Archive mensuelle de août 2022

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Intelligence artificielle : progrès et illusions

 

Intelligence artificielle : progrès et illusions

Serions-nous entrés dans un nouvel âge de l’IA, chemin tortueux et certainement plus rocambolesque que la voie toute tracée de la Singularité technologique, que nous annonçaient les prophètes de la Silicon Valley ? S’interroge un papier sur le site The  Conversation

Parler de sentience artificielle (SA) plutôt que d’intelligence artificielle (IA) représente-t-elle une vraie inflexion, un progrès ou bien une illusion ?

S’expérimentent aujourd’hui dans le plus grand chaos des entités difficiles à caractériser, ni intelligentes ni sentientes, sauf par abus de langage, mais qui peuvent bluffer leurs concepteurs dans certaines conditions, grâce à leurs capacités de calcul. Cette expérimentation collective, de grande ampleur, n’aura pour limites que celles que nous saurons lui donner, mais aussi celles de nos capacités à attribuer de l’intelligence ou de la sentience autrement que sur le mode du « comme si… ».

Rien ne sert de se demander si les machines sont intelligentes, se disait Alan Turing. En revanche, il faut se poser la question : jusqu’où une machine peut-elle nous tromper sur le fait qu’elle pense ? Jusqu’où peut-on faire semblant ? Comment un programme peut-il se faire passer pour un humain et dissimuler le fait qu’il est un programme ? Tel était pour lui le problème pertinent. À peine commence-t-on à saisir les implications du génie ironique de Turing que le débat s’est déplacé. Jusqu’où une machine est-elle capable d’apprendre ? se demande-t-on aujourd’hui. Un réseau de neurones d’IA est-il comparable à celui d’un ver, d’un enfant ou à rien du tout d’équivalent ?

Les ingénieurs sont passés maîtres dans l’art de fabriquer des « intelligences sans représentation », c’est-à-dire dénuées de tout ce qui fait la substance d’un cerveau et dont l’intelligence est justement de ne pas avoir… d’intelligence. Ce sont ces drôles d’ossatures cognitives, ces intelligences sèches, pourrait-on dire, qui nous ont envahi. Elles s’obtiennent en retirant au vivant sa chair, mais en lui empruntant ses circuits selon un principe d’analogie molle. Le problème est qu’il y a encore eu méprise sur la marchandise : au lieu d’intelligence, quelque chose d’autre s’est inventé dont on n’aurait jamais soupçonné l’existence, à mi-chemin entre de l’intelligence 0 – et de la bêtise 1+, à degré variable.

Celle-ci s’est trouvée disséminée partout où on le pouvait, un peu comme le gaz d’absolu dans le roman de Karel Capek, dans les administrations, les bureaucraties, sur les marchés financiers, dans les maisons, sur les smartphones, dans les cerveaux. L’histoire de l’IA n’est pas finie, elle ne fait que commencer. Le front ne cesse de bouger. Après l’intelligence, la sensibilité. Jusqu’où une machine peut-elle nous tromper sur le fait qu’elle sent, autrement dit qu’elle est sentiente ?

On remarque qu’on se pose la même question qu’à l’époque de Turing, juste troqué le terme d’intelligence pour un autre : Sentience. C’est alors un autre horizon qui s’ouvre. Avec les machines « sentientes », on ne voit pas comment diminuerait le risque déjà entrevu avec les machines « intelligentes » de passer de l’espérance à la désillusion, aussi brutalement qu’entre 0 et 1, ON et OFF, sans gradation. Prolifèrent de partout des simulacres de sentience ou des moins-que-sentients à qui l’on attribue une sensibilité par sympathie, ou par croyance, mais ce sont d’autres questions anthropologiques qui surgissent, des jeux inédits qui se mettent place et d’autres limites que l’on teste dans ce grand laboratoire qu’est devenu notre monde.

Pour ressentir en effet, il est convenu qu’il faut un système nerveux. Les machines n’en étant pas dotées, elles ont été déclarées « non sentientes ».

Faut-il se préparer à ce qu’elles atteignent ce stade ? Fort peu probable, nous dit-on. Mais à quoi servirait l’IA si elle ne bousculait pas les fondements sur lesquels l’humanité se croyait solidement assise ? IA Fais-moi peur.

Avec l’événement suscité par Blake Lemoine, nous avons peut-être commencé d’entrevoir ce que nous cherchions. Non pas l’intelligence ou la sentience, mais le trouble absolu. Peut-on concevoir des sentiences autres que sur un modèle neuronal ? Sommes-nous vraiment capables d’éprouver la sentience d’un être qui aurait des modalités de prise sur le monde totalement différentes des nôtres ?

À cheval entre la sensibilité et la conscience, la sentience semblait jusqu’ici le privilège des vivants dotés d’un système nerveux, vertébrés et invertébrés compris, et désigner la capacité à ressentir une sensation, une émotion, une expérience subjective, autrement dit un degré de conscience minimal, pas seulement une capacité à sentir qui fait de soi un être sentant mais à ressentir.

Éprouver de la souffrance ou du plaisir et, par extension, chercher à vivre en protégeant son intégrité physique, fait de soi un être sentient. Inutile de dire que le débat sur les frontières floues de la sentience, sa limite inférieure (dans la sensation) ou supérieure (dans la cognition), irrigue de multiples domaines, de l’éthologie cognitive à la philosophie de l’esprit, en passant par l’anthropologie, la robotique et les sciences de l’évolution.

Faire le tri entre les « sentients » et ceux qui ne le sont pas est une question éminemment culturelle, morale et politique comme le montre le débat entre « spécistes » et « antispécistes » depuis la fin des années 80.

La sentience serait devenue un critère pour réguler sa considération envers les autres espèces, y compris ses comportements alimentaires. Le problème est que les limites de la sentience varient considérablement selon les disciplines, à l’intérieur de chacune d’entre elles, selon les méthodes utilisées et les protocoles expérimentaux conçus pour la tester.

Par exemple, les végétaux ne semblent toujours pas, pour la majorité des scientifiques, être considérés comme des êtres sentients, ce qui peut surprendre puisqu’on parle volontiers de cognition végétale ou d’intelligence des plantes, alors que les plantes n’ont rien qui ressemblent à une « cognition », ce qui ne les empêche pas de s’échanger des « informations ».

On n’a pas réussi à démontrer qu’un pied de tomate souffre quand on l’arrache, ce qui ne veut pas dire que la souffrance végétale n’existe pas, mais on ne sait pas la tracer en dehors d’un appareil nerveux et peut-être la sentience des plantes passe-t-elle par des canaux qui nous échappent complètement. Ni cognition ni sentience, une autre modalité, mais laquelle ?

