L’inflation augmente encore en Europe
Pendant des semaines et des mois des autorités officielles et des experts ont soutenu que l’inflation était de nature conjoncturelle. Conclusion qu’il était inutile d’y accorder beaucoup d’importance et que la situation rentrerait dans l’ordre en 2023. Force est de constater qu’il ne s’agit nullement d’un événement éphémère. Cette inflation est bien structurelle. Elle découle notamment de l’augmentation des matières premières aussi bien industrielles qu’alimentaires, de la restructuration de l’appareil de production et de la logistique ainsi que des effets de la guerre en Ukraine sans parler de la sécheresse qui pèse sur les prix agricoles.
L’un des facteurs explicatifs revient aussi de la situation post covid. Au cours de la crise sanitaire pour prendre en charge la maladie en même temps que les conséquences sociaux économiques des milliards ont été déversées par les banques centrales de manière assez aléatoire. Il faut évidemment un jour ou l’autre remboursait les dettes qui en résultent et l’inflation et le moyen traditionnel de faire payer aux ménages le prix d’une politique monétaire accommodante pour ne pas dire complètement laxiste et insuffisamment ciblée.
Sur l’ensemble de la zone euro, l’inflation a atteint le taux record de 7,5% sur un an en avril. Elle progresse un peu partout en Europe.
En Allemagne, l’indice des prix à la consommation a atteint un nouveau record en mai, à 7,9% sur un an. . Pour trouver un chiffre d’inflation aussi élevé, il faut remonter à janvier 1952, à l’époque de l’Allemagne de l’Ouest. En Espagne, l’inflation est également repartie à la hausse au mois de mai pour atteindre 8,7% sur un an, soit 0,4 point de plus qu’en avril, selon une estimation publiée lundi par l’Institut national de la statistique (INE). Cette nouvelle hausse survient alors qu’un léger ralentissement avait été observé en avril (8,3%), laissant espérer un début de modération après un pic à 9,8% atteint en mars, le niveau le plus élevé en Espagne depuis 37 ans.
Au Royaume-Uni, l’inflation a atteint en avril son niveau le plus haut en 40 ans, à 9% sur un an. En France, après avoir atteint 4,8% au mois d’avril, l’indice des prix à la consommation pourrait dépasser la barre symbolique des 5% d’ici juin. « Nous avons aujourd’hui en France un taux d’inflation d’un peu moins de 5% », a indiqué lundi le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, à la veille de la publication de l’indice des prix à la consommation par l’Insee. Sur l’ensemble de la zone euro, l’inflation a atteint le taux record de 7,5% sur un an en avril. L’indicateur pour mai, qui sera très scruté, est également attendu pour mardi.
Dans ce contexte, la Banque centrale européenne (BCE) plaide pour une hausse graduelle des taux. Le taux de référence de la BCE est actuellement fixé à -0,5%, niveau auquel il campe depuis 2019. Il s’agit du taux d’intérêt que paient les banques qui confient une partie de leur dépôts dormants aux banques centrales de la zone euro. Cette politique, entamée en 2014, visait à soutenir le crédit aux ménages et aux entreprises pour stimuler l’activité économique et, in fine les prix.
Mais face à cette inflation record, sortir des taux négatifs en septembre « est logique », estime Philip Lane chef économiste de la BCE, qui s’exprimait lundi dans les colonnes du quotidien économique espagnol Cinco Días. D’après lui, un rythme « de référence » pour y parvenir consisterait en deux hausses de « 25 points de base » chacune, en juillet et en septembre, a-t-il déclaré confirmant ainsi la perspective récemment dessinée par la présidente de l’institution, Christine Lagarde. «Sur la base des perspectives actuelles, nous devrions être en mesure de sortir des taux d’intérêt négatifs d’ici la fin du troisième trimestre», soit en septembre, avait écrit cette dernière dans une note de blog publiée la semaine dernière sur le site internet de la BCE.
Aux Etats-Unis, la banque centrale (Fed) est plus offensive. Alors qu’elle relève habituellement ses taux directeurs par tranches d’un quart de point de pourcentage, début mai, elle a eu recours à une forte hausse d’un demi-point, pour la première fois depuis 2000/ L’objectif : juguler l’inflation record, qui s’affichait à 8,3% sur un an en avril. Lundi, lors d’un discours virtuel devant l’Université Goethe de Francfort, en Allemagne, Christophe Waller, un responsable de la Fed a anticipé plusieurs hausses des taux directeurs d’un demi-point d’ici la fin de l’année, « jusqu’à ce que l’inflation soit revenue proche de notre cible de 2% ». Il estime cela possible sans faire grimper le chômage.
Les taux, qui se situent dans une fourchette de 0,75 à 1,00%, devraient, selon lui, être relevés d’ici la fin de l’année jusqu’à dépasser le niveau dit «neutre», considéré comme compris entre 2,00 et 3,00% environ. Il a ainsi dit être sur la même ligne que les attentes des marchés, évoquant des taux en hausse de 2,5 points au total sur l’année, passant de la fourchette de 0 à 0,25% dans laquelle ils se trouvaient jusqu’en mars, à 2,5-2,75%. «Si nous devons faire plus, nous le ferons», a-t-il encore assuré. Et de souligner : un tel mouvement doit permettre de réduire «la demande de produits et de main-d’œuvre, (l’aligner) davantage sur l’offre et (aider) ainsi à maîtriser l’inflation».
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