine Berthet, Joëlle Garriaud-Maylam, Viviane Malet, Laurent Burgoa, Etienne Blanc, Daniel Laurent, Sylvie Goy-Chavent, Pascale Gruny, Bruno Retailleau, Brigitte Micouleau, Pierre Cuypers, Anne Chain-Larché, Marta de Cidrac, Kristina Pluchet, Béatrice Gosselin, Alain Houpert, Brigitte Lherbier, Alexandra Borchio-Fontimp, Sébastien Meurant, Alain Joyandet, Bernard Fournier, Jean-Claude Anglars, Antoine Lefèvre, Gilbert Favreau, Laurence Garnier, Christophe-André Frassa, Fabien Genet, Alain Chatillon, Yves Bouloux, Florence Lassarade et Bruno Belin.

 

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