Présidentielle 2022 : le costume vert, l’ultime bouée de sauvetage de Macron
Alors que le front républicain s’étiole dangereusement, l’écologie est devenue l’ultime cartouche du président sortant pour tenter de projeter la nation dans une nouvelle aventure commune. L’urgence joue pour lui, observe, dans sa chronique, Françoise Fressoz, éditorialiste au « Monde ».
Chronique.
Samedi 16 avril, à Marseille, Emmanuel Macron n’a pas lésiné sur les annonces et effets de manche pour se débarrasser de l’étiquette dans laquelle le premier tour risquait de l’enfermer : devenir le candidat des vieux, le défenseur du système, lui qui s’était promis, en 2017, de conduire une révolution pour rendre l’espoir au pays.
Pour rajeunir, il s’est peint en vert et a fait de la transition écologique sa nouvelle frontière, promettant de transformer la France en une « grande nation écologique », qui serait « la première à sortir du gaz, du pétrole et du charbon ».
Sa promesse d’aller « deux fois plus vite » dans la réduction des gaz à effet de serre, lui qui, aux yeux des écologistes, a dangereusement lambiné, est directement liée au résultat du premier tour de la présidentielle marqué par le sérieux coup de semonce que lui a adressé la jeunesse : dimanche 10 avril, les 18-24 ans et les 25-34 ans se sont massivement abstenus. Ils l’ont fait à hauteur de 42 % et de 46 %, selon l’enquête Ipsos-Sopra Steria, contre respectivement 29 % et 28 % cinq ans plus tôt. Et ceux qui se sont rendus dans leur bureau de vote ont privilégié le bulletin Mélenchon devenu, au terme de sa troisième campagne présidentielle, le héraut incontesté de la planification écologique.
Le camouflet a été sévère pour Emmnanuel Macron, qui était, en 2017, le candidat préféré des 25-34 ans et qui s’est retrouvé cette fois relégué en troisième position, distancé de plus de 10 points par l’« insoumis ».
L’autre alerte est venue de l’étiolement de plus en plus manifeste du front républicain face à l’extrême droite. Le 1er mai 2002, près de 1,5 million de personnes, stupéfaites de ce qui venait de se produire en France et farouchement déterminées à défendre les valeurs républicaines, avaient défilé à Paris et en province pour dire non à Jean-Marie Le Pen.
Vingt ans plus tard, samedi 16 avril, ils étaient à peine plus de 20 000 manifestants, selon la police, à clamer leur refus de Marine Le Pen. Beaucoup d’entre eux révélaient simultanément leur difficulté, pour ne pas dire leur incapacité, à glisser un bulletin Macron dans l’urne le 24 avril, désabusés, voire furieux, de se sentir piégés par le résultat d’une élection dans laquelle ils ne trouvent pas leur compte.
Cette difficulté à trancher entre deux rejets est un vrai signal d’alarme quant à l’état de la démocratie française. C’est comme si le projet de Marine Le Pen, qui veut s’affranchir des règles constitutionnelles, des normes et des valeurs européennes pour introduire, par référendum, une discrimination légale entre nationaux et étrangers, était jugé guère plus menaçant pour la République que l’exercice du pouvoir par Emmanuel Macron.
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