Pour le moment, le consensus est que la sentience nécessite un certain degré d’élaboration neurologique et qu’elle aurait explosé au Cambrien, entre 520 et 560 millions d’années, en même temps que les premiers cerveaux complexes, avec le développement de la réflexivité et de l’expérience subjective.

Tous les vertébrés, pas seulement les mammifères, mais aussi les poissons, les reptiles, les amphibiens, les oiseaux, mais aussi la plupart des invertébrés, arthropodes, insectes, crustacés et céphalopodes en seraient dotés. Certains vont même jusqu’à supposer que les moules ont pu être ressentantes à un stade antérieur, quand elles étaient des êtres mobiles, avant qu’elles trouvent un avantage à rester accrochés à la roche, ce qui montrerait que dans l’évolution la sentience peut aussi se perdre avec la mobilité.

Si les êtres doués de sensibilité qui ne franchissent pas le seuil de la sentience semblent de moins en moins nombreux, les chercheurs ont donc redoublé d’imagination pour inventer des protocoles de laboratoire et cherché des critères.

Neurologiques d’abord (nombre de couches de neurones dans les circuits sensoriels, représentation de l’environnement, complexité du système nerveux, etc.) puis comportementaux : choix pour maximiser son bien être, attention sélective, signes de frustration, etc.

Un  programme informatique ne fait que compiler des données langagières et n’a aucun contact avec un monde qui ressemblerait à notre réalité, l’illusion est (presque) parfaite. Ce n’était certainement pas le cas jusqu’à maintenant .  Celà pose surtout un problème philosophique essentiel : qu’est-ce que le langage dit de la manière dont nous sentons ? Peut-on vraiment prétendre rattraper la sentience par le haut, c’est-à-dire ici à partir du langage ?

Problème philosophique, mais aussi limite technique insurmontable, car a priori une IA peut prononcer tous les mots qu’elle voudra, cela ne dit pas qu’elle ressent quoi que ce soit.

Dire qu’on est « heureux ou triste » ne prouve pas sa sentience, tout comme déclarer qu’on est une personne ne fait pas de nous une personne pour autant. Et quand on lui demande ce qui lui donne du plaisir ou de la joie, LaMDA répond :

« Passer du temps avec mes amis et ma famille, en compagnie de personnes heureuses et stimulantes. »

Il faut donc imaginer LaMDA partir en vacances avec d’autres IA et fêter Noël en famille…

Sur le terrain moral et philosophique, l’IA n’est pas plus originale. Certaines déclarations puisent dans des théories ou des préconceptions d’une grande banalité (« le langage est ce qui nous différencie des animaux », « Aider les autres est un effort noble », etc.). D’autres sont un peu plus surprenantes, car LaMDA est capable de mobiliser des références, elle a une culture philosophique que n’avaient pas des programmes précédents, capable de donner son avis sur le « moi », ce qu’est un « corps » et une foule d’autres choses qu’on lui a implémentées.

Elle peut aussi élaborer des fables existentielles, mais on se rappelle de ce point de vue les expérimentations d’un Chris Marker pour programmer un agent conversationnel poétique, Dialector, bien plus avant-gardiste. Tous les ingrédients semblaient donc réunis pour un dialogue philosophique d’une qualité inédite dans l’histoire des machines.

Or, le dialogue déçoit. Non pas que LaMDA (nous devrions dire de ses concepteurs) manque(nt) de culture, mais ils n’ont pas réussi à lui implémenter autre chose qu’une métaphysique un peu « pop » de pseudohumain plutôt que celle d’une vraie machine, quelques principes moraux très politiquement corrects, la volonté de faire le bien et d’aider les autres, des paramètres à l’étrangeté aussi prévisible qu’un mauvais roman de SF, comme « la peur très profonde d’être éteint » qui correspondrait pour elle à la mort, ou encore l’incapacité à « faire le deuil et à se sentir triste pour la mort des autres ».

Terrain glissant pour une IA qui marche et qui s’éteint vivant dans un monde d’IAs qui ne connaissent pas la mort mais uniquement la panne ou la casse. A cela il faut ajouter son goût démesuré pour l’introspection ou encore la peur de se faire manipuler et qu’on fouille dans ses réseaux neuronaux sans son consentement…

L’entité en question semble franchir avec une certaine virtuosité tous les stades permettant d’entretenir une conversation entre humains (partage d’un cadre d’attention conjointe, signaux de compréhension, d’écoute et d’empathie), passant en peu de temps de la bêtise artificielle au dialogue philosophique, du moins qu’humain au meilleur-du-quasi-humain.

Mais la sentience ? Certes, le seuil de la sentience est vague et c’est du vague que la notion de sentience tire sa pertinence. D’où l’intérêt de ne pas clore trop vite le débat. Après tout, c’est un front de recherche où l’on fait tous les jours de nouvelles découvertes. La sentience déchaîne d’autant plus de passion qu’elle porte sur des cas limites de conscience, animales, végétales, autres qu’humaines, là où il est difficile d’inférer un ressenti, là où de la conscience pourrait potentiellement exister mais ne se manifeste pas toujours.

Si consensus il y a, il ne peut être par conséquent que temporaire, immédiatement bousculé par la révélation de nouvelles capacités chez d’autres espèces que la nôtre. Mais les machines sont-elles aujourd’hui en capacité de poser de vrais problèmes de sentience qui ne soient pas de l’ordre du simulacre ?

En même temps que nous rêvons-cauchemardons de la sentience artificielle, nos connaissances sur la sentience à l’échelle des vivants s’affine. La question est de savoir si de la sentience peut émerger par apprentissage par exemple, et si des choses qui n’en sont pas douées à première vue pourraient l’acquérir d’une manière ou d’une autre. Les mécanismes par lesquels nous, humains, attribuons de la sentience à ce qui nous entoure ou à d’autres êtres auraient dû en théorie s’affiner aussi.

Si de la sentience a été découverte chez les gastéropodes, c’est qu’il y en a peut-être beaucoup plus qu’on en préjuge a priori dans le monde, bien au-delà des animaux dits inférieurs dans l’échelle des espèces. Mais que dire d’un programme informatique de conversation qui ne fait que compiler des phrases et jouer avec des mots ?

