Retour de la religion ?

Retour de la religion ?

L’instrumentalisation du christianisme et d’un passé idéalisé est un levier essentiel pour les populistes contemporains, un siècle et demi après la crise boulangiste. Le journaliste Iacopo Scaramuzzi analyse le phénomène dans son essai « Dieu ? Au fond à droite ». (  dans le « Monde » )

« Dieu ? Au fond à droite. Quand les populistes instrumentalisent le christianisme » (Dio ? In fondo a destra. Perché i populismi sfruttano il cristianesimo), de Iacopo Scaramuzzi, traduit de l’italien par Muriel Lanchard, Salvator, 152 p., 15 €.

Le journaliste italien Iacopo Scaramuzzi couvre l’actualité du Vatican pour La Stampa, Famiglia Cristiana ou, aux Pays-Bas, Katholiek Nieuwsblad. Dans Dieu ? Au fond à droite, il enquête sur la manière dont les populistes, en Italie, en France, en Hongrie, en Russie ou aux Etats-Unis, font de l’identité chrétienne un des axes principaux de leur propagande.

Depuis le boulangisme ou le maurrassisme, en France, jusqu’au conservatisme américain ou à l’impérialisme russe, en passant par le fascisme ­italien, la revendication de l’identité chrétienne par les nationalistes a longtemps été diverse, voire contradictoire, l’opposition entre catho­liques, protestants et orthodoxes ­demeurant structurelle. Vous montrez qu’aujourd’hui, au contraire, elle tend à devenir un facteur d’unité. Comment expliquez-vous cette ­convergence ?

Mussolini, qui au début était anticlérical, avait fini par se rendre compte qu’on ne peut gouverner en Italie sans un lien étroit avec l’Eglise catholique. Mais il se disait à la fois catholique et antichrétien, une formule que beaucoup de nationalistes de son époque auraient pu employer, chacun pour sa confession. Désormais, elle s’inverse. Les populistes se définissent souvent comme chrétiens plutôt que catholiques, protestants ou orthodoxes, manifestant par là leur désir d’unité avec les identitaires des autres confessions.

Il est vrai que chaque pays a sa propre histoire, son propre rapport à la religion. Mais, dans un monde globalisé, tous sont traversés par un sentiment de déclin, qui crée des angoisses à la fois différentes et semblables d’un pays à l’autre, une peur commune du changement, de l’ouverture, de l’étranger. Le déclin est en partie imaginaire dans des pays qui restent solides et prospères. Mais de larges segments des populations ressentent une perte relative de pouvoir, qui engendre une nostalgie. Les gens ont l’impression de ne pouvoir s’appuyer sur rien de stable. La religion, en tant que lien social, apparaît comme un recours.

Le paradoxe étant que ces sociétés sont fortement déchristianisées…

Les leaders nationalistes eux-mêmes ont un rapport assez distant, en réalité, avec la foi religieuse. Il est clair que Matteo Salvini, Jair Bolsonaro ou Donald Trump ne sont pas des parangons de vertu chrétienne, et qu’ils ont un rapport instrumental à la religion. Ils ont senti que c’était un levier politique. Mais ce qui est intéressant, justement, c’est de comprendre pourquoi ce levier fonctionne.

 

0 Réponses à “Retour de la religion ?”


  • Aucun commentaire

Laisser un Commentaire




L'actu écologique |
bessay |
Mr. Sandro's Blog |
Unblog.fr | Annuaire | Signaler un abus | astucesquotidiennes
| MIEUX-ETRE
| louis crusol