Politique -Corse: résister à l’extrêmisme

 

Politique -Corse: résister à l’extrêmisme 

 

Alors que la tension ne retombe pas depuis l’assassinat d’Yvan Colonna, Jean-Charles Orsucci, le maire (LRM) de Bonifacio, salue la volonté de dialogue du gouvernement. Dans une tribune au « Monde », il assure le président du conseil exécutif de Corse de son soutien « pour trouver la voie de l’apaisement ».

 

Tribune.

Je suis né à Aulnay-sous-Bois au début des années 1970. Je suis le fils de deux fonctionnaires corses qui n’aspiraient qu’à retrouver leur île natale, le dernier d’une fratrie dont l’enfance a baigné dans la nostalgie d’une Corse idéalisée en vacances.

Revenu à l’âge de l’adolescence à Bonifacio (Corse-du-Sud), mon berceau familial, j’y ai grandi durant les années difficiles que connut notre région.

J’ai étudié à l’université de Corse, où j’ai connu mes premiers débats enfiévrés sur l’autonomie et les manières turbulentes de les exprimer. J’y ai forgé ma conscience politique propre où mêlent la ferme assurance de faire partie d’un petit peuple fier et l’idéal républicain, ouvert et tolérant, cher à mon mentor, Michel Rocard.

Je me définis comme corse par mes origines et français par ma naissance. Je suis la synthèse complexe de cette double filiation et je ne compte renoncer ni à l’une ni à l’autre.

Comme tous les Corses, j’ai été horrifié par l’assassinat abject du préfet Claude Erignac [le 6 février 1998, à Ajaccio], que rien ne peut justifier. J’ai défilé au lendemain de ce drame avec 40 000 compatriotes pour exprimer ma plus profonde désapprobation et mon rejet de cette violence.

Mais j’ai aussi été meurtri par la culpabilisation générale et la responsabilité collective que certains ont voulu nous imputer après ce crime : aux yeux de certains, les Corses étaient tous coupables. Ces faux procès, ces accusations injustes, ont instillé le poison d’une incompréhension réciproque.

Je suis devenu maire de Bonifacio en 2008, puis conseiller à l’Assemblée de Corse en 2010. Fidèle à mon engagement politique, je n’ai eu de cesse d’œuvrer pour trouver une issue politique pacifiée aux problèmes que rencontrent les Corses : la pauvreté, la précarité, les difficultés à accéder à l’emploi et à la propriété, la vie chère.

Figurent aussi des abcès plus symboliques, comme le rapprochement des prisonniers corses près de leur famille, conformément à la loi. A cet égard, j’ai participé à l’écriture et au vote de plusieurs délibérations demandant que soit respecté ce droit que l’on reconnaît ailleurs aux tueurs d’enfants ou aux assassins djihadistes. En retour, un silence méprisant nous a été opposé, ou le maintien abusif d’un statut de « détenu particulièrement signalé » (DPS) (on a vu ce qu’il en était [c’était le cas d’Yvan Colonna]). Tout cela a été mal vécu.

Aussi, lorsque le 2 mars, un terroriste salafo-islamiste a tenté d’assassiner Yvan Colonna [mort le 21 mars], j’ai immédiatement craint et anticipé un embrasement en Corse. Yvan Colonna ne devait pas mourir en prison et certainement pas de cette façon horrible.

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