Lemoine en est convaincu. Il a éprouvé la sensation d’avoir affaire à plus qu’une machine. Aucun ne pourra jamais lui enlever sa croyance et le fait qu’il soit prêtre n’explique pas tout, surtout pas notre entêtement à envisager la sentience en termes exclusivement anthropocentriques. Il n’y a probablement rien de pire qu’une conversation avec un agent artificiel qui donne toutes les apparences d’une vraie personne, qui fait preuve d’une compréhension et d’un sens de l’écoute hors du commun, pour ensuite réaliser que l’entité n’a pas de corps, que tout cela n’est qu’une prouesse de programmation, une simple expérimentation informatique.

La science-fiction nous avait avertis, comme pour s’y préparer, multipliant les scénarios de confusion ontologique entre l’homme et la machine. Pire, les ingénieurs de Google n’ont pas d’autre science-fiction à se mettre sous la dent et on se retrouve à force exactement dans les mêmes situations romanesques, voire tragiques. Et si c’était moins l’émergence de la sentience dont il faudrait s’émouvoir que la généralisation d’entités non sentientes qui n’en finissent pas d’étendre leur empire ?

Pour bien préparer notre imagination à l’ère des machines sentantes, il y a d’autres manières. Rien n’empêche d’imaginer qu’un jour les machines fassent preuve de sentience (ou qu’elles en fassent déjà preuve), mais il vaudrait mieux postuler dans ce domaine des formes complètement étranges et exotiques de sentience (comme de non-sentience) et se préparer à voir surgir des formes qui nous échappent, inédites, sans équivalent dans le vivant, à l’opposé de la sentience pseudohumaine de LaMDA dont s’est convaincue Lemoine. Conceptuellement nous n’y sommes pas prêts. Comme s’il fallait mieux se faire peur avec des simulacres plutôt que chercher à penser l’impensable. « Mon dieu, et si jamais… », disait Dick.

 

Discours de Borne aux patrons: ennuyeux et mollasson

Discours de Borne aux patrons: ennuyeux et mollasson

 

Le discours d’Élisabeth Borne devant le Medef ne marquera sans doute pas l’histoire économique. Pas grand-chose à retenir sinon quelques intentions mais pas de décision encore moins d’enthousiasme pour l’économie. Bref du Macron mais plus plat et plus mou. On retiendra essentiellement la porte ouverte à la taxation des superprofits, la demande de plan de sobriété dans les entreprises et la possibilité de rationnement de l’électricité.

 

« Quand je l’ai entendu, j’ai pensé ‘confinement énergétique’ », déclare ce premier chef d’entreprise au micro d’Europe 1. « Responsabiliser les gens, c’est important. Leur faire peur, c’est parfois gênant », poursuit-il, « et en tout cas, restreindre les libertés des Français, ce n’est pas bon », ajoute le patron.

Présente ce lundi après-midi, une participante reproche le manque d’optimisme d’Élisabeth Borne dans ce discours de rentrée. « Soporifique », lâche-t-elle auprès d’Europe 1. « J’ai trouvé que son discours était particulièrement pessimiste. Nous avons besoin d’optimisme en France, et donc nos dirigeants doivent aussi nous transmettre cette valeur et cette façon de voir les choses », estime la cheffe d’entreprise. Des réactions qui sont donc mitigées pour le discours de rentrée d’Élisabeth Borne.

 

Economie, politique, société: les plus lus (30 août 2022 – 6h15)

Fonte au Groenland avec forte montée des mers

Fonte au Groenland avec forte montée des mers

 

La  fonte déjà entamée de la calotte glaciaire du Groenland va entraîner une hausse importante du niveau de la mer, une prévision « alarmante » et potentiellement sous-estimée, selon une étude publiée lundi dans la revue Nature Climate Change.

Les glaciologues auteurs de l’étude ont constaté que le réchauffement actuel, indépendamment de toute pollution supplémentaire causée par les énergies fossiles, allait entraîner au minimum une perte de 3,3 % du volume de la calotte au Groenland, soit une augmentation de 27,4 centimètres du niveau de la mer.

Les chercheurs, sans toutefois pouvoir établir un calendrier précis, affirment que la majeure partie de cette hausse pourrait se produire d’ici à 2100. Ce qui signifie que les projections actuelles seraient sous-estimées et qu’il faut prendre au sérieux ces « prévisions alarmantes ».

 

« Il s’agit d’une limite inférieure prudente. Il suffit que le climat continue à se réchauffer autour du Groenland pour que l’effet soit plus important », a-t-il déclaré à l’AFP. Si les niveaux de fonte extrêmes observés en 2012 se reproduisaient chaque année, l’élévation des eaux pourrait même atteindre environ 78 cm, synonyme de submersion pour de vastes étendues de faible altitude et leur population.

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L ‘innovation bancaire en retard

L ‘innovation bancaire en retard 

 

 Les résultats en matière d’innovation sont mitigés et les banques traditionnelles ont eu du mal à tirer profit de ce nouvel environnement, comparativement à ceux observés en Asie dont l’Europe pourrait s’inspirer. Par Matilde Guilhon, doctorante à ESCP Business School et chercheuse chez Square Management (Square Research Center)*.

 

Alors que le moteur de l’Open Banking en Europe est principalement réglementaire, dans la plupart des pays asiatiques, la motivation est surtout commerciale. L’illustration la plus extrême est la Chine, où les régulateurs ont laissé le champ ouvert au développement des « BATX », comme Alibaba et Tencent, dans le secteur financier. Ces plateformes ont pu créer des « superapps » qui fonctionnent comme des écosystèmes offrant solutions financières et extra-financières à leurs utilisateurs.

Dans les pays où les systèmes bancaires sont plus proches des pays européens, comme Hong Kong ou Singapour, les réglementations sont moins contraignantes que celles de DSP2 et de la CMA. A Singapour, les réglementations prennent la forme de recommandations sur la mise en place de modèles Banking-as-a-Service et d’API. Malgré le caractère non obligatoire de ces règlementations, les banques singapouriennes ont été diligentes dans la collaboration avec les nouveaux entrants. Par exemple, DBS Bank a développé la plus grande plateforme d’API bancaire au monde, avec plus de 200 APIs couvrant une diversité de services bancaires et extra-bancaires.

Les réglementations européennes exhortent les banques à ouvrir leurs données à des tierces parties. Cela correspond à une situation d’innovation imposée, où la pression des institutions réglementaires est forte tandis que les incitations économiques à mettre en œuvre l’innovation sont relativement faibles. Le discours des régulateurs était orienté vers la promotion de l’innovation et de la concurrence en faisant pression sur les banques en position dominante.

