BCE : un risque d’éclatement?

BCE : un risque d’éclatement?

 

L’économiste Jézabel Couppey-Soubeyran souligne, dans sa chronique au Monde , les  risques pour la BCE :  lutter à la fois contre l’inflation et les écarts de taux entre pays membres.

Les achats de titres de la Banque centrale européenne (BCE) ont surtout servi à maintenir bas et à resserrer les écarts de taux (spreads) auxquels les Etats de la zone euro empruntent sur les marchés financiers. La fin des programmes d’achats, annoncée le 9 juin, signifie que la BCE ne pourra plus contrôler aussi directement les taux souverains. Certes, elle s’est engagée à « contrer la résurgence de risques de fragmentation » à l’issue d’une réunion exceptionnelle, le 15 juin. Il lui sera néanmoins difficile de lever son bouclier contre l’inflation sans abaisser celui avec lequel elle repoussait, jusqu’ici, le risque de crise des dettes souveraines.

Jusqu’au resserrement annoncé de sa politique monétaire, la BCE pouvait discrètement pallier l’une des failles de la zone euro : celle d’être une zone monétaire sans union budgétaire. Les dix-neuf Etats membres ont tous la même monnaie, mais empruntent chacun individuellement.

Même si les marchés sont friands de dette souveraine, perçue comme un actif plus sûr, les conditions de taux sont, en l’absence de dette mutuelle, inégales d’un pays à l’autre : des taux bas pour ceux jugés les plus sûrs, plus hauts pour les autres. Les écarts peuvent devenir explosifs, jusqu’à dégénérer en crise des dettes souveraines. Celle qui avait éclaté en 2010 dans la zone euro menaçait d’être fatale jusqu’à ce que Mario Draghi trouve les mots, le 26 juillet 2012, promettant aux détenteurs de titres souverains que la BCE serait là pour leur racheter leurs titres en tant que de besoin.

Sa promesse avait suffi à resserrer les spreads. Sans regagner le mouchoir de poche dans lequel ils tenaient avant la crise financière, ils ont ensuite continué d’être contenus par les achats de titres que la BCE a commencé à pratiquer de manière effective à partir de 2015. L’écart entre le taux des emprunts souverains de l’Italie et celui de l’Allemagne, par exemple, même pendant la tourmente politique de 2018-2019, n’a guère dépassé les 300 points de base, assez loin du pic des 550 points de base de 2012.

Avec le resserrement de sa politique monétaire, la BCE ne va plus pouvoir faire comme si l’absence d’union budgétaire n’était pas un problème. Le 9 juin, à l’instant même où elle annonçait qu’elle mettrait un terme à ses achats de titres à compter du 1er juillet, le spread italien est passé de 197 à 215 points de base, et augmente depuis (le taux à dix ans des obligations italiennes a franchi les 4 % le 13 juin, pour la première fois depuis 2014). Encore assez loin du pic de 2012 mais assez pour provoquer des dévalorisations substantielles d’actifs : mécaniquement, lorsque les taux des emprunts obligataires montent, la valeur actualisée de ce qu’ils rapporteront dans le futur baisse.

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