Marché électricité : l’exemple de l’Australie

Marché électricité : l’exemple de l’Australie

 

L’autorité de régulation énergétique australienne a pris le contrôle des prix de l’électricité afin d’éviter un « black-out ». Thierry Kalfon, directeur des activités « renouvelables » d’Engie en Australie et en Asie du Sud-Est, explique, dans une tribune au « Monde », pourquoi cet événement doit nourrir la réflexion sur la planification énergétique en France.

Anthony Albanese ne s’attendait certainement pas à cela. Lorsque, à l’issue des élections du 21 mai, le leader du Parti travailliste a pris les rênes du gouvernement fédéral australien, il s’était à l’évidence préparé à traiter en urgence plusieurs chantiers prioritaires : l’inquiétante accélération de l’inflation, la nécessaire revalorisation du salaire minimum, l’état calamiteux de la prise en charge des personnes âgées, une épidémie de Covid-19 encore meurtrière et, sur le plan international, au-delà du lointain conflit en Ukraine, l’affirmation de la puissance chinoise dans le « pré carré » australien des Etats insulaires du Pacifique.

Certes, tout cela a été d’emblée très présent. Mais l’événement le plus important de ce début de mandat a pris le jeune gouvernement par surprise.

Le mercredi 15 juin, à 14 h 05, l’Australian Energy Market Operator (AEMO), l’autorité de régulation énergétique, a suspendu le marché électrique australien pour la première fois de son histoire.

Afin de prévenir les risques majeurs de rupture d’approvisionnement électrique (ou black-out), le régulateur a pris le contrôle de tous les actifs de production et les contraint désormais à produire les volumes qu’il détermine, au moment qu’il décide, et aux prix qu’il fixe discrétionnairement. Les producteurs privés d’électricité australiens sont ainsi devenus les exécutants d’un système électrique centralisé à prix administrés. Par son ampleur et sa radicalité, cette mesure est inédite dans les économies électriques modernes.

Comment l’Australie, membre du G20, douzième économie la plus riche du monde, a-t-elle pu en arriver à une telle extrémité ?

Au 15 juin, environ 30 % des actifs de production électrique à partir de charbon faisaient l’objet d’arrêts programmés (pour maintenance), ou d’arrêts non programmés (pour défaillances techniques). A cette date, par exemple, la centrale à charbon géante de Yallourn, qui, à elle seule, produit 22 % de l’électricité de l’Etat de Victoria, fonctionnait à la moitié de ses capacités à cause de pannes imprévues. Mise en service il y a quarante-huit ans, cette centrale en fin de vie, comme toutes les autres centrales à charbon australiennes, souffre de problèmes opérationnels à répétition.

Les prix du gaz et du charbon qui alimentent les centrales électriques ont explosé, sous l’effet de la reprise économique postrestrictions sanitaires liées à l’épidémie de Covid-19 et de la crise ukrainienne. Ces combustibles ont également été moins accessibles à cause de la concentration de la production nationale vers les marchés d’exportation (l’Australie, qui exporte 75 % de sa production nationale, est le quatrième exportateur mondial de gaz selon le site Tarifgaz.com). Les producteurs d’électricité ont répercuté le coût de leurs achats de combustibles sur leurs prix de vente dans les marchés de gros auprès desquels les fournisseurs d’électricité s’approvisionnent pour alimenter les consommateurs finaux. Afin d’enrayer la spirale incontrôlée des prix de détail, le gouvernement a plafonné ces prix de gros ; certains producteurs ont alors interrompu leur production plutôt que de la vendre à perte, entretenant un cercle vicieux de baisse de l’offre et d’augmentation des prix.

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