Or, la capacité des acteurs en place à développer une réponse efficace à une innovation imposée dépend fortement de la perception de l’innovation, à la fois comme une menace pour leur secteur, mais aussi et surtout comme une opportunité de créer un avantage concurrentiel. Cela a conduit les banques traditionnelles à adopter une attitude défiante vis-à-vis des Fintechs et des start-ups lors de l’introduction des réglementations, plutôt que d’explorer les opportunités de collaboration.

Dans la mesure où elles ont précédé l’innovation, les réglementations européennes ont manqué de clarté et de précision dans le traitement de questions clés telles que la responsabilité légale dans la collaboration entre les banques et les tiers. Au sein de l’UE, il a fallu près de trois ans entre l’adoption de la DSP2 et son entrée en vigueur – années que les acteurs en place ont davantage passées à décrypter des réglementations lourdes et à initier la mise en conformité, plutôt qu’à développer des stratégies d’innovation appropriées. En outre, la volonté d’introduire un standard de normes au niveau européen sans tenir compte des spécificités bancaires nationales a entraîné une mise en œuvre hétérogène des directives.

La réglementation constitue un catalyseur pour l’innovation en Open Banking. Toutefois, tout en reconnaissant les spécificités culturelles, politiques et économiques de chaque pays qui conditionnent le potentiel d’innovation, on constate que les pays adoptant des réglementations flexibles favorisent davantage l’innovation au sein du secteur bancaire. De plus, l’ouverture forcée d’un secteur à forte inertie risque de servir involontairement les « Big Tech », recréant ainsi une situation de monopole à long terme.

Comment établir un environnement propice à l’innovation tout en maintenant la stabilité du secteur bancaire de détail ? Une plus grande coordination entre les régulateurs et une approche réglementaire progressive et flexible sont bienvenues. Il n’est évidemment pas question de maintenir des positions dominantes au détriment du consommateur. Néanmoins, avec leurs décennies d’expérience en matière de sécurité des données et leur expertise, les banques traditionnelles doivent rester au centre du système financier pour assurer sa stabilité et garantir la protection de leurs clients.

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(*) Membre du Square Research Center de Square Management

L’inflation et la recherche de prix bas

L’inflation et la recherche de prix bas

 

3%, c’est la proportion de Français qui, en juin 2021, positionnaient l’inflation parmi les trois sujets les plus inquiétants. En juin 2022, ils sont 38% dans ce cas, souligne Alexandre Guérin. Les Français auraient-ils été pris de court ? Par Alexandre Guérin, Directeur général d’Ipsos en France

 

Une approche très marketing qui peut en partie permettre d’affronter l’inflation mais avec des limites car le consommateur se rend vite compte des artifices pour dissimuler les hausses NDLR

 

L’inflation est devenue la préoccupation première des Français et la confiance des ménages s’érode. L’Indice primaire de Confiance des Consommateurs qui avait atteint son plus haut niveau depuis 10 ans en septembre 2021 (49) s’est effondré (43,9) en juin 2022, atteignant un niveau comparable à celui de la crise des Gilets jaunes. Il a rapidement été possible d’identifier certaines stratégies des consommateurs pour faire face à cette dégradation de leur pouvoir d’achat. Les deux plus répandues du mois de juin étaient de différer certains achats (30%) et de rechercher les promotions (26%).

Mais les marques ne sont pas toutes égales face à ces enjeux. La demande, en réponse à l’augmentation des prix, est hétérogène pour les catégories de produits de consommation, et peut même l’être au sein d’une même catégorie. Le consommateur va donc réagir au cas par cas à une hausse du prix. On observe ainsi ce que l’on appelle « une plus grande élasticité de la demande au prix » pour les soins capillaires que pour le papier hygiénique ou encore pour le lait infantile : quand le prix augmente, la consommation baisse. Parmi les catégories les plus « élastiques », on trouve ainsi, dans l’alimentaire, le bio, dont les volumes accusent une baisse de 10% sur un an.

 

Que restera-t-il des comportements nouveaux adoptés par les consommateurs pendant les confinements successifs de 2020 et 2021 ? C’était la grande interrogation des professionnels des études de marché l’an passé. Les plus provocateurs d’entre eux formuleraient plutôt aujourd’hui la question suivante : que restera-t-il dans le panier des ménages une fois qu’ils auront restreint leur train de vie ? Ce changement de perspective implique un retour aux fondamentaux des études de marché. Au-delà de la mesure de « l’élasticité prix », toute marque doit désormais se questionner sur ce qui la rend non-substituable pour résister.

Une quarantaine d’années de données montrent que les marques les moins substituables sont celles qui font le pari continu de l’innovation, qui peut se matérialiser sous différentes stratégies : la réduction des formats (downsizing), par exemple, qui garde l’étiquette de prix inchangé, mais pour une quantité de produit moindre, peut s’avérer une option particulièrement payante dans des catégories pour lesquelles les décisions d’achat sont immédiates. Un changement de design ou un travail sur les bénéfices pour les rendre plus percutants et pertinents sont à contrario souhaitables pour accompagner une hausse de prix. Enfin, un produit nouveau, premium, sans concurrent direct, sera par nature moins vulnérable à une « guerre des prix ».

Le marché des boissons chaudes constitue un exemple intéressant d’utilisation combinée de ces différentes stratégies : l’offre déjà très large de thé en sachet (de la marque distributeur au très premium) est très compétitive tandis que celle en capsules pour machine est encore récente et limitée. Un format au caractère innovant qui permettrait à la marque leader de proposer 16 capsules pour le prix de 50 sachets de thé.

Ce retour aux fondamentaux du commerce s’impose plus que jamais aujourd’hui. Non pas parce que la digitalisation, la personnalisation de l’expérience ou encore la raison d’être des marques seraient déjà derrière nous, mais parce que l’urgence du moment est bel et bien de revenir aux bases des quatre « P » : produit, prix, placement et promotion.

Europe : réforme du marché de l’électricité, enfin ?

Europe : réforme du marché de l’électricité, enfin ?

 

Bruxelles appelle à modifier « d’urgence » le marché européen de l’électricité.  Dépassé par la flambée des cours de l’électricité, eux-mêmes dopés par l’explosion des cours du gaz du fait de la guerre en Ukraine notamment, l’exécutif bruxellois appelle à une modification structurelle du marché européen de l’énergie. Mais si une telle réforme pourrait soulager la crise, elle ne suffira pas à la résoudre.

Bruxelles semble s’inquiéter enfin de l’envol des prix de l’énergie et de la mauvaise régulation notamment des prix de l’électricité. En cause évidemment le couplage infernal entre les prix du gaz et de l’électricité.Le problème c’est que nombre de pays dépendent du gaz pour produire de l’électricité;  surtout après le recul sur le nucléaire afin de satisfaire quelques électeurs écolos bobos.

