Transition énergétique :Le BTP en retard

Transition énergétique :Le  BTP  en retard  

 

Si les entreprises du bâtiment et des travaux publics se savent contraintes de changer de modèle, elles ne savent pas encore à quel rythme et à quel prix, regrettent le consultant Sébastien Delpont et le chercheur Andreas Rüdinger, dans une tribune au « Monde ».

 

On aime à dire que « quand le bâtiment va, tout va ». Mais à l’heure d’organiser sa décarbonation, il est peu de monde pour dire que tout va bien dans le BTP, secteur responsable de 40 % des émissions de dioxyde de carbone de l’Union européenne. Les entreprises peinent à se projeter, faute de politiques publiques suffisamment précises. Quels financements, quelles obligations, quels partis pris ? Elles voient un cap, mais ni l’itinéraire ni les points d’étape pour planifier leur transition en matière de gestion des compétences, de développements technologiques et de modèles d’affaires.

Tous reconnaissent que l’on utilisera des matériaux décarbonés et que l’on bâtira moins d’ouvrages neufs, avec une part moindre de maisons individuelles pour moins artificialiser les sols. Les marchés de demain seront ceux de la rénovation performante, pour baisser les factures d’énergie et s’adapter aux canicules, et de la reconversion de bureaux (moins utilisés avec l’essor du télétravail) en logements et lieux multifonctionnels.

Mais il reste un pas à franchir pour transformer ces tendances qualitatives en une planification quantitative crédible, avec des moyens financiers alignés sur des ambitions précises. Sans cette visibilité, les entreprises hésitent à investir. La définition légale de ce qu’est une rénovation performante est à géométrie trop variable. Les travaux, les besoins financiers et en formation seront très différents à cinq, dix ou vingt ans, si l’on veut basculer tous les logements en classe énergie E, F et G à la classe D, ou si l’on souhaite que 30 % des logements atteignent un niveau de classe B en une fois.

Pour rénover bien plus et bien mieux, il faudra multiplier le nombre d’emplois par 2,5. Un sujet majeur alors que 30 % des artisans partiront à la retraite dans les dix prochaines années et que la filière peine à recruter. Trois voies sont possibles : reconvertir des artisans issus de la construction neuve, reconvertir des salariés d’industries en déclin ou former des jeunes. L’organiser nécessite une clarté sur ce que l’on veut faire : quels travaux, quels niveaux de performance, quels types de bâtiments, sur quels territoires et en quel nombre par an ? Une abondance de plaquistes en Alsace ne résout pas une pénurie d’électriciens en Ariège. Il y aura aussi des postes à pourvoir pour coordonner ces différents corps de métier et pour améliorer la qualité architecturale.

Les entreprises ont des paris à tenir : vers une majorité de compagnons spécialisés, les uns installant des isolants et d’autres des pompes à chaleur, ou vers une majorité de compagnons polyvalents, formés à la plomberie, à l’électricité, à la menuiserie ? Faut-il adapter les modes de construction aux compétences des compagnons, ou les former à de nouvelles techniques ? Le fait de couler de la terre crue ou de projeter du béton de chanvre ressemble aux gestes de celui qui sait couler du béton, alors que c’est tout autre chose de construire en bois, en paille, ou de déconstruire pour réutiliser. Basculer des tâches du chantier vers l’usine, avec l’essor de la préfabrication, facilitera aussi le développement de l’emploi féminin, aujourd’hui inférieur à 15 % dans le BTP mais de 45 % dans l’industrie.

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