Une crainte de guerre montante
Dans un entretien au « Monde », Nicu Popescu, ministre des affaires étrangères de la Moldavie, décrit les conséquences sur son pays de la guerre en Ukraine, notamment dans son rapport à l’Union européenne.
La Moldavie est le pays européen, après la Pologne, qui a fourni l’effort le plus remarquable pour accueillir les réfugiés ukrainiens. Cet Etat pauvre de près de trois millions d’habitants, longtemps négligé à la périphérie de l’Union européenne (UE), fait l’objet, aujourd’hui, d’une attention inédite de la part de Bruxelles et de Washington. La visite officielle du ministre des affaires étrangères, Nicu Popescu, aux Etats-Unis, qui s’est achevée mardi 19 avril, en a été la preuve. Dans un entretien au Monde, le ministre, parfaitement francophone, explique comment son pays veut s’ancrer dans une perspective européenne.
Vous avez été reçu le 18 avril par le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken. Comment jugez-vous le soutien occidental apporté à la Moldavie ?
L’agression russe contre l’Ukraine accélère et cristallise les positions de tous ceux préoccupés par la sécurité en Europe. Afin que la Moldavie reste stable et engagée sur la voie des réformes, notre dialogue a été intensifié, à la fois avec Washington et l’UE. Notre objectif, c’est l’adhésion à l’UE. Avec les Etats-Unis, nous avons un processus d’interaction structuré autour de trois groupes de travail : l’économie et l’énergie, la politique et le dialogue sécuritaire et, enfin, la lutte contre la corruption et l’Etat de droit.
Comment parvenez-vous à gérer la vague de réfugiés ukrainiens ?
Près de 400 000 sont passés par notre territoire. Le nombre de réfugiés aujourd’hui en Moldavie est de près de 100 000, soit 3,5 % de la population. Imaginez cela à l’échelle française, c’est comme si 2 millions ou 3 millions de personnes arrivaient en une poignée de semaines. C’est sans précédent. La moitié des réfugiés sont des mineurs. Vous concevez l’effort que cela représente pour nos systèmes éducatif et de santé ? A plus de 90 %, ils ont été accueillis par des familles, volontaires ou proches, dans des appartements ou des maisons. L’accueil a donc été digne. On n’a pas de camps de tentes.
Comment gérez-vous les campagnes de désinformation russes présentant les réfugiés comme des délinquants ?
Sur les réseaux sociaux, il y a des discours antiréfugiés qui s’amplifient. Mais cela fait des années que la Moldavie est ciblée par des opérations de désinformation. Malgré cela, les électeurs ont fait un choix ferme en élisant comme présidente [pro-européenne et réformiste] Maïa Sandu. Avant la guerre, la télévision russe était assez présente. Ces chaînes fonctionnent toujours, mais, depuis le début de la guerre, on a suspendu les émissions d’information et les débats en russe.
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