Présidentielle 2022 : Le grand vide démocratique ?
Pour que les électeurs retrouvent le chemin des urnes, la démocratie doit se « ressourcer» en associant davantage les Français à son fonctionnement, estime, dans une tribune au « Monde », le président du Conseil économique social et environnemental Thierry Beaudet.
Tribune.
Fragile à l’intérieur de notre pays, attaquée près de nos frontières, la démocratie n’est ni acquise, ni naturelle. Elle ne va pas de soi. Force est de constater, d’élection en élection, une érosion ravageuse du socle électoral et une grande fatigue démocratique. Ce constat, toutes les candidates et tous les candidats l’ont partagé à l’occasion des auditions organisées les 23 et 24 février au Conseil économique et social. Gare à la désillusion des lendemains d’élection. Le soir du deuxième tour, le président ou la présidente pourrait bien se trouver à court du carburant démocratique nécessaire à la conduite sereine d’un projet commun.
La démocratie n’est pas un simple mode de scrutin. Elle est porteuse de valeurs, ouvre un horizon de participation, d’engagement, d’émancipation. Pour que le vote ait du sens, pour que nos concitoyennes et concitoyens retrouvent l’envie de donner leurs suffrages, la démocratie doit se ressourcer.
Pour ma part, je reste optimiste. Il y a moins une crise de la démocratie qu’une crise de croissance de la démocratie. Les citoyennes et citoyens sont toujours plus émancipés, informés et exigeants ? Ils acceptent de moins en moins d’être représentés sans redevabilité ? C’est la traduction d’une conquête de la démocratie, même si cela rend la société plus réactive et complexe à déchiffrer, et le statut d’élu davantage interrogé voire contesté.
Il y a là une énergie et une légitimité nouvelles qu’il faut reconnaître. L’expérience vécue par toutes et tous doit pouvoir compléter et éclairer une expertise détenue par quelques-uns : tout comme le XXe siècle a éduqué au vote, le XXIe siècle doit éduquer à la coconstruction des politiques publiques, dans une culture du débat contradictoire et de l’implication au long cours.
Si 57 % des Français et des Françaises pensent que la démocratie ne fonctionne pas bien en France, 70 % sont d’avis qu’elle fonctionnerait mieux si les citoyennes et les citoyens y étaient davantage associés (Baromètre de la confiance politique du Cevipof, en partenariat avec le Conseil économique, social et environnemental). Tout comme la démocratie politique doit être enrichie par la démocratie sociale, la démocratie représentative doit être revitalisée par la démocratie participative et délibérative. Le CESE entend y concourir. Avec les conférences citoyennes, panels, consultations, pétitions, une nouvelle matière démocratique est en circulation.
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