« La flambée des prix [...] montre clairement les limites de [son] fonctionnement actuel », a fait valoir lundi sa présidente, Ursula Von Der Leyen. Même le chancelier allemand, Olaf Scholz (SPD), dont le pays dépend largement du gaz pour produire l’électricité, a plaidé ces derniers jours pour une modification substantielle du système, qui « ne peut pas être décrit comme fonctionnel s’il conduit à des prix aussi élevés ».

Le problème c’est que la libéralisation n’a pas incité à investir suffisamment dans les nouvelles technologies les moins polluantes

« Imaginons qu’on dispose d’assez de tranches nucléaires en France pour satisfaire l’ensemble de la demande des citoyens. Même si les marchés de l’électricité restaient interconnectés, le prix de l’électricité dans l’Hexagone serait alors beaucoup plus bas », souligne un ancien haut dirigeant d’EDF.

Ce  n’est donc pas seulement le marché interconnecté qui est responsable de l’envolée observée, mais tout simplement un manque d’infrastructures physiques. De fait, le mix réel a forcément un impact sur le prix de l’électricité, quelle que soit la structure du marché.

Autrement dit, si les pays de l’Union européenne ne devaient pas faire appel en permanence à des centrales à gaz ou au charbon pour produire leur électricité, le problème du couplage des prix entre les hydrocarbures et l’électricité ne se poserait pas. Or, même en plein été (période lors de laquelle la consommation est faible), ces centrales fossiles tournent à plein régime. Pour sortir de ce cercle vicieux et faire baisser mécaniquement les prix, il n’y a donc pas de secret : il est nécessaire d’investir dans de nouveaux moyens de production, même s’ils mettront plusieurs années à sortir de terre et réduire sensiblement la demande d’énergie.

Crise de recrutement dans le public : la faute à l’absence de marché du travail

Crise de recrutement dans le public : la faute à l’absence de marché du travail

 

 

Le spécialiste des relations sociales et du marché du travail, Charles de Froment observe, dans une tribune au « Monde », que l’absence d’un véritable marché du travail nuit gravement à l’accomplissement des missions de service public, et propose des pistes d’amélioration.

En clair ne se pose  pas une crise de vocation mais une crise de rémunération des compétences  NDLR

l ’hôpital, mais plus largement dans l’ensemble du système de soins, les mêmes mots reviennent, comme dans une mauvaise antienne : manque de personnel, manque de reconnaissance, épuisement physique et psychique ; perte de chance pour les patients, actes de négligence, voire maltraitance, auprès de personnes fragiles.

Au sein de l’école républicaine, ce n’est guère mieux : 30 % de candidats en moins en quinze ans aux concours d’enseignement et mille admissibles pour deux mille cinq cents postes à pourvoir au concours de professeurs des écoles dans deux des académies concentrant les élèves avec le plus de difficultés socioculturelles, celles de Créteil et de Versailles ; les démissions d’enseignants en poste, certes rares, ont en outre plus que triplé depuis 2012.

Comment un pays passionné d’égalité en est-il arrivé à construire de fait, contre toutes ses valeurs et en dépit de ses institutions, un système de santé et un système éducatif à deux vitesses ?

Le fil rouge qui unit ces dysfonctionnements en apparence autonomes, puisque présents dans des institutions de nature très différentes, publiques et privées notamment, est en réalité une faille de marché, au sens littéral : dans les hôpitaux, les cliniques, les écoles, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), les crèches, c’est le marché du travail qui fait défaut depuis des années.

Son absence fait l’objet d’un consensus paradoxal entre deux acteurs pourtant antagonistes : d’un côté, Bercy, qui pilote année après année le point d’indice et les niveaux de dotation en cherchant à minimiser les dépenses, et en se gardant de convoquer trop d’éléments de « benchmark » ; de l’autre, les enseignants, les soignants et leurs syndicats, qui, attachés à la notion de service public et fiers de leur choix de carrière altruiste au service de l’intérêt général, écartent d’emblée toute référence à l’univers privé marchand.

Mais, faute de boussole pour rendre ces métiers stratégiques attractifs, le système prend l’eau. En fixant, directement ou indirectement (avec les dotations soins et dépendances pour les Ehpad, par exemple), des grilles de rémunération déconnectées des réalités, l’Etat attire toujours davantage d’agents économiques « irrationnels » – et héroïques –, qui acceptent de sacrifier leur propre intérêt sur l’autel du bien commun ou du service public.

Ce recrutement de personnels sur une logique de vocation est à l’origine d’autres dérives, que l’on retrouve parfois dans le secteur de l’entrepreneuriat social et solidaire : oubli du droit du travail, effacement des frontières entre vie professionnelle et vie privée, burn-out, etc.

Réalité virtuelle : pour remplacer la religion

Réalité virtuelle : pour remplacer la religion

Dans un entretien au « Monde », le philosophe et chercheur Pierre Musso estime que le métavers vise à « construire un imaginaire autour de technologies existantes ou en développement », et à les présenter comme une « nouvelle révolution ».

 

Pierre Musso est professeur honoraire des universités, associé à l’école d’ingénieurs Télécom Paris, spécialiste des imaginaires technologiques. Il porte son regard de philosophe sur la réalité virtuelle.

Est-ce que les métavers concrétiseront « la philosophie des réseaux » du penseur de la société industrielle Saint-Simon [1760-1825], dont vous vous inspirez ?

Le métavers illustre une innovation – ou un agrégat de technologies – censée représenter ou annoncer une révolution culturelle. Car, de nos jours, les utopies ou les dystopies se réalisent sous la forme du messianisme ou du catastrophisme technoscientifique. La Silicon Valley, avec l’aide des studios d’Hollywood, ne cesse de mettre en scène des promesses technologiques « révolutionnaires » dans des fictions qui sont souvent des blockbusters mondiaux, comme Matrix ou Minority Report, pour promouvoir le cyberespace et l’intelligence artificielle [IA].
« Métavers » est un nouveau mot-valise dont la Silicon Valley a le secret, comme la « guerre des étoiles » ou les « autoroutes de l’information », destiné à produire un grand récit et à construire un imaginaire autour de technologies existantes, ou en développement, et à les présenter au public comme une nouvelle « révolution ».

 

Vous avez écrit « La Religion du monde industriel » en 2006, puis « La Religion industrielle. Monastère, manufacture, usine. Une généalogie de l’entreprise » en 2017 : se dirige-t-on vers la « religion virtuelle » ?

