Sobriété : Attention aux prix
« On peut penser que des sujets (tels que la sobriété énergétique) vont devenir très naturellement des éléments de dialogue social extraordinairement banals dans les années qui viennent », a déclaré le 1er juillet Agnès Pannier-Runacher. La ministre de la Transition énergétique s’exprimait après avoir reçu à l’hôtel de Roquelaure, avec son collègue chargé du travail Olivier Dussopt, les organisations syndicales et patronales ainsi que les énergéticiens dans le cadre du plan de sobriété énergétique du gouvernement. « Lorsqu’on parle de sobriété énergétique, on parle aussi de conditions de travail, de chauffage dans les bureaux et dans les locaux de production, de télétravail, d’organisation des transports », a expliqué ce dernier. ( papier de l‘Opinion)
Qu’il s’agisse donc d’usage ou de conditions de vie, il y aura un coût à supporter. Mieux vaut sans doute ne pas le dire comme cela. Une « feuille de route de recommandations simples et opérationnelles » discutée au cours de l’été, sera présentée à l’automne. Le gouvernement se réservant le rôle de « facilitateur » pour laisser chaque entreprise « trouver son chemin ».
Dans le JDD, les patrons se répondent sur le sujet. Le 26 juin, ceux des trois énergéticiens (TotalEnergies, EDF et Engie) appelaient les Français à se serrer la ceinture s’ils ne voulaient pas avoir des coupures de chauffage cet hiver. Ils mettaient en avant un risque de pénurie menaçant « la cohésion sociale » l’hiver prochain. Une semaine plus tard, le 3 juillet, 84 dirigeants d’entreprises français, plaident pour « faire de la sobriété énergétique » un choix collectif. Ils appartiennent pour beaucoup à l’économie sociale et solidaire ou au milieu associatif. Parmi les signataires figurent également Hélène Bernicot du Crédit mutuel Arkéa, Pascal Demurger de l’assureur MAIF et Jean-Bernard Lévy d’EDF… qui a donc signé les deux tribunes. « Une sobriété durable passera obligatoirement par un partage de la valeur équitable et par une intégration du temps long au sein de l’entreprise, et donc par des évolutions de gouvernance , affirme le texte. L’expérience nous a montré que l’innovation technologique doit aller de pair avec une sobriété des usages, sans quoi les “effets rebonds” la rendront contre-productive. »
Effet rebond ? Certains consommateurs préfèrent remplacer leurs trajets onéreux en train par des trajets en voiture une fois avoir acheté une voiture performante et économe (934 km de bouchons pour le week-end de l’Ascension). Autre exemple de rebond : nous consommons un produit plus écologique comme du papier recyclé, nous nous disons que nous pourrons en consommer plus. La Suède est un bon exemple de cela. Le pays a pris tôt le chemin de la transition écologique, en créant dès 1991 une taxe carbone visant à réduire les gaz à effet de serre. En presque trente ans, les émissions déjà plus faibles que la moyenne européenne ont diminué de 26 % dans le pays, Pourtant les émissions de gaz à effet de serre basées sur la consommation s’élèvent à quelque neuf tonnes par personne chaque année, selon l’agence publique nationale de protection de l’environnement. C’est neuf fois plus que ce qu’il faudrait pour maintenir une hausse des températures « bien au-dessous de 2 degrés » d’ici 2050, d’après les autorités locales. Au royaume d’Ikea et d’H&M, la consommation des ménages, dotés d’un important pouvoir d’achat, devra donc baisser.
« En 1956, lors de la crise du canal de Suez, Guy Mollet avait annoncé à la radio qu’il fallait anticiper les difficultés dues au problème du ravitaillement pétrolier », raconte l’économiste Jean-Marc Daniel. « Je commencerai par le civisme, puis je passerai au cynisme », avait-il ajouté. Le cynisme est arrivé à l’approche de l’hiver, avec des tickets de rationnement et des hausses de prix.
0 Réponses à “Sobriété : Attention aux prix”