Philo : Maintenir la symbolique du Bac
L’épreuve de philosophie, qui a lieu mercredi 15 juin, est désormais l’unique épreuve sur laquelle tous les élèves de terminale des filières générale et technologique plancheront en même temps. La philosophie, présentée comme une matière « universelle » par le ministère de l’éducation à l’annonce des réformes du baccalauréat et du lycée en 2018, a gardé son épreuve sanctuarisée, qui aura lieu mercredi 15 juin. Une position qui réaffirme l’attachement très singulier en France pour cette discipline, même si son enseignement sort en réalité perdant de cette réforme du lycée, estime Thomas Schauder, professeur de philosophie au lycée Chrestien-de-Troyes, à Troyes.
Une interrogation sans doute justifiée mais qui ne remettra pas sans doute en cause l’obsolescence des conditions de passage du Bac aujourd’hui dans de nombreuses filières et l’évolution vers une évaluation sur dossier scolaire. ( voir parcoursusp) NDLR
Depuis la réforme qui a mis en place le contrôle continu et de multiples spécialités, la philosophie est la dernière épreuve commune maintenue pour le baccalauréat en terminale. Quelle place occupe-t-elle dans l’imaginaire collectif français ?
Ce maintien conforte le statut symbolique de cette épreuve, associée en France à une espèce de rite initiatique. Il se prolonge depuis le XIXe siècle, avec des racines certainement encore plus anciennes d’un attachement à la philosophie qui remonte à la disputatio du Moyen Age. L’épreuve de « philo » est celle dont on se souvient une fois adulte : l’appréhension de la découverte en terminale, le sujet de dissertation et la note reçue restent chez beaucoup de Français, même des dizaines d’années après, un souvenir gravé. C’est pour l’opinion commune une matière de citoyenneté, qui apprend aux élèves à réfléchir.
Il y a une vraie singularité française dans la manière dont cette discipline est considérée mais aussi enseignée. Dans les pays comme l’Espagne ou l’Italie, la philosophie est une matière historique, centrée autour de l’histoire des idées ; dans les pays anglo-saxons, c’est un art de l’argument. En France, il s’agit d’un exercice de style à part, qui mêle l’élégance du raisonnement, l’habileté rhétorique, l’érudition… Un mélange de toutes les compétences de l’école dans ce qu’elle a en réalité de plus élitiste. D’ailleurs, la philosophie telle qu’elle est notée au bac est un miroir des inégalités sociales : ceux qui la réussissent le mieux sont ceux qui arrivent à l’école avec un capital culturel et symbolique déjà acquis.
Elle n’ouvre cependant plus le bal, mais ferme les épreuves avec le grand oral. Est-ce que cela change la manière de l’aborder ?
La positionner ainsi en fin de baccalauréat et aussi loin des épreuves de spécialité a des conséquences très fortes sur la perception de la matière par les élèves. Depuis le passage de ces fameuses nouvelles épreuves de spécialité, en mai, nous avons assisté dans nos classes à une déperdition d’élèves : dans mes meilleures classes, j’étais à 60 % des effectifs en filière générale, et en terminale technologique, j’ai fait cours devant huit élèves sur trente. Pour beaucoup d’élèves, ces épreuves étant passées, l’année est finie. Le poids de la philosophie n’est pas négligeable, avec un peu moins de 10 % de la note finale, mais pas suffisant pour pousser un élève tangent à s’investir sur les dernières semaines.
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