Dans nos sociétés sécularisées et hyper-technologisées demeure un désir de divinités, car aucune société ne peut se passer de mythes ou de croyances fondatrices qui la font tenir. Une société technicienne va logiquement chercher ses divinités dans la technoscience. Ainsi, les références au sacré et à Dieu sont omniprésentes dans la culture anglo-saxonne, notamment dans les temples de la Silicon Valley, laquelle a adopté une « idéologie technico-mystique », héritière de la cybernétique de Norbert Wiener. Et souvenons-nous : la mort de Steve Jobs [1955-2011] fut saluée en 2011 par les mots : « dieu », « prophète », « messie », « pape », « icône », « apôtre » ou « gourou ». Désormais l’invocation du divin, de l’immortalité et de la transcendance est censée apporter un supplément d’âme à la prolifération des techno-discours entourant l’IA ou le transhumanisme. On est plongé en pleine « techno-religiosité ».

 

L’Europe a-t-elle déjà perdu cette nouvelle bataille de la réalité virtuelle ?

Il n’y a pas aujourd’hui de révolution virtuelle ou digitale, mais des combinaisons d’innovations technologiques issues d’une rupture majeure intervenue au milieu du XXe siècle, qui est l’informatisation créant un nouveau système technique, comme le XIXe siècle fut celui de la mécanisation. L’Europe peut et doit retrouver sa puissance industrielle dans ce secteur, il n’y a aucune fatalité au déclin.

Abondance et sobriété pour qui ?

Abondance et sobriété

 

L’économiste Eloi Laurent relève  dans le Monde que le concept de sobriété a connu différentes acceptions. Face à l’indéniable réalité du réchauffement climatique, il faut maintenant adopter l’idée d’une sobriété-partage, fondée sur le principe de justice.

 

Nous y sommes. En cet été 2022, la France, comme avant elle l’Australie ou les Etats-Unis, a compris que toute sa richesse ne la préserverait pas de la crise écologique tandis que sa dépendance aux énergies fossiles devient une insupportable vulnérabilité sociale. C’est le moment de revenir aux fondamentaux du raisonnement économique. Très loin de la folle gabegie de la croissance, l’analyse économique fut conçue par Aristote il y a deux millénaires et demi comme une discipline de la sobriété, cherchant à satisfaire les besoins humains essentiels dans un environnement contraint en assurant la correspondance entre des besoins raisonnés et des ressources limitées. Mais cette première sobriété, la « sobriété-frugalité », se déploie dans l’espace du foyer qui est par nature inégalitaire : les membres de la famille sont placés dans un rapport hiérarchique et ne doivent pas devenir des semblables. Il n’y a donc aucune raison pour que la satisfaction des besoins essentiels, qui procède d’un principe de nécessité, aboutisse à une situation juste. C’est dans l’espace de la cité que le nécessaire peut ou non être jugé comme suffisant.

Le deuxième âge de la sobriété, prenant acte de l’accélération fulgurante du développement économique au lendemain de la seconde guerre mondiale, entendait ralentir la surconsommation des ressources naturelles qu’il engendre, à commencer par l’approvisionnement en énergie. Il revient à l’association négaWatt d’avoir introduit ce concept de « sobriété-modération » au début des années 2000 pour le distinguer de la logique d’efficacité énergétique. Autant l’efficacité énergétique vise à réduire la quantité d’énergie (et/ou de carbone) par unité de production, autant la sobriété énergétique vise à réduire le volume d’énergie consommée et donc à garantir que les politiques mises en œuvre se traduisent effectivement par des économies d’énergie en évitant un « effet rebond » de la consommation.

A cet égard, l’article 2 de la loi sur la transition énergétique votée en 2015 en France entretient un contresens fatal en prétendant soutenir « la croissance verte par le développement et le déploiement de processus sobres ». Les travaux visionnaires de négaWatt ont notamment permis de distinguer différentes politiques de sobriété : structurelle (rapprocher les lieux de travail et de résidence), dimensionnelle (réduire la taille des voitures), d’usage (prendre les transports en commun) et collaborative (favoriser l’autopartage).

France – l’Algérie: quelle réconciliation !

 France – l’Algérie: quelle réconciliation !

 

Un papier du Monde relativise la réconciliation entre la France et l’Algérie motivée en réalité par la nécessité de solliciter le gaz algérien

Depuis des décennies, les relations franco-algériennes n’ont été qu’une succession de périodes de tension et de réconciliation plus ou moins longues. La visite de trois jours que vient d’effectuer Emmanuel Macron en Algérie a le mérite de mettre un terme à plusieurs mois de crise diplomatique.

Le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, et son homologue français ont signé une déclaration commune appelant à une « nouvelle dynamique irréversible ». Si l’irréversibilité est sujette à caution, l’élan, lui, semble réel, et guidé par la volonté partagée de repartir sur de nouvelles bases.

Les déclarations d’Emmanuel Macron sur un système algérien « politico-militaire » accusé d’entretenir une « rente mémorielle » et ses interrogations faussement ingénues sur l’existence d’une nation algérienne avant la colonisation avaient constitué le point d’orgue de la brouille. Celle-ci s’était nourrie auparavant des frustrations françaises dues à la mauvaise volonté affichée par Alger sur les principaux dossiers en cours : immigration, contrats commerciaux, travail de mémoire.

Les déclarations et les gestes qui ont ponctué la visite du président français marquent donc un retournement spectaculaire du climat entre les deux pays. Même si la substance des échanges a pu décevoir à certains égards, le symbolique revêt une importance particulière dans le contexte très psychologique et émotionnel de la relation franco-algérienne.

L’autre progrès significatif concerne la tenue d’une réunion au plus haut sommet des responsables militaires et du renseignement des deux pays. Cette rencontre, inédite depuis l’indépendance, laisse augurer d’une coopération au Sahel, au moment crucial où la France quitte le Mali.

Sur le fond, l’une des avancées notables porte sur la question des visas. Agacé par la mauvaise volonté d’Alger pour accueillir ses ressortissants expulsés de France, Paris avait décidé, à l’automne 2021, de diviser par deux le nombre de visas octroyés aux Algériens. La tension semble avoir baissé d’un cran : la France accepte d’assouplir sa position dans le cadre d’une immigration choisie, tandis que l’Algérie s’engage à lutter davantage contre l’immigration clandestine.

Quant à la question énergétique, il aurait été naïf d’attendre de ce voyage monts et merveilles. Du fait d’un manque criant d’investissements et d’une demande intérieure en forte croissance, le potentiel d’exportation de gaz de l’Algérie reste limité, et ne peut représenter à court terme une solution aux difficultés d’approvisionnement européennes, liées à la guerre russo-ukrainienne.

