Environnement : la transition écologique est surtout un enjeu économique
La transition peut réussir à condition de réunir quatre préalables : taxer le pétrole, assurer l’efficacité énergétique, sortir du mythe du bien commun et repenser la filière nucléaire, estime, dans une tribune au « Monde », l’énergéticien Gilles David.
La situation est grave, et les perspectives sombres. Le temps est compté avant le point de non-retour et le chaos. C’est en tout cas ce que beaucoup affirment dès que le sujet de la transition énergétique est abordé.
Pourtant, être un entrepreneur lucide et investi dans les « cleantech » [technologies propres] donne une vision autre de la réalité. Le sérieux et la complexité des enjeux ne doivent pas empêcher un optimisme lucide. Car, loin d’une foi aveugle dans la technologie et la science, c’est l’histoire qui nous ramène à la mesure et la raison.
En effet, si la crise énergétique et existentielle que nous traversons est d’une intensité inédite, elle n’en est pas moins une nouvelle réplique des secousses récurrentes que connaît notre monde en matière d’énergie. Moulins à vent et à eau ont ainsi permis, jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, à l’industrie européenne de produire farine, papier et… armes. A cette date, presque toutes les chutes d’eau en France sont équipées.
En Angleterre, ce sont les besoins croissants en énergie qui provoquèrent, aux XVIIe et XVIIIe siècles, une grave pénurie de bois et l’émergence du charbon, d’abord pour remplacer le bois dans les cheminées, les hauts-fourneaux et les fours à verre et ensuite pour remplacer les barrages, grâce à la machine à vapeur. C’est aussi la crise pétrolière de 1973 – et la forte hausse des tarifs du pétrole – qui a conduit le nucléaire à remplacer le pétrole dans notre pays. Le nucléaire n’aurait pas connu un tel développement sans cette crise.
En réalité, les avancées énergétiques se sont toujours faites pour des raisons d’abord économiques. La transition énergétique que nous appelons tous de nos vœux n’échappe pas à cette règle. Elle se fera si les conditions économiques d’un marché de la production d’énergie sans CO2 et l’efficacité énergétique sont réunies. Elle réussira si elle est technologique, libérale et régulée par des politiques visionnaires.
A l’échelle de l’homme, l’énergie disponible est illimitée. Entre le soleil, le vent, la géothermie, les combustibles fossiles ou le nucléaire, le problème n’est pas la raréfaction de l’énergie. Le problème est celui de son coût de production, de son stockage et de ses externalités. L’énergie n’est pas gratuite.
Elle coûte en capital et en main-d’œuvre. Pour produire de l’énergie, il convient donc de mobiliser du capital, de disposer de moyens humains ainsi que de conditions de marché permettant de vendre la production. La question est d’abord économique et non physique.
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