Elections législatives :L’impossible cohabitation
Compte tenu de l’opposition frontale entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon sur les questions européennes, le juriste Bertrand-Léo Combrade estime, dans une tribune au « Monde », que les quelques bénéfices liés à la cohabitation seraient annihilés.
Dès l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle 2022, le candidat La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, a demandé aux Français de « l’élire » au poste de premier ministre lors des élections législatives, qualifiées de « troisième tour » de l’élection présidentielle. De son côté, la candidate du Rassemblement national (RN), sans évoquer expressément cette perspective, a souhaité une nette victoire des députés disposés à défendre son programme à l’Assemblée nationale.
A ce jour, la perspective d’une cohabitation entre, d’un côté, un gouvernement constituant l’émanation d’une Assemblée nationale dominée par le RN ou LFI, et, d’un autre côté, le président Emmanuel Macron, semble très improbable. D’une part, en raison du scrutin majoritaire à deux tours, a priori favorable à LRM et ses alliés. D’autre part, en raison de la démobilisation traditionnelle des électeurs dont le candidat a perdu l’élection présidentielle.
Toutefois, ainsi que le président de la République l’a exposé à plusieurs reprises, il ne semble pas exclu qu’il envisage un « choc de représentativité » destiné à renforcer le pluralisme au sein de l’Assemblée nationale. De leur côté, Marine Le Pen et Jean-Luc Mélenchon pourraient, contre toute attente, parvenir à remobiliser leurs électeurs en leur expliquant l’enjeu que représentent les élections législatives.
Incontestablement, la cohabitation a bien des mérites. L’interprétation présidentialiste de la Ve République, qui domine lorsque le premier ministre et le président sont du même bord politique, s’efface au profit d’une interprétation parlementariste, plus conforme au texte de la Ve République. En outre, une telle configuration politique, dans laquelle le détenteur de l’essentiel du pouvoir n’est plus le président mais le gouvernement, qui répond de son action devant le Parlement, apparaît plus saine dans un esprit d’équilibre des pouvoirs.
Du reste, les trois expériences de cohabitation (1986-1988, 1993-1995 et 1997-2002) ont montré que le premier ministre disposait effectivement des marges de manœuvre nécessaires pour mettre en œuvre l’essentiel du programme politique de sa majorité. Cependant, sans nier les bénéfices de cette configuration politique particulière, il faut souligner combien celle qui pourrait se profiler serait, à bien des égards, acrobatique.
Durant les trois précédentes cohabitations, en dépit de tensions ponctuelles, les deux têtes du pouvoir exécutif se sont efforcées de respecter leurs champs de compétences respectifs. « La Constitution, rien que la Constitution, toute la Constitution », expliquait le président Mitterrand en 1986.
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