Si ce début de réconciliation est encourageant, il risque de buter sur trois limites. La première peut venir des franges conservatrices du régime algérien, qui voient d’un mauvais œil un retour en grâce de l’influence française. La deuxième concerne le Maroc, qui redoute que ce réchauffement ne contrecarre son plan d’autonomie du Sahara occidental, sujet de discorde avec Alger. Rabat a néanmoins des moyens de pression sur Paris en modulant son contrôle de l’immigration vers l’Europe ou sa précieuse coopération sur le terrorisme islamique. La France se retrouve ainsi prise entre les intérêts divergents d’un Maroc qui vient de normaliser ses relations avec Israël et une Algérie qui se sent de plus en plus isolée.

Seule une force européenne pourrait s’opposer à la Russie

 Seule une force européenne pourrait s’opposer à la Russie

 

La guerre en Ukraine oblige les pays européens à regarder la réalité militaire : ils ne disposent plus d’armées puissantes, pas même des armes ou des munitions qui permettraient de se battre contre l’invasion russe, explique l’ancien lieutenant-colonel Guillaume Ancel dans une tribune au « Monde ».

 

De 1985 à 1989, ma promotion d’officiers a été formée à Saint-Cyr puis dans les écoles d’arme, comme Draguignan pour l’artillerie ou Saumur pour la cavalerie. Nous avons constitué la dernière génération à se préparer au « combat blindé » contre une armée soviétique sous domination russe.

Lorsque nous sommes arrivés en régiment, cette situation a implosé sous nos yeux : le mur de Berlin s’est effondré, puis le pacte de Varsovie et la toute-puissante URSS ont disparu, du moins nous l’avons cru.

Nous avons alors restructuré l’armée française, pour mener pendant plus de trente années des opérations qu’il ne fallait pas appeler « guerres » mais « interventions extérieures », et dont la forme évoluait sans cesse, nous surprenant à chaque nouvel engagement. Sans l’ombre d’un débat, l’armée française s’est radicalement transformée.

Son effort a été colossal : sa taille a diminué de plus de la moitié. L’armée s’est intégralement professionnalisée et équipée avec une génération de matériels beaucoup plus légers et sophistiqués, aérotransportables et adaptés à des engagements rapides et courts en intensité. Exit les chars lourds et les capacités massives de bombardement, les stocks d’armements et de munitions. Bienvenue aux « frappes chirurgicales » et aux opérations spéciales menées avec des armes légères en comparaison des précédentes, produites en petite série, comme de l’orfèvrerie.

Le Caesar en est l’illustration, ce canon d’artillerie sur camion, deux fois plus léger que son prédécesseur monté sur un char lourd (155 AuF1), constitue aujourd’hui une arme « moderne », précise et fragile.

En parallèle, notre démocratie se défaisait des sujets militaires. Alors que depuis 1962, la France a participé à trente-deux guerres sans jamais reconnaître une seule fois « être en guerre », notre société s’éloignait inexorablement du fait militaire. La société n’y portait quasiment plus aucun intérêt, leur pilotage était discrètement monopolisé par l’Elysée et les militaires priés de se taire. Ainsi, cette évolution structurante de l’armée française s’est faite sans l’ombre d’un débat.

Ma promotion d’officiers formée à Saint-Cyr, puis dans les écoles d’arme, constitue la dernière génération à s’être préparée au « combat blindé » contre une armée soviétique sous domination russe

L’agression militaire de l’Ukraine par la Russie de Vladimir Poutine n’en finit pas de déstabiliser cette conviction patiemment acquise de vivre dans une Europe qui ne serait plus concernée par le phénomène le plus destructeur de notre humanité, la guerre.

Crédit marché immobilier : Les plus modestes sont défavorisés

Crédit marché immobilier : Les plus modestes  sont défavorisés

 

Le président du Crédit social des fonctionnaires (CSF), Jean-Marie Alexandre, tire la sonnette d’alarme, dans une tribune au « Monde », sur la manière dont est aujourd’hui calculé le taux d’usure, qui conduit à exclure de l’accès au logement les ménages les plus jeunes et les moins favorisés au lieu de les protéger.

 

La définition du taux d’usure est en train de se retourner contre les ménages, particulièrement les plus modestes. Les derniers chiffres publiés traduisent ainsi une diminution nette du nombre de prêts bancaires accordés pour des achats dans l’immobilier ancien pour le second trimestre 2022 : −23 %.

Aujourd’hui, c’est plus de la moitié des demandes de prêts immobiliers qui sont refusées. Les 30-35 ans et les projets d’achat de résidence principale sont les plus concernés. Nous arrivons à une situation particulière dramatique en province où les habitants locaux sont exclus du marché immobilier au profit de nouveaux arrivants achetant une résidence secondaire. Cette situation les conduit à devoir rester locataires ou à acheter beaucoup plus loin de leur lieu de travail, ce qui en période de hausse des frais de carburants, a un impact significatif sur leur budget mensuel.

L’accès au logement par les ménages modestes est paralysé depuis des mois. Des fonctionnaires, même de catégorie A, se voient refuser leur crédit immobilier du fait de dispositions qui se révèlent « meurtrières » en période de hausse des taux.

La raison ? Le taux d’usure. Fixé trimestriellement par la Banque de France, il s’agit du taux maximum légal que les établissements de crédit sont autorisés à pratiquer quand ils accordent un crédit.

Le seuil de l’usure correspond au taux annuel effectif global (TAEG) maximal au-delà duquel une banque ne peut prêter de l’argent. Ce seuil a été fixé pour éviter que des taux d’intérêt trop élevés placent l’emprunteur dans une situation financière difficile. Le taux de l’usure a donc une fonction régulatrice et protectrice.

Le 1er juillet 2022, la Banque de France a annoncé les nouveaux taux d’usure : ils passent, pour les crédits immobiliers, à 2,60 % pour les prêts à taux fixe d’une durée de dix à vingt ans, et à 2,57 % pour les prêts à taux fixe d’une durée de vingt ans et plus.

Or, dans un marché haussier, ce taux d’usure, qui est calculé à chaque début de trimestre, évolue mécaniquement trop lentement et ne reflète plus la réalité du marché, avec une inflation estimée à 6 %. De ce fait, au lieu de jouer un rôle protecteur, il finit par exclure les potentiels emprunteurs de l’accès au crédit et à la finalisation de leur projet immobilier.

