Médias et Vincent Bolloré: La menace démocratique

Médias  et Vincent Bolloré: La menace  démocratique

 

Ce qu’il a entrepris dans le domaine de l’information (déjà Canal +, CNews ou Prisma Media, et Europe 1, Le Journal du dimanche, Paris Match sur lesquels il a commencé d’imprimer sa « patte ») constituait déjà un gisement d’inquiétudes. Ce qu’il prépare dans le secteur de l’édition – résultant de l’OPA qu’il mène sur le groupe Lagardère propriétaire de Hachette – semble moins spectaculaire aux yeux de l’opinion ; or les effets industriels, intellectuels, éthiques, ne s’annoncent pas moins préoccupants. Le raid de Vincent Bolloré constitue une menace pour la salubrité du débat d’idées, qu’il soit public (dans le cas des médias) ou intime (dans celui de l’édition d’essais et de fiction). Et donc un risque démocratique. Au Festival du livre de Paris (22 – 24 avril), le sujet sera dans toutes les bouches.( papier de « la Tribune »)

C’est l’histoire d’un essayiste aguerri qui compose son premier roman. Nommons-le Pierre. Il le sait, dénicher un éditeur dans une discipline où il est novice ne sera pas un long fleuve tranquille, et même davantage : il s’engage dans un parcours du combattant à l’issue très incertaine, tant les embuches s’amoncellent dès la ligne de départ. Comment faire exister un manuscrit parmi les 2.000 à 4.000 réceptionnés chaque année par des maisons qui n’en sélectionnent, au final, qu’une à quelques poignées ? Et dans ces conditions, comment espérer qu’il rencontre la sensibilité d’une femme ou d’un homme qui l’aura miraculeusement pioché dans la pile avant de le transmettre au comité ad hoc chargé de lire puis d’élire ? La (petite) notoriété, les (solides) réseaux, la foi immarcescible de l’auteur suffiront-elles ? Non, il en est conscient, et le facteur chance, par nature imprévisible, devrait constituer l’arbitre final. Final, vraiment ? Pas tout à fait.

Lorsqu’il pense avoir triomphé des obstacles les plus aigus et que ses pérégrinations semblent proches d’aboutir, voilà que Pierre se confronte à d’autres écueils, ceux-là tout à fait imprévus. Chez telle prestigieuse enseigne, après avoir franchi avec succès le seuil le plus délicat, il s’entend signifier qu’il est trop âgé, la décision ultime privilégiant un « auteur plus jeune » qui générera un plus sûr retour sur investissement. Dans telle autre grande maison, le retour enthousiaste du sommet de la pyramide passant le relais à une collaboratrice promet la lumière ; peine perdue, les « équipes commerciales préfèrent renoncer, faute de savoir comment traiter cet « alien » ». Ici, la détermination de l’auteur de rester imperméable aux réseaux sociaux est jugée rédhibitoire « puisqu’aujourd’hui sans stratégie Instagram, Twitter, Facebook, impossible de lancer un livre ». Là, le comité de lecture estime le texte « trop sombre » pour être populaire. Le pire peut-être, introduit par différents interlocuteurs sans relation entre eux : « Il faudrait revoir l’organisation du texte, afin que l’intrigue surgisse dans les quinze premières pages. C’est une règle : au-delà, on perd le lecteur », synthétise, en substance, l’un d’eux. « Mais vous avez conscience que la première partie est volontairement étirée, lente, descriptive, pour donner à l’irruption puis au développement de l’intrigue conclue dans l’épilogue, sa force psychologique, son mystère, sa dramaturgie ? », se défend l’auteur. « Bien sûr. Vous avez raison. Malheureusement, ce qui tranche au final, c’est la loi du marketing ».

 

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