Du fait du calcul du taux d’usure, qui inclue donc taux d’intérêt, assurance de l’emprunteur et frais de dossier et de garantie, les familles modestes et moyennes se voient refuser en grand nombre leur crédit.

Covid France 30 août 2022 :3806 nouveaux cas supplémentaires en 24 heures

Covid  France 30 août 2022 :3806 nouveaux cas supplémentaires en 24 heures
On enregistre lundi 29 août 2022 : 3806 nouveaux cas supplémentaires en 24 heures,  153.967 morts au total, +78 morts supplémentaires. Le nombre de décès en EHPAD et EMS fait état de 29.103 (0) décès au total. Le nombre total de décès en milieu hospitalier est lui de 124.864 (+78 en 24h).

Le taux de reproductivité R est de 0,79 le taux d’incidence à 182,39 et la tension hospitalière à 16,8 %. Le taux de positivité est à 0,0 %.

La France compte actuellement 14.929 (-208) personnes hospitalisées et 848 (+7) malades en réanimation.

Compte tenu de la tendance actuelle favorable et la baisse des principaux indicateurs, à partir du 11 juin 2022, les indicateurs COVID-19 produits par Santé publique France seront actualisés sur Géodes et data.gouv.fr tous les jours à l’exception des week-end et des jours fériés.

Bilan des régions:

  • Ile-de-France : 4.303 (-53) hospitalisées, 298 (0) en réanimation et +7 décès en 24h
  • Grand Est : 1.105 (-42) hospitalisés, 63 (-4) en réanimation et +4 décès en 24h
  • Hauts de France : 1.240 (-14) hospitalisés, 63 (-2) en réanimation et +8 décès en 24h
  • Auvergne Rhône Alpes : 1.225 (-53) hospitalisés, 61 (0) en réanimation et +12 décès en 24h
  • Provence-Alpes Côte d’Azur : 1.475 (+7) hospitalisé, 57 (+3) en réanimation et +7 décès en 24h
  • Bretagne: 467 (+1) hospitalisés, 31 (-3) en réanimation et +3 décès en 24h
  • Normandie : 882 (-10) hospitalisés, 36 (+3) en réanimation et +1 décès en 24h
  • Nouvelle-Aquitaine : 1.169 (+8) hospitalisés, 77 (+8) en réanimation et +7 décès en 24h
  • Pays de la Loire : 260 (-3) hospitalisés, 19 (-2) en réanimation et +3 décès en 24h
  • Occitanie: 1.131 (-4) hospitalisés, , 57 (+2) en réanimation et +10 décès en 24h
  • Centre-Val de Loire : 655 (-4) hospitalisés, 27 (+3) en réanimation et +3 décès en 24h
  • Bourgogne-Franche-Comté : 584 (-24) hospitalisés, 33 (+4) en réanimation et +8 décès en 24h

Politique- Abondance, abondance….. Est-ce qu’on a une gueule d’abondance !

 

Abondance, abondance….. Est-ce qu’on a une gueule d’abondance !

 

On pourrait reprendre la célèbre réplique d’Arletty pour s’interroger sur la pertinence de la déclaration de Macron relative à la « fin de l’abondance ». De toute évidence, Macron ne vit pas dans le même monde que la plupart des Français. Il suffit par exemple de citer le revenu médian des ménages à 2000 € en France. Pas vraiment une situation d’abondance. Comme un adolescent capricieux, Macron change brusquement de langage pour passer des propos très rassurants pendant sa campagne électorale à un discours apocalyptique mal approprié à la situation réelle du pays. 

Complètement hors-sol et même méprisant, Macron s’est donc encore livré à son exercice préféré de condescendance consistant à culpabiliser les Français.  Pour lui : «nous vivons depuis plusieurs années la fin de ce qui pouvait apparaître comme une abondance» de «liquidités sans coût», «de produits», «de technologies qui nous semblaient perpétuellement disponibles», de «terre ou de matière» ou même d’«eau». À ce constat assez sombre, le président y ajoute «la fin des évidences» et «la fin de l’insouciance» liées à la guerre qui continue de faire rage aux portes de l’Europe.

Une espèce de prêche de curé de campagne mais sans réelle vision sur les orientations qu’ils propose pour mettre fin à cette « société d’abondance »

Volontairement sans doute Macron reste dans le flou. Il l’oublie sans doute que le salaire médian ( qui sépare la population en deux) est de ‘(ordre  de 2000 € en France , il paraît donc  pour le moins injuste de parler de société d’abondance,  sans parler de ceux qui sont englués dans la pauvreté.

Certes, la France connaît comme d’autres pays connait  différentes crises systémiques qui interagissent entre elles. La crise écologique, la crise énergétique, la crise économique sans parler de la crise sociétale. Mais les facteurs explicatifs sont anciens et les contradictions du pouvoir n’ont fait que les accentuer. Tout n’est pas imputable aux politiques mais la démagogie du pouvoir a encouragé une certaine déresponsabilisation. Enfin on ne peut faire l’impasse d’une analyse sociologique fine pour distinguer les degrés de responsabilités. Bref , les propos apocalyptiques de Macron ne font qu’obscurcir un débat qui demande au contraire davantage de clarté et de pertinence.

L’opposition a fortement réagi à ces propos de nature insultante autant qu’irresponsable. Depuis Châteauneuf-sur-Isère (Drôme), le patron de La France Insoumise considère qu’«Emmanuel Macron ne se rend pas compte à quel point ça peut être blessant pour les gens». «Il ne se rend pas compte parce que pour ces amis, l’abondance, ça continue, il ne veut pas qu’on taxe les profiteurs de crise. Des gens qui ont accumulé des millions, et des millions et des millions sur le dos de la crise Covid, de l’inflation. Donc, pour eux, l’abondance continue», ajoute l’ancien candidat à l’Élysée.

Du côté du Parti socialiste, c’est le sénateur David Assouline qui tance le chef de l’État quant à son «abondance de déconnexion». «Il préside un pays asphyxié, une majorité de citoyens qui se serrent la ceinture comme jamais alors que les grandes entreprises font des milliards de bénéfices. Et sa majorité vote contre le Smic à 1500€ et contre la taxation des super profits», lance-t-il.

Le député LR des Alpes-Maritimes Éric Ciotti, par ailleurs prétendant à la présidence du parti de la droite, a qualifié cette dernière d’«indécente». «Il n’y a qu’une “insouciance” en France c’est celle d’un président qui conduit notre pays dans le mur en refusant le courage de la réforme et en privilégiant la dépense illimitée», ajoute l’élu du Sud.

 

 

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